• Hugo Chavez repose parmi les siens

    « Un chef d’État qui va reposer dans un quartier populaire, c’est en soi tout un symbole »

      le 15 Mars 2013

    Venezuela : Hugo Chavez repose parmi les siens

    Caracas (Venezuela), envoyée spéciale. La dépouille du « Comandante » a été acheminée vendredi vers la caserne de la Montagne, symbole de la rébellion civico-militaire de 1992, au cœur d’un quartier populaire, bastion des luttes et du processus bolivarien. 

    Le président défunt Hugo Chavez revient, «chez lui», dans le quartier populaire du 23 de 
Enero (23 janvier). C’est là, dans ce barrio de 100 000 habitants du nord-ouest de Caracas, que le 4 février 1992, le Comandante lança une insurrection civilo-militaire pour libérer un Venezuela soumis aux diktats du FMI par une oligarchie raciste et obeissante. Il reposera dans le musée de la Révolution, ex-caserne de la Montagne, aux côtés de fresques symboles de subversion et de luttes avec les représentations du Che, de Lénine, de Karl Marx, ou encore d’Alexis Vive, ce jeune du quartier, tué en avril 2002 en défendant le nouveau processus bolivarien, victime d’un coup d’État orchestré par le patronat et la droite.

    La dépouille d’Hugo Chavez a été transférée hier de l’école militaire, où des milliers de Vénézuéliens continuent de rendre hommage au président décédé, il y a dix jours, jusque dans ce quartier vivier des luttes et dont le nom vient de la date de la chute du dictateur Marcos Perez Jimenez, en 1958. On s’attend à ce qu’une nouvelle déferlante humaine accompagne le cortège funèbre à travers la capitale où les chefs d’État bolivien et équatorien, Evo Morales et Rafael Correa, ont annoncé leur présence.

    « Un chef d’État qui va reposer dans un quartier populaire, c’est en soi tout un symbole », s’exclame Gustavo Borges, journaliste d’un média alternatif du quartier. « Tout le monde s’accorde à dire que le processus bolivarien a débuté lors du soulèvement du 4 février, ici, dans un berceau de révolte, rappelle ce militant de longue date. Le rédempteur des pauvres reste auprès des pauvres », en attendant que l’Assemblée nationale décide de le transférer au panthéon. La décision, qui doit être ratifiée par référendum, reste suspendue, en raison de l’élection présidentielle du 14 avril.

    "Nicolas Maduro poursuivra les missions qui nous ont sortis de la misère "

    Les drapeaux et autres affiches du Comandante sont autant de signes ostentatoires de sa popularité, et de l’engagement de ce quartier. Dans sa minuscule échoppe, Annie Caballero déclare, sans ambages, qu’elle votera pour Nicolas Maduro, président intérimaire et candidat du Parti socialiste unifié du Venezuela (Psuv). « Il poursuivra les missions (programmes sociaux) qui nous ont sortis de la misère », affirme cette Afro-Vénézuélienne qui précise qu’hier encore l’accès à « l’éducation, la santé, le sport étaient des rêves inaccessibles pour les pauvres ».

    À l’entrée de la Maison populaire Freddy-Parra, siège de la coordination Simon-Bolivar, et de la radio communautaire Son du 23, un peintre pose la touche finale à une nouvelle fresque : Hugo Chavez, béret rouge et habit militaire, fusil en joue, côtoie désormais son maître à penser, le Libertador, Simon Bolivar. « Le Comandante a ressorti la bannière de la lutte de classes, et du socialisme, alors que depuis la chute du mur de Berlin plus personne n’osait le faire », affirme Juan Contreras, journaliste et animateur de ce collectif. « Cette lutte est toujours d’actualité », poursuit-il, dans un pays polarisé entre « un peuple, patriote et chaviste, qui a conscience du rôle historique qu’il joue dans ce processus démocratique et participatif et une oligarchie rance, représentative du pouvoir financier, et à l’origine d’un coup d’État, d’un lock-out pétrolier et qui continue de conspirer ».

    L’affrontement ne connaîtra pas de trêve, même si, reconnaît Gustavo Borges, « l’approfondissement de la révolution dépendra du degré de conflictualité ». Elle a été la norme ces quatorze dernières années, et les actuelles passes d’armes entre les candidats Henrique Capriles, de la Table d’unité démocratique (MUD, coalition droitière), et Nicolas Maduro, donné grand favori, le confirment. Le gouverneur de l’État de Miranda a même été contraint de présenter des excuses tant ses accusations sur de prétendus mensonges d’État visant à dissimuler les circonstances de la mort de Chavez ont choqué.

    « Les mythes de l’opposition tombent l’un après l’autre », considère Gustavo Borges. Le premier, soutient-il, est le dénigrement de la popularité du leader défunt. « La droite a toujours dit que les gens étaient payés pour participer aux mobilisations chavistes, explique-t-il. Qui peut croire qu’on a distribué de l’argent aux millions de Vénézuéliens qui font la queue sur l’avenue des libérateurs ? » Le second argument asséné par l’opposition est que ce processus ne survivrait pas à son mentor. « Lors des élections des gouverneurs en décembre, Chavez était à Cuba pour se faire soigner. Il n’est jamais intervenu, et nous avons remporté vingt États (sur vingt-trois – NDLR), en regagnant des bastions de l’opposition. »

    La campagne est désormais lancée. Nicolas Maduro se pose en garant de la poursuite de la révolution bolivarienne, avec pour cap le programme pour la patrie 2013-2019, élaboré lors de la dernière présidentielle. Henrique Capriles a, lui, exigé, sans rire, des chavistes qu’ils cessent toute référence à Chavez.

    « Ce programme patriote nous permettra de tendre vers le socialisme qui n’existe pas encore aujourd’hui », précise le journaliste Juan Contreras. Selon lui, la participation citoyenne et populaire sera essentielle. Et d’évoquer le cadre « d’un État communal, l’addition de conseils communaux favorisant la mise en place de politiques publiques, décidées en bas avec le peuple ».

    Au pied de la caserne de la Montagne, un monument rappelle la journée du 4 février 1992, fruit, selon Hugo Chavez, « de la prise de conscience collective qui a permis aux Vénézuéliens de se convaincre de l’énorme force souveraine qu’ils détiennent ».


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