• Un texte de Christian Nadeau, professeur de philosophie à l'Université de Montréal
    Interprété par Christian Bégin et Dominique Leduc

     

    QUEBEC

    APPEL A LA MOBILISATION MARDI 22 

    Toutes et tous à la Place des Festivals, à Montréal, mardi le 22 mai à 14h00.

    CONTRE LE GOUVERNEMENT CHAREST

    CONTRE LA REPRESSION ET LA LOI 78

    CONTRE L'AUGMENTATION DES FRAIS SCOLAIRES DE 75%

    PARIS : Mardi, 22 Mai, 2012 - 18:00 devant la fontaine monumentale de la place Saint-Michel SOLIDARITÉ INTERNATIONALE 22 MAI, MANIFESTATION À PARIS EN APPUI AUX LUTTES ÉTUDIANTES AU QUÉBEC (COLLECTIF SODÉ-QUÉBEC - SOLIDARITÉ DÉMOCRATIQUE QUÉBEC)

    Ce rassemblement s’organise de façon synchrone avec de nombreuses manifestations qui auront lieu au Québec à la même date.


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  • Les éditocrates conseillent François Hollande : « Devenez impopulaire ! »

    Le 6 mai 2012, François Hollande est élu Président de la République française. L’enthousiasme dans la presse est quasi-unanime et dès le lendemain, les prescripteurs d’opinion habituels, désormais communément appelés les éditocrates, s’empressent de lui assurer leur soutien... Ou plutôt de le guider sur la voie de la repentance avec un seul leitmotiv : « surtout, Monsieur le Président, gouvernez à droite ! » Miracle d’une liberté d’opinion individuelle que personne ne songe à contester : la liberté d’opinion éditocratique se traduit par une troublante convergence.

    Au lendemain de l’élection de François Hollande, les éditorialistes ont quelques conseils à donner au nouveau Président. Quelques conseils, qui, sur le plan économique, vont souvent dans le même sens. À tout seigneur, tout honneur, Etienne Mougeotte donne le ton, dans Le Figaro : « Ainsi le veut la démocratie », il salue le président élu, avant de faire l’éloge de son prédécesseur, qui « a néanmoins engagé des réformes capitales concernant l’université la recherche, la justice, les retraites, la réduction des dépenses publiques ». Aussi, pour Hollande, « il n’y a pas une minute à perdre pour réaffirmer la volonté de la France de respecter le pacte de stabilité européen » et surtout pour… «  accepter les réformes de structure nécessaires  » Au moins le directeur du Figaro ne cache-t-il pas (toujours) son parti pris. Évoquant une victoire de l’UMP aux élections législatives, il « argumente » : « L’argument essentiel en faveur d’une nouvelle cohabitation sera évidemment d’éviter que la gauche ne détienne le monopole absolu du pouvoir et d’empêcher François Hollande d’appliquer son programme  »

    … Ou d’infléchir le sien. Dans La Croix, on ne dit pas autre chose : à Hollande de « faire ses preuves », en appliquant le programme de Dominique Quinio, l’éditorialiste maison. Il s’agit de mettre en place « une politique économique qui sache manier rigueur et perspectives de croissance », et de demander « des efforts d’austérité », naturellement « répartis le plus équitablement possible ». L’évocation de son prédécesseur a des airs de déjà vu – car « la défaite de Nicolas Sarkozy, […] est également le fruit amer des réformes qu’il a engagées, comme celle des retraites […]. Réformes impopulaires , menés sans doute à la hussarde, mais pourtant nécessaires . » Et pour le nouveau président, une feuille de route : « il lui faut poursuivre la transformation de la France. » Et les nécessaires réformes impopulaires.

    Pour Franz-Olivier Giesbert (Le Point, 10 mai 2012), il n’y a pas de doute, tout va bien se passer : « François Hollande sera-t-il à la hauteur ? Il n’y a aucune raison de s’inquiéter. » Avant d’ajouter : « À une condition : qu’une fois au pouvoir il devienne vraiment lui-même, c’est-à-dire un social-démocrate authentique, à la scandinave, j’allais dire intelligent . » Et pour faire preuve d’intelligence, que ne doit pas faire François Hollande ? « Si François Hollande fait de sa victoire celle du secteur public contre le secteur privé et exposé, s’il applique à la lettre son programme dépensier et continue, comme ses prédécesseurs, à laisser filer les déficits en augmentant les impôts, alors, là, il n’a aucune chance de réussir : sa présidence est condamnée d’avance. » Moralité : changez de programme !

    Dans Ouest-France, François Régis Hutin se fend d’une double « Lettre à Monsieur le président ». À l’ancien d’abord, remercié pour son « énergie » et sa « compétence ». Et surtout pour les «  réformes essentielles [qui] ont été entreprises et réussies . Elles porteront leurs fruits dans l’avenir. » Au nouveau, ensuite, pour émettre un vœu : « Nous comptons sur vous pour susciter le dynamisme de tous les Français, pour stimuler leur créativité, pour éviter qu’ils ne se replient sur eux-mêmes, pour qu’ils fassent les réformes de structures nécessaires . » Bien sûr, mais lesquelles ? Qu’importe ?

    Dans L’Express, Christophe Barbier rédige lui aussi une missive au nouveau Président. Il lui demande « d’agir ». Mais il faudra être raisonnable : « Cependant, votre programme ne laisse pas d’inquiéter. L’Etat est en faillite, les spéculateurs sont en embuscade, le monde vous regarde. Il ne s’agit pas de dépenser moins, il s’agit de dépenser beaucoup moins , et vite. Des augmentations promises pour diverses allocations aux 60 000 postes prévus dans l’Education, la liste de ce qui n’est pas raisonnable est fort longue. » (6 mai 2012)

    L’hebdomadaire Le Point, qui a consacré un numéro entier à la victoire de François Hollande, l’incite à rompre avec sa gauche et a devenir rapidement impopulaire.

    D’abord Claude Imbert s’inquiète : « Il trouvera, cramponnés à ses basques, des socialistes à l’ancienne comme seule la France en produit. » Mais très vite, il se rassure : « Dieu merci, il bénéficiera d’une garde rapprochée, aguerrie et "moderne", des Valls, Pascal Lamy ou Jouyet... Nombre d’entre eux ont dans les gènes le réformisme deloriste ou rocardien. Européen convaincu, Hollande n’arrive pas aux affaires sans biscuits. » (10 mai 2012)

    Ensuite Pierre-Antoine Delhommais l’oriente dans la bonne direction : « Pour réenchanter les finances publiques et les comptes extérieurs français, pour éviter, moins lyriquement mais plus sérieusement, une flambée des taux d’intérêt en France et une crise suraiguë dans la zone euro, M. Hollande devra donc faire l’exact contraire de ce qu’il a laissé miroiter depuis un an et de ce que la gauche avait tenté en 1981. » Puis, le chroniqueur surenchérit : « Il devra commencer par la rigueur avant de pouvoir se montrer généreux. Ce qui veut dire qu’il devra mener d’emblée une politique économique résolument impopulaire, plus tournée vers les entreprises et la compétitivité que vers les ménages et le pouvoir d’achat. » Avant de sommer à François Hollande d’être résolument impopulaire : « Sa politique, pour réussir, ne devra pas seulement déplaire aux riches, mais aussi aux classes moyennes et aux fonctionnaires, aux retraités et aux futurs retraités, aux syndicats et à M. Mélenchon. Et à ses chers camarades du Parti socialiste. Surtout à ses chers camarades du Parti socialiste. Devenez vite très impopulaire, M. Hollande, ce sera le signe que vous allez dans la bonne direction.  »

    Ne pas refaire l’erreur de 1981, c’est-à-dire ne pas être trop à gauche, semble être le refrain entonné par le chœur des éditocrates. Dans l’éditorial du Monde, au lendemain de la victoire de Hollande, Erik Izraelewicz réécrit l’Histoire à sa manière : « Il lui faut néanmoins tirer les leçons des années 1980 et s’émanciper là de François Mitterrand. En engageant, en 1981, une politique de relance massive par la dépense publique, le premier président socialiste de la Ve République avait précipité la France dans une grave crise financière et conduit à la douloureuse rigueur de 1983. Pour négocier avec le reste de l’Europe, la France doit faire rapidement preuve de sa volonté et de sa capacité à réduire sa dette et ses déficits. » (7 mai 2012)

    Faire vite et montrer patte blanche immédiatement, François Hollande doit rassurer ses « partenaires » européens : il devra être rigoureux ! D’ailleurs, Laurent Joffrin dans Le Nouvel Observateur, l’y incite explicitement : « il faudra bien rendre l’Etat plus efficace et moins coûteux, sauf à succomber sous le poids de la dette ; il faudra bien encourager l’entreprise, qui crée les emplois ; il faudra bien fluidifier le marché du travail, qui protège les protégés et humilie les exclus de l’emploi. Dans l’urgence, les tabous de la gauche doivent céder autant que les préjugés de la droite. » (6 mai 2012) Admirons la constance de Laurent Joffrin : cela fait plusieurs décennies qu’il réforme la gauche et rompt avec ses « tabous » !

    Enfin, pour Eric Le Boucher, chroniqueur sur Slate.fr (7 mai 2012), « le devoir de François Hollande est de changer de modèle économique et social de la France. Si elle souffre dans la mondialisation, c’est non pas pour avoir fait trop de concessions au libéralisme, à l’Europe et à cette mondialisation, mais pour n’avoir pas su préserver son modèle en l’adaptant au monde neuf, ouvert, technologique et individualiste. » Pour étoffer cette ode au libéralisme et à l’individualisme, Eric Le Boucher dresse une liste de dix défis que devra relever le nouveau Président. Parmi lesquels, on relèvera ceux-ci : « il faut réviser la protection sociale pour que son financement ne pèse plus sur le travail » ; « opter pour une économie de l’offre qui augmente les profits » ; « être décidé et précis sur les réductions de dépenses » ; « Cette rigueur s’imposera aux dépenses de santé comme aux collectivités territoriales ». Mais rassurons-nous, Eric Le Boucher a reconnu que « le bilan de Nicolas Sarkozy est loin d’être négatif. Il devra être en partie réhabilité. Il a engagé beaucoup de réformes, il est allé parfois dans la bonne direction, il aura été un bon capitaine dans la crise. »

    Rigueur, rigueur, et rigueur sont donc les seuls mots clés des programmes des « conseillers » auto-proclamés du Président. Une grande partie de la presse et des commentateurs politiques l’a donc affirmé : la victoire de Hollande n’est pas une mauvaise nouvelle… surtout s’il ne gouverne pas « à gauche » et s’efforce de devenir impopulaire. Encore plus impopulaire que les éditocrates eux-mêmes ? Admirons une dernière fois ce miracle : plus elles sont individuelles, plus les opinions éditocratiques sont convergentes. Sans doute nos joyeux chiens de garde croient-ils qu’ils détiennent le monopole de la raison et qu’ils devraient exercer le pouvoir par procuration...

