•    Suite à mon article Les Roms et ainsi font, font font, mon pote Gilbert Dubant, rédacteur en chef de Mémoires Vives, journal de l'Institut CGT d'histoire sociale d'Île-de-france m'envoie, sous le titre " Faux Roms et vraies ignorances", des précisions utiles pour, peut-être, ne pas raconter n'importe quoi. Et pour un vrai débat autour de cette question en France et dans l'UE.

     

    Je suis habitant d’Évry, préfecture de l’Essonne, et souvent en désaccord politique avec  Manuel Valls, longtemps député-maire avant de devenir ministre de l’Intérieur et « persécuteur des Roms », si l’on en croît la presse du moment.

    Je suis en désaccord avec cette campagne, parce que je crois que cette agitation estivale a une double cause. La droite tente d’enfoncer un coin dans un gouvernement PS, qui ne manque pas de faiblesses internes. La gauche est pleine de bons sentiments, joints à une frappante ignorance des réalités géopolitiques.

     

    Le terme « Roms » est un abus de langage. Il a été lancé par décision d’un « Congrès International des Roms », tenu à Londres en avril 1971, et qui revendique, admirons la précision, « de 6 à 20 millions de Roms dans le monde », répartis sur trois continents. En seraient sans distinction Gitans, Manouches, Yéniches, Sintis et autres Bohémiens. Le seul ennui est que ce peuple n’existe que dans l’imagination de ses auteurs, une sorte d’esperanto démographique fondé sur une lointaine et commune origine indienne. Je me revendique descendant de Néandertal, mais j’ai changé d’habitudes.

     

    ICI BUCAREST, MORT AUX ÉTRANGERS !

     

    Pour les bidonvilles démantelés dans les agglomérations lilloise et lyonnaise, après décision (inique ?) de la justice française, leurs habitants étaient des Tziganes roumains. Le mot « rom » n’existe d’ailleurs pas en roumain, où l’on parle de « Tsigani », avec une répulsion quasi-générale. L’opinion publique roumaine est majoritairement raciste, envers les Africains, les Juifs et les Tziganes. La xénophobie est naturellement la fidèle compagne du racisme et touche tous les voisins slaves.

    Pourquoi ? La « démocratie occidentale » y est encore inconnue, comme en témoignent les récents démêlés du Premier Ministre Victor Ponta, membre de l’Internationale Socialiste, qui utilise pour se débarrasser du président « libéral » Traian Basescu, des méthodes inspirées par ses prédécesseurs, les rois Carol II et Michel 1er, le maréchal pro-nazi Ion Antonescu, le Génie des Carpathes Nicolae Ceausescu, les staliniens non-repentis Ion Iliescu ou Emil Constantinescu.

    Pourquoi les Tziganes roumains, à la différence de leurs collègues bulgares, hongrois ou serbes, fuient-ils leur pays, où ils représentent, selon les estimations, entre 500 000 et 2 500 000 personnes, toutes sédentarisées depuis des siècles ? Le contentieux est lourd et ancien. Les Roumains « normaux », descendants auto-proclamés de la Dacie romaine, se considèrent comme une enclave latine dans un sous-continent slave mal éduqué, où l’Attila magyar, le Todor bulgare et l’Émir tzigane sont voués à leur perte culturelle. Le français est la première langue étrangère enseignée et la France représente l’Eldorado.

    Les déclarations du parti extrémiste nommé « Romania Mare » (Grande Roumanie)  feraient passer Marine Le Pen pour une gauchiste. L’idée est de rendre à la Roumanie sa vraie place territoriale et culturelle, flinguée par la défaite hitlérienne et la mainmise stalinienne. Les Hongrois de Transylvanie ? Dehors ! La Moldavie ? C’est chez nous, d’ailleurs ils parlent roumain ! Les Tziganes ? Ils ont collaboré avec la Securitate, la police politique de Ceausescu. Dehors ! Ils sont sales comme des peignes, ils écorchent notre langue, ils sont ennemis de l’Église orthodoxe, mendiants, voleurs, criminels ! Tous dehors !

     

    C’EST PAS MOI, C’EST L’AUTRE !

     

    Les Tziganes ne sont évidemment pas imperméables à l’opinion publique. Ils savent tous que l’école roumaine n’aime pas leurs enfants, pas plus que les parents n’aiment d’ailleurs l’éducation des « gadjés », que la police française ressemble à Sœur Emmanuelle à côté des flics roumains, que les Champs-Élysées sont plus riches que Bucarest, et que les Français donnent de l’argent avant de les remettre dans l’avion.

    L’exclusion réciproque des deux populations en Roumanie repose sur des réalités et des fantasmes. Les Tziganes sont réputés vivre uniquement de la mendicité par des enfants estropiés (ou déguisés), de vols en tout genre et de la prostitution, dans une crasse extrême. Ils refusent l’école, saccagent les logements qu’on leur propose, et sont à l’origine des trafics qui ruinent les populations laborieuses. Tout au plus leur reconnaît-on un vrai talent musical, qui leur procure quelques ressources. C’est un des rares points communs, avec la « tsuica », l’eau-de-vie de prune (excellente) qui alcoolise sévèrement l’ensemble des âges et des origines.

    Dans les préjugés, il y a à prendre et à laisser. Sur la collaboration avec la Securitate, il est vrai qu’elle a employé quelques nervis tziganes, mais la majorité des Roumains a fait du renseignement volens nolens. Il est exact que les villages tziganes se signalent par une exceptionnelle malpropreté, dans un pays où l’hygiène et l’environnement ne sont pourtant pas des obsessions. Il est vrai que la scolarité n’est pas une priorité pour les Tziganes et qu’ils en sont rejetés par les autres. Les mariages mixtes sont rares, car mal vus des deux côtés. Quant à l’accusation de trafics, c’est une plaisanterie dans un pays où la corruption est aussi générale que le marché noir.

    S’il fallait une seule preuve, où sont passés les millions d’euros que la généreuse Commission de Bruxelles a déversés sur la Roumanie et ses voisins pour « intégrer les Roms », et dont les Tziganes, sauf quelques dirigeants, n’ont jamais vu le premier « leu » ? Au premier rang des responsables, l’Allemagne, qui a profité de sa vieille implantation en Roumanie pour phagocyter des 1990 l’industrie et la main-d’œuvre, en ruines mais quasi-gratuites, et diriger de manière coloniale l’économie du pays, avec quelques guignols pseudo-démocrates à sa solde.

