• Pacte pour l’euro : un FMI européen ( 14 et 15 )

    Pacte pour l’euro : un FMI européen ( 14 )

    Comment la Commission Européenne est en train de faire un FMI européen.

    Episode 14 : « Améliorer la viabilité des finances publiques »

    Deux points principaux dans ce paragraphe.

    Le premier s’intitule : «Viabilité des retraites, des soins de santé et des prestations sociales ». Il s’agit de « mesurer la viabilité du niveau d’endettement sur la base des politiques menées, notamment les régimes de pension, les systèmes de soins de santé et les régimes de prestations, et en fonction des facteurs démographiques ».  Il est préconisé  en particulier « d’adapter le système de retraite à la situation démographique nationale, par exemple en adaptant l’âge réel de la retraite à l’espérance de vie ou en accroissant le taux d’activité; »

    Sur le fond de l’affirmation, il s’agit de tout le débat sur les retraites, et du mensonge de l’argument démographique. Impossible donc d’y revenir en détail ici, et je vous renvoie au rapport sur les retraites publiés sur ce blog.

    Signalons simplement que l’UE prend position dans cette histoire, ce qui ne surprendra personne, et que cette position est parfaitement cohérente avec l’ensemble du texte. Comme nous l’avions dit, et beaucoup d’autres avec nous, le problème des retraites est un chapitre de la bataille sur la répartition de la valeur ajoutée, non un problème indépendant des autres, ce que tendraient à faire croire ceux qui préconisent les comptes personnels et autres comptes notionnels.

    L’UE prend position de la plus forte manière qui soit en l’incluant dans un programme complet, mais aussi de la manière la plus efficace qui soit, puisque c’est autour de cet incroyable rideau de fumée de la démographie que Socialistes et autres socio-libéraux ou socio-démocrates se sont trouvés des points communs avec les auteurs des réformes sur les retraites. Ce point n’est donc pas prêt d’être contesté par une majorité au parlement européen. C’est peut être même la raison principale de sa présence dans ce texte, qui doit obtenir le plus large consentement possible, d’une part pour être dans son rôle de « consensus », et d’autre part pour être appliqué dans toute sa force.

    Le deuxième s’intitule « Règles budgétaires nationales ». Il s’agit d’un engagement des pays membres à traduire les règles budgétaires du pacte de stabilité et de croissance dans leur législation nationale au plus haut niveau possible (constitution ou loi cadre, est-il suggéré). La discipline budgétaire devra être appliquée « au niveau national et aux niveaux inférieurs », ce qui signifie que l’UE entend régler les politiques budgétaires depuis l’assemblée nationale jusqu’aux municipalités. La commission « aura la possibilité d’être consultée » avant adoption. Il s’agit par ce morceau de texte de verrouiller les marges de manœuvre budgétaires des pays européens de la zone euro. A ce stade de la lecture, ce n’est pas surprenant, sinon qu’on peut encore une fois « palper » à quel point est favorable le rapport de force dans lequel le capital européen estime se trouver.

    Pour ce qui est du contenu des règles budgétaires, il faut se reporter au pacte de stabilité et de croissance. Ceci étant, la conséquence qui se fera rapidement sentir, et qui est l’objet de ce paragraphe, est l’interdiction peu ou prou de la création de déficit public, ce qui signifie le désengagement de l’état et des collectivités territoriales. Ce texte va donc justifier le fait d’inscrire dans la constitution l’interdiction des déficits et/ou de la dette publique. Ce travail est imminent en France. L’interdiction du déficit est la négation des besoins de la population. C’est un outil essentiel de la privatisation générale, donc de la fin d’une garantie d’accès aux soins, à l’éducation, etc…Faut-il rappeler que grâce aux investissements publics, le patrimoine détenu par chaque citoyen français est supérieur au montant de la dette publique, en tout cas tant que les déficits sont utilisés pour investir, non pour renflouer le secteur financier. Il y a évidemment beaucoup de choses à dire que la question de la dette publique, mais restons sur l’objet principale du feuilleton : l’analyse du Pacte pour l’Euro. On ne s’étonnera pas dans ce contexte que ce Pacte préconise à la fois la « maîtrise » des salaires, la réduction de la fiscalité et des cotisations sociales, et la réduction des dépenses publiques. «Entraidons-nous et Assure-toi sont dans un bateau. Sarkozy en pousse un à l’eau. Qui reste-t-il ? « Le-ciel-t-aidera », répond Latran ».