    Mathias Reymond et Olivier Poche


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  • Discours de Sonia Mitralia prononcé à la grande manifestation anticapitaliste de Frankfort, le 19 mai 2012

     

    Créons une, deux, trois, plusieurs Grèces !...

    Camarades,

    Je viens de Grèce, un pays détruit et désespéré, un pays en ruine mais qui reste debout. De cette Grèce qui résiste et qui vient de dire un énorme Non magnifique à ses bourreaux : la Troïka (le FMI, la Commission de Bruxelles, la BCE) et vos Merkel et Schauble, les Barroso, les Sarkozy et les banquiers. En somme, à ceux qui nous gouvernent et nous imposent des politiques inhumaines et barbares. Ces politiques qui provoquent déjà la malnutrition des enfants et même la faim dans les grandes villes grecques. Et tout ça où ? Non pas quelque part au Tiers Monde, mais ici, au cœur de la riche Europe. Et quand ? Au moment de l’histoire où l’humanité n’a jamais produit autant des richesses que maintenant !...

    Camarades,

    Les résultats des élections du 6 mai ne laissent pas le moindre doute : une énorme majorité de citoyens grecs a rejeté les politiques d’austérité. C’est un véritable séisme politique ! Le pays qui a été choisi pour être le laboratoire des politiques d’austérité, est maintenant en révolte ouverte contre ceux qui l’affament et l’humilient, ceux qui ferment ses hôpitaux et ses écoles, ceux qui détruisent et vendent ce beau pays pour rien, contre ses bourreaux grecs et étrangers.

    Mais attention : les Grecs en révolte ne doivent pas être laissés seuls au moment où ils sont en train de transformer leur colère en mouvement conscient et libérateur, maintenant que la perspective d’un gouvernement grec de gauche commence à poindre à l’horizon, à devenir possible et réaliste. Si les Merkel et Sarkozy, le FMI et la Commission de Bruxelles ont fait des Grecs des cobayes et de la Grèce un laboratoire de leurs politiques barbares, c’est à nous, peuples d’Europe, de faire de même en faisant de la Grèce l’avant poste de nos combats communs contre ceux qui détruisent nos vies et la nature. Car la résistance des Grecs est notre résistance, leurs luttes sont nos luttes…

    Camarades,

    Je viens d’un pays qui tourne aujourd’hui son regard vers vous, en attendant des actes concrets de solidarité. Maintenant et pas demain. Car c’est maintenant plus que jamais, que les Grecs en révolte sont menacés directement d’extinction par tous ceux qui craignent que leur exemple fasse des émules, et se répande comme tache d’huile partout en Europe. Et je vous assure, ces Grecs en révolte sont persuadés que la meilleure solidarité envers eux c’est que vous les imitiez. Que vous imitiez leur exemple chez vous, dans vos pays. En développant et en coordonnant les résistances contre les politiques inhumaines d’austérité et de destruction. D’ailleurs, c’est exactement cela que craignent le plus nos ennemis communs : LA CONTAGION ! La contagion des luttes partout en Europe.


    Alors, oui, faisons-le, CRÉONS UNE, DEUX, TROIS, PLUSIEURS GRÈCES ! Mettons-nous en réseaux, coordonnons nos luttes, organisons méthodiquement un mouvement unitaire et radical, de masse et démocratique, sur tout notre vieux continent, partout en Europe, de Roumanie en Irlande et d’Italie en Islande. Un mouvement de longue haleine et de grandes ambitions émancipatrices, qui combine l’unité la plus large avec la radicalité libératrice. Maintenant c’est le moment. Car…United we stand - Divided we fall !! Ou en français de lutte : Tous ensemble-tous ensemble, oué oué

    Merci camarades.

    http://www.cadtm.org/Creons-une-deux-trois-plusieurs


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  • Les économistes sont des drôles de bêtes. Lorsque la crise a commencé en 2008, le croquemitaine qui faisait peur à tout le monde était la déflation. Les chroniqueurs veillaient sur l'indicateur des prix, et nous décrivaient les multiples malheurs qui nous menaçaient si par malchance celui-ci venait à tomber sur la pente savonneuse. Les hommes politiques, des deux côtés de l'Atlantique, défendaient à qui mieux mieux des politiques de relance, massives aux Etats-Unis, plus faibles ailleurs, pour nous empêcher de tomber dans le trou. Quatre ans plus tard, les mêmes politiques appliquent en Grèce et ailleurs des politiques qui recherchent explicitement la déflation. C'est à plus rien comprendre.

     

    C'est pourquoi il me semble intéressant de revenir sur la question de l'inflation et la déflation. Deux phénomènes qui déroute les économistes néo-libéraux, précisément parce qu'ils échappent à l'idée d'un agent économique pleinement rationnel. Commençons par poser un problème: nous savons que, dans une économie de marché, les prix sont déterminés par les lois de l'offre et la demande. Si la demande s'accroît ou l'offre diminue, alors les prix augmenteront, et diminueront dans le cas contraire. Et pourtant, cela semble contredire notre expérience quotidienne. Alors que nous sommes depuis quatre ans en crise, que les gens n'ont pas de sous, que notre appareil productif travaille en sous capacité, que nous importons de plus en plus de pays à faibles coûts... et pourtant les prix - et les salaires - continuent à augmenter. Comment expliquer cette contradiction ?

     

    La réponse est que, contrairement à ce que croient les libéraux pur jus, les prix ne sont pas déterminés uniquement par les marchés. Ils sont aussi déterminés par des comportements des agents économiques qui tiennent à l'histoire, à l'expérience, à la psychologie, aux décisions politiques. Et qui sont totalement indépendants de l'équilibre du marché. Prenons un exemple si vous le voulez bien. Imaginons un pays ou un dictateur bienveillant a décrété que les travailleurs auraient chaque premier du mois une augmentation de 10%. Bien entendu, les entreprises répercutent le coût de ces augmentations dans les prix, qui augmentent eux aussi tous les premiers du mois de 10%. Dans ce pays merveilleux, le pouvoir d'achat reste stable (puisque salaires et prix augmentent à la même vitesse), mais le niveau des prix, comptabilisé par l'organisme statistique, montrera une augmentation de l'indice de prix - "inflation"(1) - supérieure à 120% par mois. Pourtant, l'offre et la demande continuent à être la même. L'équilibre du marché n'est pas modifié, et pourtant les prix augmentent...

     

    Un autre exemple d'inflation sont les "bulles" immobilières. Là, la cause de l'inflation est une mauvaise anticipation: les acteurs économiques, en se fondant sur une expérience passée, constatent que le prix de l'immobilier monte. Ils sont tentés d'acheter le plus vite possible - pour devancer l'augmentation - et cet excès de demande fait encore monter les prix, ce qui confirme et renforce l'anticipation à la hausse des prix de l'immobilier. Cette demande supplémentaire provoque aussi un "boom" de la construction, et aussi une augmentation de la dépense des ménages persuadés de posséder un bien qui vaut beaucoup d'argent et donc dispensés d'épargner - c'est ce qu'on appelle "l'effet de richesse" - donc une augmentation générale de la demande, des salaires et des prix. C'est ce qui s'est passé en Espagne. Dans cet exemple, l'équilibre du marché se trouve bien déplacé, mais non par des circonstances "objectives". C'est la "croyance", l'anticipation d'une hausse de prix qui in fine provoque la hausse en question. C'est ce qu'on appelle une anticipation auto-réalisatrice.

     

    La déflation, c'est le phénomène inverse. Pour reprendre l'exemple précédent, imaginons que dans un pays les acteurs économiques prévoient une baisse des prix de l'immobilier. Ils auront alors tendance à vendre le plus vite possible pour dévancer la baisse. A l'opposé, les éventuels acheteurs seront tentés de différer leur achat pour profiter de la baisse. Cela se traduit par une augmentation de l'offre et une réduction de la demande... donc par la baisse des prix, ce qui justifie les uns et les autres dans leurs prévisions et tend à pousser la baisse encore plus.

     

    Inflation et déflation semblent symétriques. Pourtant, elles ne le sont pas. Il existe beaucoup d'instruments qui permettent de contrôler une spirale inflationniste, il est beaucoup plus difficile de sortir d'une spirale déflationniste. La raison est que l'inflation est une expansion des prix et des salaires: il suffit donc de bloquer l'un et l'autre à la hausse pour arrêter la spirale. L'Etat a toujours par exemple la possibilité d'augmenter les taux d'intérêt et donc de "refroidir" l'économie. Par contre, l'Etat ne peut pas toujours réduire les taux d'intérêt, tout simplement parce que les taux d'intérêt ne peuvent être négatifs: une fois qu'on arrive au plancher, c'est fini. C'est ce qui est arrivé au Japon après l'implosion de la bulle immobilière. La Banque du Japon a essayé de relancer l'économie en réduisant les taux d'intérêt à zéro, sans effet. Il s'est suivi une stagnation qui dure depuis.

