• Rassemblement à Paris pour le 70ème anniversaire de la victoire de Stalingrad, le 2 février à 15h, place Stalingrad (métro Jaurès)
    dimanche 27 janvier 2013

    Et d’abord, dans quelle situation sommes-nous pour le faire ? Il y a peu d’années, les faiseurs d’opinion les plus largement diffusés ont fait quelques titres à propos de la bataille de Stalingrad : ils s’agissait de saisir l’occasion de la sortie d’un film, un véritable navet négateur de l’évènement historique, pour dénigrer cette bataille autant qu’il leur était possible de faire.

    Aujourd’hui, ils en parlent toujours de manière réductrice et tendancieuse, mais beaucoup plus rarement.

    Leurs textes et leurs discours continuent une réécriture qui nie l’histoire : ils fondent et articulent leurs présentations autour des thèses réactionnaires que nous connaissons depuis longtemps, et que nous avons toujours combattues parce que nous les savons fausses ; ces thèses ne contiennent aucun document nouveau, aucun fait nouveau : rappelons par exemple que toutes celles qui traitent des crimes commis par les SS ou par les miliciens reprennent les arguments et récits diffusés par les SS et par les pétainistes, les unes le jour même, les autres le lendemain de leurs crimes.

    Réécrire ainsi l’histoire, en niant sa vérité, aboutit dans tous les cas à réhabiliter les criminels et les kollabos, et à condamner les résistants comme s’ils étaient des criminels ; si les faiseurs d’opinions réactionnaires aboutissaient à leurs fins, une chose est certaine et annoncée sans aucune ambigüité par de nombreux précédents historiques : tous les Résistants sans exception seraient condamnés !

    Aujourd’hui, ce processus de réécriture et de négation de l’histoire a déjà produit de très graves dégâts dans notre société ; au nombre de ces dégâts, il faut citer :

    • la mise aux oubliettes du programme les Jours heureux du CNR et de toute son œuvre, notamment, l’oubli forcé du plan de réforme démocratique et progressiste de nos institutions scolaires, lycéennes et universitaires élaboré par la « Commission Langevin-Wallon » ;
    • la mise au placard, puis le démontage des réalisations de la Libération que furent les statuts de la fonction publique, les nationalisations, la Sécurité sociale, etc… ;
    • le bâillon de plus en plus épais imposé aux luttes démocratiques ;
    • la mise sous l’étouffoir des luttes revendicatives de tous les travailleurs et de leur pensée autonome, individuelle et collective, avec comme résultat l’asservissement de la classe sociale qu’ils constituent ;
    • la montée du nombre des femmes et des hommes privés de travail et contraints au chômage ;
    • la destruction de l’industrie et de l’agriculture de notre pays.
    • ...

    Nous voyons dans ces traits caractéristiques de la situation que nous vivons, les effets des processus instrumentaux actifs et délibérés de l’oubli, je dirai : les effets de l’oubli organisé. Si les très riches capitalistes et les politiciens à leur service ont voulu, organisé et propagé cet oubli, nous voyons aujourd’hui que c’est parce qu’ils en avaient besoin, et qu’ils en ont toujours besoin, pour bâtir sur les ruines résultant de ces dégâts l’empire qu’ils appellent l’Europe et pour nous l’imposer.

    D’une manière générale, cet oubli actif et délibéré, organisé, a obtenu pour résultat que les jeunes générations (les moins de cinquante ans) semblent à peu près tout ignorer de notre histoire.

    Sauf que ces mécaniques de l’oubli ont créé des vides que les plus jeunes générations (lycéens, collégiens, adultes jusque vers vingt-cinq ans...) ressentent comme des manques : il faut observer avec quelle avidité ils écoutent les réponses sincères que les témoins peuvent faire à leurs questions lorsqu’ils ont l’occasion de les poser.

    Tout cela donne, à nos yeux, une grande pertinence à la commémoration de la bataille livrée par l’Armée rouge aux forces nazies et fascistes, et de son aboutissement, la victoire de l’Armée rouge, remportée le 2 février 1943. Nous commémorerons cette bataille et cette victoire en célébrant le 2 février 2013 à Paris le soixante-dixième anniversaire de la victoire.

    Il s’agit pour nous de rappeler l’importance qu’avait aux yeux de tous les Français dès son début, le 22 juin 1941, la guerre que faisait l’Armée rouge pour résister à la tentative hitlérienne, mussolinienne, horthyste, franquiste, pétainiste, etc... de reconquérir les territoires de l’ancien empire des tsars de Russie, et pour la repousser : cette importance, c’était l’espoir de vaincre l’oppression, de vaincre les forces armées du nazisme et du fascisme.

    Aux yeux de tous les résistants, cette importance tenait à ce que cette guerre modifiait de manière décisive le rapport des forces armées en apportant à toute la Résistance, l’appui considérable de l’Armée rouge et de l’industrie soviétique.

    Cette importance grandissait à chacune des batailles que les armées de Hitler, de Mussolini, de Horthy, la « Légion azùl (Légion bleue) » franquiste, la « LVF (Légion des Volontaires français contre le bolchévisme) » pétainiste, etc... devaient livrer contre l’Armée rouge. Elle a pris la force de l’évidence lorsque commencèrent les combats retardant l’invasion dans son approche de Stalingrad.

    La victoire de Stalingrad, remportée par l’Armée rouge le 2 février 1943, a transformé l’espoir raisonné et documenté en la victoire probable en certitude que désormais, la victoire était en marche.

    Cette certitude confirmait avec une grande force la place du combat au premier plan des préoccupations de tous les Résistants, tout en plaçant tout près, au second plan, la victoire et ce qu’il fallait faire de la victoire ; le besoin de se donner les moyens de participer à la victoire stimula grandement le mouvement fédérateur de tous les Résistants et lui permit d’aboutir à la formation du Conseil national de la Résistance, qui se réunit pour la première fois le 27 mai 1943 ; immédiatement, le besoin de concevoir ce que la nation victorieuse ferait de sa victoire assigna au Conseil national de la Résistance la tâche d’inscrire dans un programme les principes qui animaient la Résistance et les directions de la nécessaire réorganisation du pays, afin que, la victoire obtenue et l’ennemi chassé de notre territoire, les Résistants avec toutes les citoyennes et tous les citoyens, avec toutes les travailleuses et tous les travailleurs de notre pays, s’en servent pour réorganiser la France en l’assurant contre le retour des trahisons de l’avant-guerre : le programme les Jours heureux est le produit de ces travaux.

    Il faut porter la plus grande attention à la diversité des signatures que recueille l’appel à commémorer la bataille et la victoire de Stalingrad : ce sont les signatures de communistes avec ou sans carte, de gaullistes, de socialistes, de syndicalistes, de gens d’opinions très diverses : leur diversité se rapproche beaucoup de la composition du mouvement qui s’était fédéré dans le Conseil national de la Résistance.

    Voilà les raisons pour lesquelles il faut commémorer la bataille de Stalingrad et son issue victorieuse.

    Jean-Pierre Combes, jeudi 17 janvier 2013

    Ami de l’égalité

    http://lepcf.fr


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  • Consommation

    Textile : ces vêtements qui nous intoxiquent

    Par Nolwenn Weiler (29 janvier 2013)

    Combien de molécules chimiques dans votre pull, pantalon ou tee-shirt ? Combien de substances interdites ou jugées dangereuses pour la santé ? Les 80 milliards de vêtements fabriqués dans le monde chaque année regorgent de produits chimiques. Pour les rendre si colorés, si brillants, si faciles à repasser et si bon marché : des perturbateurs endocriniens, métaux lourds ou nano-matériaux, qui empoisonnent travailleurs du textile et consommateurs, et se diffusent dans l’environnement. Enquête sur ces vêtements qui nous rendent malades.

    A l’automne dernier, quelques heures après avoir enfilé une jupe et un tee-shirt neufs, une fillette de quatre ans a vu des boutons apparaître sur sa peau, aux endroits de contact avec les vêtements. Les petits points rouges se sont rapidement étendus au reste du corps. Son visage s’est mis à gonfler. Le personnel soignant qui s’est occupé de l’enfant a d’abord soupçonné le diméthylfumarate (DMFu), un anti-fongique qui avait défrayé la chronique en 2008 et 2009 suite à l’intoxication d’une centaine de personnes, via des fauteuils. Le biocide a finalement été mis hors de cause. Quelle substance a pu provoquer de telles réactions ? Le choix est malheureusement très vaste.

    Nos vêtements regorgent de molécules chimiques, dont certaines très nocives pour la santé. Mais le secteur de la confection a du mal à s’en passer. Prenons le formaldéhyde : classé dans les « substances cancérogènes avérées pour l’homme » par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), il est souvent présent dans les vêtements synthétiques, qu’il contribue à rendre infroissables, résistants et hydrofuges. Il fixe aussi les colorants : grâce à lui, pulls, jupes, et chaussettes qui ne décolorent pas à la première lessive. Problème : très volatile, le formaldéhyde provoque des irritations des yeux et des voies respiratoires, et accroît le risque de pathologies asthmatiques et de sensibilisations allergiques, même à faible dose.

    Des perturbateurs endocriniens en pagaille

    Derrière la mention « sans repassage », une autre molécule : les composés perfluorés (PFC), telles que les fibres téflon. Grâce à ces tensio-actifs, les graisses et l’humidité pénètrent plus difficilement dans les fibres. Et les vêtements sont plus faciles à nettoyer et à repasser. Ces composés merveilleux, qui peuplent nos gore-tex sont malheureusement des perturbateurs endocriniens, provoquant problèmes d’infertilité ou de développement, cancers, déficits immunitaires ou perturbations du développement neurologique. De nombreux textiles contiennent par ailleurs des retardateurs de flammes [1]. Pour éviter qu’ils ne prennent feu rapidement, les articles sont traités avec un mélange de substances, regroupées sous le nom de polybromodiphényléthers (ou PBDE).

