• Sarkozy «Ich bin ein Berliner !»

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    Quinze références au modèle allemand en 70 minutes d’émission. Même la presse allemande s'étonne de tant de louanges. Au point que certains journaux craignent l’overdose et se demandent si l’utilisation politicienne du modèle franco-allemand ne risque pas de nuire autant au candidat Sarkozy qu’au couple lui-même.  Par Régis Soubrouillard - Marianne  

    Berlin est désormais la capitale de la France ! C’est la principale information –subliminale- délivrée dimanche soir par le président de la République encore Française. Tout juste remise de sa réunification avec la RDA, voilà notre cher président dans les starting-blocks, presque prêt à aller plaider au Bundestag la cause d’une unification franco-allemande. Même outre-rhin, la presse s'interroge sur cet excès de sollicitudes et se demande ce qu’il est passé par la tête du "Französisch präsident".  Le Süddeutsche Zeitung attaque d’emblée : "selon la rumeur, le film préféré de Nicolas Sarkozy est celui du cinéaste Robert Bresson Un condamné à mort s’est échappé. Un titre qui sonne comme un programme électoral pour le président en campagne. Sarkozy n'est, en effet, pas homme à renoncer. Dimanche soir, il a commencé à essayer de renverser la tendance. C’est lors d’une apparition télévisée qu’il a tenté de convaincre ses «chers compatriotes» de refaire un bout de chemin ensemble". Et le journal d’expliquer sa stratégie "Sarkozy se voit comme un Gerhard Schröder à la française. A l'instar de l'ancien chancelier allemand, qu'il décrit comme «un homme de grandes qualités», il entend booster sa campagne présidentielle par des mesures impopulaires mais nécessaires sur le plan économique. Mais contrairement à Schröder, il espère l’emporter".

    Lors des législatives anticipées de 2005, grâce à ses réformes, le très impopulaire Schröder effectuera sur le fil une remontée aussi spectaculaire qu'inattendue. Mais pas sufisante pour constituer une majorité. L'ancien chancellier allemand s'est, depuis, reconverti dans le gaz, chez Gazprom, où il joue les VRP de luxe de Vladimir Poutine. Si die Welt comprend le pacte économique Merkoz y, le quotidien doute que l’idylle politique ne s’avère réellement payante sur le plan électoral : "La stratégie de l'UMP qui consiste à mettre l’alliance avec l’Allemagne de Merkel au centre de sa campagne n’est pas sans risques. L'enthousiasme des français pour la discipline économique allemande est très limité. S’appuyer trop sur l’exemple allemand pourrait même à terme dérouter, à gauche comme à droite, les partisans d’un rapprochement franco-allemand. A trop jouer de l’amitié franco-allemande en période électorale, la relation entre les deux pays pourrait être mise à rude épreuve".  

    L'obsession allemande.  Un appel à la prudence dont n’a pas tenu compte la chancelière Angela Merkel qui a déjà fait savoir qu’elle apporterait son soutien au printemps au pas-encore-candidat-Sarkozy. "Elle sera la première collaboratrice de campagne du président Sarkozy" écrit die Süddeutsche Zeitung qui ajoute que Angela Merkel, "la femme la plus puissante du monde selon le magazine Forbes, souhaite s’assurer que Sarkozy passera encore 5 années à l’Elysée pour travailler activement à ses côtés". La chancelière allemande a décidé de montrer la lune au président français. Reste à savoir si le candidat regardera l’astre ou le doigt car c’est peu dire que ce duo de campagne ne convainc pas tout le monde.  
    Le politologue Stéphane Rozès voit même là une première erreur de communication : "Les déclarations faites par le patron de la CDU, son parti, sur la venue de la chancelière à des meetings électoraux relèvent d'une erreur de communication, Nicolas Sarkozy n'ayant pas encore officiellement confirmé qu'il briguerait un second mandat. C'est comme si c'était l'Allemagne qui décidait de sa candidature. Même si l'amitié franco-allemande est forte, pour les Français, ce n'est pas à d'autres pays de dire là où nous devons aller!". Certains à l'UMP ou proche conseillers de Sarkozy, tel Henri Guaino, n'ont pas tardé à prendre leurs distances avec cette ingérence allemande dans la campagne française. 
    Le Frankfuter Allgemeine Zeitung résume en quelques formules le risque de germanophobie du discours sarkozyste : "Deutschland, Deutschland über Paris" ou "Deutschlandobsession".  Inutile de traduire, le journal se montre encore plus explicite : "Son père est venu de Hongrie, sa femme d’Italie, ses grands-parents sont Grecs, mais pour Nicolas Sarkozy, actuellement il n'y a qu'un seul pays européen qui l’inspire: l'Allemagne". Quinze références à l’Allemagne en 70 minutes d’émission, même le quotidien allemand ne comprend pas une telle attention, relevant que ce n’est qu’en matière démographique que Sarkozy a eu l'audace de préférer le modèle français. Au point même que le journal relativise la réussite du modèle allemand, lui-même pâle copie par Gerhard Schröder du modèle anglo-saxon… 

    Dans le couple Merkozy, Merkel porte la culotte. Une copie de copie. A l’heure où le piratage est au centre des attentions, Sarkozy devrait avoir à payer de fortes sommes en droits d’auteur.  D’un point de vue bassement stratégique, le Spiegel se demande aussi si un soutien aussi ouvertement affiché ne pourrait pas avoir un "effet boomerang" contre-productif : "Angela Merkel est aussi appréciée pour sa discipline budgétaire prussienne, qu’elle est critiquée pour son intransigeance sur la question des euro-obligations et de l’indépendance de la BCE". Surtout l’hebdomadaire résume en une phrase à quel point une victoire du couple Merkozy serait, contrairement à ce qu’a tenté de faire croire le président dimanche soir, une défaite pour la France : "Il est en effet clair que dans le couple politique Merkozy tant vanté, c’est bien la chancelière qui porte la culotte".

