• Le gouvernement envisage d'augmenter la TVA en créant un nouveau taux

    Le premier ministre, François Fillon, à l'Assemblée nationale, mardi 25 octobre.

    Le premier ministre, François Fillon, à l'Assemblée nationale, mardi 25 octobre.AFP/MEHDI FEDOUACH

    Officiellement, une révision à la baisse des hypothèses de croissance (+ 1,75 %) sur lesquelles a été bâti le projet de loi de finances (PLF) pour 2012 n'est pas à l'ordre du jour. "La priorité absolue est de réussir le rendez-vous de mercredi", le sommet européen qui se tient à Bruxelles, a répété François Fillon, mardi 25 octobre, à l'Assemblée nationale.

    Lors de la réunion du groupe UMP de l'Assemblée, dans la matinée, sachant que ses propos allaient être répercutés, le premier ministre avait assuré que "les prévisions de croissance dépendent largement du sommet de mercredi", demandant à chacun de "garder son sang-froid".

     

    Le président du groupe, Christian Jacob, interrogé par la presse sur un projet de loi de finances rectificative (PLFR) intégrant des prévisions de croissance à la baisse, s'est acquitté de sa tâche: "Aujourd'hui, pour nous, le sujet n'est pas d'actualité, a-t-il affirmé. Les prévisions de croissance sont liées aux résultats du sommet européen."

    QUELS LEVIERS ACTIVER

    L'ensemble est parfait. En réalité, la perspective d'un PLFR est déjà acquise et intégrée par les députés de l'UMP. Ce fut même l'unique sujet abordé lors de la réunion du bureau précédant celle du groupe. La question n'était pas de savoir s'il y allait y avoir un collectif budgétaire, rectifiant le projet de budget dont la partie recettes était votée dans l'après-midi, mais quand il serait présenté, à quel niveau les prévisions de croissance seraient abaissées et, en conséquence, quels leviers il faudrait activer pour maintenir les objectifs de réduction des déficits publics.

    Le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, a précisé que "rien n'empêche que ce projet de loi de finances rectificative soit soumis au Parlement avant la fin de l'année". Il pourrait, selon nos informations, être présenté en conseil des ministres dans les deux semaines à venir.

    La plupart de ceux qui ont travaillé sur le dossier tablent sur une hypothèse de croissance pour 2012 ramenée à 1 %. Même si certains continuent à espérer, en cas d'accord au sommet de Bruxelles, que la déflagration soit moindre et que le consensus des experts économiques puisse être réévalué.

    Toutefois, sur la base d'une prévision de croissance de 1 %, ce sont 9 milliards d'euros qui vont manquer au budget. Le gouvernement a prévu, dans son projet de loi de finances initial – actuellement discuté par le Parlement –, une réserve de précaution, qui va être mise à contribution. Reste à trouver 4 à 5 milliards d'euros. C'est ce dont le gouvernement et la majorité ont commencé à débattre.

    "DEUX OU TROIS MESURES FORTES"

    Pour l'heure, le premier ministre et les députés de l'UMP s'orientent vers un même schéma. "A ce stade, la position du premier ministre n'est pas de ventiler sur un ensemble de mesures, mais de cibler sur deux ou trois mesures fortes. Je suis plutôt sur cette ligne", a indiqué au Monde M. Jacob. "Je crois qu'il vaut mieux des grosses mesures. C'est plus dur mais c'est plus courageux", affirme Valérie Rosso-Debord, députée de Meurthe-et-Moselle et déléguée générale adjointe au projet de l'UMP.

    "On est tous conscients qu'il va falloir aller plus loin, mais le saupoudrage, c'est fini, dit Catherine Vautrin, députée de la Marne. On ne peut continuer à aller sur des mesures de rabotage. On va entrer dans le dur. Il nous faudra faire, de toute façon, un effort de rigueur. Massivement, en termes de rendement, c'est la TVA qui rapporte le plus."

    Le mot est lâché. Il était présent, dans un entretien accordé par l'ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin aux Echos de mardi. "La question du taux intermédiaire de TVA est posée", indiquait le sénateur de la Vienne, évoquant aussi la possibilité de "revenir sur les allégements de charges en compensation des 35 heures".

    LIMITER DES EXONÉRATIONS DE CHARGES

    Ce sont les deux principales pistes de travail étudiées à l'heure actuelle. Louis Giscard d'Estaing, vice-président de la commission des finances de l'Assemblée, confirme. "Il faut limiter certaines dépenses fiscales et sociales, comme les exonérations de charges liées aux 35 heures, dit-il. Sur la TVA, il y a une marge de manœuvre. On peut créer un taux intermédiaire de TVA, entre les 5,5 % et 19,6 %. On pourrait y mettre, par exemple, les produits alimentaires transformés."

    Problème : la création d'un taux intermédiaire de TVA signerait la fin du dernier dogme sarkozyste dont la majorité présidentielle a tant bien que mal tenté, jusqu'à présent, de préserver l'apparence. "Je ne serai pas celui qui augmentera les impôts", n'a cessé d'affirmer Nicolas Sarkozy depuis le début de son quinquennat.

    La droite, par ailleurs, concentre ses attaques sur le projet socialiste en dénonçant la hausse des impôts que celui-ci entraînerait. "Il va nous falloir faire un travail d'explication", reconnaît Mme Vautrin.

    ERIC WOERTH MET EN GARDE

    Et, si possible, d'habillage. A Bercy et à l'UMP, on envisage, tant qu'à prendre "une mesure douloureuse", d'en profiter pour mettre sur les rails la réforme dite de la "TVA antidélocalisation" prônée par le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé. Celle-ci permettrait de transférer une partie des charges assises sur le travail vers un impôt reposant sur la consommation.

    L'option des mesures ciblées, dont la TVA, ne fait pas que des adeptes dans la majorité. Tout en admettant la nécessité de "recettes ciblées", Eric Woerth met en garde. "Il n'y a pas de recette miracle, prévient le député de l'Oise, ancien ministre du budget, et, le problème, c'est qu'il n'y a pas non plus de mesures indolores. Peut-on réduire les allégements de charges dans une période de chômage, alors que nous sommes en manque de compétitivité ? Je dis attention !, Ne jouons pas avec le feu!"

    Les députés de la majorité s'attendaient à ce que, au lendemain du sommet de Bruxelles, M. Sarkozy précise ses intentions lors de son intervention télévisée, jeudi soir. Dans l'attente, ils ont voté, mardi après-midi, la partie recettes du budget pour 2012, budget que la gauche ne s'est pas privée de juger "d'ores et déjà caduc". "Austérité, inégalité, inefficacité résument votre politique", a accusé le président du groupe socialiste, Jean-Marc Ayrault.

    Pierre Jaxel-Truer et Patrick Roger


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