     

    LES VERTUS DU CHANTAGE

     

    En vérité, les  allers-retours des Tziganes entre France et Roumanie ne sont pas comparables aux déportations et aux tueries dont furent victimes Gitans et Manouches sous l’Occupation. Avec une carte d’identité roumaine, une famille de quinze personnes peut prendre un bus d’Eurolines, à Bucarest ou Cluj-Napoca, vers la France, puis s’installer dans un bidonville de Lyon et de Lille dans des conditions matérielles désastreuses, mais pas pires qu’en Roumanie, où la CMU n’existe pas. Il existe alors deux possibilités. Ou bien les autorités se désintéressent de la famille en question, et la nourriture viendra par quelques associations. Pour le reste, les enfants et les femmes iront se promener dans les centres-villes et rapporteront de la monnaie. Sauf pour l’hygiène publique, ce n’est pas très grave.

    Si police et justice françaises s’en mêlent, ce n’est pas non plus un drame. Les enfants mineurs et les femmes ne risquent rien, ou si peu, et c’est tant mieux. Il faudrait trouver pire que le FN pour embastiller ou torturer des vagabonds, européens ou autres. En revanche, les équipes de maquereaux roumains et moldaves, qui gèrent avec sauvagerie leurs compatriotes prostituées mineures, mériteraient plus d’attention de Najat Vallaud-Belkacem, de Manuel Valls et de Christiane Taubira.

    Si tout va mal, on sera expulsé avec 300 euros par adulte, et 100 par enfant. Pour la famille, ça fera une pièce de 2500 euros. De quoi vivre au moins une année en Roumanie. Ensuite, on reviendra. À moins que l’Europe, si prompte à dévorer du Grec et du Portugais, se décide à dire aux escrocs du gouvernement roumain : « Ou bien vous intégrez vos Tziganes, ou bien vos subventions s’arrêtent… ». Les politiciens roumains sont comme les Tziganes : ils reviennent toujours sur les lieux de leurs primes.

    Gilbert Dubant

    http://le-blog-de-roger-colombier.over-blog.com/


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  •  Garcia Lorca

    Le 18 aout 1936, Frederico Garcia Lorca fut assassiné par la garde civile du général Franco.

    Le crime ne fut jamais puni et les franquistes sont encore au pouvoir…




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  • Pour certains de mes lecteurs, ce papier aura un certain parfum de déjà-vu. Je m'excuse auprès d'eux, mais comme l'essence de toute pédagogie digne de ce nom est la répétition, on se retrouve souvent à redire les mêmes choses. C'est embêtant, je le sais, mais c'est comme ça. Et puis, dans la mesure où certains continuent à répéter inlassablement les mêmes idioties, on se sent obligé de tout inlassablement aussi les réfuter.

     

    Faut dire que je prends des risques: par exemple, celui d'aller sur le site du PCF pour regarder les réactions que les sorties de Manuel Valls ont provoqué. Et qui cherche, trouve: le vénérable Parti a ainsi publié une déclaration concernant la réunion interministérielle sur les Roms annoncée par le gouvernement. On peut y lire les paragraphes suivants:

     

    Le PCF exige que les mesures transitoires soient immédiatement levées par la France pour enfin permettre l’égal accès au travail. Un moratoire sur les expulsions doit être décidé. Reconnaître le droit au travail, le droit de circulation, ainsi que leur statut européen implique que l’on cesse de les chasser, de les expulser des bidonvilles et des squats.

     

    Ces lignes sont intéressantes à plusieurs titres. Commençons par la fin: on est toujours surpris de voir dans les écrits du PCF ces histoires de « statut européen ». Quelle est la logique, pour un parti politique qui se prétend par ailleurs universaliste et internationaliste, de faire une différence entre les immigrants « de statut européen » et ceux qui viendraient d'autres contrées ?

     

    Ce qui est intéressant ici, c'est que le PCF, qui rejette toute idée de « préférence nationale » au niveau de la France, semble parfaitement confortable avec la même idée au niveau de l'Europe. Et il n'est pas le seul: cette idée est fort répandue au niveau de la gauche toute entière, qu'elle soit « libérale » ou « radicale ».

     

    Pour la gauche, semble-t-il, la Nation c'est moche, c'est égoïste, c'est ringard.

     

    Et cela rend la préférence nationale détestable. Par contre, l'Europe c'est généreux, c'est ouvert, c'est beau. Et du coup, la « préférence européenne » est tout à fait louable.

     

    Cette asymétrie de la pensée dans une situation parfaitement symétrique montre qu'on se trouve devant un raisonnement ad hoc: si l'on rejette le protectionnisme national mais qu'on adopte l'idée de protectionnisme européen, c'est que quelque part l'un est dans l'intérêt de celui qui rejette, et pas l'autre.

     

    La première partie de la formule utilisée par le PCF est d'ailleurs illustrative des intérêts dont il s'agit.

     

    Le PCF, notez-le bien, « exige que les mesures transitoires soient levées (...) pour permettre l'égal accès au travail ». En d'autres termes, que les roms puissent accéder à un marché du travail déjà saturé où les français mais aussi les immigrés déjà installés en France peinent à trouver du travail, et sur lequel une augmentation de l'offre de travail ne peut mécaniquement que faire baisser les salaires.

     

    La levée des mesures transitoires ferait donc des gagnants et des perdants. Les gagnants, ce seraient les roms bien entendu, mais aussi les employeurs qui trouveraient une main d'œuvre encore plus abondante et donc acceptant des salaires moindres. Les perdants ce sont les travailleurs peu qualifiés, français et immigrés déjà installés sur notre sol.

     

    On peut déclarer que tout homme - pardon, tout « européen », ne mélangeons pas les torchons et les serviettes - devrait avoir le droit de s'installer sur notre sol et de bénéficier des avantages conquis par des siècles de luttes, de travail, de sacrifices sans avoir à souscrire en échange le moindre engagement. On peut longuement discuter sur le caractère « juste » ou « injuste » d'un système qui réserve l'accès à certains droits - dont celui d'accéder au marché du travail - en fonction de la nationalité ou de la régularité du séjour. Cette discussion, qui en fait est celle des rapports que la gauche entretient avec l'idée même de Nation est indispensable, mais ce n'est pas mon but aujourd'hui. Mon point, c'est qu'on ne peut pas proposer une politique et ignorer ses conséquences.