     

    Pourquoi je vous parle de tout cela ? Parce que cela vous permet de comprendre que même dans une union monétaire comme l'Union européenne, avec des frontières ouvertes et un "marché unique", il est parfaitement possible d'avoir des taux d'inflation différents selon les pays, en fonction des anticipations, des politiques sociales et  des mécanismes qui répercutent les prix sur les salaires et vice-versa. L'idée que le marché unique et la libre circulation allaient "uniformiser" le niveau des prix et des salaires a fait long feu: en pratique, parce que les histoires ne sont pas les mêmes, les niveaux d'inflation peuvent être différentes. Dans les pays "latins", les gens sont plus sensibles au salaire facial qu'au salaire réel. La paix sociale exige donc qu'on augmente chaque année les salaires d'un taux supérieur, quitte à augmenter aussi les prix. Dans les pays "nordiques", les gens sont plus sensibles au salaire réel, et on peut alors se permettre des augmentations de salaire qui correspondent aux augmentations du pouvoir d'achat. Du point de vue économique local, ces comportements sont neutres (2). Mais que se passe-t-il lorsque ces pays sont placés au sein d'une union économique ? Les pays qui ont les plus fortes inflations verront les prix et les salaires augmenter: leurs produits seront donc de moins en moins compétitifs et leurs déficits commerciaux se creuser. Ceux qui auront les plus faibles inflations verront au contraire leurs produits devenir plus compétitifs et feront des excédents. Avant l'union monétaire, on compensait cet effet en dévaluant la monnaie. Cela revient à baisser simultanément les prix et les salaires exprimés dans la monnaie des autres pays. Mais avec l'union monétaire, c'est aujourd'hui impossible. La seule manière de récupérer la compétitivité perdue... c'est de baisser effectivement les prix et les salaires par rapport aux autres. Et étant donné le faible taux d'inflation des "meilleurs élèves" de l'Union, cela implique de rentrer dans une spirale déflationniste. A moins de réussir à convaincre l'Allemagne, la Finlande et les Pays-Bas de faire un coup d'inflation.

     

    Dans une union monétaire sans transferts permanents, tout écart sur les taux d'inflation se traduit immédiatement par un écart de compétitivité et donc par un creusement des déficits. N'ayant plus le "stabilisateur automatique" qu'est la valeur de la monnaie, l'équilibre du système repose sur une procédure disciplinaire permanente pour s'assurer que tout le monde en Europe fait la même politique économique. Si l'on observe la situation grecque, on voit mal comment une telle contrainte pourrait être politiquement acceptable.

     Descartes 

    (1) Si j'ai mis le mot "inflation" entre guillemets, c'est parce qu'il y a une certaine confusion quand à ce qu'on appelle inflation. On a tendance à parler d'inflation dès que les prix augmentent, ce qui tend à faire penser que toute augmentation des prix a les mêmes causes et peut donc être traité avec les mêmes remèdes. Or, ce n'est pas le cas: l'augmentation générale des prix liée aux chocs pétroliers de 1974 et 1977, par exemple, n'appellent certainement pas les mêmes remèdes que la "stagflation" des années 1980. Sans entrer dans la grande querelle des définitions, disons qu'on appelle inflation une augmentation générale, continue et auto-entretenue - c'est à dire, non provoquée par un choc externe - des prix.

    (2) Enfin, pas tout à fait. Le fait d'augmenter prix et salaires du même taux est neutre pour les travailleurs, mais pas pour les rentiers, puisque la valeur relative de l'épargne tend à diminuer à chaque augmentation. L'inflation, comme disait Keynes, provoque "l'euthanasie des rentiers", et par ce biais provoque une redistribution des générations passées vers les générations futures. C'est pourquoi plus un pays vieillit, plus il a peur de l'inflation.


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  • Quel avenir pour l'OTAN ? Dimanche 20 et lundi 21 mai se déroulera à Chicago le vingt-cinquième sommet de l’OTAN, le plus fréquenté depuis sa création en 1949. Outre les vingt-huit pays membres ont été invités différents États qui n’adhèrent pas à Alliance atlantique tels que la Russie, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon, la Corée du sud ou le Pakistan. La participation de ce dernier aura, notons-le, aura été incertaine jusqu’au dernier moment à cause des tensions survenues ces derniers temps avec Washington. Au total, ce seront donc pas moins de 6.000 délégués qui convergeront vers la cité étasunienne, bastion de Barack Obama, en vue de représenter une soixantaine de pays et des organisations internationales comme les Nations-unies et l’Union européenne. En dehors des lieux en revanche sont attendus au moins 50.00 manifestants…

     

    Le thème le plus épineux qui y sera abordé est l’Afghanistan, qui est aussi la raison principale d’un sommet aussi élargi. Et plus particulièrement le retrait des troupes de l’OTAN et le financement des forces de sécurité à Kaboul, après 2014. Vu sous cet angle, le sommet est une sorte de vaste campagne de recueil de fonds. Selon les plans de l’OTAN, les forces de sécurité de Kaboul devraient s’ajouter à la fin de l’année aux 352.000 hommes de l’armée nationale afghane (il s’agit en réalité d’une estimation très optimiste compte tenu du nombre record de désertions, d’une corruption endémique et des infiltrations talibanes). Ce chiffre devrait commencer à diminuer dès 2015 pour finalement atteindre les 230.000 en 2017. Les États-Unis indiquent que le coût du maintien d’un nombre aussi important de militaires et de policiers avoisinerait 4,1 milliards de dollars par an. Une économie non négligeable pour l’Oncle Sam qui dépense déjà plus d’une centaine de milliards pour maintenir 90.000 hommes dans le pays. Une somme inenvisageable pour le gouvernement de Kaboul qui a un budget annuel à peine supérieur à 1,5 milliards et qui ne pourrait participer qu’à hauteur de 500 millions. Et encore…

     

    Plus de la moitié de la somme totale (environ 2,5 milliards) serait à mettre au compte des États-Unis. C’est du moins ce qu’avait promis l’administration Obama qui n’a pourtant encore rien écrit noir sur blanc, hormis un vague accord de partenariat au grand dam d’ailleurs de Kaboul. Pour la somme restante (2,6 milliards), la Maison blanche espère fortement des pays engagés au sein de l’ISAF qu’ils participent, y compris dans le cas d’une éventuelle déstabilisation du pays après le retrait des forces de l’OTAN.

     

    « Les États-Unis s’attendent à ce que les pays composant l’ISAF payent une contribution d’environ un milliard de dollars par an », expliquait dernièrement le ministre polonais des affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, contrarié par le fait que la Pologne doive verser 20 millions de dollars par an pendant que l’Inde, la Chine ou la Russie participent seulement à hauteur de 10 millions. « Nous devrions payer la même somme que la Chine et la Russie ensemble », a-t-il commenté. 

     

    Même l’Italie est appelée à apporter sa pierre à l’édifice, malgré les menaces économiques qui pèsent sur elle. James Townsend, vice-secrétaire à la défense des États-Unis et responsable des relations avec l’Europe, n’y va pas par quatre chemins dans l’entretien qu’il a tenu au journal la Stampa : « j’espère que l’Italie sera malgré les difficultés financières capable de renouveler l’engagement qu’elle a pris jusqu’à aujourd’hui ».

    Dans ce même entretien, le représentant étatsunien a parlé de la collaboration toujours plus étroite de l’Alliance atlantique avec quelques pays d’Asie, comme le Japon ou la Corée du sud. « Á Chicago, on parlera d’une OTAN globalisée parce que nous avons des intérêts globaux à protéger », a-t-il déclaré. Agrandir sa propre sphère d’influence est devenu depuis longtemps une des priorités de l’OTAN. En réalité, vingt ans après la chute de l’Union soviétique, les membres de l’Alliance, les États-Unis au premier chef, doivent s’interroger sur l’engagement et sur l’utilité d’une structure apparemment anachronique. Même si le projet de bouclier anti-missiles dans l’Europe de l’est montre que le cauchemar russe est encore bien présent. Á la fin de la Guerre froide et à la disparition de l’ennemi qui avait justifié la naissance de l’OTAN s’ajoutent les difficiles contractions économiques. Les États-Unis ont ainsi fait savoir qu’ils n’étaient plus disposés, après les dernières coupes dans le budget de leur défense, à couvrir 75 % des dépenses de l’Alliance. Ce qui explique pourquoi ils ont demandé à leurs alliés européens de s’investir davantage. Un possible effondrement de l’OTAN n’est pas inenvisageable à terme.

     

    Capitaine Martin


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  •   Oui, si l'on en croit toutes les télés françaises et les médias de la même origine, ce G8 fut une sacrée réussite pour le président de notre république. François hollande s'est comporté comme l'un des chefs d'états des 8 plus grandes puissances internationales, celles qui font la pluie et le beau temps sur la terre, mais surtout du mauvais temps sur les peuples. Mais pourquoi aurait-il failli dans ce cénacle capitaliste qui régente le monde à sa sauce, celle des marchés et des inégalités sociales?

      Il faut que la Grèce reste dans l'euro et accepte l'austérité et la ruine, a dit d'une voix unanime le G8: bonjour l'indépendance des Grecs à se gouverner par eux-mêmes. Il faut réduire les budgets publics et faire une politique de croissance, sans augmenter aucunement le pouvoir d'achat, a renchéri aussi le G8. En 2003, le socialiste François Hollande disait que le G8 était inutile. Aujourd'hui, président de la République française et toujours socialiste, le même n'a pipé mot sur ce regroupement qui n'a aucune légitimité, sauf celle du fric et des armes...

     

      "Et, les gars, euh pardon madame Merkel, attendez-moi pour la photo", semble dire notre président de la République. Mais ce G8, c'est vraiment un sacré succès pour l'image de la Gaule et pour toute la planète, foi de journalistes gaulois.

    François Hollande rejoint Barack Obama, Angela Merkel et David Cameron sur une scène à Camp David, aux Etats-Unis, où s'est déroulé le G8 le 19 mai 2012.

      Note de ma pomme: Sur la photo, Le président des States et du billet vert, la chancelière d'Allemagne, souveraine de la zone euro et de l'Ue, le premier ministre britannique dont le pays n'est pas dans la zone euro, mais qui, avec sa City, plus grande place financière européenne, est le fer de lance du dollar et de l'argent sale sur le vieux continent. A part ça, tout va bien...

    http://le-blog-de-roger-colombier.over-blog.com


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  • image.jpgAlors que la presse française a les yeux rivés sur la lune de miel Hollande-Merkel, sans pourtant en profiter pour mettre en lumière les contradictions flagrantes du nouveau Président de la République quant à sa promesse de renégociation du Pacte budgétaire, un vote crucial eu lieu lundi dernier à Bruxelles, dans l'indifférence général.

    En toute discrétion, les eurodéputés de droite et du centre ont adopté la règle d'or budgétaire tandis que les eurodéputés socialistes se sont eux, au mieux, abstenus.


    Ces derniers auraient pourtant préféré reporter ce vote qui nous en dit long sur le consensus gauche-droite existant quant à la nécessaire discipline budgétaire.

    Qui, après un tel vote, peut encore croire à une renégociation du Pacte budgétaire par François Hollande?

    Explications.

