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    Le 5 avril 2011, l’UMP, le parti présidentiel organisait, une fois encore, la triste comédie d’un faux débat, cette fois sur la laïcité, sans même rappeler la loi de 1905, dont les deux premiers articles fondent les principes essentiels :

    art 1 : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes ».

    art. 2 : « La république ne reconnaît, ni ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. »

    Certes, tous les observateurs s’accordent à le constater, cette dernière « convention » a fait flop et a même provoqué quelques remous frileux au sein de la majorité.

    Mais, cette « convention » s’inscrit dans un contexte très inquiétant, de propos, d’interdictions, qui s’attaquent violemment aux étrangers, aux Roms, aux gens du voyage, aux immigrés, et aux « français musulmans » ainsi dénommés comme au temps des colonies….

    En quelques jours, Messieurs Guéant, Chatel et Copé se sont lancés dans une dangereuse et ignoble « croisade », présentant « les musulmans » comme ceux « qui font problème », qui troublent l’ordre public, interdisant aux mères portant un foulard d’accompagner les enfants en sortie scolaire, tentant d’imposer que les prêches dans les mosquées soient en français.

    C’est bien l’Islam qui est visé et non toutes les religions.

    Ainsi en 2008 Sarkozy a conclu un traité d’Etat à Etat entre le Saint-Siège et la République Française énonçant que, désormais toutes les institutions universitaires avalisées par le Vatican pourraient délivrer des diplômes.

    Terrible coup porté à la séparation des églises et de l’Etat.

    Comme si cela ne suffisait pas, Guéant et le parti présidentiel proposent un code de la laïcité !

    Comment, en effet, les promoteurs d’une France aux « racines chrétiennes » au premier rang desquels le Président de la République, pourraient-ils souscrire à la loi de1905 ?

    C’est donc bien la loi de 1905 qui est remise en cause et mise en danger. Stigmatiser, considérer comme suspects des hommes et des femmes du fait qu’ils sont d’une confession religieuse différente, c’est vider la laïcité de son sens et vouloir communautariser la société, c’est aussi exercer un pouvoir absolu sur les consciences.

    Le gouvernement français utilise, de façon récurrente, l’islam, comme exutoire commode : loi sur l’interdiction du foulard à l’école, loi sur l’interdiction du voile intégral (niqab) , entraînant dans son sillage une partie des députés de l’opposition et alimentant une nouvelle forme de racisme : l’ « islamophobie ».

    Comment ces convergences ont-elles été rendues possibles ?

    Une première réponse est, sans doute à chercher dans un souci commun de détourner les colères sociales grandissantes provoquées par une économie libérale et guerrière, largement acceptée par la classe politique comme seul modèle possible en dépit des dégâts qu’il provoque dans une grande partie de la population.

    Comment, en effet, faire admettre que les difficultés à se loger, à se soigner, à s’éduquer, à prendre sa retraite, que l’augmentation du chômage, que la précarisation grandissante seraient inéluctables, et, en tout état de cause, indépendantes des choix économiques du gouvernement français et de la communauté européenne!

    La désignation de boucs émissaires sert à tromper des êtres humains fragilisés et taraudés par la peur, bien réelle celle-ci, du lendemain.

    Ne s’agit-il pas, aussi, de déporter plus à droite les débats de la société française, de diviser pour détourner l’attention de la politique menée et d’utiliser l’arme la plus abjecte des droites : le racisme et la xénophobie à des fins politiques?

    Une autre réponse, se situe dans la manipulation des mots : en particulier la confusion savamment entretenue entre deux sens différents du mot « public ». « Public » : qui est du ressort de l’Etat, et « public » : ouvert au public, espace public, qui appartient à tous. Or c’est bien dans cet espace « public » que l’Etat doit garantir à tous la possibilité d’exprimer ses convictions, ses croyances religieuses et garantir les libertés de chacun..

    Cantonner l’expression des croyances religieuses dans la seule sphère privée, intime, la rendre invisible, c’est remettre en cause la liberté de conscience et par voie de conséquence la liberté d’expression de tous .

    Par ailleurs, il est particulièrement grave d’assimiler les usagers des « services publics » aux agents de ces mêmes services, agents de l’Etat, tenus, eux, à la neutralité en particulier dans le domaine religieux, contrairement aux usagers qui disposent de leur liberté de penser et d’expression. Si tel n’était pas le cas nous serions dans un régime totalitaire.

    Or c’est très exactement ce qui a permis de justifier la loi sur le foulard interdisant aux jeunes filles, le portant, d’accéder au lycée. C’est en présentant « l’espace public » comme un « espace du public », c’est-à-dire comme lieu appartenant à l’Etat, que la loi interdisant le port du voile intégral a été rendue possible.

    Ces premières lois ont ainsi constitué les prémices d’interdictions sans fin et de plus en plus invivables pour les femmes, en particulier, qui en sont les premières victimes.

    Oui la loi de1905 protège l’Etat de l’ingérence des religions, mais protège aussi les religions de l’ingérence étatique.

    La laïcité ainsi instrumentalisée à des fins politiques, manipulée pour mettre à l’écart les « citoyennes et les citoyens musulmans », renforce le racisme islamophobe , alimente les communautarismes, met à mal un projet commun de vivre ensemble, et fait peser de lourds périls pour la liberté de conscience de tous.

    Non, ce ne sont pas les « musulmans » qui sont un danger pour la laïcité, c’est une politique qui s’acharne à détruire les « services publics », une politique qui fiche, qui classe, qui rejette, qui discrimine, qui exclut , qui désigne les bons et les mauvais citoyen(ne)s, les bonnes et les mauvaises religions, les citoyen(ne)s menacé(e)s et les citoyen(ne)s menaçant(e)s, une politique qui nourrit la peur et la haine des différences.

    Oui, c’est l’ « islamophobie » , fable pernicieuse de « l’arabo-musulman-danger- pour-la-République » construite jour après jour par la répugnante et insidieuse réutilisation d’expressions qui ont alimenté l’antisémitisme des années 30 /40, qui menace le vivre ensemble.

    Ainsi, l’inadmissible et révoltant « français-d’origine-musulmane », à mettre en regard avec « français-d’origine-juive », « trafiquants noirs et arabes » de Zemmour, copiant le « juif escroc né », ou la distinction faite entre les français « bien et mal enracinés », l’introduction « des sur-peines » pour les étrangers, l’utilisation du vêtement pour montrer hier « l’envahissement métèque » aujourd’hui « l’islamo-terroriste » ou écarter les accompagnatrices scolaires « voilées » portant un foulard sur les cheveux.

    Oui, c’est le concept d’identité nationale, oui , c’est l’amalgame immigration et insécurité ; oui, c’est la politique d’exclusion des roms ; oui, c’est le discours de l’anathème ; oui c’est l’utilisation de l’injure verbale ; oui , c’est le développement des peurs irrationnelles ; oui c’est le combat contre les lumières de la raison mis en œuvre par les plus hauts représentants de l’Etat qui font peser un grave danger sur la laïcité, sur la République, sur la liberté de conscience et les libertés d’expression.

    Le MRAP fait un appel solennel pour que tous les citoyennes et citoyens se dressent contre ces manipulations dont on sait qu’elles peuvent nous entraîner dans les pires aventures.

    Le MRAP appelle chaque citoyen(ne) à opposer à la xénophobie, au racisme sous toutes ses formes et sans hiérarchie, à toutes les discriminations, la volonté inébranlable de construire une société fondée sur le droit à la différence sans différence de droits.

    Le MRAP appelle à un sursaut général pour faire échec au projet de modification de la loi de 1905, sous couvert de « code de la laïcité ».

    Le MRAP appelle à une forte mobilisation de toutes et de tous-en particulier par la création de collectifs locaux-pour préparer activement la manifestation nationale du samedi 28 mai « contre le racisme, la xénophobie, la politique d’immigration du gouvernement et pour la régularisation de tous les sans papiers ».

    Paris, le 9 avril 2010

    De : Le MRAP


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  • http://www.ladepeche.fr/article/201...

    Portail de l'action des Elus et de la vie citoyenneAuparavant sporadiques et dénoncés, ces actes inhumains tendent à devenir de plus en plus courants et convergent sciemment vers un refus du vivre-ensemble. Cette famille n’est pas en situation d’irrégularité, étrangère ou islamiste... elle est pauvre.

    Peu importe, il semble que pour certains tous ceux-là ont un point commun (leur différence) et méritent donc qu’on leur fasse sentir et toucher du doigt leur infériorité, car pour les esprits étroits : différence= infériorité.