    Une fois passées dans le corps humain, on retrouve ces substances chimiques persistantes jusque dans le sang des cordons ombilicaux [2] . Elles altèrent l’attention, la mémoire, l’apprentissage et le comportement des animaux de laboratoire, même à des doses minimes ! Certaines de ces substances, présentes dans les vêtements de nuit (mais aussi matelas, fauteuils et rideaux) sont des perturbateurs endocriniens. Et n’oublions pas les métaux lourds, qui permettent de faire briller les vêtements et de les teindre efficacement. Ou encore les nano-matériaux, notamment le nano-argent, qui élimine efficacement les microbes. Et que l’on retrouve dans les chaussettes ou vêtements de sport, à cause de leurs propriétés anti-tâches et anti-odeurs, alors même que l’on ignore les effets sanitaires réels de ces nouvelles technologies.

    Les travailleurs, premières victimes

    Inhalés, ingérés ou passant à travers la peau, ces polluants touchent d’abord les salariés qui confectionnent les articles textiles. Mais il a aussi des modes indirects d’intoxication, souligne Jerôme Frignet, chargé de la campagne Detox à Greenpeace : « Une large part des polluants part dans l’eau au moment du lavage. La fin de vie de ces vêtements — brûlés ou enterrés — entraîne aussi des relargages de polluants dans l’écosystème. »

    En Inde, dans la ville de Tirupur, célèbre pour ses teintureries, les ouvriers utilisent des colorants azoïques (interdits en Europe) ou chlorés. Ils manipulent ces produits et les dissolvent dans l’eau sans aucune protection. Selon les médecins locaux, rencontrés par Inge Alteméier et Reinhard Hornung, auteurs du documentaire « Du Poison dans nos vêtements », le nombre de personnes atteintes de cancer a doublé ces 10 dernières années dans la région. « Les gens souffrent ici de cancers des organes internes – reins, estomac, œsophage, col de l’utérus, sein », détaille l’un des cancérologues.

    Deuxième étape toxique : les lieux d’embarquement et de réception des chaussures et vêtements. Dans les grands ports européens où débarque chaque semaine près d’un million de containers, les travailleurs respirent des quantités de substances organiques chlorées, destinées à désinfecter la marchandise et à éradiquer les parasites (champignons, rongeurs,...). A Hambourg, la médecine du travail a découvert que la moitié des containers en provenance d’Asie contenaient ces substances. Les mesures de la qualité de l’air des containers sont aléatoires, et non obligatoires. Au Havre, les douaniers se sont insurgés contre les quantités de vapeur qu’ils respirent en ouvrant les containers. Pour l’instant, les recommandations se limitent à laisser le container ouvert le temps que les vapeurs toxiques s’échappent...

    370 fois la dose autorisée

    Parmi les substances cachées dans nos placards, certaines sont totalement interdites. D’autres ont un usage règlementé, avec des seuils autorisés – comme le formaldéhyde, les phtalates ou les métaux lourds. Mais ces seuils sont régulièrement dépassés. Dans une enquête réalisée en 2012 [3], Greenpeace a trouvé dans des vêtements pour enfants des doses de phtalates 370 fois supérieures à la norme en vigueur pour les articles destinés aux enfants ! Utilisés pour assouplir les plastiques, ces perturbateurs endocriniens notoires sont souvent présents sur les dessins, inscriptions et décorations collés sur les pulls, tee-shirts, casquettes ou pyjamas.

    Autre découverte de l’ONG : des éthoxylates de nonylphénol (NPE), dont la dose pouvait atteindre 45 000 ppm (partie par million), pour 1000 ppm autorisées ! Utilisés comme détergents, les NPE sont déversés dans les égouts lors du lavage des vêtements. Ils se décomposent alors en nonylphénol (NP), un sous-produit très toxique, bio-accumulable et perturbateur endocrinien. Identifiés par Greenpeace grâce à des contrôles complexes et coûteux, ces produits passent régulièrement nos frontières incognito. Les contrôles sont insuffisants, du fait d’un manque de moyens humains et matériels. D’autant que la présence des toxiques n’apparaît pas sur les étiquettes...

    Des coupables jamais inquiétés

    Alimenté en France par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), le système d’alerte européen Rapex publie chaque semaine un bilan des produits de consommation dangereux. Dans son rapport 2011, textiles, vêtements et articles de mode arrivent en tête, avec 27% des notifications, juste devant les jouets (21%), puis les moteurs (11%). Quand ils apparaissent dans la système Rapex, les articles sont généralement retirés « par les acteurs économiques eux-mêmes ». Qui ne sont pour autant jamais inquiétés.

    « Si les produits sont fabriqués en Union européenne, où s’applique la réglementation Reach, un particulier ou une association qui découvrent des dépassement de seuils de substances chimiques utilisées peut attaquer la marque, détaille Jérôme Frignet. Mais si le produit est fabriqué hors Union européenne, comme c’est le cas pour un grand nombre de produits textiles, cette réglementation ne s’applique pas ! » Et « tous les Etats-membres ne signalent pas les articles défectueux », déplore le Bureau européen des unions de consommateurs (Beuc), qui estime que Rapex « mériterait d’être renforcé ».

    Des entreprises qui tiennent à leur image de marque

    Le Beuc réclame aussi une vigilance particulière envers les perturbateurs endocriniens. Pour Greenpeace et le Réseau environnement santé (RES), les demandes sont plus radicales : il faut les interdire. La délimitation de doses limites (comme le fait souvent la directive européenne Reach [4]) ne vaut pas pour ces substances, estiment les deux organisations.

    « On reste sur le principe qui dit que "la dose fait l’effet", mais c’est injustifiée pour les perturbateurs endocriniens », explique Gilles Nalbone, chercheur à l’Inserm et membre du RES. Pour ces produits, le moment d’exposition est tout aussi important que la dose : « Les périodes de vie in utero étant particulièrement vulnérables. » Pour lui, la réduction globale de l’exposition à ces substances, qui menacent nos capacités reproductrices, est urgente. Sur cette question, il estime que la France « est plutôt en avance. Elle a été la première à interdire le bisphénol A par exemple. Et une loi est en préparation pour généraliser l’interdiction de l’exposition aux perturbateurs endocriniens. Cette façon de cibler une famille de polluants, c’est tout à fait nouveau ».

    Les entreprises seront-elles d’accord ? Suite à la campagne Detox menée par Greenpeace à l’automne, des marques comme Benetton, Mango, Esprit ou Levi’s se sont engagées sur des échéanciers précis pour éliminer les produits incriminés. « Aucune d’entre elles n’a envie d’apparaître en tête de gondole de notre prochaine campagne. Leur image de marque est capitale. Et leur cible, les ados, sont très sensibles aux campagnes lancées sur les réseaux sociaux », explique Jérôme Frignet de Greenpeace. La marque Zara, premier vendeur de vêtements au monde, a assuré à Basta ! qu’elle travaille depuis des années dans cette direction. La page dédiée de son site ferait presque rêver, tant les objectifs sont ambitieux...

    Réduire la pression sur les producteurs

    Inditex, propriétaire de la marque Zara, « s’engage d’ici 2020 à encourager un changement systémique, c’est-à-dire social et politique, pour atteindre l’objectif de « zéro rejet » de substances dangereuses (dans la chaine de production et dans tout le cycle de vie des produits) en une génération, ou moins », peut-on y lire. Comment la marque compte-elle s’y prendre pour financer ces changements radicaux ? Osera-t-elle ponctionner son milliard d’euros de bénéfices net (chiffre de 2010), en hausse de plus de 30% en un an ? « Nous jugeons cet engagement crédible », précise Jérôme Frignet. Qui espère que l’engagement de grandes marques influenceront leurs collègues. Côté grande distribution, où s’achètent une grande partie des vêtements consommés en France chaque année, silence radio. Ni Auchan, ni Carrefour n’ont donné suite à nos (nombreuses) sollicitations.

    Les grandes marques se savent sous surveillance. Mais elles ont aussi appris à ruser. La technique hautement toxique du sablage de jeans, qui permet de leur donner ce côté délavé très tendance, est toujours pratiquée, malgré les promesses, rappelle Nayla Ajaltouni, coordinatrice du collectif « De l’étique sur l’étiquette ». « Le sablage a été interdit en Turquie, où la mobilisation a été rapide et efficace. Mais il se développe au Bangladesh. Des systèmes de vérifications vraiment performants sont donc nécessaires. » Autre piste : assouplir la demande. « Les donneurs d’ordre ne peuvent pas ignorer qu’en demandant les mêmes produits, aux mêmes coûts dans les mêmes délais, ils autorisent implicitement la poursuite de l’utilisation de techniques ou de produits soi-disant interdits. »

    Repenser nos modes d’habillement

    Avoir des vêtements sans dangers implique de renoncer à certains standards. « Vous ne trouverez pas chez nous de vêtements d’un blanc immaculé, impossible à obtenir sans utilisation massive de produits chimiques », détaille ainsi Sabrina Cherubini, directrice marketing chez Ekyog, qui travaille depuis 10 ans sur la construction de filières textiles éthiques et sans produits chimiques. « Pour les imprimés, nous nous passons de plastisol (qui contient des phtalates, ndlr). Mais la technique que nous avons sélectionnée suppose trois passages en machine au lieu d’un seul. Nous allongeons donc les délais pour nos fournisseurs. Et payons trois jours de travail au lieu d’un. » Les coûts des produits textiles proposés par Ekyog ou encore Bleu Forêt (une entreprise située dans les Vosges qui fabrique des collants et chaussettes) « pourraient diminuer si tout le monde s’y mettait », assure Sabrina Chérubini.