    La Commission économique et monétaire du Parlement européen, rassemblant 95 eurodéputés, s'est réunie le 14 mai 2012 pour voter deux projets de règlements européens visant à renforcer la discipline budgétaire: Lire la suite sur http://contrelacour.over-blog.fr


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  • L’ex-locataire de l’Elysée rejoint le club des VIP français qui se mettent au vert à Marrakech dans leurs demeures de rêve. Nicolas Sarkozy, accompagné de sa femme Carla et de leur petite Giulia, devrait y séjourner quelques mois dans une villa.

    Nicolas Sarkozy à la table de Mohamed VI, dans le palais royal, le 23 octobre 2007

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    Mise à jour du 17 mai: Nicolas Sarkozy accompagné de son épouse Carla Bruni est arrivé mercredi 16 mai au soir à Marrakech pour une visite privée. Il devrait y séjourner jusqu'au 31 mai. Dans un entretien jeudi à l'hebdomadaire Valeurs Actuelles  l'ancien ministre du Travail Xavier Bertrand déclare que Nicolas Sarkozy a "besoin de se reposer et de profiter des siens" et "fera part de ses projets" professionnels "après la rentrée".

    *****

    La passation de pouvoir achevée entre Nicolas Sarkozy et François Hollande, les Sarkozy vont d'abord partir en famille se reposer. «Carla et son époux vont souffler un peu, réfléchir à leur avenir mais aussi redécouvrir un autre rythme, sur un autre mode», souligne une source proche de l'ex-première dame de France. Carla Bruni-Sarkozy devrait également profiter de ce repos pour finaliser son prochain album, dont la sortie est annoncée pour l'automne prochain.

    «Je vais m’occuper de ma fille», aurait confié l’ex-président à ses intimes. Selon un ami, il va prendre «trois mois de vacances» et préparer sa nouvelle vie professionnelle. Aucun détail officiel n'a filtré quant à la destination - la maison familiale des Bruni au Cap Nègre sur la Côte d'Azur ou l'étranger? Mais déjà des rumeurs persistantes circulent: l’ex-couple présidentiel et leur petite Giulia devraient se mettre au vert dans leur villa de maître de Marrakech acquise fin 2011.

    Un «cadeau» tenu secret

    A l’époque, la presse marocaine avait fait état d’une information, sans en livrer la source, qui laissait entendre que Nicolas Sarkozy avait reçu cette maison en cadeau. «Un superbe palais faisant partie du projet immobilier de luxe Amelkis à Marrakech, aurait été offert à un célèbre chef d’Etat européen», rapportait l’hebdomadaire Al Ousboue cité par Biladi

    Lire la suite de l'article sur http://www.slateafrique.com/87299/retraite-doree-pour-sarkozy-marrakech-dsk


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  • Selon un tableau de l'OCDE (année de référence: 2010), qui compile les données de ses pays membres sur le "Nombre moyen d'heures annuelles ouvrées par personne ayant un emploi", on découvre que le pays le plus industrialisé d'Europe, le poumon économique de l'Union, bref l'Allemagne, a fait bossé ses employé(e)s en moyenne 1'409 heures. Soit 32 heures de plus que leurs voisins Hollandais qui, avec 1'377 heures de boulot en 2010, seraient les plus fainéants d'Europe. La Norvège rejoint le tiercé perdant en affichant 1'414 heures de boulot.

    Les Danois ont sués 1'542 heures

    ;Les Français : 1'562 heures

    ;Les Autrichiens: 1'587 heures.

    Ensuite j'ai choisi un petit quatuor de pays ayant fait travaillé leurs employés entre 1'600 et 1'700 heures

    :Luxembourg (1'616); Royaume-Uni (1'647); Espagne (1'663) et l'Irlande (1'664);

    Les Portugais auront eu plus de temps pour la "Sagres-Super Bock", que les Italiens pour le "Chianti" (1'714 h contre 1'778 heures), tandis que le plombier Polonais sera resté 1'919 heures avec sa tuyauterie.

    Quant aux Suisses, les chiffres concernant 2010 se trouvent sur le site du BFS:http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/03/02/blank/key/arbeitszeit0/normale_arbeitszeit.htmlqui nous indique que les Helvètes ont travaillé, en moyenne, 1'944 heures pendant l'année 2010.

    Pour en finir avec ces chiffres de l'OCDE, je vous présente le trio vainqueur des plus gros bosseurs:

    Troisième: Il nous vient d'Amérique du Sud. Ses communautés autogérées ont hérissé bien des poils, et lui auront valu un coup d'état orchestré par la CIA, suivi d'une dictature militaire.Aujourd'hui, Pinochet n'est plus qu'un triste souvenir, et il semblerait que son gouvernement fasse toujours la nique au capitalisme. J'ai nommé, avec 2'068 heures annuelles travaillées, le Chili.

    A la deuxième place, Il nous vient du Sud-Est de l'Europe, et après avoir fait le bonheur des philosophes de toutes les nations, des historiens et des antiquaires, Il s'apprête à faire subir la calvitie précoce à tous les banquiers et financiers européens. Les Grecs sont-ils des Penseurs et des doux rêveurs? En 2010, Ils auront trimé 2'109 heures.

    Premier au tableau de l'OCDE, la Corée avec 2'352 heures de travail. Sud ou Nord n'étant pas précisé, difficile de dire "travaux forcés".2'352 heures, cela laisse une marge de manœuvre confortable au "Seco" et à "EconomieSuisse" pour trouver le moyen de combler notre retard sur les  Coréens.


    Une étude de l'Office Fédéral de la Statistique, rendue publique récemment, nous apprend que la Suisse serait "Vice-championne d'Europe du travail" pour reprendre les termes du "20 minutes".82,8% est le chiffre correspondant au "taux d'activité chez les 15-64 ans" en Suisse, un taux supérieur de 11,6 point à celui de l'UE (71,2%).

    Il n'y a pas très longtemps, la même Union Européenne annonçait que le taux de chômage dans la zone "Euro" avoisinait les 11%, tandis que 25% de sa population était menacée par la précarité…Chez nous, nos élus bombent le torse devant nos 3% de chômeurs alors que 17,2% des 15-64 ans seraient sans travail…


    Bref, l'interprétation de toute une série d'indicateurs économiques fait de la Suisse le petit paradis du patron. Et, en guise de remerciement, et de gratitude envers toutes, et tous, les employé-e-s de notre pays, une certaine Droite propose d'élever l'âge de la retraite à 70 ans.Mais pourquoi tant d'acharnement, et de poids sur les épaules, des employés-ouvriers Suisses?Ne travaillons-nous pas déjà suffisamment?


    Une connaissance me disait dernièrement qu'une étude de l'OCDE (encore) avait porté sur le rendement des ouvriers européens et, après de savants calculs, qu'il en était ressorti que l'employé Suisse avait un rendement horaire inférieur à celui d'un Allemand, et qu'un ouvrier Français rapportait plus à son patron en 39 heures hebdomadaire qu'un Suisse en 43 heures…(Je n'ai pas trouvé la référence, donc une certaine prudence est de mise.)


    Autre rumeur officieuse: Entre les murs des bâtiments "Paul-Henri Spaak" et "Résidence Palace", tous deux à Bruxelles, résonnerait l'écho d'un murmure qui trahit le fantasme des dirigeants européens de voir le terme: "Retraite" supprimé du vocabulaire socio-économique de l'UE.Un souhait qui prendrait presque le chemin de la concrétisation dans nos vertes contrées.


    Petite anticipation de série "Z":

    Au rythme où ça va, le p'tit Dylan (4 ans) sera encore actif dans 76 ans, professionnellement parlant.Une aide à domicile viendra tous les matins pour l'aider à se préparer plus rapidement.Atteinte de Parkinson, l'infirmière sera malheureusement plus efficace dans le toilettage que dans l'habillage, ce dont Dylan ne pourra profiter au vu de l'état avancé de sa metallopause (cheveux en argent, dents en Or et testicules en plomb).

    Pour se rendre sur son lieu de travail, il devra utiliser un module individuel de transport, un fauteuil propulsé par énergie électromagnétique, dont les frais de locations seront directement prélevés sur son salaire pour être versés dans les caisses du gouvernement Impérial du Royaume de Brabeck.Avant de pouvoir quitter son logement, l'aide-infirmière devra s'assurer que la main gauche de son "patient" est bien insérée dans une sorte de boîtier-réceptacle fixé à l'extrémité de l'accoudoir, ceci afin que le Centre de Surveillance des Mouvements Citoyen (CSMC) puisse accéder et traiter les informations et données personnelles et professionnelles contenues dans la micro-puce HD-RFID-7.1 que le citoyen "DJ.TaK 1800-41.0128.0823.01.967" a dû "s'implanter", il y a une cinquantaine d'années, contre une prime bonus mensuelle de 22,85 Eurofrancs CB.Un modeste montant qui lui permet tout juste d'acheter 1 litre d'eau pure importée de Saturne par la multisidérale G.N.W (God NesBrabeck Water).

    Durant la période de 12 heures pendant laquelle Dylan sera sur son lieu de travail, un système de survie intégré au fauteuil, et géré par le consortium "KingVasela-MerckFuhrer Healthcare", dont G.N.N (God NesBrabeck Nutrition) est le principal actionnaire, régulera les "constantes" physiologique et endocriniennes du patient, contrôlera la présence de particules atmosphériques toxiques et d'isotopes radioactifs dans l'organisme, tout en s'assurant que le rendement de l'ouvrier "DJ.Tak 1800 (…) soit optimal.

    Le cas échéant, KV-MF Healthcare peut interagir directement dans le corps de l'employé, par l'intermédiaire des milliers de nano-puces, implantées dans le corps de Norrin, en leur ordonnant de stimuler le système immunitaire du porteur ou de synthétiser telle ou telle substance antitoxique, vitaminée ou dopante.En arrivant sur son poste de travail, et pour de ne pas "froisser" les clients, le "Modificateur physiologique" s'enclenchera automatiquement et projettera une image holographique de Dylan enregistrée il y a une cinquantaine d'années de cela. Tandis qu'une interface neuronale assurera les compétences et l'excellence de "l'employé".Dernièrement, un centre de ravitaillement ambulatoire (un Tea-room, quoi) a frôlé la faillite par la faute des serveuses atteintes de la maladie d'Alzheimer.Il y a bien eu une tentative de rébellion en 2057 lors de la mise en service des premiers Centres de Contrôles Citoyens dans les Départements de Freysinger et de Poggia.

