PSA Aulnay : une saignée pour l’emploi, un malheur pour les salariés, du bonheur pour les actionnaires !
La direction de PSA Peugeot-Citroën vient d’annoncer la fermeture en 2014 du site d’Aulnay sous bois (Seine-Saint-Denis), où travaillent 3 300 salariés et la suppression de 8 000 emplois au total sur le territoire national. Les conséquences de cette annonce violente iront bien au-delà, la fermeture d’Aulnay s’accompagnera de la perte supplémentaire de 7 000 emplois induits parmi les entreprises de sous-traitance et de maintenance.
Alors qu’il passait son temps à nier ce projet odieux, depuis la révélation par la CGT, il y a un an, d’un plan de restructuration d’ampleur, Philippe Varin, administre sans ciller, une saignée pour l’emploi, annonciatrice de malheur pour les salariés d’Aulnay et des autres sites de Citroën. PSA s’inscrit dans la vague des licenciements boursiers, que les grands groupes du CAC40 gardaient sous le coude pour ne pas polluer le débat présidentiel. Les marchés financiers encouragent cyniquement cette attaque en rafale contre l’emploi, le court de l’action PSA augmentant aujourd’hui à 11H de 3,23%.
La direction de PSA prétexte de l’insuffisance des ventes de véhicules pour appuyer sa décision. Il n’en est rien ! Il reste à produire 450 000 Citroën C3 jusqu’à la fin de la commercialisation de ce véhicule, soit trois années de production. L’usine d’Aulnay est donc pérenne jusqu’en 2016, ce qui permettrait d’organiser la mise en production d’un nouveau véhicule et de garantir l’avenir de ce site historique.
Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, demande un rapport d’expertise, devant l’aider à préparer le plan de soutien à la filière automobile qu’il annoncera à la fin du mois.
Pour ce qui nous concerne et sans attendre, nous exigeons une opposition ferme de l’état à la fermeture de ce site industriel et la perte de ses 3 300 emplois. Pour les élu-e-s et militant-e-s PCF, l’heure est au développement d’une mobilisation avec les salariés et toutes les forces vives du département. Nous serons à leur côté, aujourd’hui à 14H, devant l’usine d’Aulnay-sous-Bois.
Hervé Bramy, secrétaire départemental du PCF
PSA Aulnay: "La décision de fermer le site a été prise en 2010"
Depuis deux ans, PSA savait qu'il allait fermer son usine d'Aulnay. C'est ce que révèle Philippe Julien, secrétaire du syndicat CGT de PSA Aulnay, dans l'Humanité Dimanche de cette semaine. L'entretien a été réalisé avant les annonces du constructeur automobile française de ce jeudi matin.
HD. Dans une grande partie des médias, la fermeture de l’usine d’Aulnay est présentée comme inéluctable ? Est-ce votre avis ?
Philippe Julien. Une partie de la presse nous a effectivement déjà enterrés vivants. Pourtant il n’y a aucun argument valable pour justifier la fermeture. On évoque la baisse des ventes. Mais PSA ne peut décider de fermer une des cinq usines de montage qu’il a en France sous prétexte d’une baisse du marché depuis le début de l’année, alors que cette chute intervient après deux années exceptionnelles, 2010 et 2011. En une dizaine d’années, PSA a augmenté son chiffre d’affaires en proportion de ses ventes de 41 à 61 milliards d’euros en 2011. Les effectifs ont baissé et la productivité a augmenté. Et ça ne serait pas rentable ? L’autre argument avancé, c’est une prétendue surcapacité, mot repris en boucle par les « experts » sans que rien ne soit jamais démontré. La direction a même affirmé qu’Aulnay ne marchait qu’à 50 % de ses capacités, alors que l’on fabrique 700 véhicules par jour, c’est-à-dire 100 % de la capacité d’une ligne de montage.
HD. Si l’on en croit le document envoyé anonymement à la CGT en juin 2011, la décision de fermeture aurait de toute façon été prise en 2010, une excellente année pour PSA.