    Impossible de poursuivre l’achat effréné d’habits, en les passant simplement en coton bio, et colorants sans chimie de synthèse. « Si plusieurs milliards de gens voulaient des bluejeans en fibre naturelle teintée avec des colorants naturels, l’humanité devrait dédier des millions d’hectares à la culture de l’indigo et du coton uniquement pour satisfaire cette demande – des hectares nécessaires à l’agriculture », précisent Michael Braungart et William McDonough dans leur ouvrage Cradle to cradle, recycler à l’infini. « Il faut sans doute repenser nos modes d’habillement, avance Gilles Nalbone. Nous avons certes des vêtements high tech, en grande quantité et pour pas cher, mais on en paie le prix fort ensuite, en terme de santé. Évidemment, on touche là à notre modèle de société, et il y a beaucoup à faire. »

    Nolwenn Weiler (@Nolwenn Weiler sur Twitter)

    Photo : © George Nikitin / Greenpeace et © Ivan Castaneira / Greenpeace

    Notes

    [1] Voir Les fringues qui tuent, synthèse de l’association Santé environnement France.

    [2] Voir Les toxiques en héritage, de Greenpeace, 2005.

    [3] L’enquête de Greenpeace a porté sur 20 marques de vêtements, et a inclus des tests sur 141 produits vendus par des enseignes connues et reconnues de la mode, comme Zara, Calvin Klein, Mango, Tommy Hilfiger ou encore Vero Moda.

    [4] Règlement sur l’enregistrement, l’évaluation, et l’autorisation et restriction des produits chimiques.

    http://www.bastamag.net/article2907.html


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  •  Les communistes égyptiens saluent dans les manifestations populaires contre le pouvoir islamiste une nouvelle étape de la Révolution

    communism-egypt (1) Le peuple égyptien achève sa révolution

     

    Communiqué du Parti communiste d’Égypte traduit par MA pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

     

    Notre grand peuple prouve – une nouvelle fois et sans l'ombre d'un doute – sa détermination à réaliser les nobles objectifs de sa révolution, et son rejet résolu de toutes les tentatives des Frères musulmans et de leurs alliés des groupes réactionnaires de droite, prétendument attachés à la religion, de voler la révolution, de confisquer l’État et la nation, de s'en prendre violemment au pouvoir judiciaire, de déployer sa haine envers les médias et de falsifier la volonté du peuple dans une mascarade de référendum sur cette pseudo-Constitution.

     

    Le soulèvement des masses égyptiennes, dans plusieurs régions du pays, n'est qu'un révélateur du rejet de la piètre gestion du président et de l'incapacité du pouvoir exécutif, du gouvernement Qandil, à avoir une vision d'ensemble des véritables problèmes de la nation, ce qui explique que les conditions économiques et sociales se soient si manifestement dégradées. Ce sont la majorité des Égyptiens, les pauvres et les travailleurs, qui paient la facture de cet échec et de cette dégradation.

     

    L'incapacité politique et l'échec de la ligne suivie par le président et son clan conduisent le pays à être le théâtre de violents incidents qui ont coûté déjà la vie à un grand nombre d'égyptiens. Les autorités portent la responsabilité de ce bain de sang. Ici, notre parti demande une commission d'enquête indépendante, impartiale, sur ces événements qui puisse faire la lumière sur les circonstances et identifier puis juger les personnes qui en sont responsables. Confirmation de cette incapacité chronique des Frères musulmans, le communiqué du Conseil de défense nationale esquive toute analyse des véritables causes qui ont conduit à de tels événements. Par conséquent, il n'apporte aucune réponse aux revendications des masses, des forces révolutionnaires et de l'opposition civile, si ce n'est une invitation à un dialogue formel visant à contenir la situation révolutionnaire sans aucun progrès réel vers le changement, comme nous l'avons déjà maintes fois expérimenté dans le passé. D'autre part, ce communiqué sous-entendait la menace de déclarer un état d'urgence, sans traiter aucune des causes fondamentales de la colère populaire, ce qui ne pourrait que la faire grandir.

     

    Notre parti salue les efforts remarquables, héroïques de notre grand peuple, et annonce son engagement plein et entier dans les nobles objectifs de la révolution et il restera ferme pour réaliser sa volonté de liberté intégrale, de démocratie réelle, de justice sociale immédiate. Notre parti appelle le peuple égyptien à poursuivre ces marches pacifiques et ces sit-ins dans toutes les places de la Libération du pays jusqu'à la reconnaissance de tous les droits réclamés et la mise en œuvre de toutes les mesures exigées par le processus de salut de la révolution et de la nation de la crise actuelle, avant tout, cela consiste en :

     

    1 – La démission de ce gouvernement en faillite et la formation d'un gouvernement de salut national exprimant toute la diversité des forces nationales et révolutionnaires ;

     

    2 – L'abolition de la pseudo-Constitution actuelle ;

     

    3 – La tenue d'élections présidentielles anticipées ;

     

    4 – L'annulation de toutes les implications de l'autoritaire Déclaration constitutionnelle avec la démission immédiate du Procureur général ;

     

    5 – La mise en place immédiate du salaire minimum et maximum, de l'indexation des salaires sur les prix et le soulagement des effets de la crise économique que portent actuellement sur les épaules les pauvres et les travailleurs ;

     

    Le Parti insiste bien sur le fait qu'il a entièrement confiance en la force de la volonté révolutionnaires des masses du grand peuple égyptien ainsi qu'en son désir de sauver la révolution et la nation. Le Parti confirme sa foi inébranlable en une victoire inéluctable.

     

    Vive la lutte du peuple égyptien ! Vive la révolution !


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  • Lettre d’un instit parisien écœuré à lui-même (puisque personne ne veut l’entendre)

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    "Hier, j’ai fait grève, comme près de 80% de mes collègues parisiens. Pour dire à MM. Delanoë et Peillon mon désaccord avec la mise en place pour la rentrée prochaine des nouveaux rythmes scolaires. Tout le monde a dit que je faisais grève parce que je ne voulais pas venir travailler le mercredi. C’est faux.

    J’ai fait grève car je pense sincèrement...

     ...que cette réforme mal fichue et inessentielle, préparée à la va-vite et difficile à mettre en œuvre – on s’en apercevra dans huit mois –, ne va pas apporter grand-chose aux élèves, contrairement à ce qui est claironné partout, ministre en tête.

     

    Raccourcir la journée des enfants ? Ils feront seulement 45 minutes de classe en moins, au mieux, et leurs journées finiront toujours à 16 h 30.

     

    Alléger les journées ? Impossible, les heures de classes seront toujours aussi denses, les programmes ne vont pas changer, ce sera encore la course contre la montre, comme aujourd’hui, au détriment des plus faibles.

     

    Alléger la semaine ? Pas franchement, les enfants se lèveront une journée de plus, qu’ils passeront dans la très usante collectivité.

     

    Offrir une ouverture culturelle lors de l’accueil périscolaire ? Outre que plein de villes peineront à s’organiser, quelle activité ambitieuse est-il possible de mettre en place en 45 minutes (auxquelles il faut ôter le pipi, les déplacements, la récré, reste une peau de chagrin). Financées comment, ces activités ? Encadrées par qui ? Le risque de voir ce créneau transformé en récré géante est important. A Paris, comme dans d’autres villes certainement, la solution trouvée serait d’allonger la pause méridienne, de 11 h 30 à 14 h 15. Presque trois heures de pause, quand des enfants viennent déjà me voir au bout de d’1 h 30 pour me demander quand ça finit, et se remettre au travail après, vraiment ?...

     

    On invoque les chrono-biologistes, mais qui les a vraiment lus ? Il faut se pencher sur les travaux de Claire Leconte, par exemple, pour voir que le compte est loin d’y être, en l’état actuel ! Il faut se souvenir que l’Académie de Médecine préconisait certes le retour de la semaine de 4 jours ½, mais avec adjonction du samedi matin, non du mercredi matin !

     

    Voilà, brièvement et incomplètement résumées, quelques-unes des raisons pour lesquelles j’ai accepté de perdre 80 € pour cette journée chômée.

     

    J’aurais aimé une autre réforme, ambitieuse.

     

     Des journées de classe vraiment raccourcies, 4 h 30 ou 5 h maximum, des mâtinées plus denses, 3 h 30 de classe sont faisables sans souci, mercredi compris, il aurait fallu aller au bout de la logique et raccourcir les vacances d’été, mettre en place l’alternance 7 semaines travaillées / 2 semaines de vacances, il aurait fallu mettre en place un vrai temps périscolaire sans concession, permettant véritablement aux enfants de découvrir arts, sciences, pratiques sportives, etc…

     

    Surtout, il aurait fallu alléger les programmes, ce sont leur lourdeur et leur inadaptation qui font de nos journées (car instits et élèves sont dans la même galère, personne ne semble le comprendre) des sommes considérables.

    Il aurait fallu… Mais cette réforme ne va pas assez loin, et se donne pourtant des airs de révolution.

     

    J’ai entendu des presque collègues tirer sur nous à balles réelles.

    Au cours de cette longue et pénible journée, j’ai entendu les syndicats de Province accuser ceux de Paris de faire cavalier seul, et se frotter les mains de leur bonne peine, eux qui sont infoutus de faire l’union nationale alors que partout les instits ne demandent qu’à dire les choses.

    J’ai entendu des profs d’IUFM verser dans l’anti-parisianisme primaire, à grands coups de dénigrement méprisant : « La caste des enseignants parisiens jette le doute sur les motivations réelles des enseignants. Merci à ces enseignants autocentrés d’entraîner tous les profs de France avec eux… ».

     

    J’ai entendu certains profs de lycée, de collège, des proviseurs même, « trouver cette grève consternante », et la condamner d’un lapidaire « le rejet des rythmes est un affaire corporatiste ». Que savent-ils des rythmes du primaire, au juste, et quelle expertise de terrain peuvent-ils faire valoir sur ce sujet ? Comme les autres, ils ne savent mais prononcent sentence. Cuistres.

     

    Merci à ces chers collègues, je l’espère peu représentatifs, d’avoir pris le temps de considérer les complexités de l’école primaire, bien différente du secondaire, et d’avoir écouté les collègues du premier degré avant de s’exprimer à travers des propos qu’ils sont les premiers à condamner quand ils sont prononcés par d’autres qu’eux.