     

    Ouvrir le marché du travail aux roms n'est pas une mesure gratuite pour tout le monde: même si elle semble gratuite pour les classes moyennes, son coût sera supporté par les travailleurs les moins qualifiés sous forme de concurrence accrue sur le marché du travail. Il faut être conscient du coût d'une telle politique, et surtout de qui devra le supporter. Dans cette affaire, les intérêts des roms et ceux des travailleurs français les moins qualifiés sont contradictoires. Si la gauche radicale prend le parti des premiers sans une véritable explication (1), alors elle ne devrait pas être étonnée que les travailleurs aillent chercher un défenseur ailleurs. Chez Le Pen, par exemple.

     

    Cette déclaration du PCF montre à quel point ce parti s'est éloigné de ses racines dans le monde du travail, et combien il est aujourd'hui aliéné aux fantasmes des couches moyennes. Que ce soit sur la question européenne, où il se classe de plus en plus chez les eurobéats, ou sur l'achat d'une bonne conscience avec l'argent des autres.

     

    La politique, la vraie, ce n'est jamais la lutte des bons et les méchants. C'est le compromis entre des intérêts contradictoires, souvent tous aussi « légitimes » les uns que les autres. C'est cela que la gauche bienpensante ne veut pas comprendre...

    Descartes

     

    (1) Le PCF - et ceux qui sont sur la même ligne - serait-il capable d'ailleurs de justifier rationnellement une telle politique ? Car il n'est pas évident d'expliquer rationnellement aux travailleurs les moins qualifiés pourquoi ils doivent risquer leur gagne-pain pour permettre à leurs « frères européens » d'accéder au marché de l'emploi en France pour le plus grand profit des employeurs.


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  • La société minière Lonmin a sommé dimanche les grévistes de Marikana de reprendre le travail lundi matin, sous peine de "possibles licenciements", trois jours après la fusillade qui a fait 34 morts sur ce site d'extraction de platine. - /AFP

    La société minière Lonmin a sommé dimanche les grévistes de Marikana de reprendre le travail lundi matin, sous peine de "possibles licenciements", trois jours après la fusillade qui a fait 34 morts sur ce site d'extraction de platine. - /AFP

    L'exploitant de Marikana menace toujours de licencier les grévistes qui ne reprendraient pas le travail lundi matin : le bras de fer continue, en Afrique du Sud, trois jours après la tragédie : jeudi, 34 mineurs avaient été tués par la police. Les grévistes, qui réclament toujours de substantielles augmentations de salaires, semblent majoritairement prêts à rejeter cet ultimatum, en mémoire de leurs camarades tués.

    "L'ultimatum final a été repoussé au lundi 20 à la suite des événements de jeudi", explique le porte-parole de Lonmin : "l'ultimatum final donne aux employés une dernière chance de reprendre le travail ou de s'exposer à un possible licenciement".

    "Une insulte"
    "S'attendre à ce que nous retournions au travail, c'est comme une insulte. Beaucoup de nos amis et collègues sont morts et on s'attendrait qu'on reprenne le travail? Jamais!", s'emporte Zachariah Mbewu, assurant qu'aucun de ses camarades mineurs ne se présenterait à son poste lundi. "Il y a des gens en prison et à l'hôpital. Demain, on retourne sur la montagne mais on ne descend pas dans la mine, à moins que les patrons nous donnent ce qu'on réclame",.

    400 euros par mois
    La "montagne" est une petite colline proche de la mine où les mineurs s'étaient rassemblés au début de leur mouvement lancé le 10 aout, jusqu'à la fusillade de jeudi, qui a fait 34 morts et 78 blessés. "Nous attendons que la direction s'exprime. Demain nous ne reprendrons pas le travail s'ils n'écoutent pas nos exigences d'augmentation de salaire", poursuit Fezile Magxaba, un contremaître de Marikana.

    Les mineurs, qui touchent en moyenne 4.000 rands (400 euros) par mois, réclament 12.500 rands (1.250 euros), soit plus qu'un triplement de leur salaire. "Des gens sont morts. On est en colère. Si on reprenait le travail, ce serait comme s'ils étaient morts pour rien", dit-il en faisant sa lessive à un robinet collectif.

    Une enquête ouverte
    Une enquête doit déterminer les circonstances exactes du déclenchement de la fusillade. La police affirme avoir agi en état de légitime défense face à des mineurs qui chargeaient, brandissant des machettes et des lances. Autour des misérables baraquements, les forces de l'ordre se faisaient discrètes ce dimanche. Les gens semblaient vaquer à leurs occupations quotidiennes, mais la colère restait vive.

    Un ancien leader de l'ANC sur le front
    Dans le pays, les commentaires politiques allaient bon train, accusant notamment le président Jacob Zuma d'avoir été passif tout au long de la crise. La vedette des journaux du dimanche était le jeune tribun populiste Julius Malema, soudain sorti de l'anonymat politique dans lequel il était tombé après avoir été exclu en avril de l'ANC, le parti au pouvoir, pour ses provocations répétées.

    Samedi, l'ancien leader de la ligue de jeunesse de l'ANC s'est rendu auprès des mineurs et s'est adressé à eux, refusant toute forme de protection policière. Il a accusé le président Zuma d'être responsable du massacre et l'a appelé à démissionner.
     
    "Julius Malema a saisi une opportunité et a exploité le massacre de Marikana en se présentant comme le seul leader capable de s'adresser aux mineurs armés et en colère", notait dimanche matin The Sunday Independant: "Pendant que le président Zuma arrivait à Marikana nuitamment, Malema a profité du vide pour sortir brutalement de l'obscurité politique où il était plongé".

    Malema, qui n'a plus aucune structure politique autour de lui, a très longtemps incarné l'aile radicale de l'ANC. Insatisfait de voir le chômage, la misère et les inégalités s'aggraver 18 ans après la chute de l'apartheid, il appelait notamment à la nationalisation des mines et à l'expulsion sans compensation des grands propriétaires terriens blancs.

    AFP

     


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  • L’esprit de Pinochet hante la campagne contre Chavez

    John PILGER

    Je suis entré avec Roberto Navarrate dans le stade national de Santiago, Chili. Le vent de l’hiver austral descendait des Andes et le stade était vide et fantomatique. Peu de choses avaient changé, dit-il : le grillage, les sièges brisés, le tunnel vers les vestiaires où résonnaient les cris. Nous nous sommes arrêtés devant un grand 28. « J’étais ici, face au tableau d’affichage. C’est ici qu’ils ont appelé mon nom pour me torturer ».