    L'armée avait même dû intervenir.Mais le projet "C cube" fut maintenu malgré la colère populaire, et rebaptisé "CSMC" quelques années plus tard.De nos jours, en 2088, les manifestants qui s'opposent C.S.M.C., jugeant leurs méthodes liberticides, sont "neutralisés" avec une effrayante rapidité depuis que le G.N.E.E.D (God Nesbrabeck Electric & Energetic Department) chapeaute le système.N'importe qui pouvant, dès lors, être "débranché" à n'importe quel moment.


    Aujourd'hui, Dylan aura droit à sa pause hebdomadaire de 15 minutes qu'il prendra devant "la seule machine qui sait faire le café comme il l'aime". Sauf que son "Assistant Médical Automatisé" lui a formellement interdit d'en consommer.Pendant que son "Mug" se remplit d'une infusion saveur "Menthe-Verveine", Dylan observe, avec une certaine tristesse une petite plaque "commémorative" apposée sur le mur, à la droite du distributeur de boissons chaudes, sur laquelle quelques mots ont été gravés au laser."Ici est tombé, Alexandre. Sacrifié pour la gloire et la Prospérité de son Impérator."

    Mort en attendant son café.

    Sous la petite plaque, un formidable élan de solidarité a permis aux employés de fixer une petite étagère sur laquelle repose, scellé dans un récipient en verre, le dernier Mug d'Alexandre. Celui qu'il n'a pu consommer. C'était en Septembre 2072, et il fut le premier à décéder sur son lieu de travail. Beaucoup d'autres l'imitèrent.

    Depuis cette date, la présence d'un aumônier est obligatoire dans toutes les grandes entreprises, ceci afin de parer au plus pressé et d'offrir les derniers sacrements aux employés-ouvriers qui ont la mauvaise idée de mourir sur leur lieu de travail. Un véhicule correspondant aux normes en vigueur pour le transport des cadavres est aussi à disposition, contre rémunération bien sur.


    Un léger "Bing" retentit, annonçant que la boisson est prête à la consommation. Dylan saisit le gobelet chauffé à point et s'en retourne vers poste de travail en se demandant, comme il le fait jour après jour:"Etait-ce cela la promesse de la Vie?"


    NEMo


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  • Les pays du G8 représentent 13% de la population mondiale mais prennent des décisions qui impliquent l’ensemble de la planète. En s’y rendant, ces 18 et 19 mai, François Hollande légitime la séquestration de la démocratie mondiale. Alors que le changement aurait été d’en sortir... maintenant !

    Établir la liste des pays membres du G8 suffit pour démontrer du caractère suranné et anachronique du G8. États-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Canada, Russie. Le G8 fleure bon la domination politique, géopolitique et économique de la fin du siècle passé. Ceux qui furent « les plus puissants de la planète ». Ceux qui furent. En 2012, mettre sur la touche la Chine, l’Inde, le Brésil, la Corée du Sud, l’Afrique du Sud, etc. tourne au ridicule.

    Il sera répondu « mais pourquoi diable les pays qui le souhaitent ne pourraient-ils pas se rencontrer » ? Exact, si l’on ne perçoit pas le symbole – chacun sait ô combien les symboles sont importants – de l’époque et de la réalité géopolitique qu’incarne cette vieillerie qu’est le G8. Exact si ces mêmes pays limitaient leur agenda de discussions à ce qui les concernent exclusivement. Or quel est le problème ? A partir du moment où un groupe de pays qui se réunit prend des décisions ou des orientations politiques qui concernent d’autres pays, et les populations qui vont avec, ces derniers devraient avoir leur mot à dire. Ce n’est pas le cas avec le G8 qui s’entretient de tout ce qui lui passe sous la main. Représentant à peine 13 % de la population mondiale, quelle est donc la légitimité des chefs d’État du G8 pour prendre des décisions qui concernent l’ensemble des pays et des populations mondiales ?

    Voilà un profond déni de démocratie mondiale. Plus. C’est une confiscation des décisions fondamentales pour l’avenir de l’humanité, une séquestration de la démocratie.

    Paroles, paroles...

    Et les résultats du G8 ne sont même pas là pour le sauver. Au G8 2011 mitonné par Nicolas Sarkozy à Deauville, comme un mauvais remake, promesse a été faite de débloquer 40 milliards pour les pays du « Printemps arabe », une promesse doublée à 80 milliards en septembre 2011. Aux dernières nouvelles, rien ou pas grand chose n’avait été versé. Il en fut de même avec les promesses des G8 d’Evian en 2003 et de Gleneagles en 2005. Les pays du G8 n’ont jamais débloqué les montants nécessaires au développement économique des pays africains ou à la suppression de la pauvreté auxquels ils s’étaient engagés.

    Ils n’ont pas été plus capables de s’entendre sur la suppression intégrale de la dette des pays pauvres pourtant exigée de toute part. Loin de stabiliser les grands déséquilibres économiques mondiaux, les pays du G8 ont contribué à les accroître par leurs politiques de libéralisation de l’ensemble des marchés mondiaux et d’extension des pouvoirs de la finance. Les pays du G8 possèdent 90 % des armes nucléaires et dépensent les trois quarts des budgets militaires. Sans avoir su assurer « la paix et la sécurité » qui revient pourtant comme un leitmotiv à chaque déclaration du G8.

    Vestige du passé

    Illégitime et sans résultat probant, le G8 mériterait d’être laissé aux historiens plutôt que le maintenir sous perfusion. Et ce d’autant plus que les crises financière et économique, la nouvelle donne géopolitique mondiale, le changement climatique et la raréfaction des ressources naturelles, ou les migrations internationales, sont autant de défis cruciaux qui concernent l’avenir de toutes les populations de la planète. En ce début du 21ème siècle, ces défis seront résolus pour tous ou ils ne le seront pour personne. Il y a des choix à faire. Se recroqueviller sur un G8 incarnant les dominations du siècle passé et la confiscation des décisions globales. Ou contribuer à l’émergence d’une véritable démocratie globale.

    Bunkérisé et déplacé à Camp David pour échapper aux manifestations et apparitions des Occupy à Chicago, le G8 organisé par Obama pourrait être le dernier. Il suffirait pour cela que François Hollande le dise et le quitte. Toutes les traditions ne méritent pas d’être poursuivies. Sortir du G8 pour enterrer ce vestige du passé, voilà qui aurait de la classe. Comment faut-il dire ? « Le changement, c’est maintenant ! »

    Maxime Combes, membre d’Attac France et de l’Aitec, engagé dans le projet Écho des Alternatives

    http://www.bastamag.net/


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  • Colombie

    L’arme médiatique

    Loic RAMIREZ


    Suite à la capture au combat du journaliste français Roméo Langlois, les FARC posent la question du rôle des médias dans le conflit colombien

    Il aura fallut presque 8 jours d’attente pour qu’enfin le secrétariat des Forces armées révolutionnaires de Colombie-armée du peuple (FARC-EP) annonce publiquement détenir le journaliste français Roméo Langlois. Publié par l’agence d’information Anncol (Agencia nacional nueva Colombia, Agence nationale nouvelle Colombie) sur leur site le 6 mai 2012, le communiqué confirme que M.Langlois est entre les mains d’unités du XV Front de la guérilla [1]. Celui-ci est fait prisonnier le 30 avril 2012 dans la province du Caqueta, dans le Sud du pays, lors d’un accrochage entre l’unité militaire qu’il accompagnait et les forces rebelles. Selon la plupart des témoignages, il semble avoir été blessé durant l’affrontement et s’est alors lui-même rendu aux insurgés [2]. Journaliste à France 24, Roméo Langlois a déjà réalisé des reportages sur le conflit colombien et est connu de la guérilla paysanne [3].

    Extrait du communiqué :

    « La détention en qualité de prisonnier de guerre du journaliste français Roméo Langlois par des unités du XV Front des FARC-EP met en lumière les choses suivantes :

    1.Les journalistes que les forces armées colombiennes emmènent avec elles en opérations militaires ne respectent pas l’objectif impartial d’informer sur la réalité, sinon celui de manipuler celle-ci pour qu’elle serve le projet de guerre contre le peuple colombien.

    2.Il est bon de se demander quelle aurait été la réaction des autorités colombiennes si un journaliste qui, avec une saine volonté d’informer, aurait accompagné des unités de guérilla et était ensuite capturé par l’armée régulière lors d’un combat. (…)

    • Roméo Langlois portait une tenue militaire de l’armée régulière en plein combat. Nous pensons que le minimum que l’on peut attendre pour la récupération de sa totale mobilité est l’ouverture d’un débat national et international sur la liberté d’informer » [4].
    • Dès la publication du communiqué la condamnation est unanime. « Les prisonniers ne sont, ne peuvent être et ne seront jamais des prisonniers de guerre » a déclaré le président Juan Manuel Santos [5]. Le ministre de la défense, Juan Carlos Pinzon, a pour sa part affirmé que les FARC « tentent de créer un exercice médiatique au lieu de libérer rapidement ce journaliste » [6].

    La guérilla a en effet étonné le pays en exigeant que s’ouvre un débat autour de la liberté d’expression et sur le rôle des médias dans le conflit. « Une offense » selon le vice-président colombien Angelino Garzon, pour qui il ne peut y avoir de débat avec les “violeurs des droits humains” [7]. « Nous ne pouvons accepter qu’il soit (R.Langlois) prisonnier de guerre, car la seule arme qu’il avait était sa caméra, outil universel des journalistes » a-t-il poursuivi [8]. C’est là justement que se situe le débat. Pour celle que l’on considère la plus vieille guérilla du continent, la caméra est un acteur déterminant du conflit, comme l’indique le communiqué : « La conception contre-insurrectionnelle de l’état colombien vise à impliquer dans la guerre, en sa faveur, tout le monde, y compris la presse. Qu’une caméra puisse jouer le rôle d’une arme est corroboré par la manipulation médiatique quotidienne dans notre pays » [9]. Si comme le disait Mao l’insurgé « doit être au sein du peuple comme un poisson dans l’eau » il est de l’intérêt du gouvernement “d’assécher” totalement le milieu dans lequel se développe l’insurrection. En découle une guerre de l’information visant à nier toute essence politique de l’adversaire, résumant les FARC à n’être plus qu’une bande de “narco-terroristes” et ce surfant sur les années post 11 septembre 2001. David Galula, stratège français, l’a écrit dans son manuel de la contre-insurrection : « la victoire n’est pas la destruction des forces insurgées et de leur appareil politique dans une région donnée (...) La victoire est cela, plus la rupture définitive des liens entre l’insurgé et la population » [10].