     

    J’ai lu la presse et assisté, atterré, à la curée.

    J’ai lu que cette grève était « injustifiée » parce que la concertation avait eu lieu, on ne peut donc affirmer ne pas avoir été consultés : faux, la concertation n’a rassemblé que « le millier de personnes traditionnellement impliqué dans le fonctionnement de l’institution (…) sans que les acteurs de terrain aient les moyens de s’en saisir » (Meirieu).

     

    J’ai lu que cette grève était injustifiée parce que les syndicats avaient eu gain de cause : 1. Je ne crois pas que les syndicats aient eu ce qu’ils voulaient, il faut leur demander… 2. Il faut être un peu naïf et sacrément méconnaître les salles des maîtres pour ne pas savoir les divergences de la base avec les syndicats…

     

    J’ai repensé aux propos de Julliard, quittant le ministère et pourfendant ces mêmes syndicats, déjà accusés de corporatisme, de conservatisme et  d’immobilisme. Feignant d’oublier que toutes les parties concernées ou presque par la réforme la rejettent en bloc, Julliard faisait par avance des enseignants l'unique obstacle à la Réfondation de l'école… Bravo Bruno, et merci.

    J’ai lu aussi qu’il n’y avait qu’une seule véritable raison de faire grève : nos salaires ! Ca alors !... Que n’aurions nous entendu, si effectivement nous étions descendus dans la rue pour demander à être mieux payés !

     

    J’ai lu aussi des représentants de parents d’élèves, pourtant les premiers à dire que la réforme n’est pas satisfaisante, crier avec les loups qu’« il faut faire passer les enfants d’abord pour une fois », ce qui évidemment ne peut être le cas des enseignants. Coup de pied de l’âne.

     

    Je me rappelle pourtant lundi, 16 h 30, quelques mamans qui viennent me voir à la sortie des classes, savoir pourquoi on ferait grève le lendemain, je me rappelle la discussion amicales avec elles, comme toujours, et leur hochement de tête approbateur, leur mot d’au revoir : « on est avec vous, on vous soutiendra en gardant nos enfants ».

     

    J’ai bien sûr lu les propos de notre bon ministre, qui parlait d’ « exception parisienne »… J’entends pourtant encore la discussion avec l’équipe enseignante dans l’école de mon fils, qui n’est pas scolarisé à Paris : « On est à fond avec vous, si seulement nos syndicats avaient suivi et qu’on pouvait être avec vous aujourd’hui… ». J’ai également lu, entendu, tous ces messages de soutien et de regrets de n’en être point, d’instits de France et de Navarre. Exception parisienne, mon œil.

     

    Et puis j’ai lu « le grand quotidien du soir » que le Monde est sensé être, et mon cœur s’est arrêté de battre quand j’ai lu l’édito, intitulé « L’école ou le triomphe du corporatisme »… Cet édito courageusement non signé, incomplet, lacunaire, approximatif, inculte pour tout dire, dénonce un « corporatisme étriqué lamentable », accusant les instits de ne pas se mobiliser dans l’intérêt des enfants… Coup de grâce. Quelque chose s’est cassé en moi. Merci à ce journaliste imbécile et censeur, que la méconnaissance de la réalité n’empêche pas de prononcer des sentences destinées à attirer les foudres populistes sur les instits (il devra assumer la somme nauséabonde de commentaires poujadistes qui suivent son papier).

    J’ai mal à mon école.

    La grève scolaire la plus réussie de la décennie s’est transformé en cinglant revers. Personne ne nous a écoutés, personne ne nous a compris. Notre faute aussi, sûrement, mais nous ne méritions pas ce déferlement, ce flot-là.

     

    J’ai ravalé ma rage, mes presque larmes de colère, et je me suis dit : puisque tout le monde croit que nous sommes égoïstes, vénaux, grégaires, puisque personne ne veut savoir ce que l’on pense, puisqu’il ne vient à l’esprit de quiconque qu’un instit puisse se préoccuper avant tout de l’intérêt d’élèves avec qui il passe plus de temps qu’avec ses propres enfants et qui sont le cœur vivant de son métier (ne serait-ce que pour ce qu’il en tirera en retour !), je m’en retourne, démoralisé et écœuré, à ce qu’il me reste : mon travail, mes élèves, seuls vestiges sur le champ de ruine de cette putain de grève du mardi 22 janvier 2013.

     

    C’est mercredi matin, j’ai du travail"

     

    http://blog.francetvinfo.fr/l-instit-humeurs/2013/01/23/lettre-dun-instit-parisien-ecoeure-a-lui-meme-puisque-personne-ne-veut-lentendre.html

    http://comite-pour-une-nouvelle-resistance.over-blog.com/


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  • Vivent les révolutionnaires (morts) !

    Rallumez les feus !

    Samedi, on était à une soirée en l'honneur de Rosa Luxembourg. Dimanche, à une matinée de la pièce de Dominique Ziegler sur Jean Jaurès*. S'apprêterait-on à entamer un marathon d'hommages aux révolutionnaires assassinés ? leur liste est longue, et à ne consacrer un jour qu'à chacun des plus connus d'entre eux (sans parler des millions d'anonymes tombés au champ d'honneur politique), on se retrouverait à l'orée des élections de cet automne, plus émus que ragaillardis par cette nostalgie. Emus, et inquiets : si ces morts nous paraissent si grands, ne serait-ce pas que les vivants, à commencer par nous mêmes, nous semblent trop petits ?

    * elle se joue jusqu'au 3 février au Poche.  On réserve au N° +22 310 37 59


    Se mettre debout peut vous transformer en cible,  mais rester assis n'a jamais grandi personne

    « Eh ! bon Dieu ! Nous ne voyons que trop autour de nous la triste et désenchanteresse réalité : la tiédeur insupportable des demi-caractères, des ébauches de vertus et de vices, des amours irrésolus, des haines mitigées, des amitiés tremblotantes, des doctrines variables, des fidélités qui ont leur hausse et leur baisse, des opinions qui s'évaporent; laissez-nous rêver que parfois ont paru des hommes plus forts et plus grands, qui furent des bons ou des méchants plus résolus; cela fait du bien », tempêtait Alfred de Vigny (qui pourtant n'était pas le plus révolutionnaires des romantiques) en 1829. Deux siècles plus tard, prenons-en pour notre grade (quoique, bien sûr, la vitupération de Vigny ne pourrait aujourd'hui concerner que d'autres que nous, qui sommes droits, fiers et purs, entiers et sans compromissions). Nous avons donc communié samedi dans la mémoire de Rosa et dimanche dans celle de Jaurès. Avant que de reprendre, revigorés dans nos ascendances politiques, le cours normal de nos activités citoyennes, présentement sans grand risques. Nous nous gardons fort bien en tout cas, et rien d'ailleurs ne le requiert de nous ici et maintenant, de revivre ce que vécurent nos héros et héroïnes assassiné-e-s. Tant mieux pour nous. Mais si ailleurs qu'ici se mettre debout peut vous transformer en cible (dans de nombreuses régions du monde, chaque personne peut dire ce qu'elle veut, mais une seule fois, rappelle Amnesty International), rester assis n'a jamais grandi personne, même ici.

    Nous ne risquons plus grand chose à défendre nos choix, si radicaux qu'ils soient ou veuillent paraître, et il y a désormais d'autres moyens, moins spectaculaires, de nous préserver des pièges et des compromissions du pouvoir que celui de nous faire assassiner par nos ennemis avant d'y être parvenus, comme Rosa ou Jaurès, ou en s'y étant rendu inquiétant pour d'anciens compagnons, comme Saint-Just ou Sankara, ou en l'ayant quitté pour reprendre le combat sur d'autres terrains, comme le Che.

    révolutionnaires assassinés2.jpg

    L'assassinat d'un révolutionnaire le sauve des disgrâces de la Realpolitik; l'assassinat d'un réformiste aussi, parfois : on ne sait ce que Jaurès, «radicalement réformiste», et d'autant plus radical qu'il était intègre,  aurait dit et fait s'il n'avait été assassiné au déclenchement de la Grande Guerre... aurait-il suivi Guesde et Hervé, réputés « plus à gauche » que lui, dans l'« Union Sacrée » contre l'«impérialisme allemand» (mais aux côtés des impérialismes russe et anglais) ou l'aurait-on retrouvé à Zimmerwald ? Quant aux révolutionnaires, la mort stoïque de Saint-Just, héroïque du Che, pathétique de Netchaïev, sauvage de Villa et Zapata,  Liebknecht et Rosa, effacent tout reproche et tout doute sur leurs actes précédents : une fois la Passion consommée, le mort est sans tache. On ne se demande plus ce qu'auraient valu Babeuf ou Rosa Luxemburg au pouvoir, on sait seulement ce que valurent ceux qui les assassinèrent : le plus souvent pas grand chose. Ou seulement le pouvoir qu'ils prirent ou gardèrent par ces assassinats.
    Nous n'avons pas à sacrifier à un « devoir de mémoire », aux trop forts relents de contrition et de mauvaise conscience plus ou moins hypocrite. Il n'y a pas de devoir de mémoire qui tienne, parce qu'une mémoire posée comme un devoir n'est plus qu'un ressassement. Pas de devoir de mémoire, donc, mais une nécessité de mémoire. On ne peut savoir où l'on est, et moins encore où l'on va, si on oublie d'où l'on vient. Et nous venons d'une interminable cohorte d'assassinés, une autre « armée des ombres » que celle que célébrait Malraux évoquant Jean Moulin, mais pas moins héroïque.