    Notre société est déjà cruelle envers tous ces gens marginalisés qui galèrent au quotidien, apparemment, cela ne suffit plus : il faut rajouter une dose de cruauté et de sadisme.

    Il y a la loi qui certes autorise les expulsions, la trêve hivernale étant terminée.

    Mais que dire de la méthode employée ?? Ces forces de l’ordre agissent comme une milice : non contents de foutre dehors une famille, les privant d’un toit (malgré la loi sur le droit opposable au logement) ; ces flics balancent tout le mobilier et les effets personnels par la fenêtre... Cette femme et son fils ont vu des sales cons (hommage à Sophia Aram) briser tous les souvenirs d’une vie, tous leurs effets personnels ont été sadiquement éradiqués...

    Quel en était l’intérêt sinon enfoncer un peu plus le clou de l’humiliation et faire de cette famille un exemple?

    Il y a vraiment de quoi être très inquiet des choix politiques que nous faisons : l’UMP virant à la droite de la droite et la banalisation des idées de l’extrême droite nous conduisent de plus en plus vite vers une société où la tolérance et le respect de l’autre ne seront plus qu’un vague souvenir... Au-delà d’un contexte politique momentané, les mentalités évoluent salement et une idéologie est en train de sournoisement gagner du terrain, sinon comment expliquer le développement de telles ignominies ?

    Aujourd’hui c’est cette famille, mais demain ?

    Lorsqu’ils sont venus chercher les communistes Je me suis tu, je n’étais pas communiste. Lorsqu’ils sont venus chercher les syndicalistes Je me suis tu, je n’étais pas syndicaliste. Lorsqu’ils sont venus chercher les juifs Je me suis tu, je n’étais pas juif. Puis ils sont venus me chercher Et il ne restait plus personne pour protester.


    De : scandalisé
    mardi 12 avril 2011



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  • Lagarde crée une usine à gaz face à la hausse des carburants

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    Les compagnies pétrolières financeront à hauteur de 100 millions d'euros une augmentation des déductions fiscales liées aux dépenses de carburants pour certains contribuables. C'est ce qu'a annoncé tout feu tout flamme ce lundi matin la ministre de l'Economie, Christine Lagarde. Ce dispositif très compliqué et qui ne bénéficiera pas à tout le monde aura bien du mal à contrer la hausse des prix des carburants. Voilà pourquoi.

    • Le contexte

    Le cours du baril de pétrole Brent s'est envolé de plus de 75% depuis août dernier pour dépasser 120 dollars ces derniers jours. Une hausse alimentée entre autres par les tensions sociales et politiques au Moyen-Orient et par la perspective d'une augmentation de la demande japonaise après l'accident nucléaire de Fukushima. Les prix à la pompe en France sont ainsi remontés vers les plus hauts atteints en 2008, le litre de gazole dépassant 1,36 euro et le super sans plomb 98 1,54 euro.

    Cette forte hausse a relancé le débat sur la fiscalité des carburants et les moyens dont dispose ou non l'Etat pour amortir l'augmentation de la facture énergétique des ménages. Plusieurs responsables politiques ou syndicaux et des associations de consommateurs ont demandé entre autres le rétablissement de "TIPP flottante", un mécanisme qui permet de moduler la taxation des produits pétroliers en fonction du niveau des prix hors taxes. Certains ont aussi réclamé une mise à contribution des compagnies pétrolières en arguant du niveau record de leurs bénéfices. Total  a publié en février un bénéfice net annuel de 10,3 milliards d'euros.

    • Le dispositif

    Christine Lagarde et Eric Besson, le ministre de l'Industrie, doivent réunir dans la matinée les représentants de la filière pour faire le point sur les conséquences de la hausse des prix des produits pétroliers et les résultats des discussions ouvertes ces dernières semaines avec les entreprises du secteur. "Je crois qu'on a un accord à peu près ficelé maintenant", a dit Christine Lagarde sur France Inter.

    "Il consistera pour les compagnies pétrolières à prendre en charge, par le biais d'une taxation, la revalorisation du barème mis en place dans la déduction de frais professionnels pour déplacement", a-t-elle expliqué. Cette déduction s'applique aux contribuables payant l'impôt sur le revenu qui utilisent leur voiture particulière dans le cadre de leur activité professionnelle. Elle permet de déduire du revenu imposable une partie de ses dépenses de carburants, en appliquant au kilométrage parcouru un barème fixé par l'administration fiscale.

    C'est le relèvement de ce barème que financeront donc les pétroliers. La mesure coûtera "plus de 100 millions d'euros" et devrait bénéficier à environ cinq millions de personnes, a dit Christine Lagarde.

    • Les critiques

    Avant même sa signature, l'accord avec les compagnies pétrolières a été critiqué lundi par Jean-Claude Mailly, le secrétaire général du syndicat Force ouvrière, qui a regretté l'aspect "compliqué" de son application. "Ça veut dire que c'est une déduction de l'impôt sur le revenu: donc encore faut-il payer l'impôt sur le revenu. Je rappelle que près de 50% des ménages ne le paient pas parce qu'ils sont en dessous du seuil, a-t-il dit sur RTL. Ça a quand même un peu un côté usine à gaz. Le truc le plus simple, c'est que ça figure d'une manière ou d'une autre sur la fiche de paie."

    • A lire

    Après le vélo, le kit de conseils de Christine Lagarde pour économiser l'essence

    Pas de vélo, cette fois pour remplacer la voiture, depuis que le prix du baril de pétrole atteint des sommets. Christine Lagarde, ministre de l’Économie, a retenu la leçon. La ministre a dégotté une toute nouvelle idée : un kit de conseils à l’usage des automobilistes. « J’en cite quelques-uns parce qu’on n’y pense pas toujours. D’abord, faire très attention à son gonflage de pneus ; deuxièmement, réduire un peu sa vitesse ; troisièmement, éviter de conduire de manière un peu saccadée », a-t-elle expliqué à la presse dans une station-service d’Ivry (94). Lire la suite...


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  • Les difficiles débuts de la loi sur l'interdiction du voile intégral

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    Une demi-douzaine de femmes portant un foulard musulman et une seule vêtue d'un niqab ont été interpelées ce lundi matin devant Notre-Dame de Paris. Elles protestaient devant la cathédrale contre l'entrée en vigueur de la loi sur l'interdiction du voile intégral. La police a immédiatement procédé à des interpellations tout en insistant sur le fait que ces arrestations n'étaient pas liées à la nouvelle loi. La manifestation n'avait pas été autorisée, a fait valoir un porte-parole de la préfecture de police.

    Ces protestataires, qui avaient prévenu de nombreux médias de leur action, ont réussi leur coup de publicité. Avant son arrestation, Kenza Drider, seule femme voilée entendue par la mission parlementaire préparant la loi, a démenti avoir voulu provoquer les forces de l'ordre en bravant ouvertement la loi le jour de son entrée en vigueur. "Ce n'est pas de la provocation", a assuré à Reuters TV à bord du train celle qui se défend d'être une intégriste mais qui fait figure de porte-parole des défenseurs du voile intégral.

    • Une loi de circonstance

    La loi, qui interdit "la dissimulation du visage dans l'espace public", sert officiellement à réaffirmer les valeurs de la République. Dans les faits, celle-ci a été prise pour marteler le discours sécuritaire de la majorité présidentielle et vise clairement les adeptes du voile intégral islamique - burqa ou niqab. Au vu des chiffres, il s'agit même d'une loi de circonstance, puisqu'elle ne concerne que trois mille personnes en France, selon les statistiques du ministère de l'Intérieur.

    Ce texte prévoit une amende de 150 euros pour les porteuses de voile intégral couvrant tout le corps à l'exception des yeux. Forcer quelqu'un à porter le voile intégral sera désormais puni d'un an de prison et 30.000 euros d'amende. Pour les syndicats de policiers, il est difficilement applicable.

    • Un texte inapplicable

    Sur France Inter ce lundi matin, le secrétaire général adjoint du Syndicat des commissaires de police a estimé que le texte serait "infiniment peu appliqué… On n'a pas de pouvoir de contrainte, la circulaire (du ministère de l'Intérieur Claude) Guéant nous dit même qu'il ne faut surtout pas utiliser de la force, on doit essayer de convaincre", a expliqué Manuel Roux. La circulaire datée du 31 mars envisage le cas où la personne refuserait de se dévoiler et de décliner son identité : on lui indiquera alors qu'elle risque d'être conduite au commissariat, ou on l'immobilisera le temps qu'elle cède, mais "il conviendra de faire preuve de persuasion de façon à ne recourir à cette faculté qu'en dernier recours", dit le texte. Il est toutefois exclu d'avoir recours à la force. "Les forces de sécurité intérieure n'ont pas le pouvoir de faire ôter le vêtement qui dissimule le visage", prévient le ministère de l'Intérieur.