    Des milliers de « détenus et disparus » furent emprisonnés dans ce stade au lendemain du coup d’état du Général Pinochet, soutenu par Washington, contre la démocratie de Salvador Allende, le 11 septembre 1973. Pour la majorité des peuples d’Amérique latine, les abandonados, l’infamie et la leçon historique du premier « 11 Septembre » n’a jamais été oubliée. « Dans les années Allende, nous avions l’espoir de voir l’esprit humain triompher » dit Roberto.

    « Mais en Amérique latine, ceux qui croient qu’ils sont nés pour diriger se comportent avec une telle brutalité pour défendre leurs droits, leur propriété, leur mainmise sur la société qu’ils sont proches du véritable fascisme. Les gens qui sont bien habillés, dont les frigos sont pleins, cognent sur des casseroles dans les rues pour protester, comme s’ils n’avaient rien. C’est ce que nous avons vécu au Chili, il y a 36 ans. C’est ce à quoi on assiste actuellement au Venezuela. Comme si Chavez était Allende. C’est très évocateur pour moi. »

    Lorsque je tournais mon film, The War on Democracy, j’ai tenté d’aider des Chiliens comme Roberto et sa famille, et Sara de Witt qui a courageusement accepté de retourner avec moi dans les salles de torture de la Villa Grimaldi, où elle a miraculeusement survécu. Avec d’autres Latino-américains qui ont connu les tyrannies, ils observent le même schéma de propagande et les mêmes mensonges à présent être déployés pour contrer une nouvelle aspiration à la fois pour la démocratie et la liberté sur le continent. Ironiquement, au Chili, qu’on présentait à Washington comme un « modèle de démocratie », la liberté se fait attendre. La Constitution, le système de contrôle électoral et les inégalités sont autant de cadeaux que Pinochet a laissé derrière lui.

    La désinformation qui a aidé à détruire Allende et participé à la montée des horreurs de Pinochet a fonctionné de la même manière pour le Nicaragua, où les Sandinistes eurent la témérité de mettre en œuvre des réformes populaires modestes largement inspirées du mouvement coopératif anglais. Dans les deux pays, la CIA finançait les principaux média d’opposition, même si ce n’était pas vraiment nécessaire. Au Nicaragua, le faux martyr du journal « d’opposition » La Prensa devint une cause nationale pour les grands journalistes libéraux nord-américains, qui débattaient avec tout le sérieux du monde si un pays misérable de trois millions d’habitants représentait une « menace » pour les Etats-Unis.

    Ronald Reagan le pensait et déclara l’état d’urgence pour repousser les hordes à ses portes. En Grande-Bretagne, où le gouvernement de Thatcher « appuyait sans réserves » la politique des Etats-Unis, la classique censure par omission fut appliquée. En examinant 500 articles traitant du Nicaragua au début des années 80, l’historien Mark Curtis a trouvé une censure quasi totale des réussites du gouvernement sandiniste - « remarquable à tous points de vue » - en faveur du mensonge sur « la menace d’une mainmise communiste ».

    Les similitudes avec la campagne actuelle contre la montée phénoménale des mouvements démocratiques populaires sont frappantes. Prenant principalement pour cible le Venezuela, et particulièrement Hugo Chavez, la virulence des attaque laisse entendre que quelque chose est en marche, et c’est bien le cas. Des milliers de pauvres Vénézuéliens voient un médecin pour la première fois de leur vie, leurs enfants sont vaccinés et boivent de l’eau potable.

    Le 26 juillet, Chavez a annoncé la construction de 15 nouveaux hôpitaux ; plus de 60 hôpitaux publics sont en cours de modernisation et seront ré-équipés. De nouvelles universités ont ouvert leurs portes aux pauvres, brisant le privilège des institutions compétitives contrôlées par la « classe moyenne » dans un pays où il n’y a pas de moyenne. A Barrio La Linea, Beatrice Balazo m’a dit que ses enfants étaient la première génération de pauvres à assister à une journée entière d’école et à recevoir un repas chaud et à apprendre la musique, l’art et la danse. « J’ai vu leur confiance s’épanouir comme des fleurs, » dit-elle. Une nuit au barrio La Vega, dans une salle nue éclairée par une seule ampoule, j’ai observé Mavis Mendez, 94 ans, apprendre à écrire son propre nom pour la première fois.

    Plus de 25.000 conseils communaux ont été crées en parallèle des anciennes structures bureaucratiques locales corrompues. Beaucoup sont des phénomènes de démocratie à la base. Des porte-paroles sont élus, mais toutes les décisions, idées et dépenses doivent être approuvées par une assemblée communautaire. Dans des villages longtemps contrôlés par les oligarques et leurs médias serviles, cette explosion de pouvoir populaire a commencé à changer les vies de la manière que Beatrice a décrite. C’est cette nouvelle confiance du « peuple invisible » du Venezuela qui a enflammé ceux qui vivent dans les quartiers appelés Country Club. Derrière leurs murs et leurs chiens de garde, ils me font penser aux blancs Sud-africains.

    Les médias vénézuéliens, caricatures du Far West, sont majoritairement entre leurs mains ; 80% des émissions et pratiquement la totalité des 118 sociétés de presse sont privées. Jusqu’à récemment, un présentateur de télévision aimait qualifier Chavez, qui est métisse, de « singe ». On le présente à la Une des journaux comme un Hitler, ou un Staline (le rapport entre les deux étant qu’ils aiment tous le deux manger les enfants). Parmi les médias qui hurlent le plus fort à la censure, on trouve ceux qui sont financés par la National Endowment for Democracy, qui n’est qu’une façade de la CIA. « Nous avions une arme létale, les média » a dit a Amiral qui faisait partie des comploteurs du coup d’état de 2002. La chaîne de télévision, RCTV, qui n’a jamais été poursuivie pour son rôle dans la tentative de renverser un gouvernement élu, a perdu sa licence d’émettre par voie hertzienne et émet encore par satellite ou par câble.