    Reste qu'être assassiné se mérite : cette mort, ni le parcours hugolien d'un Jaurès, n'est pas accessible à tout le monde. La guillotine sous laquelle finirent Babeuf, Théroigne, Ravachol et Saint-Just, les balles qui tuèrent Durrutti, Sankara, Guevara, Villa, Zapata, Malcolm X, Liebknecht, Rosa Luxemburg et Jaurès, la prison qui étouffa Netchaïev, les coups sous lesquels succombèrent Lumumba et Ben Barka, le poison qui emporta Socrate, le feu sous Servet et le pic à glace dans Trotski, nous ne les avons plus à craindre.
    Ne serait-ce pas que plus grand monde n'ait plus grand chose à craindre de nous ?

    http://causetoujours.blog.tdg.ch


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  • Textile

    Des marques françaises impliquées dans un nouveau drame au Bangladesh

    Par Ivan du Roy (28 janvier 2013)

    Sept ouvrières sont mortes dans un nouvel incendie d’une usine textile au Bangladesh, le 26 janvier. Deux des ouvrières décédées étaient âgées de 15 et 16 ans. Elles travaillaient pour l’usine textile Smart Fashion, située à Dhaka, qui emploie environ 700 personnes. Au moment de l’incendie, l’usine était en train de produire des vêtements pour les marques françaises Sol’s et Fox & Scott, toutes deux basées à Paris, ainsi que pour la marque espagnole Lefties, qui appartient au groupe Inditex, propriétaire de Zara. Des membres d’une organisation internationale de défense des travailleurs (Institute for Global Labour and Human Rights) ont pu pénétrer dans l’usine sinistrée et relever les étiquettes des vêtements en cours de confection.

    Chacune des marques assure « respecter la liberté d’association et de négociation collective », ne pas recourir au travail forcé ni à des « horaires de travail excessifs ». L’entreprise Solo Invest, propriétaire de la marque Sol’s, est même adhérente de plusieurs chartes éthiques et codes de conduite. Les familles des ouvrières tuées seront probablement heureuses d’apprendre toute l’attention qui était portée à leurs conditions de travail…

    Solo Invest a notamment conclu des partenariats avec l’ONG états-unienne Wrap (Worldwide responsible accredited production) et l’association de commerce équitable Max Havelaar, qui labellise l’une de ses collections « bi-ethic ». Contacté par Basta !, Max Havelaar France ne disposait pas encore de ces informations.

    Fin novembre, 112 ouvrières avaient été tuées, brûlées vives dans un incendie d’une autre usine textile à Dakha. Le groupe Tuba, à qui appartenait l’usine, travaille notamment comme fournisseur pour les marques Auchan, C&A, Carrefour, Casino, Go Sport, Pimkie, Walmart. A qui le tour ?

    http://www.bastamag.net/article2908.html


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  • Les déçus de Hollande dans la rue

    Sanofi, ArcelorMittal, Peugeot, Goodyear… Entre 700 et 1.500 salariés d’entreprises menacées manifesteront mardi. 

    À l’usine Goodyear d’Amiens, les banderoles et les pancartes sont déjà prêtes, le slogan aussi : "Hollande, qu’est-ce que tu glandes? Cette loi, tu nous la dois." La colère est d’autant plus vive que les 1.250 salariés du groupe de pneumatiques pourraient apprendre, jeudi, lors d’un comité central d’entreprise, la fermeture de leur site d’ici à 2014. "Il y a quinze mois, sur notre parking, François Hollande a promis qu’il ferait une loi pour interdire les licenciements boursiers s’il arrivait à l’Élysée, pointe le délégué CGT Mickaël Wamen. On veut lui rappeler ses promesses. Nous, on a une proposition toute prête à lui soumettre, pour que les sociétés qui font des profits ne puissent pas licencier…"

    "Notre pays plonge dans une misère sociale qu’il n’a jamais connue"

    Les salariés de Goodyear ne seront pas les seuls à manifester leur ras-le-bol, mardi, devant le ministère du Travail, alors que les chiffres du chômage explosent. Les représentants de 25 entreprises menacées par des plans sociaux, tous syndicats confondus, rejoindront la rue de Grenelle : Sanofi, ArcelorMittal, Peugeot, Fralib, Ford, Pilpa, Faurecia, Virgin, Sodimédical… La grogne des entreprises en difficulté, chacune soumise à un cas particulier, se mue désormais en contestation collective. "Le but est de constituer un front uni, indique Marie Lecomte, ancienne salariée des 3 Suisses, instigatrice de l’association Licenci’elles et de la manifestation. Pendant la campagne, Hollande et Montebourg ont fait beaucoup de promesses, mais on n’a rien vu venir. Désormais, on veut faire converger les luttes pour se faire entendre…"

    Dans la foulée, les 700 à 1.500 participants attendus entameront une marche jusqu’à l’Assemblée. Sur les tee-shirts, un seul leitmotiv : "Non aux licenciements financiers, une loi pour une vraie sécurisation de l’emploi." Et dans leur ligne de mire, l’accord signé, il y a quinze jours, par les syndicats CFDT, CFTC et CFE-CGC… "Les confédérations s’engagent, mais à la base, les syndicalistes en bavent face à la détresse des salariés", souligne Marie Lecomte. "Cet accord est le plus nocif qui existe, dénonce Mickaël Wamen. Notre pays plonge dans une misère sociale qu’il n’a jamais connue. Michel Sapin doit nous rencontrer."

    Au ministère du Travail, on indiquait, samedi soir, être "prêt à recevoir une délégation" si la demande en était faite. Pour Lionel Burriello, délégué CGT chez ArcelorMittal à Florange, les pouvoirs publics n’ont pas pris la mesure de l’urgence. Il sera, lui aussi, dans le cortège, avec ses collègues qui ont tenté de s’enchaîner aux grilles de Matignon, cette semaine, pour demander la nationalisation de leur usine. "La pression monte, ça devient dangereux, s’alarme-t-il. Des dizaines de communes vont souffrir. On a le sentiment que ça va péter. Et plus vite qu’on ne le croit…"

    Tous comptent ressortir leurs banderoles aussi souvent que nécessaire pour obtenir le vote d’une loi contre les licenciements boursiers et tenter de sauver leurs dossiers de l’enlisement. "C’est le début d’un mouvement, confirme Laurent Besson-Imbert, délégué Sud chez Sanofi. On est prêts à faire d’autres actions s’il le faut, pour combattre les affres de la finance."

    Camille Neveux - Le Journal du Dimanche

    Pour une vraie sécurisation de l'emploi : rassemblement des salariés en lutte de plusieurs entreprises le 29 janvier 2013 devant le Ministère du travail

    collectif-licencielles29012013.jpg

     

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  • Moscovici vante la "flexibility" française à Davos

    Philippe Mabille 

    En France, le mot reste officiellement bani du vocabulaire politique. On dit plutôt "souplesse" ou "adaptation" dans la doxa socialiste. A Davos, le ministre français de l'économie, qui a fait le voyage pour la journée de vendredi faire le service après-vente des réformes de François Hollande, n'a pas eu de fausse pudeur pour souligner l'importance de l'accord sur le marché du travail signé entre le patronat et trois syndicats.

    Dans un très bon anglais, à la différence de son prédecesseur François Baroin qui avait parlé en français l'an dernier, obligeant l'assistance à se ruer vers les écouteurs pour entendre la traduction, Pierre Moscovici a été sans équivoque. "More security for the employees, more flexibility for the firms", cet accord est un des éléments décisif pour redresser la "competitivity" de la France. Le ministre présentait ainsi le 4ème pilier de la politique économique de la France, un pays sérieux qui fait ce qui est nécessaire pour se relever après dix années pendant lesquelles il s'est "affaibli", a-t-il souligné.

    Le premier pilier, c'est la stabilisation de l'euro, réussie. Le second, c'est le désendettement et la réduction des déficits. Le troisième, c'est la baisse du "Labor cost", avec le crédit d'impôt compétitivité emploi.

    Pierre Moscovici, invité à une session sur le changement de modèle de croissance à l'Ouest, organisé par Bloomberg TV, a aussi organisé une conférence de presse où il a été obligé de répondre sur le sort de la taxe à 75% sur les riches. Le ministre ne s'est pas trop attardé pour démentir les informations du Figaro qui affirme que le gouvernement voudrait enterrer lentement ce dossier empoisonné. Pas du tout. "Vous saurez dans les prochaines semaines comment nous respecterons l'esprit de cette taxe tout en respectant aussi les principes imposés par le Conseil Constitutionnel"... Fin décembre, celui-ci avait invalidé cette mesure phare du projet Hollande, au nom de l'égalité devant l'impôt.

    Reste qu'à Davos, les 75% de François Hollande sont un repoussoir à investisseurs. Le président de Goldman Sachs, Lloyd Blankfein, lors d'un débat le matin avec Fleur Pellerin la ministre des PME et de l'économie numérique, aussi du voyage à Davos, a expliqué sa vision des choses. "75% d'impôt, pourquoi pas, mais à condition que le retour sur investissement en France le justifie"...

    http://www.latribune.fr


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  • Les désillusions du «made in China»

    LUNDI 28 JANVIER 2013

    RAPATRIEMENT D'ACTIVITÉS • Hausse des coûts, problèmes de qualité et de flexibilité: la délocalisation en Asie réserve parfois de mauvaises surprises. Des sociétés ramènent leurs activités au pays. Plus qu’une tendance.

    En arrière toute! Rossignol remballe une partie de sa production à Taïwan (20 000 paires de ski par an) et rentre en France. Elle a lancé mi-janvier la deuxième phase de son opération de rapatriement entamée en 2010. Et l’entreprise basée à Grenoble n’est pas la seule à plier bagage en Asie.
    Apple, Caterpillar, Lenovo, Meccano, Decathlon... Plusieurs grandes enseignes occidentales ont ramené au pays la totalité ou une partie de leurs activités ces derniers mois. Apple a annoncé en décembre le retour sur le sol américain en 2013 d’une ligne de production d’ordinateurs. Les PME s’y mettent ausssi, à l’image du vaudois AgoraBee SA, actif dans les GPS, qui viennent de quitter le marché chinois (voir ci-après).

