• Syrie : le point de vue des communistes du PRCF

    Une réflexion de la commission internationale

    du Pôle de Renaissance Communiste en France

     

    clic-rouge-prcf«L’Orient compliqué » dont parlait le Général de Gaulle ne permet pas, contrairement à la non-pensée-BHL, des analyses à l’emporte pièce. Le schéma « western » n’est pas de mise, tant pis pour ceux, nos médias de masse, propriété, faut-il le rappeler de grands groupes capitalistes, et de marchands d'armes en particulier, qui ne sont capables de raisonner que de façon manichéenne : là les gentils, ici les méchants, et cela dans le but de préparer les esprits aux guerres d'agression impérialistes. Les "médias-mensonges" du type "Timisoara" ou "pouponnières du Koweït" ne doivent pas être négligés.
     
    La situation en Syrie est caractérisée par des affrontements extrêmement violents entre des  rebelles  opposés au régime Assad - l’actuel Président du pays - certains armés comme l’ « Armée Libre »  et les partisans du régime dont l’armée reste globalement fidèle à Assad. Tueries, massacres se succèdent, manipulations médiatiques et politiques aussi.

     

    De plus les deux blocs qui s’opposent ne sont pas homogènes : parmi les opposants nous trouvons des citoyens qui veulent en finir avec un régime clanique et corrompu mais aussi des terroristes d’Al-Qaïda, sans parler des agents des « services » occidentaux qui jettent de l’huile sur des feux qu'ils ont eux mêmes allumé.

     

    Parmi les soutiens au régime il y a aussi des inconditionnels, ceux qui profitent du régime et de son évolution néo-libérale, et des critiques, qui soutiennent l’indépendance de la Syrie contre les menées impérialistes plus que le régime lui-même.

     

    D’autre part, le pays est non seulement composé de courants politiques différents et opposés mais aussi de communautés religieuses qui se positionnent en fonction de ce qu’elles croient être leurs intérêts : les Alaouites (groupe minoritaire dont fait partie le « clan »Assad) ou les Chrétiens plutôt avec le régime qui se proclame laïc et qui « protège » les minorités, puisqu'il est lui-même une minorité, les sunnites majoritaires et partiellement opposés à Assad, la forte minorité Chiite et les Druzes.

     

    Enfin il faut tenir compte du fait que les tribus, leurs chefs, gardent une importance certaine dans les relations politiques inter-syriennes dans un écheveau complexe et fluctuant.

     

    N’oublions pas, par ailleurs, que le conflit syrien est surdéterminé par la géopolitique mondiale. Les USA et la France impérialiste veulent profiter de la guerre civile pour recoloniser de fait le pays, tuer toute opposition au « Grand Israël » et au « Grand Proche-Orient » voulu par Bush, et surtout, finir de couper la Russie et la Chine de l’Afrique et de la Méditerranée.

     

    Déjà la Russie a prévenu qu’elle ne reculerait pas en Syrie. Les enjeux dépassent, en effet, le cadre proche-oriental, le but pour la Trilatérale USA/Union Européenne/Japon est de briser l’élan des « BRIC », les pays émergents qui réclament leur part au soleil dans le cadre de la mondialisation capitaliste. Sans idéaliser aucun des États concernés, qui postulent à des degrés divers à des positions dominantes dans le cadre du système capitaliste, il est impossible de ne pas voir que les « BRIC » sont conjoncturellement amenés à défendre le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes – une revendication plus révolutionnaire que jamais -, alors que le bloc trilatéral est porté à broyer l’indépendance de tous les peuples, à commencer par le nôtre : si bien que toute victoire de l’impérialisme « français », y compris dirigé par le « gentil » et « normal » Hollande, est d’abord une défaite pour le mouvement démocratique dans notre pays.

     

    Bien entendu, l’histoire de la Syrie conditionne aussi le présent. C’est après un long combat contre les puissances coloniales que la Syrie devient officiellement indépendante en 1946. Lutte contre l’occupation turque dure 400 ans et prend fin à la suite de la Révolte arabe et du rapport de forces crée après la Première guerre mondiale.

     

    Mais en 1920 la France impose son mandat avec son armée. C’est alors que la Syrie est démembrée en trois États: Liban, Jordanie et Syrie proprement dite. Événement qui explique l’attitude interventionniste de la Syrie à l’égard du Liban pendant des décennies. Finalement c’est en 1948, après la Deuxième guerre mondiale que la République syrienne est proclamée. Mais bien entendu les puissances impérialistes, en particulier les États-Unis tente de garder la main sur ce pays.