    Et pourtant, comme au Nicaragua, le « traitement » subi par RCTV est devenue une cause célèbre pour tous ceux en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, offusqués par le culot et la popularité de Chavez, qu’ils qualifient de « assoiffé de pouvoir » et de « tyran ». Le fait qu’il soit le produit authentique d’un réveil populaire ne sera pas mentionné. Même sa description comme un « socialiste radical », généralement de manière péjorative, ignore volontairement qu’il est en réalité un nationaliste et un social-démocrate, une étiquette que le Parti Travailliste britannique était jadis fier de porter.

    A Washington, le gang des anciens des escadrons de la mort Iran-Contra, revenus au pouvoir sous Bush, craignent les relations économiques que Chavez est en train de nouer dans la région, comme le recours aux revenus du pétrole vénézuélien pour mettre fin à l’esclavagisme du FMI. Le fait qu’il maintienne une économie néo-libérale avec un taux de croissance de plus de 10%, qui permet aux riches de devenir plus riches, et faisant selon le magazine the American Banker « l’envie du monde bancaire » est rarement mentionné comme une critique justifiée de ses réformes timides.

    Evidemment, par les temps qui courent, toute réforme véritable est exotique. Et tandis que les élites libérales sous Blair et Bush s’abstiennent de défendre leurs propres démocraties et libertés fondamentales, ils observent le concept même de leur démocratie de privilégiés du haut vers le bas être remis en cause sur un continent dont Richard Nixon avait dit un jour que « tout le monde s’en fout ». Tout en cherchant par tous les moyens à lui inculquer les bonnes manières, à Chavez, leur arrogance les empêche d’accepter que les graines de l’idée de Rousseau sur la souveraineté populaire directe ait pu être semées chez les plus pauvres, une fois encore, et que « l’espoir dans l’esprit humain », dont Roberto parlait dans le stade, soit de retour.

    John Pilger

    http://www.johnpilger.com/articles/the-ghost-of-pinochet-hau...

    Traduction « c’est vrai que le changement c’est maintenant. Mais pas ici : là-bas » par VD pour le Grand Soir avec probablement les fautes et coquilles habituelles.

    URL de cet article 17470
    http://www.legrandsoir.info/L-esprit-de-Pinochet-hante-la.html

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  • Elle a visité neuf pays africains –Sénégal, Ouganda, Soudan du Sud, Kenya, Malawi, Afrique du Sud, Nigeria, Ghana, Bénin- en bénissant les parterres de ses « God bless you », et en jurant que Washington n’a comme unique objectif en Afrique que « renforcer les institutions démocratiques, promouvoir la croissance économique, faire avancer la paix et la sécurité ». La secrétaire d’état Hillary Clinton est donc allée en Afrique, en plein mois d’août, pour faire des bonnes œuvres.

    Elle a été accompagnée, dans la noble mission, par les exécutifs des plus grandes multinationales étasuniennes. Affaires, oui, mais conduites par un principe éthique que la Clinton a énoncé ainsi à Dakar : « Au 21ème siècle il faut que cesse le temps où les étrangers viennent extraire la richesse de l’Afrique pour eux-mêmes, en ne laissant rien ou très peu derrière eux ».

    Clinton, c’est connu, est un soutien convaincu du commerce équitable et solidaire. Comme celui qui est pratiqué au Nigeria, dont l’industrie pétrolifère est dominée par les compagnies étasuniennes, qui ramènent chez eux la moitié du brut extrait, pour plus de 30 milliards de dollars annuels.

    Pour les multinationales et pour l’élite nigériane au pouvoir, une source de richesse colossale, dont il ne reste quasiment rien pour la population. Selon la Banque mondiale, plus de la moitié des Nigérians se trouvent au-dessous du seuil de pauvreté, et l’espérance de vie moyenne est d’à peine 51 ans. La pollution pétrolière, provoquée par Shell, a dévasté le delta du Niger : pour le décontaminer, d’après un rapport de l’Onu, il faudrait au moins 25 années et des milliards de dollars.

    La même chose est en préparation au Soudan du Sud où, après la scission du reste du pays soutenue par les Usa, se concentre 75% des réserves pétrolifères soudanaises, à quoi s’ajoutent de précieuses matières premières et de vastes terres cultivables. La compagnie texane Nile Trading and Development, présidée par l’ex-ambassadeur étasunien E. Douglas, s’est accaparée, avec une aumône de 25 mille dollars, 400 mille hectares de la meilleure terre avec droit d’en exploiter les ressources (y compris forestières) pendant 49 ans.

    L’accaparement de terres fertiles en Afrique, après expropriations des populations, est devenu un business financier lucratif, géré par Goldman Sachs et JP Morgan, sur lequel spéculent, avec leurs fonds, même Harvard et d’autres prestigieuses universités étasuniennes.

    La stratégie économique étasunienne rencontre cependant en Afrique un formidable obstacle : la Chine, qui, à des conditions avantageuses pour les pays africains, construit des ports et des aéroports, des routes et des voies ferrées.

    Pour franchir cet obstacle, Washington abat son joker : le Commandement Africa, qui « protège et défend les intérêts de sécurité nationale des Etats-Unis, en renforçant les capacités de défense des états africains ». En d’autres termes, en s’appuyant sur les élites militaires (que le Pentagone essaie de recruter en leur offrant une formation, des armes et des dollars) pour ramener le plus grand nombre possible de pays dans l’orbite de Washington.

    Quand il n’y arrive pas, l’Africom « conduit des opérations militaires pour fournir un environnement de sécurité adapté au bon gouvernement ». Comme l’opération Odissey Dawn, lancée par l’Africom en mars 2011 : le commencement de la guerre pour renverser le gouvernement de la Libye (le pays africain avec les plus grosses réserves pétrolifères) et étouffer les organismes financiers de l’Union africaine, nés surtout grâce aux investissements libyens.

    Ainsi y a-t-il maintenant, en Libye, un « bon gouvernement » aux ordres de Washington.

    Par Manlio Dinucci il manifesto le 14/08/2012
    Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

    http://www.rougemidi.fr/spip.php?article7130


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  • Un article de Sébastien Hervieu pour le journal Le Monde, sur le bain de sang intervenu contre des mineurs grévistes en Afrique du Sud. La police a tiré et tué 34 mineurs et 78 blessés selon un bilan officiel. Jacob Zuma, le président élu d'Afrique du Sud est rentré aussitôt d'une réunion régionale et a déclenché une enquête.

     

    Quand la poussière est retombée, jeudi 16 août, à Marikana, les ombres menaçantes s'étaient muées en corps sans vie. Parmi la dizaine de mineurs baignant dans leur sang, seuls deux remuaient encore.