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    Après avoir livré à la vindicte les musulmans « trop nombreux », le ministre de l'Intérieur poursuit sa chasse aux voix frontistes en annonçant vouloir « réduire l'immigration légale ».

    Toujours plus loin. Á peine clos le débat nauséabond sur la laïcité et l'islam, l'Élysée, via son porte-parole officieux Claude Guéant, a repris son pèlerinage au pays du Front national. Dans un entretien à paraître aujourd'hui dans le Figaro Magazine, le ministre de l'Intérieur, qui avait déjà fait part de ses inquiétudes quant à « l'accroissement » du nombre de musulmans en France, en remet une louche sur le thème de l'immigration. Interrogé sur son intention d'« intervenir pour réduire l'immigration légale », Claude Guéant répond : « Bien évidemment. »

    Cette réponse n'avait pourtant rien d'évident. Depuis 2007 et l'élection de Nicolas Sarkozy, c'est la première fois que le gouvernement affiche l'intention de réduire l'immigration légale. Jusqu'ici, Brice Hortefeux et Éric Besson avaient toujours mis en avant la lutte contre les clandestins. Nicolas Sarkozy lui-même n'a jamais été sur une ligne de réduction de l'immigration légale, prônant - seulement - un rééquilibrage de l'immigration familiale, qualifiée d'« immigration subie », vers une immigration de travail, qualifiée de « choisie ». Á l'évidence, le chef de l'État et son ancien secrétaire général, obnubilés par la chasse aux voix frontistes, ont décidé de franchir un pas supplémentaire pour coller au plus près des thèses de l'extrême droite. Et mieux renvoyer dans les cordes tous ceux, au sein même de l'UMP, qui critiquent cette stratégie de droitisation.

    Sur le fond, Claude Guéant souhaite jouer sur tous les leviers, demandant à son administration de « réduire » le nombre de personnes admises au titre de l'immigration du travail (20 000 arrivées par an), ainsi que celles venant en France au titre du regroupement familial (15 000). En matière d'asile (10 000), notre ministre vit, semble-t-il, un drame insupportable. « Notre pays est plus généreux, malgré les restrictions apportées, que l'Allemagne ou le Royaume-Uni, alors que nous appliquons les mêmes conventions internationales ! S'il apparaît qu'il y a des anomalies dans nos pratiques, des modifications interviendront. » Enfin, à propos de l'immigration illégale, Claude Guéant rappelle l'objectif fixé de « 28 000 reconduites à la frontière » pour 2011. Avant d'ajouter : « Très franchement, j'espère que nous ferons plus. » On s'en était douté.

    Évidemment, cette énième sortie xénophobe du ministre a provoqué une avalanche de réactions. « Réduire l'immigration légale, comme le propose Claude Guéant, conduirait automatiquement à augmenter l'immigration clandestine et à produire des sans-papiers. Beau résultat ! » souligne Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF. Le PS dénonce « une vision nationaliste et raciste ». Et le député Jean-Christophe Cambadélis d'appeler, pour ne pas faire le jeu de Sarko-Guéant, à une « grève du commentaire ».

    Laurent Mouloud


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  • http://www.laprovence.com/media/imagecache/article-taille-normale/hermes/2010-01/2010-01-13/2010011218592021.jpgPas bien pleine les urnes. Pourquoi ?

     

    Notre camarade Charles Hoarau a repris les résultats des élections cantonales.

    Il s'est livré à une analyse très fine des tendances, réalités, manifestées par les chiffres officiels nationaux.

     

    Il arrive par une démonstration incontestable aux mêmes conclusions que La Canaille avait avancé à chaud dès le premier tour puis dans les heures qui ont suivi le second.

     

    Son travail est un argumentaire de fond pour les mois à venir sur la réalité du vote politique qu'est l'abstention. Il éclaire l'usage fait comme miroir antidémocratique, de la confiscation de l'idée du vote qu'à partir des sufrages exprimés, non rapportés aux inscrits, qui satisfait le microcosme politicien et péri politicard.


    Une étude qui confirme la redistribution des cartes entre droite extrème masquée de l'UMP et extrème droite du FN. et confondu la non progression du nombre d'électeurs de ces droites, leur reculs. Il pointe enfin la perte de substance du vote des quartiers populaires, la montée du vote FN en zone rurale et les centres villes cossus. Des votes et abstentions de classe. 


    Voici in extenso son argumentation : 

     

    Les élections se sont donc terminées comme la presse (la grande, celle qui compte) l’avait prédit, dit et redit : le FN grâce à sa nouvelle dirigeante, « plus forte d’entre les forts » a ramassé la mise d’une partie que la droite avait perdue, discréditée par un président colérique et instable. 
    La gauche (comprenez le PS puisque c’est la seule force qui compte à leurs yeux) peut nourrir un espoir certain (pour 2012 évidemment seule élection qui compte !) à condition qu’elle se rassemble devant un chef incontesté, qu’elle cesse donc ses querelles intestines afin de vaincre une extrême droite plus menaçante que jamais. 
    Ça c’est ce qu’ils nous ont servi pendant des mois avant, pendant et depuis l’élection.

    En prévision de la victoire future du FN (et qui donc appellerait une réaction « républicaine » sans faille) Marine Le Pen s’est retrouvée invitée quasi quotidienne des médias. On se croirait, à une lettre près, à une de ces séries pour enfants d’il y a quelques années : Marine au congrès, Marine en débat, Marine à Lampedusa, Marine et la droite, Marine et la gauche, Marine au Maroc, Marine en Israël…. Dans les régions, pour ne pas être en reste, la presse locale en a fait de même. Ainsi, pour ne prendre qu’un exemple, sur le canton de Marseille St Barthélémy où Rouge Vif 13 se présentait, le représentant du FN, qui n’a jamais été élu, a eu droit avant le 1er tour, à 22 articles de la presse écrite et 7 passages télévisés. Si ce n’est pas de la promotion c’est quoi d’autre ?…

    Pour enfoncer le clou, des sondeurs furent aussi sollicités qui aboutirent tous à la même conclusion : Marine est en position de force. Sondages tous plus contestables les uns que les autres, ce que d’autres que nous ont démontré avec assez de rigueur pour nous n’ayons pas à nous étendre sur le sujet.

    Au lendemain du second tour, quelques voix peu nombreuses mettaient en cause partiellement le discours officiel sans toutefois expliquer ce qui ressemble à un vrai paradoxe : comment dans un pays qui a connu à l’automne un record de mobilisation sociale, peut-il succéder un printemps de la désaffection électorale ?

    Que penser des résultats ?

    Progression du FN ? Du PS ? Quel est l’élément déterminant qui ressort de ces élections ? 
    S’il ne convient pas de négliger l’onde de choc psychologique que peut produire l’apparente progression du FN (du moins dans les votes exprimés), une analyse approfondie des chiffres s’impose pour qui veut répondre à la question : qui progresse en France ? 
    Pour faire celle-ci nous nous sommes penchés sur le résultat [1] des élections depuis 30 ans et un certain 10 mai 1981 qui devait changer la vie de millions de gens. Nous avons comparé les chiffres 
    -  des 1ers tours (celui où on choisit) de toutes les élections au regard de l’abstention 
    -  des pourcentages obtenus par 4 familles politiques : PCF (et Front de gauche), PS (et divers gauche), Droite(UMP, UDF, divers droite), Extrême droite(FN, MNR, divers extrême droite), lors de toutes les élections hors municipales [2].

    La droite et son extrême.

    Le graphique ci-après montre l’évolution à droite en pourcentages par rapport aux exprimés aux différentes élections depuis 1981 et qui sont indiquées par la date et l’initiale (P : présidentielle, L : législative, C : cantonale, R régionale, E européenne).

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    A la lecture de ce graphique on ne peut dire que l’élection de 2011 marque pour le FN un progrès par rapport à des scores antérieurs. Par contre l’effondrement de la droite fait que l’écart entre elle et le FN diminue fortement. 
    2007/2011 est la seule période où l’on observe une progression relative du FN sur 5 élections, progression qui se fait au détriment de la droite. 
    La preuve s’il en fallait une que la droite qui ne cesse de se radicaliser et de rendre floue la frontière entre elle et son extrême récolte ainsi ce qu’elle a semé…intentionnellement ? 
    Dans une version moderne du « plutôt Hitler que le front populaire », plutôt le fascisme que la remise en cause du capitalisme ?