    Les mots prennent alors toute leur importance. Bien que la guérilla déclare en février 2012 renoncer aux enlèvements à des fins économiques, la capture du journaliste en plein combat est assimilé à une trahison vis à vis de cet engagement. Le dirigeant guérillero Ivan Marquez a personnellement répondu, dans une lettre, à la journaliste Maria Jimena sur ce point : « Timoleon Jimenez, notre commandant, a consulté tous les blocs et la vérité est qu’aucun ne détient des personnes avec cette intention (...) Vous dites ne pas nous croire lorsque nous annonçons la fin des rétentions économiques, de plus vous nous exigez encore et encore des gestes en direction de la paix, et pas un seul au gouvernement. Peut être s’est évaporé de votre mémoire le fait que nous ayons libéré unilatéralement 500 prisonniers de guerre capturés au combat, ne recevant de l’état aucune réciprocité » [11]. Devant la déferlante de critiques de la part de la communauté médiatique sur la libération de Langlois contre l’ouverture d’un débat, peu sont ceux qui y ont apporté un point de vue divergent. Le journaliste Jorge Enrique Botero est de cela. Dans une interview à Radio Nederland il s’est déclaré favorable au questionnement du traitement médiatique de la guerre, « durant cinq décennies les FARC ont été totalement vilipendées, déformées et manipulées au niveau médiatique, et maintenant elles considèrent qu’il est temps de mettre les choses sur la table » [12].

    Comme un pied de nez à l’affaire, un journaliste colombien, Luis Ernesto Almario, exilé en Australie (c’est déjà un argument de débat) s’est prononcé pour un échange entre Roméo Langlois et le journaliste Joaquin Pérez Becerra, arrêté par Caracas en avril 2011 [13]et exigé par Bogota pour de supposés liens avec la guérilla. Proposition immédiatement refusé par le Ministre de la Défense.

    Au niveau international ce débat aurait pourtant lieu d’être. Les Etats Unis, si prompts à défendre la “liberté” face aux “dictatures”, se sont payé le luxe d’interdire le journaliste franco-colombien Hernando Calvo Ospina de survol de son territoire. Une proscription qui a empêché celui-ci, par deux fois, de prendre l’avion, et ce récemment : le 6 mai 2012, un vol à destination de Cuba [14]. La France, si ce n’est lorsque l’un de ses ressortissant est retenu prisonnier (comme Ingrid Betancourt à l’époque, Roméo Langlois aujourd’hui) ne traite quasiment jamais de l’actualité du pays andin. La guérilla n’y est traitée que comme le résultat d’un folklore éternel issu des pays latino-américains, mêlant dans l’imaginaire narcotrafiquants et barbus avec fusil à l’épaule. Combien sont ils à connaître les racines de cette insurrection paysanne de plus de 50 ans ? Combien savent ce qu’il en a coûté à ces femmes et ces hommes en armes d’emprunter les voies démocratiques en 1985 sous le drapeau de l’Union Patriotique ? Combien, lorsque Roméo Langlois rentrera en France, se pencheront sur le sort des syndicalistes et dirigeants de gauche assassinés par les groupes paramilitaires ?

    Divulgué par l’agence d’information cubaine Prensa Latina, un communiqué des FARC, datant du 13 mai, annonce la prochaine libération de Roméo Langlois. Il termine par : « Une fois libre, le journaliste Langlois pourra terminer d’accomplir le rôle espéré par le gouvernement de Colombie, ses forces armées et ses grands médias. Du contraire, il pourra rester fidèle à sa conscience et se référer à la vérité ; si tel est le cas, il se peut que ceux qui aujourd’hui exigent sa libération immédiate s’acharnent sur lui jusqu’à le détruire complètement » [15].

    Loïc Ramirez

    [1] http://anncolprov.blogspot.fr/2012/05/el-secretariado-de-las-farc-ep-ahora.html

    [2] http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20120504.OBS4747/colombie-qu-est-il-arrive-a-romeo-langlois.html

    [3] Voir son reportage : http://www.youtube.com/watch?v=J6A8uLhCvXo

    [4] http://kaosenlared.net/america-latina/item/17396-el-secretariado-de-las-farc-ep-confirma-que-la-guerrilla-tiene-en-su-poder-el-reportero-francés.html

    [5] http://www.eltiempo.com/justicia/polemica-por-condicion-que-impuso-farc-para-liberar-a-langlois_11742285-4

    [6] http://www.eltiempo.com/justicia/farc-condiciona-la-liberacion-de-romeo-langlois-a-debate-sobre-derecho-a-informar_11736381-4

    [7] http://www.caracol.com.co/noticias/actualidad/debate-propuesto-por-las-farc-es-un-atropello-a-la-libertad-de-expresion-vicepresidente/20120508/nota/1683977.aspx

    [8] Ibid

    [9] http://kaosenlared.net/america-latina/item/17396-el-secretariado-de-las-farc-ep-confirma-que-la-guerrilla-tiene-en-su-poder-el-reportero-francés.html

    [10] Contre-insurrection, théorie et pratique, Dadivd Galula, Economica, 2008, page 115

    [11] http://www.resistencia-colombia.org/index.php?option=com_content&view=article&id=1287:ivan-marquezintegrante-del-secretariado-del-estado-mayor-central-de-las-farc-ep&catid=22&Itemid=37

    [12] http://www.pacocol.org/index.php?option=com_content&task=view&id=12848

    [13] Voir l’article sur http://www.legrandsoir.info/Les-amis-et-les-ennemis.html

    [14] http://www.cubainformacion.tv/index.php/america-latina/43151-prohiben-volar-con-air-europa-a-hernando-calvo-ospina-

    [15] http://www.prensa-latina.cu/index.php?option=com_content&task=view&id=506302&Itemid=11

    URL de cet article 16709
    http://www.legrandsoir.info/l-arme-mediatique.html

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  • La composition du gouvernement Ayrault dévoilée, Fabius aux Affaires étrangères

    PARIS (AFP) - 16.05.2012 18:01

    La composition du gouvernement Ayrault a été dévoilée mercredi, avec parmi ses membres l'ex-Premier ministre Laurent Fabius, 65 ans, comme ministre des Affaires étrangères et Pierre Moscovici, 54 ans, ministre des Finances.

    voir le zoom : Laurent Fabius, nouveau ministre des Affaires étrangères, le 15 mai 2012 à l'Elysée
    Laurent Fabius, nouveau ministre des Affaires étrangères, le 15 mai 2012 à l'Elysée
    AFP - Lionel Bonaventure
    voir le zoom : Christiane Taubira, nouvelle Garde des Sceaux, le 27 juin 2011 à Paris
    Christiane Taubira, nouvelle Garde des Sceaux, le 27 juin 2011 à Paris
    AFP/Archives - Miguel Medina

    C'est un des proches du président François Hollande, Michel Sapin, 60 ans, qui a été choisi pour le ministère du Travail. Le dossier de la réindustrialisation a été confié à Arnaud Montebourg, 49 ans, membre de l'aile gauche du parti socialiste, chargé du "redressement productif". Le chef de file des députés socialistes, Jean-Marc Ayrault, avait été nommé mardi Premier ministre.

    L'élu breton Jean-Yves Le Drian, 64 ans, est ministre de la Défense et Manuel Valls, de l'aile droite du PS, au ministère de l'Intérieur.

    François Hollande a choisi l'un de ses proches, Michel Sapin, 60 ans, pour le ministère du Travail et son ancienne porte-parole de campagne, Najat Vallaud-Belkacem, Franco-Marocaine de 34 ans, comme ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement.

    L'élue de Guyane (territoire français en Amérique du Sud) Christiane Taubira, 60 ans, est nommée à la Justice, Aurélie Filipetti à la Culture et Marisol Touraine, 53 ans, aux Affaires sociales et à la Santé.

    Au ministère de l'Economie et des Finances, crucial en ces temps de crise de l'euro, Pierre Moscovici sera assisté d'un ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac.

    Le gouvernement compte 34 membres, sans compter le Premier ministre.

    Le précédent cabinet du Premier ministre de droite François Fillon comptait déjà 32 ministres et secrétaires d'Etat.

    Le premier Conseil des ministres se tiendra jeudi après-midi à 15H00.

    La patronne du parti socialiste, Martine Aubry, dont le nom avait aussi circulé pour le poste de Premier ministre, avait annoncé mercredi matin qu'elle n'entrerait pas au gouvernement.

    Le secrétaire général de l'Elysée a dévoilé la composition du gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

    Sur le parvis du Palais de l'Elysée, le secrétaire général de l'Elysée Pierre-René Lemas a annoncé la composition du gouvernement du nouveau Premier ministre.

    Ministres des Affaires étrangères :
    Laurent Fabius

    Ministre de l'Education nationale :
    Vincent Peillon

    Garde des Sceaux :
    Christine Taubira

    Ministre de l'Economie et des Finances :
    Pierre Moscovici

    Ministre des Affaires sociales :
    Marisol Touraine

    Ministre de l'Egalité du territoire et du logement :
    Cécile Duflot

    Ministre de l'Intérieur :
    Manuel Valls

    Ministre de l'Ecologie :
    Nicole Bricq

    Ministre du Redressement productif : Arnaud Montebourg

    Ministre de l'Emploi :
    Michel Sapin

    Ministre de la Défense :
    Jean-Yves Le Drian

    Ministre de la Culture et de la communication :
    Aurélie Filipetti

    Ministre du Droit des Femmes et porte-parole du gouvernement :
    Najat Belkacem

    Ministre de l'Agriculture :
    Stéphane Le Foll

    Ministre de l'Outre mer :
    Victorin Lurel

    Ministre des Sports :
    Valérie Fourneron

    Ministre de la Réforme de l'Etat :
    Marylise Lebranchu

    Ministre
    de l'Enseignement supérieur : Geneviève Fioraso

    Délégué Budget : Jérôme Cahuzac

    Délégué Réussite éducative :
    George-Pau Langevin

    Délégué Relation avec le Parlement :
    Alain Vidalies

    Délégué à la Justice : Delphine Batho

    Délégué Affaires européennes :
    Bernard Cazeneuve

    Délégué à la ville :
    François Lamy

    Délégué Personnes agées :
    Michèle Delaunay

    Délégué Economie sociale :
    Benoît Hamon

    Délégué Famille : Dominique Bertinotti

    Délégué Personnes handicapées :
    Marie-Arlette Carlotti

    Délégué Développement : Pascal Canfin

    Délégué Français de l'étranger : Yamina Benguigui

    Délégué Transports et économie maritime : Frédéric Cuviller

    Déléguée PME et innovation :
    Fleur Pellerin

    Déléguée Artisanat, commerce et tourisme : Sylvia Pinel

    Délégué Anciens combattants : Kader Arif

    © 2012 AFP


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  • C’est aux grecs antiques que l’on doit l’histoire du minautore, du labyrinthe et du fil d’Ariane.