    Tendus, des policiers se rapprochaient en pointant le canon de leurs fusils automatiques. L'un d'entre eux ramassait puis éloignait un pistolet tombé des mains d'un travailleur.

    Les policiers sud-africains encadrent la grève des travailleurs de la mine de platine de Marikana dans le nord-ouest de Johannesburg, le 15 août.

    Après que les grévistes de la mine de platine de Marikana eurent été la cible de canons à eau et de grenades lacrymogènes pour être délogés d'une colline où ils s'étaient installés, des individus ont-ils riposté en tirant les premiers ?

    La police assure avoir agi "en état de légitime défense". Devant l'avancée soudaine d'un groupe de mineurs, les forces de l'ordre ont-elles au contraire réagi de manière disproportionnée ? De très longues secondes se sont écoulées avant que l'un des officiers lève le poing en l'air pour faire taire le feu nourri face à des assaillants armés de machettes et de gourdins sur le site de la mine située à une heure de route à l'ouest de Pretoria.

    Ensuite, des coups de feu ont continué à retentir dans plusieurs directions. Dans le ciel bleu de l'hiver austral, quatre hélicoptères tournoyaient. Plus tard encore, d'autres corps seront aperçus au pied de plusieurs ambulances.

    Les mineurs sud-africains en grève devant la mine de platine de Marikana.

    Vendredi, un bilan officiel de la police nationale a fait état de trente-quatre mineurs tués, et soixante-dix-huit, blessés. Ce jeudi noir est devenu l'un des jours les plus sombres de l'histoire de l'Afrique du Sud post-apartheid. Le choc dans l'opinion était alimenté par les images tournant en boucle sur les chaînes de télévision nationales, rappelant à beaucoup les interventions meurtrières de la police dans les townships sous le régime de la minorité blanche.

    "La police a fait tout ce qu'elle a pu mais ces gens avaient dit qu'ils n'étaient pas prêts à quitter les lieux mais plutôt à se battre", s'est défendu le ministre. Le président Jacob Zuma s'est déclaré "choqué et consterné par cette violence absurde".

     "LA DIRECTION FAIT LA SOURDE OREILLE"

    Avant les violences de jeudi, la grève, lancée il y a une semaine, affichait déjà le triste bilan de dix morts, dont deux policiers. Roger Phillimore, le président de Lonmin, l'un des principaux extracteurs de platine dans le monde qui possède la mine de Marikana, a estimé que c'était "clairement une affaire d'ordre public plutôt qu'un conflit social".

    Les corps de mineurs tués par les forces de police gisent sur le site de la mine de platine de Marikana, le 16 août, près de Johannesburg.

    Plus tôt dans la journée, Lonmin avait refusé de négocier toute augmentation de salaires et intimé l'ordre aux 3 000 grévistes de reprendre le travail sous peine d'être licenciés.

    En chemin vers la butte rocailleuse, un homme, qui préfère rester anonyme, se doutait bien qu'il n'obtiendrait pas les 1 250 euros exigés. Mais après vingt années passées sous terre à récupérer le précieux métal, souvent six jours sur sept, officiellement huit heures par jour mais souvent neuf payées huit, il pense quand même qu'il mérite mieux que ses 580 euros mensuels.

    "J'ai cinq enfants dont trois au lycée, raconte-il. Comment voulez-vous que je les envoie à l'université avec ce salaire ?" Ses camarades grévistes gagnent en moyenne 400 euros par mois. "On se tue à la tâche et quand on demande quelque chose à la direction, elle fait la sourde oreille", ajoute-t-il.

    Le corps amaigri, le souffle court, Domingos Tivano, 39 ans, est en arrêt de travail depuis juin. "Mais comme je ne suis toujours pas revenu, je crois qu'ils m'ont viré", glisse-t-il. Le médecin de l'hôpital de la mine lui a diagnostiqué une tuberculose, mais ne s'est pas étendu sur les causes. "Des explosions ont souvent lieu avant qu'on ait le temps de remonter, nos masques ne nous protègent pas bien, cela fait douze ans que j'avale de la poussière", explique-t-il.

    Les mineurs sud-africains en grève devant la mine de platine de Marikana, le 15 août, dans le nord-ouest de Johannesburg.

    La plupart des mineurs vivent à quelques centaines de mètres du principal puits dans des cabanes en tôle, dont à peine une sur deux à l'électricité. A l'extérieur, parfois, un robinet crachote. Les champs sont parsemés de détritus.

     CONFLITS D'INTÉRÊTS

    En début de semaine, une étude sur les producteurs de platine de la région, publiée par la fondation Bench Marks, spécialisée dans la responsabilité sociale des entreprises, rappelait que les compagnies minières faisaient des profits très importants alors que les communautés avoisinantes, "comme celles de Marikana", souffrent d'un haut niveau d'inégalité et de pauvreté.

    "Ils montent des projets sociaux essentiellement pour soigner leur image dans l'opinion, mais ils consultent rarement les populations pour savoir ce dont elles ont vraiment besoin", lit-on dans l'étude.

    Assis dans une cour, un non-gréviste n'ose pas aller travailler. "Je me ferais tuer par les autres", affirme-t-il. Derrière le conflit social se cache une lutte violente entre le puissant mais déclinant syndicat national des mineurs (NUM), précieux soutien du Congrès national africain (ANC), le parti au pouvoir et une branche dissidente, AMCU, dont le succès croissant se nourrit des espoirs déçus d'une partie de la population. En février, deux ouvriers ont été tués lors d'une grève dans une autre mine de platine de la région.

    "Est-ce que la jeune génération doit être asservie à la pauvreté toute sa vie et être l'esclave d'une minorité blanche qui continue à contrôler les ressources après dix-huit années de démocratie ?" s'interrogeait, juste avant l'assaut de la police, Joseph Mathuniwa, le président du nouveau syndicat à l'origine de la grève.

    A quatre mois du congrès électif de l'ANC, il est possible que cette lutte syndicale soit instrumentalisée par des factions du parti opposées à la réélection de Jacob Zuma pour un second mandat. AMCU accuse ainsi le NUM de ne pas défendre ses membres et de "partager le même lit que la direction".