    On observe aussi que c’est lors des européennes, qu’il y a systématiquement diminution de l’écart entre la droite et son extrême. A croire que pour l’électorat de droite (seul ?) le discours de l’extrême droite sur l’Europe est plus convaincant.

    Si maintenant on observe les scores par rapports au pays réel, et donc au nombre des inscrits (en sachant que ce nombre ne prend en compte ni les français non inscrits soit environ 10% de la population, ni les étrangers), les observations sont les mêmes avec plus de netteté encore.

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    La perte en pourcentage des deux forces est visible. C’est même un élément essentiel depuis 30 ans : à l’exception notable de la présidentielle de 2007 qui apparait comme un évènement isolé, cette perte apparait clairement si on fait le total des deux forces :

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    Avec 41,05% des exprimés la droite et son extrême font leur plus mauvais score depuis 30 ans et c’est la même chose si on compare par rapport aux inscrits

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    17,85% des inscrits : un record d’impopularité. En voix, si on compare les deux élections comparables le résultat est édifiant. Alors que par rapport aux cantonales de 2004 il y avait cette année 1 million d’inscrits en plus, le droite et l’extrême droite perdent plus de 2 millions de voix (3 802 317contre 6 090 225), l’extrême droite seule perdant 140922 soit un peu plus de 9% de ses voix (1 393 644 contre 1 534 566) !

    Et la gauche ?

    La gauche profite-t-elle de cette débâcle ? Pas du tout comme le montrent les tableaux ci-après :

    Pour le PCF, même allié au Front de gauche, on ne peut parler de progression [3] (en rouge et vert les deux dernières cantonales).

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    *Avec le Front de gauche **Score avec le Front de gauche allié parfois au NPA : 3,88% des inscrits - 8,76% des votants.

    Pour l’ensemble des forces de gauche non plus :

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    *26,32 si on rajoute les voix obtenues par Besancenot à cette présidentielle

    17,09% des inscrits ! Pas de quoi se réjouir ! Là aussi un des plus mauvais scores de ces 30 dernières années. La gauche perd près d’1,5 million de voix sur 2004, le PS 1 206 657 (25,92% de ses voix !), le PCF 232 304 (24,26% de ses voix) et 130402 (13,62% des voix) avec ses alliés du Front de gauche. 
    Avec une parité presque parfaite, la droite et la gauche ensemble totalisent à peine 35% des voix des électeurs.

    Reste donc 65% d’inscrits qui ne se reconnaissent pas dans ces deux familles.

    Les électeurs ont renvoyé dos à dos la gauche et la droite, renvoi dont ne profitent pas vraiment les verts qui font en 2011, moins de 4% des inscrits, sans progression notable (malgré « l’effet Japon » tant commenté par nos medias) sur leurs scores antérieurs des 10 dernières années [4]. La progression sur les exprimés (8,22% contre 4,48% en 2004) étant un trompe l’œil qui masque pour eux aussi une perte non négligeable en voix (65 209 soit un recul de 8% sur 2004 [5]. .

    Alors qui a gagné ?

    Si on s’en tient aux cantonales, un dessin vaut mieux qu’un long discours.

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    Les abstentionnistes, et nous l’avons déjà dit ici, ne sont pas des pêcheurs du dimanche, mais des électeurs qui font un choix politique, celui de ne plus voter.

    2011 a donc vu un nouveau record du PRV, « Parti des Refus de Vote » et c’est l’enseignement principal de cette élection. Il est faux d’avancer l’argument que ce taux record s’expliquerait par le fait que c’est la 1ère fois qu’une cantonale n’est pas adossée à une autre élection. Si cet argument pouvait s’entendre en 1988, élection placée en septembre, donc juste après la période de juillet août peu propice à une campagne électorale, il ne peut s’entendre aujourd’hui puisque le cas s’est déjà produit en 1994 où la cantonale n’était couplée à aucune autre élection. 
    Le « parti des refus de vote » ne cesse de progresser comme le montre le tableau ci-après qui prend en compte toutes les élections hors européennes, ces dernières étant particulières et méritant une analyse spécifique.

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    Cette progression est particulièrement claire si on regarde les taux record d’abstention pour chacun des 6 types d’élections au suffrage universel existant en France. 
    Hormis là encore la présidentielle de 2007, le record d’abstention a été battu à chaque dernière élection du type concerné. La cantonale de 2011 n’est donc pas une exception mais se situe dans la norme. A chaque élection les français votent moins.

    ElectionAnnée recordtaux
    Européenne 2009 59,37
    Cantonale 2011 56,4
    Régionale 2010 53,64
    Législative 2007 39,56
    Municipale 2008 38,95
    Présidentielle 1995 21,62

    Le cas particulier des européennes.

    Il est fréquent d’entendre dire par « les experts » désignés comme tels par les médias que les français s’intéressent moins aux européennes, car ce sont des élections lointaines, par opposition aux municipales ou aux cantonales qui sont des élections de proximité. La cantonale de 2011 montre assez que cette explication ne tient pas la route. De même le tableau ci-après montre que la question de la participation à cette élection ne peut s’expliquer par la question de la proximité. A deux reprises la participation a été plus importante non pas parce qu’il s’agissait d’un référendum et qu’il suffisait de répondre par OUI ou par NON, mais plus sûrement parce que les deux fois les électeurs ont eu le sentiment que leur vote était utile et qu’il posait une question de choix de société.

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    Quelques réflexions nationales…

    Il y a à profusion dans notre pays développé, l’un des plus riches du monde, donneur en chef de leçon de démocratie sur toute la planète, des politologues, des observateurs avertis, des chroniqueurs en tous genres, qui, au vu de ces chiffres qu’ils connaissent, en toute logique, auraient du si ce n’est tirer des conclusions péremptoires au moins poser quelques questions qui s’imposaient.

    -  Si les habitants de France après avoir battu des records de mobilisation ont battu des records d’abstention n’est ce pas tout simplement parce qu’ils ne trouvent pas de réponse politique à leurs aspirations ? 
    -  Si on s’en tient aux cantonales en quoi une gestion de gauche d’un canton, d’un département, est-elle radicalement différente d’une gestion de droite ? En quoi peut-elle être un point d’appui pour le combat contre un capitalisme que 72% des français rejettent ?
    -  Croit-on qu’il peut y avoir un RSA de gauche ? 
    -  Plutôt que de nous expliquer dès aujourd’hui que la seule alternative qui nous reste pour l’avenir (qui passe forcément par 2012 selon eux) c’est de choisir entre Strauss-Kahn ou Le Pen, entre la dictature des marchés ou la dictature nationale, ce qui est de toute façon un non choix économique et social, ne faut il pas analyser ce refus de vote des électeurs comme un refus de tomber dans ce piège qui risque de nous conduire d’avoir un jour à combattre autrement que par les urnes un fascisme que d’autres auront préféré réhabiliter plutôt que de remettre en cause leurs choix politiques ? 
    -  De même celles et ceux, médias, sondeurs ou « politologues avertis » qui ne cessent de traiter le FN comme un parti comme les autres portent aussi une lourde responsabilité dans cette confusion entre le débat démocratique et la tribune donnée à un parti fasciste, confusion qui se retrouve dans la tendance à la passation des voix de la droite à son extrême. 
    Lourde responsabilité pour les libertés. 
    -  Ne risque-t-on pas de se retrouver, toutes proportions gardées, dans une « situation à la tunisienne » avec un futur hyperprésident élu à une très grande majorité… par une minorité de votants dans un pays qui ne croit plus à l’alternative du moins par les urnes ? 
    -  A la sortie de ces élections (et des précédentes) ne peut on pas se dire que pour une grande partie de la population, au-delà de l’abstention, ce qui grandit c’est l’idée même de révolution ?

    …Et locales

    Dans le département des Bouches du Rhône, Rouge Vif a été la seule force politique à critiquer sur le fond les choix politiques du conseil général. Elle l’a fait dans un département vérolé par les affaires, où le symbole de l’affairisme, des liens entre la mafia et la « gôche » et du clientélisme vient d’être réélu président du conseil général sans qu’une seule voix ne manque à l’appel.

    Notre intention était de faire reculer l’abstention sur le canton. Nous nous sommes présentés aux gens (plus de 800 personnes rencontrées en porte à porte) en expliquant nos candidatures par le fait qu’en tant que communistes nous remettons en cause les choix de ce département et donc notre refus d’appartenir à sa majorité.