    Explosion des salaires
    «Ce mouvement n’est pas étonnant car de nombreuses d’entreprises sont allées trop loin dans la production en Asie», estime Jean-Philippe Bonardi, professeur en économie à l’Université de Lausanne. «Ceux qui ont dit qu’il n’y avait pas de salut sans délocalisation se sont trompés. Ces transferts ne se sont pas toujours soldés par des avantages concurrentiels en termeS de coûts.»
    Nombre d’entreprises qui ont déplacé leur unité de production en Chine pour faire de grosses économies sur les coûts, à commencer par la main-d’œuvre, ont déchanté. C’était sans compter l’explosion des salaires – 400% entre 1996 et 2008 – et des charges sociales.
    Idem pour les coûts dépendants de la conjoncture, comme l’approvisionnement et le transport qui est directement lié au cours du pétrole: ils ont érodé la compétitivité des entreprises délocalisées. «Même si les salaires sont plus élevés en France, produire en France coûte moins cher que produire en Asie en raison de la diminution des coûts liés aux transports», affirme une porte-parole de Rossignol.
    Produire à bas coût à Shanghai ou Shenzhen n’est plus aussi attractif pour certaines sociétés. «Mais les deux principaux arguments d’un retour sont le manque de flexibilité dans la chaîne d’approvisionnement et les problèmes de qualité», insiste Stefan Kinkel, professeur de sciences appliquées à l’Université de Karlsruhe. L’allemand Steiff a ainsi rapatrié de Chine en 2008 la production d’ours en peluche en raison d’une fabrication bâclée.
    Des entreprises réalisent que la Chine, c’est finalement plus loin qu’elles ne l’imaginaient au départ. Comment garantir les standards de production et de livraison à 10 000 kilomètres de là? Comment répondre à des commandes de dernière minute à une telle distance? Alors qu’en regroupant sur le même site toutes les étapes de la production, elles peuvent mieux contrôler la ­fabrication et raccourcir les ­délais de livraison.

    Trop loin pour contrôler
    Si Rossignol a fait volte-face, c’est pour se rapprocher des clients et des matières premières qui servent à la fabrication des skis. «Plus on est éloigné de son marché, moins on est réactif», souligne Jean-Philippe Bonardi. «Si on veut rester concurrentiel, il faut pouvoir s’adapter rapidement aux demandes du client.»
    Les entreprises sont aussi handicapées, selon les secteurs, par les délais trop longs, la fluctuation des taux de change, la contrefaçon, la corruption, le manque de main-d’œuvre qualifiée... Des inconvénients qui favorisent un retour de balancier observé dans des pays comme les Etats-Unis, la France, l’Allemagne ou la Grande-Bretagne. Fin 2011, une étude de l’EEF (organisme représentant des milliers d’entreprises manufacturières britanniques) affirmait qu’une société sur sept avait rapatrié ses activités. En Allemagne, un pays qui a délocalisé à outrance, entre 2 et 3% des entreprises font pareil, selon Stefan Kinkel.

    L’aide au retour
    Ce rapatriement qui s’effectue au compte-gouttes pourrait  devenir un mouvement de fond, pressent David Bailey, professeur de commerce international à l’Université de Coventry: «La délocalisation montre ses limites, en raison de cette combinaison de salaires plus élevés, de coûts de transports en hausse, et de problèmes dans la chaîne d’approvisionnement. Ce contre-courant va devenir toujours plus important.»
    A condition que les gouvernements soutiennent le retour à la maison des fabricants. La France et les Etats-Unis ont montré l’exemple, en lançant un programme d’encouragement au retour. Produire dans son pays, c’est aussi dans l’air du temps. En cette période de crise et de conscience écologique, les consommateurs sont toujours plus friands de biens de proximité, histoire de soutenir l’industrie et les emplois du pays. Certaines sociétés comme Apple l’ont bien compris. Elles jouent la carte du rapatriement comme on lance une opération marketing. I

     

    La Suisse reste une exception

    Rares sont les entreprises suisses actives en Chine à suivre le mouvement de rapatriement d’activités. «Sur les 440 recensées, il y a peu de cas de retrait du marché», souligne Kilian Widmer, chef du bureau de Shanghai du Swiss Business Hub China. AgoraBee SA fait partie des exceptions. La société basée à Renens fabrique des GPS destinés aux suivis d’objets transportés. Elle a rappelé en 2012 de Chine son unité d’assemblage (25 000 pièces depuis la création). «Nous voulions pouvoir mieux servir les clients, avoir plus de réactivité et gérer la qualité depuis chez nous», explique le directeur Jari-Pascal Curty.
    Depuis Shanghai, Nicolas Musy, directeur de CH-ina, société de conseils, ne sent pas ce mouvement en sens inverse: «Au contraire, toujours plus d’entreprises suisses veulent entrer sur le marché asiatique.» TJ

    Nombreux retours gagnants en France

    Rossignol (ski), Smoby (jouets), Geneviève ­Lethu (vaisselle), Atol (lunettes)... Les retours gagnants d’Asie sont nombreux en France. Prenons Majencia, l’une des pionnières en la matière. Proche du dépôt de bilan en 2004 (20 millions d’euros de pertes), l’entreprise s’est refait une santé (1,8 million de bénéfice en 2011) depuis qu’elle a décampé de Chine. L’enseigne a rapatrié en 2006 la fabrication annuelle de 3000 caissons de bureau. «Les 20% que nous économisions grâce aux coûts bas de la main-d’œuvre étaient absorbés pour moitié par les coûts de transports» détaille Vincent Gruau. «Pour 10% de marges seulement, et avec les risques de hausse du prix du pétrole, il n’était plus viable de produire en Chine.»
    Résultat: depuis 2011, Majencia  est numéro un en France dans le secteur du mobilier de bureau. Et elle a même créé des emplois (l’effectif est passé 691 à 808 employés entre 2007 et fin 2012). «Ce retour est positif à tous les niveaux. Nous avons pu adapter notre produit à la ­demande de la clientèle, en étant plus réactifs et plus flexibles.» TJ

     

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  • Le chef des travailleurs sans terre tué au Brésil

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    © Flickr.com/Andre Maceira/cc-by-nc-sa 3.0

    Un inconnu a tiré sur le chef du Mouvement des travailleurs sans terre du Brésil, Cicero Guedes. Le militant a été tué dans l’État de Rio de Janeiro, lorsqu'il allait chez lui en vélo.

    Ces dernières années, les meurtres des militants «sans terre» ont commencé à avoir lieu moins fréquemment, mais ils reçoivent les menaces de mort trois fois plus souvent qu'avant.

    Le mouvement, qui a été dirigé par Guedes, exige une réforme agraire, et est considéré comme un mouvement sociale mieux organisé au Brésil.

     

    http://french.ruvr.ru/2013_01_27/Le-chef-des-travailleurs-sans-terre-tue-au-Bresil/

    Le Mouvement des Sans Terre (Brésil) : un mouvement qui reconstruit la vie.

    Rosa Cañadell / El Viejo Topo (Barcelone)
    A l´heure où, comme aujourd´hui, une crise s´abat sur les classes les plus défavorisées, incapables d´offrir une réponse solide pour stopper l´agression contre les droits sociaux et du travail, parler d´un mouvement social comme le MST est comme une bouffée d´air frais, et même si les circonstances diffèrent beaucoup, son exemple d´organisation, de lutte et d´éducation peut servir de source d´inspiration pour toutes et tous ceux qui s´indignent et cherchent de nouvelles voies vers cette société rêvée, plus juste et moins plus égale.

    Le fait que depuis 1985 (année de la naissance du Mouvement des Travailleurs ruraux Sans Terres, MST), ce mouvement n´a jamais cessé de croître et n´a jamais renoncé à ses principes, au point de devenir une référence au Brésil comme en Amérique Latine, jette une lueur d´espoir dans notre désert plein de rage et d´impuissance.
    Avec son slogan : « Occuper, résister, produire », le MST organise les paysans privés de terre pour occuper des zones improductives. Pour cela peuvent se réunir de 300 à 3000 familles, en général des personnes qui vivent dans les quartiers pauvres des grandes villes après avoir été expulsées de la campagne. Sortir de la pauvreté et retourner vivre à la campagne est ce qui pousse ces familles à se regrouper au sein du MST et à commencer le processus d´occupation et de résistance.

    Une fois que la zone, le jour et l´heure sont décidés, elles prennent possession collectivement de la terre. L´étape suivante est de la défendre. Parfois surgissent les sicaire. Parfois c´est l´armée. Les paysans n´ont pas d´armes et leur défense est la non-violence et l´abandon temporaire de la terre en cas d´expulsion, généralement violente, pour la réoccuper ensuite .

    Les familles montent les campements et commencent le processus de légaliser l´occupation. La Constitution brésilienne reconnaît le droit que les terres improductives soient « susceptibles de Réforme Agraire ». Ainsi l´occupation est une forme de lutte et de pression pour obliger le gouvernement à mettre en pratique le mandat constitutionnel de réaliser la réforme agraire et de faire en sorte que les terres remplissent leur fonction sociale.

    Ce processus de légalisation initié par une équipe d´avocats du mouvement lui-même, peut durer des mois, parfois des années. Dans 80 % des cas la démarche aboutit mais il y a des campements qui attendent depuis dix ans la fin du processus. Pendant toute cette période sont combinées actions légales, négociations, et mobilisations : marches, occupations d´édifices publics, etc.
    Finalement, une fois établie la légalisation de l´occupation, la terre devient propriété de l´État qui la donne en usufruit aux familles qui l´ont occupée. Ainsi commence l´”asentamento”, la construction de maisons et les activités productives. Les personnes qui ont conquis la terre planifient les aspects relatifs à sa répartition, à l´organisation du travail, au lieu de construction des maisons, de l´école, etc.
    C´est un processus démocratique, assembléiste, et participatif. La ligne politique du MST est d´impulser et de développer la production de manière collective, mais les décisions appartient aux personnes qui se sont établi(e)s sur les terres.