Philippe Julien. Oui, effectivement, selon ce document la décision a été prise en janvier 2010. Elle est peut-être même antérieure. C’est donc sans rapport avec l’évolution du marché. Le calcul de la direction, c’est qu’en « saturant » les autres usines de montage – je n’emploie pas ce mot par hasard, c’est celui qui était utilisé dans le document – on peut augmenter la productivité de manière très importante. En vérité, les voitures continueront à être fabriquées, mais au lieu de l’être dans cinq usines elles le seront dans quatre.
HD. La direction du groupe invoque la nécessité de baisser les coûts de fabrication des modèles du segment B, dont la C3, fabriquée à Aulnay. Mais quels sont ces coûts de fabrication ?
Philippe Julien. C’était le premier argument de la direction pour fermer Aulnay : une marge insuffisante sur les petites voitures. Argument qu’elle a laissé tomber quand on lui a demandé le niveau de ses marges par modèle, sur l’ensemble des gammes fabriquées. L’un des problèmes, c’est le manque de transparence de la direction. D’où la nécessité de dispositifs permettant aux salariés de pouvoir contrôler réellement les comptes de l’entreprise, les coûts, les prix de revient.
HD. Depuis quelques années, la menace de fermeture semble passer d’un site à l’autre. Après Rennes, Aulnay…
Philippe Julien. C’est une technique de management. Depuis une dizaine d’années, il y a mise en concurrence des sites entre eux. On crée le doute. Chaque site est ainsi déstabilisé. Auparavant, chaque site savait à l’avance quel type de voiture lui serait attribué. La direction dit : « Aujourd’hui vous fabriquez tel modèle, mais après on ne sait pas. On réfléchit, on verra si vous êtes performants. » C’est une manière d’accroître l’exploitation des salariés.
HD. La CGT alerte depuis plus d’un an sur les plans de la direction. Qu’ont fait les pouvoirs publics ?
Philippe Julien. Dès qu’on a eu le document, on a alerté l’État. Puisque l’État, contrairement à ce qu’on entend un peu partout, a les moyens d’intervenir. Le code du travail lui permet de nommer des médiateurs pour intervenir dans un conflit du travail. Surtout, l’État a versé des centaines de millions d’euros d’aides au groupe PSA et même, il y a 2 ans, un prêt de 3 milliards à taux préférentiel. Par exemple, à travers les conventions APLD (activité partielle de longue durée – NDLR), qui en théorie sont là pour éviter les licenciements, l’État augmente sa participation au financement du chômage partiel, et l’employeur s’engage en contrepartie au maintien de l’emploi. PSA a signé des dizaines de conventions de ce type. Qu’attend l’État pour les faire respecter ? Au lieu de cela, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, se contente de demander au groupe de clarifier ses intentions. Il n’y aurait que le ministre qui ne les connaisse pas ! Et s’il lui manquait quelque chose dans son arsenal juridique, le gouvernement a aujourd’hui tous les moyens pour faire voter des lois qui soient favorables aux salariés. Entre autres d’interdiction des licenciements.
HD. Peut-on chiffrer le total des aides reçues par PSA ?
Philippe Julien. Nous n’obtenons que des données partielles, au compte-gouttes. Mais l’État peut connaître ce montant : aides à l’APLD, prime à la casse, aides pour des études sur la voiture électrique et la voiture hybride, argent versé au titre de la formation, exonérations de cotisations sociales, défiscalisation des heures supplémentaires, aides à la recherche et au développement, etc. On serait curieux de connaître le total. On accuse souvent les salariés d’être des assistés, on voit que de grands groupes le sont complètement !
HD. Il y a un CCE extraordinaire le 12 juillet. Un autre programmé le 25, juste avant les congés, qui démarrent le 27 juillet. Va-t-on vers un plan de sauvegarde (PSE) de l’emploi à Aulnay ?