    FTVi

    Ces 5 omissions de Nicolas Sarkozy sur l’Allemagne

    Source : TempsréelNouvelObs 30/01/2012

    Nicolas Sarkozy avant son interview télévisée à l'Élysée, le 29 janvier. (AFP PHOTO / POOL / LIONEL BONAVENTURE)

    Nicolas Sarkozy avant son interview télévisée à l’Élysée, le 29 janvier. (AFP PHOTO / POOL / LIONEL BONAVENTURE)

     

    L’Allemagne, un pays en crise ? Avec des exportations record, un excédent commercial de 150 milliards d’euros en 2010, un “pacte national pour l’apprentissage” qui bénéficie à de nombreux jeunes, il fait plutôt figure de modèle.

     Mais le miracle économique, chanté par le chef de l’Etat français, cache une autre réalité, plus dure, et touchant des millions d’Allemands. 

    1. L’Allemagne et sa croissance au ralenti

     

    Forte d’une croissance enviable et de déficits maîtrisés, l’Allemagne semble tourner le dos aux mauvais chiffres qui pèsent sur le reste de la zone euro. Qu’en est-il vraiment? En 2011 et 2010, l’Allemagne a vécu deux années fastes avec respectivement 3% et 3,7% de croissance du PIB.

     

    Malgré tout, le gouvernement d’Angela Merkel a revu à la baisse ses prévisions pour 2012, tablant sur 0,7%. Beaucoup d’économistes outre-Rhin jugent ces pronostics encore trop optimistes. D’ailleurs, début janvier 2012, une petite agence de notation américaine, Egan-Jones, a baissé d’un cran la note attribuée à l’Allemagne en raison du poids financier que font peser les plans de sauvetage de la zone euro sur sa dette publique. En 2010, l’endettement allemand se situait à 83% du PIB. Il est attendu à 86% en 2011.

     

    2. Une place de premier exportateur concurrencée

     

    Lorsque l’on parle du modèle allemand, on pense inévitablement aux exportations qui signent la réussite du pays. En Allemagne, le poids des exportations dans le PIB est passé de 26% en 1991 à 46% en 2010. En France, la progression est bien moindre : de 21 à 25% sur la même période. Mais une ombre plane sur ce tableau idyllique : l’Allemagne a cédé son rang de premier exportateur mondial à la Chine en 2009 et recule encore d’une place en 2010 au profit des Etats-Unis.

     

     3. Mini jobs et mini salaires

     

    Flexilibilité et modération salariale sont les maîtres mots des quatre lois Hartz promulguées par le chancelier Gerhard Schröder entre 2003 et 2005. Ces réformes devaient faire baisser le taux de chômage allemand. Le pari est réussi, mais à quel prix ?

     

    Nicolas Sarkozy constate qu’”en Allemagne, il y a moins de 8% de chômeurs”. Pour y parvenir, Berlin a durci les conditions d’indemnisation du chômage et a mis en place un dispositif de retour à l’emploi en favorisant le temps partiel, exonéré de charges.

     

    Ces “mini jobs”, venant compléter un autre emploi, s’adressent d’abord aux jeunes : les salaires ne peuvent dépasser 400 euros par mois et aucune couverture sociale n’est prévue. Entre 2000 et 2010, 2 millions d’emplois à temps partiel ont été crées outre-Rhin. Début janvier 2012, l’OIT (Organisation internationale du travail) pointe du doigt la compétitivité allemande par les bas salaires… “cause structurelle des difficultés récentes dans la zone euro”.

     

    4. Salaire minimum ? Nein !

     

    Une évolution semble se profiler en Allemagne : l’instauration d’un salaire minimum légal. Voulu par Angela Merkel, ce “Smic” allemand s’appliquerait aux branches d’activité qui en sont démunis, comme les services, l’hôtellerie et la restauration.

     

    Aujourd’hui, les salaires sont négociés annuellement entre les partenaires sociaux, les branches professionnelles et les länder. Avec pour conséquence de fortes disparités salariales selon les régions.

     

    Mais à y regarder de plus près, la réforme qui se profile n’est pas si révolutionnaire. En effet, dans un pays toujours très attachée à l’autonomie des syndicats, la chancelière s’oppose à un salaire minimum unique décidé par l’Etat fédéral, lui préférant des négociations au cas par cas.

     

    5. L’Allemagne et ses 6,5 millions de travailleurs pauvres

     

    L’Allemagne compte 6,5 millions de travailleurs pauvres. L’Institut allemand de recherche économique (DIW) calcule que le salaire moyen a baissé de 4,2% en 10 ans. La paupérisation de la société est la face cachée du modèle allemand.

     

    Selon Der Paritätische Verband, une confédération d’organismes d’entraide, le nombre d’Allemands menacés de pauvreté stagne à 14% depuis 2005, et ce en dépit des bonnes performances économiques du pays.

     

    Pire : le vieillissement de la société allemande contraint les personnes âgées à retourner travailler. Plus de 600.000 retraités se voient dans l’obligation de cumuler leur pension avec un salaire pour pouvoir vivre dignement.

     

    Florence Malleron – Le Nouvel Observateur



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