    "Les partis qui veulent gagner les élections ont besoin d'énormément d'argent, et ces compagnies leur donnent ce financement", alertait lundi David van Wyk. Le chercheur de la fondation Bench Marks s'inquiétait aussi de ces hommes politiques qui intégraient de plus en plus souvent les conseils d'administration de grandes sociétés. Ex-secrétaire général de NUM et figure majeure de l'ANC, Cyril Ramaphosa est aujourd'hui administrateur de Lonmin.

     

    Sebastien Hervieu (Marikana, Afrique du Sud, envoyé spécial)

     

    Note de ma pomme: Ce n'est pas la première fois qu'un conflit social important éclate en Afrique du Sud. Le chemin, pour résorber toutes les inégalités découlant de l'apartheid qui a régné longtemps sur le pays, est encore long et difficile. Et la misère d'une partie de la population noire est une réalité qui mine la société sud-africaine.

    Jacob Zuma, président de l'Afrique du Sud, revenu d'urgence d'une conférence régionale au Mosambique, a promis une enquête rapide sur ce bain de sang. Espérons que des considérations politiciennes ne l'enterreront pas.

    La compagnie Lonmin, qui exploite la mine dans laquelle travaillent les mineurs grévistes, a promis d'aider à l'identification des corps et d'organiser les obsèques des victimes. La compagnie va aussi offrir de payer les frais de scolarité des enfants des mineurs tués, de la primaire à l'université. C'est le moins qu'elle puisse faire, après avoir refusé toute discussion avec les grévistes.

    Lonmin est une société privée de production de platine dont le siège social se situe à Londres, capitale de la Grande-Bretagne qui abrite des paradis fiscaux et la City plaque tournante de l'argent sale pour l'Europe et fer de lance du dollar sur le vieux continent. Lonmin est côté à la Bourse de Londres.

    Le salaire du boss de Lonmin s'élevait en 2009 à 788 844 livres, soit plus d'un million d'euros. Et avec le coût des minerais précieux qui flambe, sans nul doute que les actionnaires et dirigeants de Lonmin n'iront pas se ravitailler dans une association caritative en 2012.

    Qui a dit que la lutte des classes n'existait plus? C'est vrai, il y en a tant qui assènent cela à tout bout de champ dans les médias, non?

    http://le-blog-de-roger-colombier.over-blog.com

     

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  • Afrique du Sud : la police tire sur les mineurs en grève, tuant 34 personnes

    Des policiers devant des corps allongés de mineurs, devant la mine de Marikana, le 16 août.

    Trente-quatre mineurs ont été tués et soixante-dix-huit blessés dans les affrontements, jeudi 16 août, entre grévistes et policiers à la mine de platine Lonmin de Marikana, en Afrique du Sud, selon un bilan officiel de la police nationale. Le syndicat des mineurs NUM a évoqué trente-six morts. Par ailleurs, deux cent cinquante-neuf personnes ont été arrêtées, "pour différents motifs, violence publique, meurtre, tentative de meurtre, rassemblement illégal, possession d'armes dangereuses", a ajouté la chef de la police nationale, Mme Riah Phiyega.

    Ces morts s'ajoutent aux dix survenues dans les violences entre syndicats survenues depuis dimanche sur ce site minier, où plusieurs centaines de grévistes réclamaient d'importantes augmentations de salaire.

    Le président sud-africain, Jacob Zuma, a annoncé la création d'une commission d'enquête pour faire la lumière sur cette fusillade. "Nous devons faire éclater la vérité sur ce qui s'est passé ici, c'est pourquoi j'ai décidé d'instaurer une commission d'enquête pour découvrir les causes réelles de cet incident", a déclaré le chef de l'Etat à Marikana, revenu précipitamment d'un sommet régional au Mozambique pour se rendre sur les lieux du drame.

    En Afrique du Sud, grévistes, syndicats et forces de l'ordre s'opposent dans des affrontements violets à la mine de Marikana.

    LA POLICE INVOQUE LA LÉGITIME DÉFENSE

    Pour justifier son action, la police a montré des vidéos où l'on voit les forces de l'ordre tenter de disperser les mineurs en négociant avec eux, puis en utilisant différents moyens, dont des gaz lacrymogènes, des canons à eau, des grenades incapacitantes et des balles en caoutchouc. On y voit aussi un policier supplier les mineurs de se disperser : "Nous ne sommes pas ici pour vous arrêter, notre seul problème, ce sont les armes."

    Selon la chef de la police nationale, "les policiers ont dû faire usage de la force pour se défendre contre le groupe qui les chargeait". "La police a commencé par utiliser le minimum de force, conformément à notre politique et à la loi. (...) Ce n'est que lorsque cela n'a pas suffi à stopper les manifestants que nous avons utilisé un autre moyen. Et je pense profondément, nous pensons, que cela était justifié. Nous ne voulions la mort de personne", a-t-elle assuré.

    Selon Reuters, des policiers, lourdement armés et appuyés par des véhicules blindés, étaient en train de dresser des barrages de fils barbelés quand ils ont été débordés par quelque trois mille employés de la mine, située au nord-est de Johannesburg. Ils ont alors tiré des rafales d'arme automatique sur un groupe de mineurs qui surgissait de derrière un véhicule.

     
     

    "ILS N'ONT PAS L'INTENTION DE BOUGER"

    Jeudi matin, plusieurs centaines d'hommes armés de gourdins, de barres de fer et de machettes s'étaient de nouveau regroupés à l'extérieur de la mine pour réclamer des augmentations de salaire. Le porte-parole du syndicat des mineurs, Lesiba Seshoka, a déclaré à la chaîne d'information eNews que le président de l'AMCU, le petit syndicat qui avait appelé à la grève, avait tenté de persuader les mineurs de reprendre le travail, en vain. "Ils lui ont dit qu'ils étaient prêts à mourir (...) qu'ils n'avaient pas l'intention de bouger, qu'ils allaient appeler leurs enfants à les rejoindre" sur la colline où ils sont regroupés depuis lundi.

    Des incidents avaient commencé vendredi dernier à la mine, lorsque des centaines de mineurs de fond ont lancé une grève sauvage. Certains, encouragés par le syndicat AMCU, réclamaient 12 500 rands par mois (1 250 euros), soit plus qu'un triplement de leur salaire. Des affrontements ont alors éclaté entre partisans de la NUM et ceux de l'AMCU, né d'une dissidence de la NUM.

