• Mohamed Morsi face à la colère de tout un peuple

    Mohamed Morsi face à la colère de tout un peuple

    Hassane Zerrouky
    Un an après son élection, le président est confronté à d’immenses manifestations, au Caire, à Alexandrie, à Port-Saïd ou dans plusieurs villes du delta du Nil et du Sud, exigeant son départ et l’organisation d’une présidentielle anticipée

    32% C’est la part des Égyptiens qui, selon un sondage, approuvent l’action du président, Mohamed Morsi, contre 42 % le mois dernier et 78 % à l’issue de ses 100 premiers jours de pouvoir.

    Le mouvement Tamarod, créé en avril dernier, soutenu par l’opposition, dont le Front du salut national (FSN, regroupement de partis progressistes et de gauche), exige le départ de Morsi et une élection présidentielle anticipée dans une pétition qui a récolté quelque 22,2 millions de signatures. Il était en passe, hier soir, de confirmer cette mobilisation populaire anti-Morsi dans la rue. Le Caire, Alexandrie, Port-Saïd, les villes du delta du Nil et du sud du pays ont été le théâtre d’imposantes manifestations durant tout le week-end.

    DANS LA FOULE, BEAUCOUP DE FEMMES ET DE JEUNES

    Hier, tôt dans la matinée – dimanche est le premier jour de la semaine et n’est pas férié –, des milliers d’Égyptiens affluaient vers la fameuse place Tahrir, où la veille plusieurs dizaines de tentes avaient été dressées. Et dans l’après-midi, la foule ne cessait d’enfler. Brandissant des cartons rouges à l’endroit de Morsi, scandant « Dégage ! » ou « Le peuple veut la chute du régime », au son des sifflets et des vuvuzelas, tenant à bout de bras des portraits de Morsi et des dirigeants des Frères musulmans barrés d’une croix, ils arrivaient par groupes des différents quartiers du Caire mais aussi des alentours de la capitale égyptienne.

    Parmi la foule, beaucoup de femmes, des chrétiens de la minorité copte et surtout des jeunes, pas seulement cette jeunesse éduquée à l’origine du mouvement populaire qui avait fait chuter Moubarak, mais des jeunes des quartiers populaires, des salariés, des chômeurs, des vendeurs à la sauvette, dont certains avaient cru aux slogans « L’islam est la solution », en votant pour Morsi et le Parti de la liberté et de la justice (PLJ, la vitrine politique des Frères musulmans). « Je suis ici parce que Morsi, pour qui j’ai voté, m’a trahi et n’a pas tenu ses promesses », a déclaré un jeune manifestant, cité par l’AFP.

    À l’heure où ces lignes étaient écrites, ils étaient déjà plusieurs dizaines de milliers sur la place Tahrir. Et le gros de la manifestation était attendu en soirée, à la sortie des bureaux, avec à la clé des défilés hostiles au président islamiste qui doivent converger vers le palais présidentiel à Héliopolis, protégé par les gros bras du PLJ, mais aussi par l’armée, qui s’est déployée dans la capitale pour protéger les bâtiments publics.

    LE DROIT INSTRUMENTALISÉ PAR LES ISLAMISTES

    Des manifestations anti-Morsi ont également lieu à Alexandrie (nord), deuxième ville du pays où vendredi, jour de grande prière, elles avaient pris un tour violent. Le siège du PLJ a été incendié, deux personnes ont été tuées par balles, dont un photographe américain, et plus de 70 manifestants ont été blessés lors d’affrontements entre anti-Morsi et islamistes. Vendredi, Port-Saïd, troisième ville du pays, a été le théâtre de heurts entre les deux camps. La colère populaire a touché Menouf et Mahallah, la ville ouvrière, dans le delta du Nil, ainsi que Suez, sur le canal du même nom, et même la ville natale de M. Morsi, Zagazig, au nord-est du Caire.

    Pendant ce temps, aux abords de la mosquée Rabaa al-Adawiya, dans le faubourg de Nasr City, au Caire, où s’étaient rassemblées vendredi plusieurs dizaines de milliers de personnes à l’appel des Frères musulmans et de leurs alliés pour soutenir le président, se tenait un sit-in géant. Sous le slogan « La légitimité (du président Morsi) est une ligne rouge », les islamistes et leurs alliés ont placé leur mobilisation sur le terrain du droit et de la légalité, mettant en avant le statut de premier président élu démocratiquement en Égypte. Et d’accuser les manifestants de l’opposition de vouloir perpétrer un « coup d’État contre cette légitimité ».

    CHRONOLOGIE D’UNE ANNÉE SOUS TENSION

     30 juin 2012 : Mohamed Morsi est déclaré vainqueur de la présidentielle avec 51,73 % des voix.

     12 août, bras de fer avec l’armée : Morsi écarte le maréchal Hussein Tantaoui, ministre de la Défense, qui fut chef d’État de fait après la chute de Moubarak.

     15 et 22 décembre : la Constitution défendue par les islamistes au pouvoir est approuvée au terme d’un référendum entaché d’irrégularités, selon l’opposition.

     2 juin 2013 : la justice invalide le Sénat, qui assume le pouvoir législatif en l’absence d’Assemblée, ainsi que la commission qui a rédigé la Constitution. La présidence affirme que le Sénat continuera de légiférer dans l’attente de nouvelles législatives et que la loi fondamentale est intouchable.

     23 juin : l’armée déclare être prête à intervenir en cas de troubles.

     29 juin : Barack Obama exprime son « inquiétude » et appelle à un dialogue « plus constructif ».

    le 1 Juillet 2013

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