• Morsi et les forces contre-révolutionnaires

    Morsi et les forces contre-révolutionnaires

    Mohamed Morsi a annulé le décret qui lui conférait des pouvoirs élargis mais a maintenu le référendum sur le projet constitutionnel qui cherche à consolider la position politique dominante des Frères musulmans dans le pays. Lee Sustar, journaliste au SocialistWorker.org, analyse ces efforts du président égyptien pour empêcher l’aboutissement du printemps arabe.

     

    Le projet constitutionnel que Morsi veut soumettre au vote le 15 décembre ancre non seulement la loi islamiste dans la Constitution, mais garantit à l’armée égyptienne les pouvoirs et privilèges dont elle a joui durant les trente ans du règne de Moubarak, y compris le contrôle de son propre budget et de la politique étrangère de l’Egypte.

    Les conséquences de cette distribution du pouvoir seraient la continuation de l’accord de paix que l’Egypte a signé avec Israël, ainsi que le maintien des aides en provenance des Etats-Unis. Tant pour les leaders des forces armées égyptiennes que pour l’administration Obama, ce sont des motifs suffisants pour fermer les yeux alors que Morsi s’empare définitivement du pouvoir politique au nom des Frères musulmans.

     

    Un vote opposant islamistes et laïcs?

    Le vote – organisé dans un délai très court ne permettant pas un vrai débat – est la dernière étape vers une nouvelle Constitution après la destitution de Moubarak. Vingt-deux membres de l’Assemblée constituante, qui comportait initialement cent membres, ont déjà démissionné et sept autres membres remplaçants sont également partis, majoritairement des représentants de la gauche et des chrétiens coptes. Ils ont jugé le processus de rédaction de la Constitution biaisé en faveur des Frères musulmans.

    Les Frères musulmans et leurs alliés, les Salafistes, tentent de dépeindre le vote comme un affrontement entre les valeurs des islamistes et celles des laïcs – qui ne reconnaissent pas le rôle de l’islam dans la société égyptienne ou qui sont pro-occidentaux et donc «décadents».

    En même temps, Morsi continue à affirmer que les Frères musulmans et leur aile politique, le Parti liberté et justice, représentent les vrais gardiens de la révolution. Ainsi, il a révoqué le procureur général, un vestige détesté de l’ère Moubarak; il a neutralisé le pouvoir judiciaire qui est également assimilé Moubarak et il a promis de poursuivre les personnes impliquées dans le meurtre et la torture de révolutionnaires. De cette manière, Morsi essaie de présenter l’opposition démocratique comme un véhicule des partisans de l’ancien régime, connus en Egypte sous le nom de «feloul».

    Les feloul et les révolutionnaires

    Les révolutionnaires égyptiens doivent lutter contre les tentatives de Morsi d’établir les Frères musulmans comme force politique dominante, sans s’aligner pour autant sur les feloul, comme l’explique Hossam el-Hamalawy, journaliste et membre des Socialistes révolutionnaires: «Nous devons prendre en considération qu’il y a une partie du feloul qui souhaite également le départ de Morsi. Et qu’elle participe à la mobilisation actuelle… Quand la polarisation devient celle entre les islamistes et les laïcs, ça veut dire que [l'ancien ministre des Affaires étrangères de Moubarak] Amr Moussa peut soudainement devenir un défendeur ardent de l’Etat de droit; ça veut dire que [l'animateur d’un talk-show pro-Moubarak] Tawfiq Okasha devient un symbole de la liberté d’expression; ça veut dire que [le blogueur contre-révolutionnaire] Ahmed Spider peut marcher dans les rues pour récupérer [la cape] des martyrs. Ceci est ridicule et ouvre la porte aux forces contre-révolutionnaires. Les révolutionnaires doivent donc être très prudents. Les fils de Hosni Moubarak, les orphelins d’Omar Suleiman et les loyalistes [de l'ancien ministre de l'Intérieur et récent candidat au poste présidentiel Ahmed] Shafiq ne peuvent jamais être nos alliés.»

    Tamer Wagih, rédacteur du site Web Egypt Independent, fait une remarque similaire: «En raison de l’absence d’un bloc révolutionnaire cohérent majoritaire, l’opposition à Morsi est un méli-mélo de pouvoirs appartenant à l’ancien régime Moubarak corrompu et d’autres pouvoirs populistes-réformistes-libéraux-centristes. La tâche des révolutionnaires est difficile, mais inévitable. Ils devront s’engager dans une lutte contre la dictature des non- révolutionnaires et des Frère,s sans tomber dans le piège d’une alliance avec les autres ennemis de la révolution.»

    Lee Sustar

    http://www.gauche-anticapitaliste.ch/?p=8415


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