    Les mineurs, qui vivent dans des taudis accolés à la mine, sans eau courante, touchent environ 4 000 rands par mois (400 euros)."Nous sommes exploités, ni le gouvernement ni les syndicats ne sont venus à notre aide", avait déclaré l'un d'eux mercredi, Thuso Masakeng, "les sociétés minières font de l'argent grâce à notre travail et on ne nous paye presque rien. Nous ne pouvons pas nous offrir une vie décente. Nous vivons comme des animaux à cause des salaires de misère".

    Source LE MONDE


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  • Les Pussy Riot comdamnées à deux ans de prison

    Nadejda Tolokonnikova des Pussy Riot et militante LGBT

    Les trois jeunes femmes musiciennes et militantes du groupe de punk russe Pussy Riot ont été  reconnues "coupables de hooliganisme" et d’"incitation à la haine religieuse". Le verdict est tombé ce vendredi après midi, elles sont condamnées à 2 ans de prison.

     

    Les Pussy Riot comdamnées à deux ans de prison


    Nadejda Tolokonnikova, 22 ans, d'Ekaterina Samoutsevitch, 30 ans, et de Maria Alekhina, 24 ans, toutes trois membres du groupes Pussy Riot, avaient chanté en février une "prière punk" dans la cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou, demandant à la Sainte Vierge de "chasser Poutine" du pouvoir. Pour cette raison elles ont été condamnées à 2 années de prison chacune. Le parquet avait requis 3 ans.  La juge a souligné qu'il n'y avait pas eu de "repentir" des accusées, malgré leurs excuses répétées et qu'elles avaient "violé l'ordre public" et "offensé les sentiments (religieux) des croyants".
    L'avocate des musiciennes a annoncé qu’elle ferait appel, y compris devant les instances internationales.

    "Sainte Marie mère de Dieu, deviens féministe"

    Le texte de la prière incriminée n’est effectivement pas qu’anti-Poutine, il est aussi féministe. Il accuse la religion d’être misogyne, tout comme il accuse le patriarche orthodoxe accusé de "croire en Poutine plus qu’en dieu". Ce qui motive, outre l’aspect sacrilège de jouer du rock dans une église, la condamnation pour "incitation à la haine religieuse".

    Les Pussy Riot ne sont pas des inconnues en Russie. Depuis plusieurs mois, elles multiplient les performances autant militantes qu’artistiques, pour défendre la cause des femmes, des homosexuels, la liberté sexuelle et contre la « routine » en général. Leurs actions sont généralement à forte connotation sexuelle, dans le but de secouer la société patriarcale et traditionnelle russe. Leurs performances classiques sont les concerts sauvages et les dessins de sexes géants sur les symboles phallocrates. Plus original, les membres du groupe tentent aussi d’embrasser sur la bouche des policiers du même sexe.

    Procès perdu mais victoire au moins médiatique

    Les membres du groupe ont réussi à émouvoir partout dans le monde. Des manifestations de soutien ont lieu ce vendredi dans de nombreuses villes, y compris à Paris. Et les jeunes artistes ont aussi ému de nombreuses stars qui se sont exprimés en leur faveur : Madonna, Sting, Red Hot Chili Peppers, Faith No More, Franz Ferdinand, Anti-Flag, Pete Townshend des Who, Jarvis Cocker de Pulp, Neil Tennant des Pet Shop Boys), Johnny Marr des Smiths), ou encore les acteurs Danny DeVito et Stephen Fry.

    Lire aussi http://pcautunmorvan.eklablog.com/trois-ans-de-prison-pour-une-priere-anti-poutine-a48482784


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  • Les pilotes de Air France valident la suppression de 5000 postes

    Alexande de Juniac, PDG d'Air France

    Les pilotes d'Air France ont finalement accepté le projet Transform 15, qui vise à gagner en "productivité", autrement dit ce plan prévoit la suppression de milliers de postes. Mais les pilotes devraient eux bénéficier de bonus conséquents.

    Le SNPL, syndicat majoritaire chez les pilotes de ligne, a décidé de signer le projet d'accord proposé par la direction après avoir consulté ses adhérents par referendum. Les pilotes ont approuvé l'accord à hauteur de 67% (avec un taux de participation de 83%), indique jeudi le SNPL dans un communiqué. Le SNPL, représentant 70 % des voix aux élections professionnelles, sa seul signature suffit donc pour faire adopter l'accord d'entreprise. Le deuxième syndicat, le SPAF (environ 20%) avait fait grève cinq jours durant en juillet pour dénoncer les nouvelles conditions de travail et de rémunération prévues dans le plan de redressement.

    La direction d'Air France s'est félicitée de ce vote, dont le "résultat sans ambiguïté témoigne de l'esprit de responsabilité des pilotes de la compagnie et de leurs représentants", selon le PDG Alexandre de Juniac. Le projet Transform 15 doit permettre un gain de productivité de 20 % selon la direction. La recette du succès n'est pas nouvelle puisque le projet, pour atteindre ses objectifs, prévoit de supprimer 5122 postes d'ici fin 2013, dont 1712 via des départs naturels (retraites, etc.).

    "10 000 emplois au sol supprimés depuis 2007"

    "Il n’y a pas de plan B", S’ils devaient voter contre, nous appliquerions un texte de façon unilatérale comme le droit nous y autorise". Alexandre de Juniac, PDG d'Air France avait annoncé la couleur après le rejet de l'accord par les personnels naviguant commerciaux (PNC). Déjà visée par le précédent plan de départs volontaires de 2009, qui avait débarqué 1 900 salariés, cette catégorie de personnel se verrait donc de nouveau proposer 2 717 départs volontaires d’ici à fin 2013. "Cela ferait l’équivalent de 10 000 emplois au sol supprimés depuis 2007", notait Mehdi Kemoune, secrétaire général adjoint à la CGT Air France, en juillet. Les économies vont donc principalement se concentrer sur les PNC car la direction, ne semble pas vouloir loger les pilotes à la même enseigne que les autres personnels.

    Selon des sources internes à la compagnie, la direction a prévu pour inciter les pilotes de ligne à voler pour Transavia (compagnie lowcost de Air France-KLM) des maxi-bonus allant de 60.000 euros pour un commandant à 30.000 euros pour un copilote."Ces sommes sont scandaleuses [...]Je trouve ça d'autant plus choquant que des tas de personnels doivent se serrer la ceinture." jugeait un commandant de bord d'Air France, sous couvert d'anonymat, à l'AFP.


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