    Une fois cet objectif atteint, le MST continue à chercher de nouvelles terres pour installer de nouveaux groupes de paysan(ne)s. Une partie de la production de ceux qui sont déjà établis permet d´appuyer les nouvelles occupations et l’expérience des uns sert à l’organisation des autres, dans un vaste cercle de solidarité qui permet son expansion.

    Depuis le début, le mouvement n’a pas cessé d’occuper des terres, d´organiser la production, de construire des écoles et de former de nouveaux militants. Actuellement quelque deux millions de personnes vivent et travaillent sur les terres occupées et / ou légalisées. On compte des centaines d’associations paysannes et de coopératives de production.

    En abril 2010 on comptait près de deux mille écoles dans les campements (« acampamentos ») et dans les unités de production qui en naissent (« asentamentos »). Par l´École Nationale Florestán Fernandes sont passés 16.000 jeunes pour se former politiquement et techniquement. Pendant ce temps quelques 60.000 familles campent dans l´attente de légaliser les terres occupées.
    Comment ont-ils obtenu tant avec si peu ? Trois clefs sont à la base du succès du mouvement : la lutte constante, l´organisation comme construction de valeurs nouvelles et la formation comme garantie de continuité.

    1. La lutte comme moteur

    La lutte constante part de l´idée que la conquête de la terre par un groupe de familles n´est pas suffisante ; la lutte continue avec la réforme agraire et avec une conception nouvelle de la production dans la campagne : sans latifundios, sans monocultures destinées à l´exportation, sans produits agrotoxiques, sans variétés transgéniques. Une agriculture qui permette aux paysans et aux paysannes de vivre dans la campagne et de la campagne, de produire sans détruire la nature, de cultiver pour la consommation interne et de garantir la souveraineté alimentaire pour toute la population. Tout cela implique un changement dans les structures de la propriété et un changement de modèle économique et politique du pays. Un grand changement structurel et de sytème pour atteindre une société plus juste et viable, tel est l´objectif ultime de ce mouvement. «  Nous ne voulons pas créer de petites îles fantastiques, nous voulons changer la société  » nous disait un jeune dirigeant.

    Ainsi, la terre devient lutte et accumulation de pouvoir en trois sens : le premier, c´est la conquête de la terre et la défaite du latifundio ; Impressionnant spectacle que ces kilomètres et kilomètres sans maisons, sans habitants des grandes plantations d´eucalyptus, de maïs transgénique, puis soudain, comme dans une oasis, un campement productif doté de maisons, de jardins, de potagers, de garçonnets et de fillettes, d´animaux, d´écoles, en définitive, de vie. Le deuxième sens, c´est d´obliger l´État à légitimer l´organisation et l´occupation des terres par cette quantité énorme de personnes et ainsi d´observer ses propres lois constitutionnelles. Et le troisième sens est qu´en conquérant la terre, l´organisation des Sans Terre devient une référence politique et sociale capable d´influencer l´espace géographique et social autour de ses communautés organisées.

    La lutte, en outre, génère des coutumes et des aspects différents qui forgent l´identité de l´organisation. On occupe des terres, on lutte pour des crédits, on éduque les enfants, on enregistre des CDs, on proteste contre les privatisations, on mène des actions solidaires avec d´autres mouvements, on organise des rencontres, on réalise des marches, on édite des livres, et combien d´autres choses...

    2. L´organisation comme base de la société future

    Par la conquête de la terre, le MST démontre en outre qu´est possible une forme alternative d´organiser la vie : en tant que propriété et communauté. La propriété collective, la production sous forme de coopératives et l´organisation assembléiste de la communauté, permettent au mouvement de se maintenir et de croître. Selon des études de la FAO sur les campements productifs, les paysans bénéficiaires des occupations de terre gagnent trois fois plus qu´avant ; l´analphabétisme disparaît, ainsi que la mortalité infantile et les jeunes qui vivent là disposent d´un débouché, sur la base d´une formation technique, professionnelle et politique.

    L´organisation dans les campements, dans les unités productives, dans les écoles et dans les autres structures du MST est une des grandes conquêtes et un levier de changement. Avec l´organisation des campements et le travail volontaire et collectif, est menée une « réforme dans la réforme ».
    La vie dans les campements et unités productives reconstruit, réordonne la vie sociale : chaque groupe de dix familles forme un des “Noyaux de base” parmi lesquels on choisit un coordinateur et une coordinatrice (dans toutes les structures organisatrices la parité est une norme). On nomme des responsables pour les différents secteurs : Infrastructure, Education, Santé, Finances, Sécurité, Communication et culture, Production et Front de masses. Un groupe de cinq noyaux forme une brigade (soit 50 familles) dans laquelle se coordonnent les représentants des Noyaux des différents secteurs. Finalement, les coordinateurs et coordinatrices de chaque Brigade, avec les responsables de chaque secteur, forment la Coordination Générale du Campement initial (« Acampamento ») ou de l´Unité productive postérieure («  Asentamiento »).

    Chaque semaine, normalement les samedi, tous les Noyaux de base et tous les secteurs se réunissent. Au terme de la réunion la Coordination générale évalue toutes les propositions et les décisions émanant des différentes réunions. De même le coordinateur et la coordinatrice de chaque campement et de chaque unité productive se réunissent avec les unités les plus proches : c´est une coordination locale qui avec d´autres coordinations locales forment la coordination territoriale, puis celle de chaque état, et finalement la coordination nationale.

    Cette organisation depuis la base génère la participation et l´auto-organisation de la vie quotidienne des campements et des unités productives, favorise la vie en commun entre les diverses familles qui occupent une même terre et maintient en vie l´esprit de solidarité et de lutte. En même temps elle maintient en contact et en coordination constante les différentes structures du Mouvement lui-même, permettant de réunir les forces, d´additionner les luttes, d´échanger des expériences, d´unifier les slogans de lutte, ce qui rend le mouvement plus grand et plus fort. La démocratie, dit-on au MST, ne peut être comprise seulement comme la participation aux processus électoraux, elle doit s´enraciner dans toutes les dimensions de la vie sociale.

    Tout cela permet, dès le premier jour de l´occupation, de résoudre les problèmes produits par la précarité et la vie en commun de milliers de personnes, qui ne se connaissent pas. En peu de jours se construisent des réservoirs d´eau, des baraques de bois et de plastiques, des rues et des éclairages, des toilettes et l´école. Conjointement on établit des normes de vie commune et ainsi on réorganise en peu de jours la nouvelle forme de produire et de vivre. Le travail collectif, la participation démocratique créent une nouvelle culture sur la base de vertus nouvelles que l´organisation aide à développer. Des pères et des mères de familles qui jusqu´il y a peu étaient à peine nommés par leurs enfants, sont à présent appelés par les haut-parleurs pour participer aux réunions qui décideront du futur de leurs vies. Et en vérité il est étonnant de voir ces immenses rassemblements de personnes vivant ensemble sans besoin de représentation de l´État ni de forces policières.

    Les portes des maisons sont ouvertes et elles n´ont pas de murs, la délinquance est inexistante, de même que le vol ou la violence (mon séjour dans ces campements, logée dans ces maisons sans portes, avec tous mes documents, bagages, argent à l´intérieur, n´a pas éveillé le moindre intérêt ni le plus petit problème). Les conflits sont traités collectivement et l´esprit de lutte est présent dans tous les actes quotidiens. Dans tous les campements et unités de production, le drapeau du MST est peint sur les murs des granges, des maisons, des écoles. Il n´y a pas une seule place d´une seule unité productive sans un drapeau rouge qui flotte et contraste avec le vert de la végétation. Les animaux domestiques se promènent parmi les enfants et devant chaque maison, quelque pauvre qu´elle soit, il y a un petit jardin et quelques fleurs d´ornement.

    Les parents nous racontent leur satisfaction d´avoir éloigné leurs enfants “du climat de délinquance et de drogue des quartiers marginaux dans les grandes villes” et les plus petits manifestent leur sentiment d´être « plus libres et plus en sécurité”. La peur et l´exclusion semblent appartenir au passé.
    L´intérêt porté à l´entretien et au nettoyage des espaces fait partie des valeurs. Le contact avec la terre et la beauté naturelle pour embellir le quotidien génèrent le sens esthétique, par l´usage des produits de la nature elle-même, et l´éveil de l´intérêt artistique : chanter, peindre, décorer, faire du théâtre, transmettre à partir de petites radios locales, tout fait partie des activités collectives. “La beauté des unités productives sert à montrer que nous avançons vers la reconstruction de la vie” dit-on avec fierté. La conscience écologique naît aussi du respect de la nature et de la volonté de reconstruire la production sans poisons ni variétés transgéniques, en respectant et en récupérant les espèces autochtones.

    3. L´éducation comme semence du futur

    Pour le MST éduquer est fondamental. Sa préoccupation pour l´école existe depuis le début du mouvement. La lutte pour l´école est la phase suivante de la lutte pour la terre : il s´agit d´assurer l´accès à l´éducation de tous les enfants en âge scolaire, l´alphabétisation des jeunes et des adultes et la formation technique et politique de la jeunesse.

    Éduquer pour le MST signifie basiquement “former pour transformer la société” : il s´agit d´une éducation qui ne cache pas son engagement de développer la conscience de classe et la conscience révolutionnaire, parmi les participants comme parmi les formateurs. L´école est conçue comme un espace où les enfants et les adolescents se forment comme êtres humains intégraux. L´organisation collective se conçoit comme un pilier fundamental de l´école et le travail comme la base de tout processus éducatif. L´auto-organisation des éducateurs et des participant(e)s ainsi que l´implication de toute la communauté sont aussi présentes dans l´éducation : depuis l´autoconstruction de l´école à la lutte pour elle et à la participation dans les conseils scolaires.