Philippe Julien. Pour la première réunion aucun document n’a été remis à l’avance, contrairement à ce que prévoit la loi. Ils seront transmis en séance aux représentants du personnel. Ce qui, outre le choix des dates, juste avant les congés, montre que la direction craint la réaction des salariés. Les décisions prises seront-elles soumises au vote du CCE le 25 juillet ? On n’en connaît pas encore l’ordre du jour. Tout le monde a compris maintenant que la direction préparait la fermeture de l’usine. Elle se cale d’ailleurs sur le calendrier prévu dans le document que nous avons rendu public. C’est la fin d’un an de mensonges, au moins sur ce terrain. Mais l’objectif, c’est de fermer Aulnay, comme Melun (Seine-et-Marne) et Asnières (Hauts-de-Seine), sans PSE. Pour la direction, c’est encore trop cher ! Et cela l’obligerait à négocier avec les syndicats. La direction compte fermer Aulnay dans le cadre de la GEPEC, la gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences, qui normalement n’est pas prévue pour fermer des entreprises mais au contraire pour éviter les licenciements.
HD. Quel est l’état d’esprit des salariés ?
Philippe Julien. Plusieurs centaines d’entre eux sont prêts à se mobiliser pour sauver leur emploi, même si d’autres hésitent encore à entrer dans une lutte collective. Les 4 et 5 juillet par exemple, les salariés de la peinture – un secteur qui fait rarement grève – ont arrêté le travail. Le journal « les Échos » a titré récemment « Comment désamorcer la bombe d’Aulnay ? » (le 29 juin – NDLR). Comme si c’était la seule préoccupation, et pas de préserver l’emploi ! Effectivement, 3 000 salariés unis pour mener une lutte collective, qui peuvent s’adresser aux autres salariés dans la même situation, mais aussi à ceux qui restent au travail soumis à des efforts croissants de productivité, des baisses de salaire… c’est une bombe. Nous avons bien conscience que nous ne sommes pas les seuls salariés menacés. Dans le groupe PSA, il y a de nombreux licenciements, des suppressions de poste dans tous les sites. C’est la même chose pour toute la filière automobile, pour les équipementiers. Le fait que nous soyons une grosse usine en région parisienne nous donne la responsabilité de porter haut et fort la revendication du maintien de l’emploi, de l’interdiction des licenciements, de la répartition du travail entre toutes les usines.
La fermeture est actée, les promoteurs s'activent sur la future dépouille
Ce que tout le monde savait depuis longtemps, la direction de PSA le confirme ce matin dans un communiqué de presse, l’usine d’Aulnay comme celle de Rennes fermera d’ici 2014.
C’est un cataclysme supplémentaire pour l’emploi industriel et un coup très dur pour les 8000 salariés et leurs familles ainsi que les employés indirects.
Les salariés sont restés mobilisés en permanence car eux ne doutaient pas de cette issue tragique. Certains avaient déjà remarqué que l’usine se vidait tout doucement de sa substance, les salariés puis les machines.
Le député de l’époque Gérard Gaudron recommandait dans son rapport remis au gouvernement Fillon, la reconversion immédiate du site et des salariés.
La droite annonçait déjà au Parisien du 11 mai « il y a une usine de construction automobile de trop en France ».
Les élus communistes et les militants du Front de Gauche d’Aulnay et du Département condamnent cette décision de fermeture du site et s’inquiètent de l’avenir de ces milliers de personnes.
C’est encore plus scandaleux lorsqu’on entrevoit des promoteurs immobiliers venir frapper à la porte de la ville d’Aulnay-sous-Bois, après l’annonce d’une DUP possible par le Maire.
Quel devenir du site ? Quels plans déjà dans les tiroirs ? Comment ne pas mettre en corrélation les projets du Grand Paris et l’implantation d’une gare avec les appétits des spéculateurs y compris ceux de PSA qui y voit un juteux marché.
La spéculation va bon train tandis que des hommes et femmes sont en colère et pleurent sur leur avenir qui s’assombri.
Les salariés en lutte depuis de nombreux mois ont tout notre soutien car l’avenir de l’automobile dans le Département est une nécessité, il ne faut rienlâcher.
C’est une bataille nationale d’importance qui doit interpeller le Président de la République et le Ministre de Relance Productive.
Les militants et les élus communistes d’Aulnay-sous-Bois donnent aux habitants et aux salariés rendez-vous dès début septembre pour poursuivre la mobilisation de tous et construire ensemble les perspectives industrielles du site.
En ce sens nous répondons à l’appel des représentants des salariés qui se sont exprimés cette après-midi devant l’usine.