    C’est peut être aux luttes des grecs modernes que l’on devra de sortir du labyrinthe actuel de la monnaie unique, des banques et des états qui leurs sont soumis...

    En tous cas, comme le montre cet article, plus personne ne doute du labyrinthe dans lequel l’UE nous a plongé.
    Si pour le minautore européen la seule solution est l’abandon des souverainetés populaires au profit d’une eurodictature bancaire, les législatives grecques montrent que grandit dans ce peuple l’idée que le fil d’Ariane est la nationalisation des banques que proposent (en totalité) le KKE et (en partie) SYRIZA....

    Il n’est pas possible de sortir la croissance économique d’un chapeau, comme par magie, et certainement pas sans argent pour des investissements. C’est pour cela que Daniel Gros est stupéfait de la manière dont les politiciens européens, le nouveau président français en tête, martèlent ce seul mot : croissance.

    Pour l’économiste allemand du think-tank bruxellois CEPS, la discussion "austérité contre croissance" est un "faux débat" qui ne fait pas avancer d’un pas la solution à la crise de l’euro. Le vrai débat, dit-il, devrait concerner les banques, en particulier celles d’Europe du Sud, qui vont beaucoup plus mal que ce que l’on pensait. "Les banques grecques et espagnoles sont assises sur une montagne de dettes croissantes", explique Gros. "Seule l’Europe peut les sauver, les gouvernements grecs et espagnols sont trop faibles. C’est un problème européen d’importance majeure."

    Abandon de la dette

    L’année dernière, après une forte pression politique, les banques européennes ont accepté des "haircuts”, c’est-à-dire un abandon de la dette de l’Etat grec. Depuis lors, ces mêmes banques se retirent de la partie méridionale de la zone euro, avant les prochains haircuts. L’Espagne, l’Italie et le Portugal sont massivement abandonnés par les investisseurs étrangers. En Grèce, la phase suivante a déjà commencé : même les Grecs mettent leur argent à l’étranger. D’après Daniel Gros, cette fuite des capitaux est énorme. "Quatre, cinq, six milliards d’euros par mois. Personne ne peut l’arrêter."

    Cette évolution va de pair avec une autre, au moins aussi fâcheuse : en raison du départ des banques d’Europe du Nord, celles d’Europe du Sud s’enfoncent de plus en plus dans les dettes. Car les mêmes obligations d’Etat, dont les investisseurs étrangers se débarrassent, sont justement achetées par les banques sud-européennes. Elles le font sous la pression de leurs gouvernements, mais aussi parce que cela leur permet de gagner de l’argent. Car en échange de cette faveur, les gouvernements contractent à leur tour de nouveaux emprunts auprès des banques, à des taux d’intérêt avantageux pour elles.

    Des taux très avantageux, même. L’hiver dernier, la Banque centrale européenne a accordé des crédits très bon marché pour 1 000 milliards d’euros, afin de maintenir les échanges de prêts européens. Les banques d’Europe du Sud utilisent bien volontiers ces crédits, à un taux d’intérêt d’1%, pour leurs prêts aux gouvernements qui leur rapportent 6% ou plus. Un acte de patriotisme qui leur permet de faire leur beurre. Cela semble être une solution, mais cela provoque une dynamique perverse : les banques et les gouvernements deviennent tellement interdépendants qu’ils s’affaiblissent mutuellement.

    Pour Daniel Gros, "les banques grecques sont complètement cuites." Cela semble être un problème national. Mais c’est une illusion d’optique. Car que se passe-t-il si tout à coup les banques du Sud ne remboursent pas (ne peuvent pas rembourser) leurs emprunts à la BCE ? "En raison de l’euro, nous sommes tous dans le même système" explique Thierry Philipponnat, du groupe de pression Finance Watch.

    Fuite des capitaux

    La BCE, c’est nous, indirectement. Nous tous. D’autres pays de la zone euro devront intervenir si les choses se gâtent en Europe du Sud, simplement pour sauver l’union monétaire européenne. Pour cette raison, la BCE est sous forte pression de la part de l’Allemagne et des Pays-Bas pour arrêter ces prêts à bon marché. Le marché financier intérieur constitue le fondement de l’euro. La fuite des capitaux du Sud vers le Nord endommage ce tissu. "L’intégration financière de l’Europe recule pour la première fois depuis le début des années 80", explique Ignazio Angeloni, conseiller de la BCE à Francfort.

    Les Français ont un magnifique mot pour cela : détricotage*. Les banques se retirent derrière leurs frontières comme un tricot dont on défait les mailles : pour être plus fort dans un pays, ils n’accordent plus beaucoup de prêts à un autre pays. Les banques centrales sont plus strictes au Nord qu’au Sud.

    "La géographie joue tout à coup un rôle", note le lobbyiste Philipponnat. Un banquier londonien l’a remarqué récemment lors de la visite d’une délégation chinoise. La première question des Chinois fut : "Comment pouvons nous distinguer un billet en euros grecs d’un billet en euros allemands ?"

    Beaucoup disent que seule une union bancaire européenne peut libérer les banques et les gouvernements de cette étreinte étouffante. Une union bancaire avec un fonds de sauvetage alimenté par les banques elles-mêmes, de sorte que les gouvernements ne soient plus obligés de compenser des faillites. Cela permettrait de résoudre le dilemme actuel du "too big to fail" [1], qui veut que les grandes banques peuvent tout se permettre, parce qu’elles sont sûres d’être sauvées par le gouvernement quand cela va mal. Si elles souffrent elles-mêmes, elles évalueront les risques différemment.

    Factures européennes

    La Commission européenne a préparé une proposition. Mais sa publication est déjà différée depuis deux ans parce que les Etats membres n’en veulent pas, car elle implique une surveillance européenne forte. Cela équivaut à un transfert de souveraineté nationale, ce qui est, pour de nombreux pays, difficile ou un sujet tabou.

    L’Europe tourne en rond. Comme les gouvernements ne veulent pas de système européen fort de réglementation financière, le risque pour le contribuable de se voir refiler des factures européennes, sous forme d’actions de sauvetage dévoreuses de milliards, augmente. Et il reste alors très peu d’argent pour stimuler la croissance économique, dont François Hollande fait actuellement la promotion.

    "La plus grande menace pour la stabilité financière de l’Europe est le fait que des pays de la zone euro sont financés par des banques qui, si elles risquent de faire faillite, sont elles-mêmes dépendantes des gouvernements auxquels elles prêtent de l’argent", a expliqué récemment Philipponnat lors d’une conférence organisée par la BCE. "Nous savons tous que cela ne peut pas marcher."

    Caroline de Gruyter source NRC Handelsblad Rotterdam le 14/05/2012
    Traduction : Michèle Cousin

    Transmis par Linsay

     

    [1] trop gros pour tomber

    http://www.rougemidi.fr/spip.php?article6861


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  • mardi, 15 mai 2012

    Aujourd'hui, 26 Floréal, la France change de président

    Changements...

    Tout à l'heure, François Hollande est arrivé  au palais de l'Elysée, a été reçu par Nicolas Sarkozy, qui a quitté ensuite le siège de la présidence. Hollande a été élevé au rang de Grand Maître de l'Ordre de la Légion d'Honneur, a reçu les honneurs militaires, puis devait déposer une gerbe de fleurs sur la tombe du soldat inconnu, remonter les Champs-Elysées en voiture, prononcer un éloge de Jules Ferry et de Marie Curie, rendre visite au Maire de Paris, Bertrand Delanoë, prendre un bain de foule, faire annoncer le nom de son (ou de sa) premier-e ministre et du ou de la secrétaire général-e de la présidence, puis s'envoler pour Berlin rencontrer la chancelière allemande, Angela Merkel. La France aura changé de président et de gouvernement. Pas d'institutions, ni, encore de politique.

     


    Tout changer pour que rien ne change ?


    Un président ne change pas un pays, s'il arrive qu'un pays change son président : « nous voulions changer la vie, la vie nous a changé », reconnaissait Lionel Jospin -d'autres, en écho, disant plutôt, contemplant l'accession au pouvoir de ceux (et de quelques celles) élus sur la promesse rimbaldienne : « ils voulaient changer la vie, ils n'ont changé que la leur ». Et Hollande aura fort à faire pour changer de politique plus q
    u'être lui-même changé par sa fonction politique.

    Les dossiers urgents ne manquent pas. Les dossiers sensibles, clivants, faisant polémiques, non plus (et ce ne sont pas forcément les mêmes) : c'est ainsi, par exemple,  que l'organisation protestante d'entraide et de solidarité avec les réfugiés, la Cimade, appelle le nouveau président et son futur gouver
    nement à rompre spectaculairement, mais pas moins réellement pour autant, avec leurs prédécesseurs et leur « approche sécuritaire de la politique d’immigration », avec la « maltraitance dont sont victimes les personnes étrangères » et avec les « objectifs chiffrés en matière d’expulsion », et les appellent, comme premières mesures, à mettre fin au placement en rétention des familles, y compris à Mayotte, et aux expulsions de demandeurs d’asile en cours de procédure, quel que soit leur statut ; à régulariser les personnes engagées dans le mouvement de grève des travailleurs sans papiers qui a débuté en octobre 2009 et à garantir le droit au séjour des personnes étrangères gravement malades qui vivent en France. La Coordination nationale des Sans-papiers est sur la même ligne, en proposant « pour sortir du cercle infernal de la fascisation », ces critères pour un projet de loi de régularisation des sans-papiers : L’insertion, la solidarité, la citoyenneté et la durée de présence; la défense du Droit d’Asile, notamment la situation dans les pays d’origine;  la vie privée et familiale; le travail, la promesse d’embauche, le projet professionnel, les sans papiers licenciés; la maladie, les études et les raisons humanitaires...