    Dans les circonstances actuelles notre score de 5% est plus qu’honorable, mais même si nous sommes les seuls à « gauche » à progresser en pourcentage sur le canton, force est de constater que nous n’avons pas réussi à faire reculer l’abstention de manière significative, en particulier dans les cités populaires. Cela tient à plusieurs raisons parmi lesquelles un manque de visibilité nationale de ce courant communiste sans compromission et à notre activité trop faible en temps ordinaire dans ce canton.

    Pourtant nous savons bien que nombre des électeurs qui ont voté pour nous font partie de celles et ceux qui ne seraient pas aller voter sans notre présence ou, pour reprendre les mots d’une jeune participante à notre assemblée qui a suivi le 1er tour, sont passés d’un « vote par dépit à un vote de conviction ».

    L’accueil extraordinaire que nous avons reçu, la richesse des débats que nous avons eus, s’ils ne se reflètent pas encore dans les urnes à la hauteur où on aurait pu l’espérer, sont autant d’encouragements à continuer et amplifier notre action en intégrant les nouvelles et nouveaux adhérent-e-s qui ont décidé de nous rejoindre. En juin Rouge Vif 13 tiendra son 1er congrès.

    Comme le dit notre déclaration d’après 1er tour : le combat continue…

     

    [1] sources ministère de l’intérieur www.interieur.gouv.fr et www.france-politique.fr

    [2] élections où les listes d’union au 1er tour ne permettent pas de différencier les 4 familles politiques choisies

    [3] Le score du seul PCF aux régionales de 2004 et 2010 ne peut être pris en compte à cause du nombre important de liste d’union au 1er tour

    [4] entre 1,5 et 4% des inscrits

    [5] 818 201 voix aux cantonales de 2004, 752 992 voix en 2011 toutes formations écologistes confondues

    Par canaille le rouge

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  • Déclaration CGT au Conseil National de l’emploi 7 avril 2011

    ETRANGERS= PRESUMES COUPABLES ?

    Le Conseil National de l’Emploi est saisi aujourd’hui pour avis sur le projet de décret ministériel portant sur la création du dispositif AGDREF2, destiné à la mise en fiche systématique et prolongée des étrangers qui demandent un titre de séjour.

    Tout d’abord, il est étonnant de constater que cette question des fichiers des étrangers, salariés ou non, est examinée au détour d’une réunion du CNE.

    Le Conseil National de l’Emploi est en effet bien loin d’être au fait, jusqu’à présent, de la panoplie, pour le moins fournie, de l’ensemble des mesures de police, administratives, juridiques et réglementaires qui sont prises depuis des années à l’encontre des migrants.

    Si le gouvernement souhaite que le CNE s’empare de ces questions, nous le ferons bien volontiers : les migrants, quelle que soit leur situation administrative, sont avant tout des salariés, et comme tout salarié, ils doivent avoir des droits reconnus et nous avons à cœur de les défendre.

    Cela signifie que les longs efforts qu’il a fallu déployer pour que le gouvernement consente à faire participer le Ministère du Travail aux négociations ouvertes entre les organisations syndicales et le Ministère de l’Immigration sur la régularisation des salariés dépourvus de titre de séjour valable, seraient aujourd’hui vraiment derrière nous. Nous attendons donc que le Ministère du Travail investisse alors enfin totalement ces négociations ! Puisqu’il s’agit dans ce dossier d’assainissement par le haut du marché du travail, de salariés aujourd’hui sans droits dans les entreprises, et qui doivent enfin recouvrer leurs droits !

    Il est malgré tout alors étonnant que lors des récentes discussions avec la Commission européenne et le Parlement européen au sujet du permis unique de séjour et de travail pour les migrants issus de pays tiers, le Gouvernement français ait pu écrire que les migrants détachés, saisonniers, ou mutés à l’intérieur d’un groupe multinational, ne faisaient pas partie du marché du travail, tant européen que national.

    Avec les travailleurs migrants, nous sommes oui ou non sur une question d’emploi, donc susceptible d’être traitée au Conseil national de l’Emploi ? Si c’est oui, que le gouvernement cesse de tergiverser, tant dans les négociations sur les travailleurs sans papiers que dans ses déclarations sur le permis unique européen séjour-travail ! Si c’est non, que faisons nous ici aujourd’hui ?

    Sur le fond : L’immigration dans notre pays, de fait, est d’abord une immigration de travail. Il ne sert à rien de tenter de faire passer les migrants pour des délinquants potentiels, qu’il faudrait suivre à la trace, et pour ce faire, les répertorier, les ficher et les classer afin de pouvoir mieux éventuellement les expulser.

    Cette pression constante que le gouvernement actuel prétend maintenir sur les migrants, et cette fusion des fichiers AGDREF et ELOI en est une nouvelle illustration, ne vise au bout du compte qu’à donner aux autorités les moyens de maintenir ces salariés dans la peur et l’angoisse d’être reconduits dans leur pays d’origine alors qu’ils travaillent ici. Pourquoi sinon réintroduire le maintien des données contenues dans ces fichiers sur cinq ans, alors que le Conseil d’Etat s’y était opposé?

    D’autre part, l’enrôlement forcé dans cette politique de chasse aux salariés migrants des agents de Pôle Emploi, de la Sécurité sociale, après celui de l’Inspection du Travail que le Bureau International du Travail vient encore de fustiger, est une ignominie.

    Le migrant, et qui plus est le travailleur migrant, avec ou sans titre de séjour valable, n’est pas un « ennemi intérieur »! Bien au contraire son travail crée des richesses pour toute la communauté nationale. Comme tous les salariés de notre pays, il doit être respecté et considéré.

    Vouloir l’affubler d’un nouveau numéro AGDREF, concentré informatique de son état civil, de sa situation administrative et de travail, attaché en tant que tel à sa personne, n’est pas la marque d’un progrès. Bien au contraire.

    Alors que notre économie a besoin de ces travailleurs migrants, alors qu’ils ne prennent le travail de personne mais acceptent le travail que personne ne veut faire dans les conditions qui leur sont imposées, il est temps d’arrêter de considérer ces salariés comme des « forçats en rupture de ban », dont le passeport jaune serait juste remplacé par des données biométriques.

    Montreuil, le 7 avril 2011


    De : s@brina
    vendredi 8 avril 2011


    http://bellaciao.org/fr/spip.php?article115909


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  • Les gourous de la com’, ces décideurs de l’ombre par Jean-Marie Durand

    Portail de l'action des Elus et de la vie citoyenne

    Crédit Photo : Franca Maï (2011)

     

    Ils sont trois. Anne Méaux, Michel Calzaroni et Stéphane Fouks disposent d’un immense pouvoir d’influence sur la vie politique et économique française. Une enquête nous fait découvrir ces grands gourous de la com, vrais décideurs installés dans l’ombre de notre système démocratique.

    Serait-ce le signe d’une prise de conscience des citoyens ?

    L’opacité qui préside à l’organisation de la vie publique semble de moins en moins supportable aux yeux des gouvernés. L’affaire WikiLeaks a illustré ce désir de transparence et de contrôle de la vie diplomatique. L’enquête d’Aurore Gorius et Michaël Moreau, Les Gourous de la com’ - Trente ans de manipulations politiques et économiques, s’inscrit dans un élan plus large qui vise à dévoiler les mécanismes de la prise de décision publique.

    Qui sait, en dehors des petits milieux autorisés, que la vie politique et économique en France passe par le filtre invisible et pourtant décisif des conseillers en communication ? Leur zone d’influence dépasse l’idée que chacun pourrait se faire de leur existence : tous les patrons du CAC 40 et tous les politiques en vue font appel à eux pour les guider dans l’orientation stratégique de leurs actions.

    Une dizaine de personnes partageraient la majorité des décisions d’intérêt général

    Sans discréditer pour autant ni leur rôle technique ni même le principe du lobbying, vieille pratique des démocraties modernes, les deux journalistes décrivent un système opaque et posent une question qui touche le coeur de l’esprit public : peut-on se satisfaire d’un pouvoir d’influence qui ne dit pas son nom, qui échappe à la vigilance des citoyens, qui monopolise la majorité des décisions d’intérêt général ? Ce pouvoir occulte, contrôlé par moins d’une dizaine de personnes sur la place de Paris, est-il acceptable dans une démocratie moderne ?

