• Un nouvel outil pour spéculer contre la dette française ?

     
    Le contrat Eurex - organisé et permettant de prendre des positions aussi bien sur la vente que l'achat - ouvre la porte à de nouveaux acteurs.

    Outil de protection ou instrument de spéculation ? Le débat émerge avant le lancement le 16 avril - six jours avant le premier tour de la présidentielle - d'un nouveau produit financier assis sur l'évolution future des emprunts d'Etat français. Créé par Eurex, filiale du groupe allemand Deutsche Börse, ce contrat à terme permettra aux investisseurs de parier sur la hausse ou la baisse des obligations françaises à l'avenir.

    Ce "future", dans le jargon des financiers, est semblable à de multiples produits existant notamment dans les matières premières : cette technique permet par exemple à un producteur de blé de s'assurer dès aujourd'hui de figer le prix de vente de sa production de demain ou à un industriel de sécuriser son approvisionnement ; mais il constitue aussi une arme pour spéculer. Dans les années 1990, il existait d'ailleurs un tel produit sur la dette de la France.

    "POURQUOI PRENDRE UN TEL RISQUE ?"

    "Le timing du lancement de ce nouveau produit est troublant, note Marc Fiorentino, président d'Euroland Finance. Il va faciliter grandement la spéculation sur la dette française." Un investisseur souhaitant parier contre celle-ci avait jusqu'ici deux outils : d'abord, les "credit default swaps" (CDS), ces contrats d'assurance contre la faillite d'un emprunteur, mais leur utilisation est en train d'être limitée à ceux possédant des titres de dette ; ensuite, la vente à découvert, quand l'investisseur vend aujourd'hui un produit financier qu'il n'achètera que plus tard, mais ce marché de gré à gré reste circonscrit à un nombre limité d'intervenants, car très technique.

    Le contrat Eurex - organisé et permettant de prendre des positions aussi bien sur la vente que l'achat - ouvre donc la porte à de nouveaux acteurs... "Pourquoi prendre un tel risque ?, s'interroge l'eurodéputé Pascal Canfin (EELV), spécialiste des questions financières. Pour que ce produit soit un instrument de couverture et non de spéculation, il aurait fallu restreindre son utilisation à des investisseurs ayant effectivement de la dette française."

    Pour ses défenseurs, un tel produit doit permettre de rendre le marché des emprunts français plus attractif, car les investisseurs pourront se protéger contre des variations trop brutales, comme c'est le cas en Allemagne. Sur le modèle allemand, un "future" sur la dette italienne a d'ailleurs été créé en 2009, mais les volumes d'échanges sont restés faibles (1 milliard d'euros par jour pour une dette de 1 900 milliards).

    Clément Lacombe


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