Les enseignants du primaire se sont massivement mobilisés, mardi 12 février, contre la réforme des rythmes scolaires. Au niveau national, ils étaient entre 36 % et 58 % de grévistes selon, respectivement, le ministère de l'éducation nationale et le syndicat majoritaire SNUipp-FSU.
A Paris, où la mobilisation était la plus forte, 62 % des enseignants étaient en grève selon le ministère et près de 80 % selon le SNUipp-FSU, qui affirme que 12 000 personnes ont manifesté dans la capitale (5 800 selon la police). Dans les autres villes, les cortèges n'ont cependant rassemblé que quelques centaines d'enseignants.
"POURQUOI DIT-ON QU'ON ALLÈGE LES RYTHMES ?"
Dans la manifestation parisienne, les enseignants et les parents présents partagent la même interrogation : pourquoi dit-on qu'on allège les rythmes scolaires alors que les enfants seront autant à l'école et qu'ils y viendront, en plus, le mercredi matin ?
"Les enfants passeront donc autant de temps à l'école", observe Serge, papa d'Angèle et Gabin, dispensés d'école à cause de la grève. Le problème, selon lui, c'est le mercredi matin travaillé. "Se lever cinq matins d'affilée, c'est vraiment trop pour les enfants", juge-t-il. "Je ne comprends pas pourquoi on choisit ce système. Si on voulait vraiment alléger les rythmes scolaires, on pourrait aussi toucher aux vacances."
Raccourcir les vacances d'été, la proposition ne fait pas non plus peur à Mélanie, enseignante en CE1 dans une école du 11e arrondissement. Selon elle, la réforme des rythmes devrait passer par un allègement plus radical de la journée d'école. "Le matin, ça va, les enfants sont concentrés. Après la pause de midi c'est difficile et à partir de quinze heures, ils ne sont plus du tout attentifs. On pourrait au mieux tenir jusqu'à 12 h 30, après, c'est difficile."
Pierrick, Julien et Simon sont tous les trois "PVP", professeurs d'EPS pour la ville de Paris, une des spécificités du système scolaire parisien. L'inquiétude pour eux c'est qu'avec la réduction de la journée de cours, les écoles perdent du temps dans les infrastructures sportives, en particulier dans les piscines. "C'est dommage, explique Julien, professeur dans le 18e arrondissement, car nous venons de quartiers où les enfants ne vont pas à la piscine en dehors du temps scolaire."
L'autre enjeu "moins important", insistent-ils, c'est aussi pour certains d'entre eux la perte d'un complément de salaire qui venait des matinées sportives du mercredi organisées avec l'USEP, l'Union sportive des enseignants du premier degré, dont ils ne pourront plus assurer l'animation puisqu'ils seront dans les écoles.
UNE RÉFORME POUR LES COLLECTIVITÉS ?
"Je pense que l'enjeu de cette réforme, ce ne sont pas les rythmes scolaires, analyse de son côté Jean-François Fontana de Sud-Education. Si on avait voulu réformer les rythmes, on aurait réaménagé toute l'année scolaire. Là, il s'agit surtout d'un transfert de compétences de l'Etat aux collectivités."
D'après le décret, c'est aux municipalités de décider de l'organisation de la future journée des écoliers, mais aussi des types d'activités qui leur sont proposées à travers les futurs "projets éducatifs territoriaux" qui aiguilleront la stratégie pédagogique des communes. Sud-Education y voit un "changement de nature de l'école" puisque son action sera guidée "par les collectivités et non par le ministère de l'éducation nationale".
Mardi, le Conseil de Paris a décidé de mettre en place des groupes de travail pour mener les actions de concertation sur la mise en œuvre de la réforme. Paris annoncera le choix de sa formule de réorganisation du temps scolaire les 25 et 26 mars.