    Ce monopole de la communication se partage entre trois personnes dont les noms sont surtout connus de leurs clients et des journalistes spécialisés : Anne Méaux, Stéphane Fouks, Michel Calzaroni. Le grand public ignore leurs visages : on ne les voit jamais à la télé, on ne les entend pas à la radio, on ne les lit guère dans la presse. Pourtant ils pèsent sur tous les médias.

    Leur obscurité sert leur éclat, leur sous-exposition médiatique illustre leur surexposition stratégique.

    Comme si les mots, les postures, les déclarations, les gestes des acteurs de la vie publique - élus et patrons - relevaient de leur ressort. Ils ne revendiquent certainement pas le terme de "gourou", ni celui de "magicien", ni celui de "faiseur de roi" : les termes "conseiller" ou "codécideur" leur vont mieux, mais restent trop euphémiques pour éclairer la dérive de leur pouvoir opérationnel. On ne vote pas pour eux mais ce sont eux qui décident !

    Cultivant la discrétion, condition du succès de leur influence, ces "gourous de la com’" ont accepté de dévoiler leurs méthodes. Aurore Gorius et Michaël Moreau les ont rencontrés plusieurs fois au cours de leur enquête, qui a duré près de deux ans.

    "Au départ, Anne Méaux a été la plus réticente à nous parler, reconnaît Michaël Moreau, mais elle a finalement joué le jeu lors de deux longs rendez-vous."

    En retraçant le parcours de ces trois personnes, depuis leurs débuts dans la communication politique au milieu des années 80 jusqu’à aujourd’hui, les auteurs révèlent comment, à partir d’une fonction modeste - le conseil en image -, leur métier, de plus en plus professionnalisé, a évolué vers une fonction stratégique : l’aide à la décision plus qu’à la démonstration.

    Des méthodes de com’ toujours plus agressives

    L’artifice (l’image) s’est transformé en feu (l’action), le vernis s’est définitivement écaillé. Rappelant certaines des récentes batailles qui les ont opposés sur le front des grandes entreprises publiques - la nomination du président d’EDF en 2004, les dossiers complexes concernant les stratégies industrielles de Veolia, GDF et Suez, où leurs conseils valent comme principe d’action sur les marchés... -, les auteurs analysent leurs méthodes toujours plus agressives.

    Si Jacques Pilhan, maître en la matière, ancien conseiller de Mitterrand puis de Chirac à l’Elysée, a posé les bases de la communication politique - aujourd’hui prolongées par les Louvrier, Charon, Giacometti, Buisson auprès de Sarkozy -, Anne Méaux et Michel Calzaroni ont élargi le territoire de la com au patronat. Venus l’un et l’autre de la droite dure libérale, ils créent leur boîte à peu près en même temps : DGM pour Calzaroni en 1985 et Image 7 pour Méaux en 1988. Concurrents directs - Calzaroni baptise Anne Méaux "Cruella", c’est dire l’ambiance... -, ils se partagent les affaires dans tous les secteurs où coulent les profits (industrie, services, luxe, télécoms...).

    "En 2011, ils coachent les deux tiers des patrons du CAC 40".

    Anne Méaux gère la communication des Pinault père et fils, de la patronne d’Areva Anne Lauvergeon, du producteur de télé Stéphane Courbit, de la patronne du Medef Laurence Parisot, de Jacques Servier, empêtré dans le scandale du Mediator... La com’ de crise l’intéresse, à défaut de faire des miracles : c’est elle qui a conseillé Eric Woerth durant l’affaire Bettencourt.

    Chez elle, rue de Courcelles à Paris, ou dans sa maison de Saint-Tropez, Anne Méaux aime, dit-on, recevoir des dirigeants de l’industrie, des hommes politiques ou des journalistes dans un climat de convivialité "propice à la connivence". Ancienne giscardienne, proche d’Alain Madelin, de Jean-Pierre Raffarin ou d’Hervé Novelli après avoir flirté avec les mouvements d’extrême droite (le Gud et le Parti des forces nouvelles) au début des années 70, Anne Méaux a tempéré ses positions : le business a noyé ses anciens élans politiques droitiers.

    Elle a inventé un style, une démarche, une manière de travailler "cash" :

    "Elle parle à ses clients sans ménagement et fait de sa franchise un véritable atout. Elle bouscule les chefs d’entreprise dans leur confort quand en interne, les collaborateurs directs n’osent pas souvent contrecarrer leur patron", explique Michaël Moreau.

    Anne Méaux ne démarche jamais : "Ce sont les patrons qui viennent à elle." Avec le plaisir de se faire malmener dans un affrontement direct. "Elle est la maman qui protège et qui punit." Sa devise, empruntée à Charles Péguy, leur plaît : "Il y a quelque chose de pire que d’avoir une âme perverse, c’est d’avoir une âme habituée."

    Elle a appris à placer ses hommes et femmes partout où il faut, dans les cabinets ministériels, dans tous les relais de pouvoir possibles. L’entrisme est de règle, la seule voie possible de ses conquêtes à venir. Face à cette guerrière, Michel Calzaroni jouerait plutôt la carte du séducteur. Tout aussi marqué à droite, il est proche de Vincent Bolloré, Bernard Arnault ou Gérard Mestrallet (pdg de GDF Suez) mais son style affiche davantage de souplesse et de rondeur. Le groupe LVMH, en lui confiant sa stratégie de communication dès 1999, a nourri la croissance de sa carrière.

    Plus qu’une idée, la com’ c’est le plaisir du jeu

    A force de s’infiltrer dans l’économie française, les deux rivaux risquent le conflit d’intérêts et le mélange des genres. Comment conseiller au sein d’une même structure deux concurrents directs sur un même marché (deux banques, deux groupes de luxe, deux entreprises de téléphonie...) ? Le problème ne semble pas les perturber, comme si leur éthique s’effaçait sous le poids de leur voracité. C’est le vice premier de la communication : le geste technique dépasse le cadre affectif ou idéologique dans lequel il se déploie.

    La com se déconnecte de la croyance.

    Plus qu’une idée, un projet ou un individu, c’est le plaisir du jeu, désinvesti de tout affect, qui importe le plus souvent.

    En la matière, Stéphane Fouks s’impose comme un maître. Ancien rocardien devenu strauss-kahnien notoire, proche de Manuel Valls et d’Alain Bauer, Fouks régente Euro RSCG, une machine de guerre dans le monde du conseil et de la communication, qui s’accommode de n’importe quel client. Fouks a le carnet d’adresses le plus épais de Paris, avec un atout qui échappe à certain de ses rivaux : ses réseaux à l’international.

    Chez cet ancien protégé de Jacques Séguéla, le mélange des genres relève d’un art de l’équilibre, théorisé par ses soins.

    Rapporté par un concurrent, il a une formule éclairante :

    "Quand on a deux clients dans le même secteur, c’est un conflit d’intérêts ; quand on en a quatre, c’est une expertise."

    Tout en se disant de gauche, il s’entoure de lobbyistes de droite (Bernard Sananès, Michel Bettan) et conseille des leaders de l’UMP (Xavier Bertrand...), des présidents étrangers parfois peu recommandables (Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire, Ali Bongo au Gabon...), des patrons du CAC 40 (Henri Proglio à EDF, Stéphane Richard chez France Télécom, Henri de Castries chez Axa...). Mais surtout, il manie avec dextérité la pratique anglo-saxonne des revolving doors, ces allers-retours entre cabinets ministériels et agence de communication.

    Exemple : le secrétaire d’Etat au Logement Benoist Apparu est un ancien d’Euro RSCG. Ces portes tournantes entre privé et public, droite et gauche, ouvrent sur une "immense toile tissée entre les différents lieux de pouvoir". Avec la plume de l’agence, Gilles Finchelstein, et le démineur de crise Ramzi Khiroun, porte-parole parallèle du groupe Lagardère (mélange des genres ?), Stéphane Fouks pratique le "management en râteau".

    Bien que tout à fait légale et encadrée par des règles, l’influence de ces conseillers de l’ombre reste un angle mort dans notre système démocratique. Pour une raison fondamentale : les citoyens ignorent tout de leur rôle. D’où l’introduction d’un vice dans un jeu fondé depuis longtemps déjà sur la pratique du lobbying. La communication s’est accaparé un pouvoir que personne ne remet en cause. "Ces agences interviennent dans la vie publique et dans celle des affaires pour défendre des intérêts particuliers", souligne Michaël Moreau.

    Au-delà des copinages, arrangements entre amis, connivences extradémocratiques, la nouvelle fonction des conseillers influe sur la collecte de l’information. Il est devenu difficile d’accéder aux figures du monde patronal ou politique sans l’aval des conseillers qui les entourent ; le journalisme de validation remplace désormais le journalisme d’investigation...