    La première chose qu´on construit dans un campement, c´est l´école. Ensuite on cherche les jeunes les plus formés pour qu´ils se chargent d´éduquer les plus petits. Le pas suivant est la lutte pour l´école publique, pour exiger de l´administration (locale ou de l´état, selon qu´il s´agit de primaire ou de secondaire) la construction de l´école publique et l´adjudication de maîtres et maîtresses.
    Pour le Mouvement des Travailleurs Ruraux Sans Terre, la formation de ses propres enseignants est une question centrale, et ce pour deux raisons : la première est d´assurer la continuité de l´école, puisque tant les campements que les unités productives sont situées dans des zones éloignées et souvent, les enseignants qui ne font pas partie du mouvement abandonnent l´école ou ne veulent pas y travailler. La deuxième est de mettre en oeuvre sa conception de l´éducation liée à l´histoire du campement, de la lutte pour la terre et du travail agricole.

    Quand on a obtenu l´installation d´une école publique dans le campement ou dans l´unité productive, le programme de formation est “officiel” et les maîtres ou maîtresses sont payé(e)s par la Municipalité ou par l´État. Dans la grande majorité de ces écoles on obtient que les jeunes du lieu, déjà formés, puissent occuper ces postes.

    Tout ceci implique qu´ils doivent transmettre les contenus officiels. Mais il n´en restent pas là. Ils mettent en pratique leurs propres principes éducatifs : une méthodologie « émancipatrice », inspirée de Paulo Freire et d´une éducation théorico-pratique liée à la terre, avec jardins scolaires, soins des arbres et des fleurs, etc... Ainsi on élargit les contenus officiels avec des contenus propres et on élabore un matériel pédagogique alternatif. La “mystique” (chants, hymnes, slogans, poésie, représentations symboliques, etc.) est toujours présente dans les écoles, de même que l´éducation artistique et culturelle : musique, danse, théâtre, art. Ces écoles, situées dans les unités productives, sont souvent ouvertes au reste des enfants des villages voisins, de sorte qu´elles offent aussi un service à la communauté locale.

    Par ailleurs le MST, en partenariat avec plusieurs universités, organise des cours techniques et pédagogiques pour ses jeunes. Ces cours fonctionnent toujours à temps partiel, combinant théorie et pratique : deux mois de formation dans le Centre éducatif et trois mois de travail dans l´unité productive, et ainsi de suite durant trois ans, au bout desquels on acquiert une formation et un titre universitaire qui leur permet de travailler dans les unités productives (« asentamentos ») comme professeurs des écoles publiques ou comme techniciens en agro-écologie ou en coopérativisme.
    La conception de l´école au MST embrasse un grand nombre d´aspects : la planification, l´évaluation, la formation des professeurs, les matériels didactiques, la relation professeur/élève, le travail pédagogique, etc. En d´autres termes, l´école est repensée de manière intégrale et vise de nombreux objectifs : comme outil d´émancipation sociale, elle veut éliminer l´analphabétisme et rendre la culture accessible à tout le monde. En tant que promotion intellectuelle et technique, elle veut permettre aux jeunes de rester vivre sur place et de disposer d´un emploi. Elle cherche à transmettre des valeurs : amour de la terre, travail collectif, solidarité, discipline, créativité. Elle vise à améliorer la vie des unités de production et de leur environnement local : production, coopérativisme, agro-écologie.

    Elle est une manière de stimuler l´engagement : la lutte pour la terre, la récupération de l´histoire propre (celle de l´occupation, du campement) et collective (les luttes sociales et paysannes, les révolutions en Amérique Latine, etc.). Elle sert aussi à former les futurs cadres et dirigeants : la formation politique.

    L´éducation se veut donc à la fois un processus de rétroalimentation du mouvement lui-même et un outil de transformation sociale.

    Au cours de son quart de siècle d´existence, le MST a construit un vaste réseau d´écoles, dans leur majorité publiques, qui se situent dans les zones d´influence du Mouvement. Selon des données du secteur de l´éducation, en avril 2010, existaient dans les campements et dans les unités de production, près de deux mille écoles, basiquement d´éducation infantile et de primaire complète, et quelques unes d´enseignement secondaire. On compte 300.000 personnes étudiant dans des écoles publiques, depuis l´infantile jusqu´à l´universitaire, en pasaant par l´éducation de jeunes et d´adultes. Dans les écoles des campements et des unités de production travaillent 10.000 professeurs, plus 5.000 autres travailleurs de l´éducation, normalement des jeunes qui exercent cette fonction d´éducateurs sans en avoir le titre mais qui sont en formation dans les cours pédagogiques du MST.

    Tout cela a permis de mettre un terme à l´analphabétisme, de disposer d´écoles dans tous les campements et unités productives, d´avoir des maîtres et des maîtresses jeunes, motivés et impliqués dans cette éducation comme projet global au-delà de la simple instruction. Et de compter des jeunes formés, munis de titres, et d´un ensemble d´étudiants motivés, avec peu de problèmes de discipline et un grand sens des responsabilités.

    Autre résultat, jeunes et adultes possèdent un haut niveau de formation idéologique et politique, il n´y a qu´une faible désaffection des jeunes dans le Mouvement. L´enracinement renforcé dans les unités productives a permis d´augmenter la qualité de la production et de l´auto-organisation. Tout cela revient à continuer la lutte pour la terre et pour la transformation sociale tout en multipliant les opportunités de vie personnelle, professionelle, des paysan(ne)s sans terre.

    L´École Nationale Florestán Fernandes (ENFF) : la connaissance libératrice de consciences

    Avec l´éducation, la formation politique a toujours été un des piliers du MST, et c´est pourquoi a été créée l´Escuela Nacional Florestán Fernandez, en 2005. L´idée de cette école nationale est née à la fin des années 90 quand a surgi le besoin de disposer d´un espace de formation de la militance et d´échanger des expériences ou de mener des débats sur la transformation sociale en Amérique Latine.
    Cette école est située à Guararema (à 90 KM. de Sao Paulo) et a pour objectif d´ètre un espace de formation supérieure plurielle dans les divers domaines de la connaissance, non seulement pour les militants du MST, mais aussi pour ceux d´autres mouvements sociaux, ruraux et urbains, du Brésil et d´autres pays d´Amérique Latine.

    L´école a été construite à partir du travail volontaire de brigades de personnes venues des campements et d´autres mouvements sociaux. Plus de mille personnes ont collaboré à l´auto-construction de l´École, qui, en outre, se caractérise par une grande beauté et simplicité architecturale, ainsi que par un environnement bien entretenu. Elle compte des dortoirs pour 250 personnes, avec un grand réfectoire, una salle de projections, une salle pour les réunions et les assemblées, une bibliothèque, 15 classes, un grand jardin, une garderie d´enfants et de vastes espaces externes avec jardins et petites unités de production agricole.

    Depuis 2005 sont passés par cette école plus de 16.000 jeunes, près de 500 professeurs volontaires de diverses universités du Brésil, d´Amérique et d´autres continents, et 2.000 visiteurs du monde entier. Les espaces de l´école servent aussi à l´organisation de diverses rencontres : de jeunes, de professeurs, d´autres mouvements sociaux comme la Via Campesina, le Mouvement Noir, le Mouvement des Sans Toit, etc., ainsi qu´à la réalisation de séminaires et d´autres évènements. Les principaux intellectuels de gauche sont passés par l´école au moins une fois, beaucoup y reviennent.
    Les élèves ne paient rien et le professorat ne perçoit pas de salaire. La conservation du centre se fait à partir du travail des jeunes qui étudient et qui assument les tâches de nettoyage, de cuisine, de travail productif dans les potagers et de soins des animaux qui seront une partie fondamentale de leur propres repas. Ainsi l´École se soutient par ses propres forces et le travail collectif revêt une dimensión pédagogique et éducative fondamentale pour les étudiants.

    La formation des militants, ou formation politique, combine des questions de théorie et de connaissance avec une formation éthique et morale, mettant l´accent sur la coopération, la solidarité, la fierté de classe, l´importance de l´étude, du travail et de la beauté. L´école se valorise par sa capacité à impulser la formation de militants, la formation à de nouvelles formes de travail dans la campagne et à des valeurs humanistes et socialistes.

    Conclusion

    En ces temps de néo-libéralisme radical et de pensée unique, le Mouvement des Sans Terre du Brésil montre qu´il est possible d´établir un nouveau type de propriété de la terre et de produire sans préjudices pour la nature, d´avancer et de perfectionner la démocratie et la solidarité, de participer dans toutes les luttes contre l´oppression et de mettre en pratique de nouvelles valeurs avec de nouveaux contenus.

    De son organisation, de sa lutte, de sa ténacité pour une éducation émancipatrice, nous pouvons apprendre en tant qu´éducateurs et activistes de mouvements sociaux. L´histoire n´est pas écrite mais il y a des voies tracées et cela vaut la peine de les explorer.

    Dans la nuit, quand on les attend le moins, on voit des légions de familles juchées sur des camions prendre la route pour occuper des grandes plantations abandonnées, pour retrouver la possibilité de renaître comme êtres humains et politiques. En peu de temps le rouge des drapeaux brille comme un brasier et annonce que là-bas, des esclaves cherchent la liberté et invitent les autres à forger ensemble leur propre destin”. (Ademar Bogo :”Le MST et la culture”, Sao Pâulo 2009))

    LUTTER EST LA MEILLEURE MANIÈRE D´ESPÉRER
    Rosa Cañadell est professeur, porte-parole de l´USTEC•STE. Membre du Comité de soutien au MST, Barcelone (Catalogne). Membre de Socialisme 21.
    Source : El Topo Viejo, http://www.elviejotopo.com/
    Traduction française : Thierry Deronne, pour www.larevolucionvive.org.ve
    Pour soutenir le MST, on peut écrire à Salete Carollo, prointer@mst.org.br
    Pour une information continue en français sur les activités du MST, http://mouvementsansterre.wordpress.com/

    http://amisdessansterre.blogspot.fr/2012/01/rosa-canadell-el-viejo-topo-barcelone.html#more

    http://jacques.tourtaux.over-blog.com.over-blog.com/


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