    Trèves de billevesées. Reste à voir le dernier paragraphe du pacte, intitulé « renforcer la stabilité financière ». A suivre dans l’épisode 15.

     

    Pacte pour l’euro : un FMI européen ( 15 )

    Comment la Commission Européenne est en train de faire un FMI européen.

    Épisode 15 : « Renforcer la stabilité financière »

    Une réforme globale du cadre européen de supervision et de régulation du secteur financier est en cours. Le texte prévoit de mettre en place une législation nationale en matière de résolution des défaillances bancaires. Des tests stricts de résistance des banques, coordonnés au niveau de l’Union, seront menés régulièrement. Le niveau de l’endettement privé des banques, des ménages et des entreprises non financières sera suivi de près pour chaque État membre. On est donc là dans l’outillage technique d’une politique de l’euro fort qui est à l’œuvre depuis maintenant longtemps, mais qui prétend avoir tenu compte de la crise récente. Sauf que la crise récente n’est pas que financière… mais c’est un autre débat. Continuons.

    Premier point : « coordination des politiques fiscales ».

    Ce point là mérite plus ample réflexion. « Les États membres s’engagent à entamer des discussions structurées sur les questions de politique fiscale, en vue notamment d’assurer l’échange des bonnes pratiques, sur la prévention des pratiques nuisibles ».

    Toute la phrase tient dans le mot « bonne » et donc dans le mot « nuisible ».

    « Établir une assiette commune pour l’impôt sur les sociétés pour garantir la cohérence des régimes fiscaux tout en respectant les stratégies fiscales nationales et sans incidence sur les recettes. » Cette phrase assez obscure ne laisse rien présager de bon. Les éléments pour apprécier correctement cette partie du texte sont à trouver dans les prises de positions antérieures de l’UE en matière fiscale. Cela méritera donc une réflexion plus poussée. Il y a en particulier quelque chose à comprendre au fait que la seule proposition pratique soit ciblée sur l’impôt sur les sociétés.

    Second point : « engagements annuels concrets ».

    « Les États membres de la zone euro conviendront chaque année, au niveau le plus élevé, d’une série d’actions concrètes à mettre en œuvre dans un délai de douze mois ».

    « Le choix des mesures politiques spécifiques à mettre en œuvre restera du ressort de chaque pays, mais ce choix sera guidé en particulier par l’examen des éléments mentionnés précédemment. Ces engagements se refléteront également dans les programmes nationaux de réforme et dans les programmes de stabilité présentés chaque année, qui seront évalués par la Commission, le Conseil et l’Eurogroupe dans le cadre du semestre européen. »

    Ce dernier paragraphe du Pacte pour l’Euro est un rappel des hiérarchies politiques déjà explicitées dans le texte. Pour le comprendre et pour se faire une idée du rapport de force institutionnel entre le « ressort de chaque Etat » et le « guide », il faut savoir ce qu’est le « cadre du Semestre Européen ». Ce point, ainsi que des éléments concernant la stratégie « Europe 2020 », feront l’objet des derniers épisodes.

    Nous voici donc arriver au terme de l’examen du Pacte pour l’Euro. Rappelons que ce « Pacte » est la première annexe des « Conclusions des Chefs d’Etat ou de Gouvernement du 11 mars », qui formalisent la mise à jour de la doctrine européenne pour les années à venir, si nous laissons faire. Avant d’évoquer le Semestre Européen et Europe 2020, il nous faut entrer dans la seconde annexe de ces « Conclusions du 11 mars », annexe appelée « Composantes générales du futur mécanisme, déclaration de l’Eurogroupe du 28 novembre 2010 ». Il s’agit des principales règles du « Mécanisme Européen de Stabilité » lorsqu’il va s’agir de l’octroi d’une aide à un pays de la zone Euro. C’est un texte relativement court, mais très instructif. En effet, on croyait que la hiérarchie des politiques économiques au bénéfice d’une Union Européenne était un but en soi, même si devine que la démocratie de compétitivité cache quelque chose. Et bien effectivement, il y a quelque chose au-dessus de l’Union Européenne. Venez le découvrir dans l’épisode 16.


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