     

    De 1948 à 1963 toute une série de coups d’état ont lieu et le pays reste très instable, mais les progrès du panarabisme socialisant au Moyen-Orient, avec, en Egypte le nassérisme, poussent à la création du Parti Baas. Celui-ci finit par s’emparer du pouvoir en 63 mais ce n’est qu’en 1970 que Hafez el Assad, à la suite d’un nouveau coup d’état, s’empare du pouvoir. Il meurt en 2000 et son fils Bachir lui succède.

     

    Disons tout de suite que, dès l’origine, le « socialisme » dont se réclame le Baas se définit comme antimarxiste, récusant la lutte des classes : c’est en fait l’idéologie de la bourgeoisie anti-impérialiste et laïque obligée de tenir compte d’un rapport de forces mondial alors favorable au camp socialiste et au progressisme.

     

    Constatons d’ailleurs que l’orientation de plus en plus à droite, de plus en plus favorable au capital, de plus en plus favorable à l’impérialisme même, se produit simultanément que l’affaiblissement, puis la défaite du camp socialiste, avec les privatisations massives de l’économie, y compris sous la forme d’une coupe réglée clanique, le recul de la laïcité, le recul de l’indépendance nationale au profit des impérialismes.

     

    Cette situation nouvelle entraîne un mécontentement de masse parmi les peuples arabes qui luttent pour plus de justice et de libertés. Comme l’impérialisme ne supporte plus la moindre autonomie des régimes du Moyen-Orient du fait de la présence de sources d’énergie vitales pour les pays impérialistes, les États-Unis et ses alliés, malgré des contradictions internes, veulent instaurer un « nouveau » Moyen-Orient, comprendre un nouveau protectorat sur cet espace géostratégique, d’autant plus important que les USA tentent de couper la Chine de son approvisionnement en énergie, Chine qui est l’ennemi stratégique fondamental des Etats-Unis.

     

    C’est d’ailleurs la raison de l’affirmation de l’alliance Chine-Russie récemment affirmée à Pékin par les deux grands pays qui du coup s’opposent aux ingérences impérialistes en Syrie au sein de l’ONU. Surtout qu’ils ont été échaudés par l’affaire libyenne dont on n’a pas assez dit qu’elle devait beaucoup aux plans de Kadhafi de se rapprocher de la Chine.

     

    En tous les cas la conjonction de ces deux facteurs, mécontentement social profond des masses arabes et volonté de l’impérialisme de détruire les vestiges du nationalisme arabe ont créé une situation explosive dont une des expressions sont les «révolutions arabes ». Ceci étant, comme les régimes arabes bourgeois ont pourchassé, massacré, anéanti les avant-gardes progressistes et révolutionnaires arabes, les masses se sont trouvées, avec les islamistes, un porte-parole de substitution. Mais il se trouve que ce porte-parole est parfaitement compatible avec l’impérialisme. Un nouveau genre de bourgeoisie « compradore » qui veut sa part des richesses mais ne remet pas en cause le capitalisme ni la domination impérialiste.

     

    Ceci étant des contradictions peuvent apparaitre et apparaissent entre eux et l’autonomie des sujets politiques est telle que nous ne devons pas avoir une vision mécaniste des ces situations mais une vision dialectique, appréhendant les contradictions qui peuvent surgir chez nos ennemis, impérialistes ou islamistes. Mais force est de constater que ces derniers sont, en Syrie, soutenus et armés par le Qatar et l'Arabie Saoudite, donc par les Américains.

     

    Dans ce contexte, quelle attitude pour les communistes ?

     

    Soutenir les luttes des masses populaires arabes et de la région en tant qu’elles expriment leur indépendance par rapport aux ingérences impérialistes et qu’elles refusent l’appel à l’ingérence franco-américaine.

     

    Soutenir l’indépendance nationale et la souveraineté des pays concernés.

     

    Développer une ligne anti-impérialiste conséquente : ne jamais sombrer dans la métaphysique manichéenne et soutenir l’insoutenable, sachant que l'ennemi de mon ennemi n’est pas forcément mon ami....l’histoire illustre amplement l’impasse de ce genre de raisonnement primaire et antidialectique, soyons donc lucides et vigilants.

     

    Développer la solidarité de classe avec les communistes syriens, iraniens, etc.

     

    Défendre un pays contre l’agression et l’ingérence impérialiste prime sur toute autre considération, car l’impérialisme est l’ennemi principal des peuples.

     

    Mais cela ne signifie pas donner brevet de progressisme et de vertu à un régime. Nous serons, en tous les cas, au premier rang du combat contre les guerres impérialistes et aux côtés des peuples.

    Source : «CLIC ROUGE» PRCF


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