    Cette communication triomphante nourrit une crise de l’information.

    Et manifeste un déficit démocratique.

    Jean-Marie Durand
    Source : http://www.lesinrocks.com

    http://e-torpedo.net

     

     


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  • L'expert ès opinion de Nicolas Sarkozy propose dans Paris-Match de "réserver le RSA et le RMI aux Français qui ont un travail". Un tournant radical. Par Claude Weill


    patrick-buissonDans le très instructif portrait de Patrick Buisson (Photo) que publie cette semaine Paris-Match, cette phrase, au détour d'un paragraphe : "Il plaide ["il", c'est donc Buisson, le très écouté expert ès opinion de Nicolas Sarkozy] pour une grande loi de réhabilitation du travail ; elle lutterait contre l'assistanat en réservant par exemple le RSA et le RMI aux Français qui ont un travail." Nous y voilà. Tout commence par les mots. Depuis un certain temps, on redoutait que la dérive droitière de la rhétorique sarkozyste ne débouche sur un tournant radical. Dans les faits et plus seulement dans les mots.
    Jusqu'ici, en effet, cette stratégie a produit l'inverse du but recherché. Le président-candidat espérait enrayer la fuite de ses électeurs vers l'extrême-droite. Il n'a réussi qu'à élargir la voie d'eau. Débat sur l'identité nationale, discours de Grenoble liant immigration et insécurité... A chaque fois, Marine Le Pen monte dans les sondages, et aussi dans les urnes (voir les cantonales). Avec ce beau résultat : Nicolas Sarkozy est désormais devancé par elle dans les intentions de vote et menacé – humiliation suprême - de se voir éliminé au premier tour de 2012. S'il décide de persévérer dans cette voie – et il y paraît bien décidé, malgré les mises en garde d'un Fillon, d'un Baroin et d'autres, qui l'adjurent de délaisser la thématique national-sécuritaire et de se recentrer sur les questions économiques et sociales (chômage et pouvoir d'achat) -, il est condamné à passer à l'acte.
    Exclure les étrangers du RSA et du RMI, c'est très exactement ce que réclame le Front national. C'est même une des rares constantes et peut-être la mesure la plus emblématique de son programme. La traduction directe du slogan de la "préférence nationale". Cela marquerait une rupture radicale avec la tradition républicaine, avec la philosophie même qui fonde notre protection sociale. Ce serait jeter des dizaines de milliers de familles dans la misère absolue.
    On se dit que c'est trop énorme, que Sarkozy n'oserait pas. Mais celui qui réclame cette mesure n'est pas n'importe qui. C'est, comme le note Paris-Match, "l'éminence grise de Sarkozy". L'homme qui a "inventé" le ministère de l'Identité nationale, trouvaille à laquelle Nicolas Sarkozy pense devoir sa victoire de 2007. Le théoricien de la ligne nationale-populiste que l'on voit aujourd'hui prospérer. Alors, un dérapage de plus, la petite phrase du conseiller Buisson ? Une opinion personnelle qui n'engage que lui ? Un ballon d'essai ? Ou une annonce soigneusement pesée, laissant présager la brutalité des mesures qui se préparent ? En tout cas un signal à prendre très au sérieux, car il en dit long sur les scénarios qui ont cours dans l'entourage immédiat du candidat-président.


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  • Puisque TF1 a omis d’en parler, je livre en exclusivité aux lecteurs de ce blog, le texte de l’intervention que j’ai faite à la  séance de clôture de l'audit sur la politique d'immigration, d'intégration et de codéveloppement organisée par plusieurs parlementaires et par les membres de l'association «Cette France-là»

    (Assemblée nationale, 25 mars 2011)

     

       « Vous m’avez demandé de participer à cette audition consacrée à la question de l’immigration en me posant deux grandes questions : Comment s'est construit le clivage entre nationaux et étrangers en France ? Comment s'articule la construction du « modèle républicain d'intégration » et l'émergence de l'Etat Nation ?

       Pour tenter d’y répondre, je dois commencer par préciser que le clivage entre nationaux et étrangers s’enracine dans un clivage plus fondamental et plus général, fondé sur l’opposition entre « eux » et « nous », clivage que l’on rencontre dans toutes les sociétés et à toutes les époques de l’histoire. Ce qui a changé au cours du temps, ce sont les formes prises par ce clivage et aussi le fait qu’à partir du XVIIIe siècle, il ait été dénoncé au nom de la raison et de l’universalité de la condition humaine.

       Les grandes lignes du « modèle républicain », si tant est que cette expression ait un sens, ont été fixées dès le début de la Révolution française, comme une mise en œuvre contradictoire de la philosophie des Lumières. Cette contradiction apparait clairement dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Dans la logique républicaine en effet, la citoyenneté se définit comme participation à la vie de l’Etat national. Par conséquent, l’étranger ne peut pas avoir les mêmes droits politiques que le citoyen, ce qui contredit l’article 1er de la Déclaration stipulant que « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ». C’est cette contradiction fondatrice qui explique qu’aujourd’hui encore des discours les plus opposés sur l’immigration puissent se réclamer des « valeurs républicaines », les uns privilégiant la sécurité des citoyens et les autres l’universalité des droits de l’homme.

       Une autre caractéristique du « modèle républicain » français tient au fait que la Révolution de 1789 a supprimé les « corps intermédiaires ». Un lien direct a ainsi été établi entre l’Etat national et les citoyens. C’est l’une des raisons qui expliquent l’importance accordée à la question de la nationalité (qui désigne en droit l’appartenance à l’Etat). Le langage courant fournit de bonnes illustrations de la puissance qu’exerce la norme nationale. Par exemple, en français, le mot « étranger » sert à la fois à désigner l’inconnu au sens du non-familier (étrange) et le non-national, alors que dans beaucoup d’autres langues il existe des termes différents pour distinguer ces notions. De même, si les politiques ou les journalistes  parle fréquemment de « l’intégration sans préciser quel est le groupe social de référence, c’est parce qu’il va de soi pour tout le monde qu’il s’agit de la nation.

       Le deuxième moment décisif dans la construction du « modèle républicain » s’est produit un siècle après la Révolution française. L’avènement de la IIIe République enclenche un processus démocratique qui apparaît lui aussi très contradictoire. D’un côté, le régime républicain favorise un puissant mouvement d’intégration des classes populaires au sein de l’Etat-nation. Mais d’un autre côté, il institutionnalise de nouvelles formes d’exclusion, liées à l’immigration et à la colonisation.

       Les historiens ont beaucoup étudié le rôle joué par l’école, par les commémorations, par la littérature, dans le développement du sentiment d’appartenance à la nation française. Mais ils ont trop souvent oublié le fait qu’une identité se définit toujours par opposition à d’autres identités. Le « nous » français s’est fixé à la fin du XIXe siècle par la construction d’images négatives de l’étranger, autour de deux grands repoussoirs : l’ennemi qu’il faut combattre (à l’époque il s’agit surtout des Allemands) et le primitif qu’il faut civiliser (les indigènes de l’empire colonial)

       Dès les années 1880, il devient évident que l’industrie français ne pourra pas se développer sans un recours massif aux travailleurs étrangers. Et pourtant, c’est à ce moment-là que naît le discours politico-journalistique présentant l’immigration comme un « problème ». Ce qui est fascinant pour l’historien qui travaille sur cette question, c’est de constater que les grandes lignes de la rhétorique qui a été inventée il y a 130 ans sont toujours en vigueur aujourd’hui, bien que les prédictions apocalyptiques qui ont accompagné les discours sur l’immigration-problème n’aient jamais été confirmées par les faits.

       Le mot « immigration », qui était pratiquement inconnu avant la IIIe République, s’impose brutalement dans le vocabulaire français à la suite d’un événement qui constitue à mes yeux le moment fondateur de toute l’histoire de l’immigration. Il s’agit de la première « chasse à l’immigré » qui a lieu à Marseille en juin 1881. Pendant près d’une semaine, les travailleurs italiens de la ville sont pourchassés parce que quelques uns d’entre eux ont sifflé la Marseillaise, lors du défilé des troupes qui ont imposé le protectorat français sur la Tunisie au détriment de l’Italie. (La Marseillaise était devenue l’hymne national l’année précédente, en 1880).