    Ce ne sont peut-être pas là les enjeux les plus lourds : l'inversion des po
    litiques budgétaires, fiscales, économiques européennes, la fin des cures d'austérité imposées aux peuples pour sauver les banques et la monnaie, sont en effet d'une toute autre ampleur -mais symboliquement, culturellement, la rupture avec les discours et les pratiques xénophobes, quand ils ne sont pas ouvertement racistes comme le sont les pratiques à l'égard des Rroms, le rejet des paranoïas et des enfermements ethniques, marqueraient immédiatement, sinon le passage d'une République (la Vème, héritée de De Gaulle mais travestie par Sarkozy) à une autre (la VIème, prônée par Montebourg et par Mélanchon), le passage d'une culture politique à une autre, d'une pratique politique à une autre.  C'est au pied de ce genre de murs qu'on reconnaîtra le maçon Hollande. Sinon quoi ? Le conseil de Tancrède au Guépard, « tout changer pour que rien ne change » ?

    On nous dira qu'on en prend à notre aise genevoise, avec nos attentes à l'égard de Hollande et de la France. Et on aura raison de nous le dire. Mais en plus petit, en plus local, c'est bien aussi de cela dont il va commencer à s'agir le 17 juin prochain, avec une élection complémentaire au gouvernement genevois : le début d'un changement de majorité, non pour le plaisir d'en changer (car ce serait un plaisir), mais pour la nécessité de changer, ici aussi, de culture et de pratique politique.


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  • Michel ROGALSKI
    illustration www.zonz-artiste-peintre.com
     

    Rarement campagne électorale n’aura autant fait l’impasse sur les enjeux internationaux et sur leurs articulations au national. Pourtant, s’il est chose certaine c’est que le mondial, loin d’être un facteur extérieur secondaire ne faisant qu’apporter des corrections négligeables aux problèmes locaux, s’impose comme une réalité omniprésente façonnant la vie des états et des individus. C’est ce qu’a traduit inconsciemment l’apparition dans le débat public d’appels à la nécessité d’une protection, d’une maîtrise de souveraineté, d’un primat du politique sur l’économie. Comme s’il devenait urgent de se dégager d’une gangue qui entravait notre liberté d’action, voire la rendait déjà largement illusoire. Pour autant l’analyse de ces processus ou de la place et du rôle de la France dans le monde a-t-elle reçu un intérêt à la hauteur de ses enjeux ? La bataille du chiffrage visant à décrédibiliser le programme de l’adversaire a ramené l’essentiel des échanges à des débats comptables ennuyeux dont bien peu arrivaient à s’extraire. Que la politique étrangère de la France ne soit pas débattue doit inquiéter. Cela voudrait-il signifier consensus de la part des principaux candidats ? S’il n’y a pas conflit sur le fond, alors il devient inutile d’en discuter.

    Pourtant la diplomatie sarkozyste a été stupéfiante d’inflexions, de retournements, de gages inutilement donnés et d’impréparations velléitaires riches de conséquences, au point que l’on a pu s’interroger s’il existait une vision d’ensemble cohérente du rôle de la France dans le monde. En rupture avec les tendances lourdes, consensuelles sur l’essentiel – au point qu’on avait pu parler d’une approche gaullo-mitterrandienne –, l’image de la France dans le monde a été totalement reformatée en cinq années. De l’abandon de toute idée d’indépendance, acquise à l’ombre des blocs de la guerre froide, à la disparition d’une politique arabe permettant de peser sur le conflit israélopalestinien, en passant par son retour peu glorieux dans le giron de l’Otan ou aux engagements néocoloniaux en Afghanistan, en Côte d’Ivoire et en Libye, tout fut mis en oeuvre pour dilapider le potentiel diplomatique engrangé depuis une quarantaine d’années et spectaculairement réaffirmé avec panache dans le refus de suivre les états-Unis dans leur aventure irakienne.

    Car la France ne manque pas d’atouts et a su longtemps s’appuyer sur son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, sa puissance militaire nucléaire, la francophonie, son poids dans le PIB mondial, sa maîtrise de la haute technologie, son réseau d’ambassades et de diplomates qualifiés, bref tout ce qui concourt au rayonnement d’un pays. Notre pays a toujours su en jouer en donnant à sa politique étrangère, grâce à son non-alignement, plus de poids qu’elle n’en avait réellement.

    Pourtant les appels et mises en garde n’avaient pas manqué sur les déconvenues de notre politique extérieure. à commencer par celles d’un groupe de diplomates se dissimulant sous le pseudonyme de Marly et dénonçant notre politique européenne, africaine et méditerranéenne illisible ainsi que la manière dont Washington nous ignorait et la Chine nous avait domptés. Voici à peine deux années, deux poids lourds, Alain Juppé et Hubert Védrine avaient ensemble lancé un cri d’alarme en évoquant un instrument diplomatique « sur le point d’être cassé », sans parler d’un ambassadeur au Sénégal, Jean-Christophe Ruffin, démissionnant et parlant d’un « ministère sinistré, complètement marginalisé ». Tout cela témoigne d’un mépris de l’outil de l’expertise diplomatique que l’on s’est ingénié à court-circuiter.

    Amateurisme, style impétueux, promesses sans lendemain, activisme désordonné, diktat de l’instant sans vision, tel semble être sur la forme le bilan des cinq dernières années de la diplomatie du sortant. À de rares exceptions, les prétendants ne semblent pas s’en émouvoir et ne proposent rien de significativement différent, donc pour l’essentiel restent muets et s’apprêtent à rester dans le sillon tracé.

    Pourtant, si le style dénote incohérence et agitation, le fond mérite que l’on s’y arrête car il fait sens et doit inquiéter. Pour l’essentiel la voix de la France a effacé sa singularité et abandonné

    son autonomie en faisant retour dans le giron occidental et atlantique après 43 années d’absence de ses structures militaires intégrées. Cette posture lui a interdit de porter un discours à vocation universaliste et de gagner en influence sur la scène mondiale. Cette banalisation s’est dissimulée un temps derrière l’écran de fumée d’activisme de façade et de propos désordonnés et velléitaires. Mais le style impétueux s’est fracassé devant l’absence de résultats.

    L’Union pour la Méditerranée, lancée malgré les mises en garde du Quai d’Orsay, et censée s’appuyer sur deux solides piliers, la Tunisie de Ben Ali et l’égypte de Moubarak, a sombré en mer avec ces régimes, et la politique arabe n’a pas survécu à l’attitude indécise et floue face au « printemps » arabe, voire à l’inconvenance de propos ministériels proposant notre expertise en matière de maintien de l’ordre. Le silence complice sur les exactions d’Israël au Sud Liban puis dans la bande de Gaza ou notre rôle décisif dans l’expédition punitive en Libye ont fait de cette présidence française la plus pro-israélienne qui n’ait existé depuis l’agression de Suez en 1956, alors même que ce pays se donnait le gouvernement le plus à droite de son histoire. De surcroît cette guerre en Libye a perverti et probablement discrédité pour longtemps le concept de la « responsabilité de protéger » adopté en 2005 par les Nations unies pour venir en aide à des populations persécutées par leur gouvernement ou pour assister celles que leur gouvernement n’était plus en mesure de protéger lui-même.

    On a assisté à une tactique de renversement de régime, de déstabilisation s’approchant des techniques des conflits de basse intensité. Sans se soucier, bien sûr, se savoir ce qu’il convenait de reconstruire. Comment et avec qui ? A-t-on vraiment cru que la démocratie s’exportait par les armes ?

    L’atlantisme affiché, c’est-à-dire un soutien sans faille à l’Otan et aux états-Unis qui y sont aux commandes, nous conduit en réalité dans l’alignement et l’inféodation. Il nous entraîne à imaginer des ennemis au lieu de favoriser l’émergence d’un monde multipolaire et de développer des liens fructueux avec les pays émergents qui représentent l’avenir. Il nous pousse à délaisser et à marginaliser le système des Nations unies comme instance de référence au profit de l’Alliance atlantique et donc à tenir pour négligeable l’avis des trois quarts de la population de la planète.

    Il s’agit de rompre avec tout cela. D’abord, il faut évidemment sortir de l’Otan qui depuis la fin de la guerre froide n’a plus de raison d’être sinon de permettre aux états-Unis d’exercer leur emprise sur ses membres et les pousser en situation de servitude volontaire. Il convient également d’exiger la dissolution de l’Otan devenue anachronique et d’en tirer toutes les conséquences en matière de désarmement et de lutte contre la prolifération nucléaire. Le retrait des forces françaises d’Afghanistan ne peut plus être différé. Il doit être fermement proclamé et appliqué.

    Il faut saisir cette opportunité de liberté d’action recouvrée pour s’engager hardiment dans une politique de coopération avec les pays émergents et les pays du Sud, là où se trouve l’avenir du monde et hâter la fin d’un monde unipolaire construit sur la puissance militaire.

    Dans l’espace européen, il convient d’abroger le traité de Lisbonne et s’apprêter à mener un bras de fer avec les institutions européennes qui n’auront de cesse de s’opposer aux nouvelles orientations choisies par le peuple français. Elles ne sont pas toutes eurocompatibles et la réussite de la victoire des urnes se jouera largement sur ce front, ce qui implique un large développement des solidarités des forces progressistes à l’échelle du continent pour s’opposer à l’axe austéritaire ambiant. Car ce qui sera possible chez nous le sera aussi ailleurs. L’Europe ne doit plus rester une Sainte Alliance occupée à s’opposer aux volontés de changements des peuples. Il nous incombe qu’elle ne les rende pas impossibles ou sans lendemain.

    Au vu de la campagne, on peut s’interroger sur la volonté d’un nouveau Président. Fera-t-il de l’ancienne politique une parenthèse ? Se dégagera-t-il de l’ornière ? Ou au contraire chaussera-t-il les pas de son prédécesseur dans un « continuisme » discret ?

    Michel Rogalski
    Directeur de la revue Recherches internationales

    6, av. Mathurin Moreau ; 75167 Paris Cedex 19

    Site : http://www.recherches-internationales.fr/

    Abonnements 4 numéros par an : 55 Euros, Étranger 75 Euros

    URL de cet article 16700
    http://www.legrandsoir.info/l-etranger-dans-la-campagne.html

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