       L’analyse des commentaires publiés par les journalistes, les hommes politiques ou les intellectuels qui se sont emparés de cet événement permet de mettre en évidence une autre caractéristique du « modèle républicain ». Il s’agit de l’ethnocentrisme des élites, ethnocentrisme qui les incite à interpréter en termes étroitement politiques des gestes symboliques qui s’expliquent en réalité par des raisons sociales. Pour des immigrants surexploités, stigmatisés, et qui sont par ailleurs exclus de l’espace public, siffler le drapeau c’est une façon de protester contre la surexploitation et stigmatisation dont ils sont victimes.

       Mais le regard ethnocentrique de l’élite républicaine interprète ce type de geste comme une menace pour la nation. C’est à la suite de cette rixe de 1881 entre ouvriers français et italiens (rixe qui fera trois morts) que naît le discours sur l’immigration-problème. Les deux grands types d’arguments qui émergent à ce moment-là structurent aujourd’hui encore les polémiques publiques sur ce thème.

       En premier lieu, c’est la question du contrôle des flux migratoires qui est posée. La rixe de 1881 est vue comme une réaction de défense de la part des ouvriers français menacés par l’invasion des immigrants. On découvre alors que ces derniers ne sont enregistrés nulle part, qu’il n’existe pas de statistique fiable, etc. Le remède qui s’impose rapidement, c’est l’identification des étrangers. Le décret de 1888, confirmé par la loi de 1893, marque le point de départ de la politique des « papiers d’identité ». La loi républicaine crée ainsi une ligne de démarcation entre immigrants légaux et illégaux, ceux qu’on appellera ensuite les « clandestins » ou les « sans papiers ».

       En second lieu, le fait que des Italiens aient sifflé l’hymne et le drapeau français, est vu comme la preuve qu’ils ne sont pas assimilés, comme un manque de loyauté à l’égard de la nation française et donc comme une menace puisqu’en 1882, l’Italie est devenue l’alliée de l’Allemagne. On ne parle pas alors de « communautarisme » mais de « nation dans la nation ». Ce « défaut » d’assimilation est attribué au libéralisme du Code civil, lequel permettait aux enfants d’étrangers de décliner la qualité de Français à leur majorité, ce que l’immense majorité d’entre eux faisait pour échapper au service militaire. La grande loi de 1889 sur la nationalité française impose alors la règle du double jus soli. Les enfants d’étrangers nés en France de parents eux-mêmes nés en France sont désormais Français de naissance.

       Les républicains qui ont concocté cette loi pensent avoir trouvé le remède au « problème » de l’assimilation des étrangers. En réalité, ils ont fabriqué une machine infernale au piège de laquelle ils seront bientôt pris. En effet, c’est en s’appuyant sur un fait divers, donc sur un événement exceptionnel, que les républicains ont bâti leur raisonnement sur le déficit d’assimilation des Italiens, en généralisant des comportements qui ne concernaient qu’un tout petit nombre d’individus pour dénoncer toute une communauté. Mais toute politique fondée sur l’exploitation des faits divers peut être contestée au nom d’autres faits divers. Les conservateurs catholiques que les républicains avaient écartés du pouvoir en 1870 vont rapidement reprendre à leur compte la rhétorique républicaine, en s’appuyant sur des faits divers impliquant des naturalisés et des Français de confession juive, de façon à « démontrer » que la politique d’assimilation explicitement visée par la loi de 1889 sur la nationalité française a échoué. Une nouvelle bataille s’engage alors sur la définition du national et de l’étranger. Pour les conservateurs, ce n’est pas le droit qui fait le Français, mais l’origine. C’est ainsi que le racisme fait irruption dans l’espace public sous sa forme première qu’est l’antisémitisme.

       Le champ politique français achève de se structurer pendant l’Affaire Dreyfus.  La gauche prend en charge la défense des droits de l’homme et la question sociale, alors que la droite privilégie la sécurité des citoyens et la question nationale. Tout au long du XXe siècle, dans chaque période de crise, la question de l’immigration sera remise au centre de l’actualité sous l’impulsion de l’extrême droite. Les années 1930 montrent clairement que la stratégie des partis de gouvernement ayant cherché à capter les voix de l’extrême droite en reprenant ses thématiques sous une forme euphémisée, aboutit à une fuite en avant mettant en péril les institutions démocratiques. Un large accord existe aujourd’hui chez les historiens pour affirmer qu’à partir de 1938 les dérives de la IIIe République ont préparé l’avènement du régime de Vichy et de sa « révolution nationale ».

       Les générations qui ont vécu les atrocités du nazisme, les horreurs de la Première et de la Seconde Guerre mondiale ont compris que la manipulation des identités, l’exaltation du nous national, la stigmatisation des étrangers étaient un danger mortel pour la démocratie. C’est pourquoi dans les années d’après-guerre, une sorte de « cordon sanitaire » a été construit par les démocrates pour isoler l’extrême droite et le maintenir à l’état groupusculaire. Mais ce barrage s’est rompu au début des années 1980. La résurgence des discours négatifs sur l’immigration a permis d’alimenter une nouvelle forme de nationalisme, ciblé sur l’immigration post-coloniale, reprenant les vieilles thématiques identitaires mais en évitant de s’attaquer frontalement aux fondements du régime démocratique. C’est sans doute ce qui explique que ce nouveau nationalisme ait aujourd’hui tendance à se banaliser. Une autre raison de cette banalisation, tient au fait que pour échapper à la législation antiraciste, ces discours se sont aujourd’hui fortement euphémisés. L’étranger n’est plus insulté avec la violence verbale qui caractérisait les années 1930. Les représentations négatives sont le plus souvent véhiculées par des formules qui ne nomment plus directement un groupe, mais à l’aide des mots en « isme » (islamisme, communautarisme) que les médias ont fixés dans le cerveau des citoyens en mobilisant les images choc de l’information-spectacle.

       Etant donné les progrès de la recherche historique sur l’immigration depuis 20 ans, il n’est plus possible aujourd’hui d’ignorer que la France a été l’un des tout premiers pays d’immigration au monde au cours du XXe siècle. Mais la nouvelle rhétorique xénophobe a intégré nos recherches en déplaçant le curseur pour opposer les « bons » immigrants d’autrefois et les « mauvais » d’aujourd’hui.

       Le caractère répétitif, voir compulsif, des discours présentant l’immigration comme un problème - alors qu’elle a joué un rôle fondamental dans le développement économique, social et culturel de la France - s’explique par le pouvoir mobilisateur que possède la rhétorique nationaliste. Si personne ne peut définir rigoureusement ce qu’est l’identité nationale, nous pouvons en revanche expliquer comment fonctionne le processus d’identification nationale. Le sentiment d’appartenance à une nation fonctionne comme une identité latente (au même titre que les autres sentiments d’appartenance qui nous animent en fonction des groupes sociaux auxquels nous sommes affiliés). Identité latente qui doit être réactivée par des discours publics pour devenir effective. Les nombreuses guerres auxquelles ont pris part les Français depuis 1870 ont longtemps alimenté les réflexes xénophobes. Mais ceux-ci s’expliquent aussi par des raisons économiques. C’est toujours pendant les périodes de crise que l’intolérance à l’égard de l’étranger se développe. Le discours public (qu’il soit politique ou journalistique) valorise constamment le « nous » français, confortant ainsi les citoyens dans l’idée qu’ils sont supérieurs aux étrangers. D’où le violent sentiment d’injustice qu’ils ressentent quand un étranger (ou supposé tel) exerce un emploi alors qu’ils sont au chômage, d’où le sentiment d’abandon qui les saisit quand les circonstances les obligent à accepter le travail que-les-Français-ne-veulent-pas-faire ou à habiter dans des « quartiers d’immigrés », etc.

       C’est sur ce terrain que prospèrent les discours xénophobes et racistes. Ils exploitent le sentiment d’injustice de ces citoyens en brodant sur le thème : « les étrangers font la loi chez nous ». Cette rhétorique de « l’inégalité retournée », comme disait Marc Bloch, est politiquement efficace car elle inverse les relations réelles de domination (statistiquement, faut-il le rappeler, les étrangers occupent toujours en effet des positions inférieures aux nationaux) 

       On ne peut pas lutter contre un sentiment d’injustice uniquement par des arguments rationnels. C’est pourquoi je pense que tous ceux que la montée de la xénophobie inquiète devraient réfléchir aux nouvelles formes d’interventions publiques qu’il faudrait mettre en œuvre pour combattre ce fléau de façon plus efficace.

    Texte à lire sur le blog de Gérard Noiriel : Le « modèle français » d’immigration : intervention à l’Assemblée Nationale 

     


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