• Le complot des Super Mario

    Rouge Midi 08Samedi 26 novembre 2011


     

     

    Pour guérir l’Europe de sa dette, s’imposent à des postes clés des ex de Goldman Sachs, la banque US à l’origine de la ...crise.

     

     

     

    A trop jouer les marioles avec Berlusconi, l’Italie est tombée sous la coupe des Super Mario, et l’Europe avec.

    Les Super Mario ne sont pas des rigolos mais des plombiers chargés de serrer la vis.

    Mario Monti, 68 ans, nouveau président du Conseil italien, et Mario Draghi, 64 ans, nouveau patron de la BCE, sont du genre pincés.

    Les deux ont été formés par les jésuites.

     

    Le premier a poursuivi à l’université Bocconi de Milan, où il a franchi tous les échelons.

    Il est aussi passé par Yale, où il était assidu aux cours du Nobel Tobin, père d’une taxe fantôme.

    « Je ne suis malheureusement pas quelqu’un d’intéressant » a-t-il coutume de dire, en avouant ne pas « avoir le sens de la convivialité resplendissante ».

    Autant dire qu’il ne faut pas compter sur lui pour mettre de l’ambiance dans une soirée mousse à Ibizza.

     

    Le second, après une maîtrise à Rome, a étudié au Massachusetts Institute of Technology de Boston auprès de Modigliani.

    Pas Amadeo, le peintre, mais Franco, l’économiste, moins porté aux nus mais tout de même prix Nobel pour un théorème sur la finance d’entreprise.

    Draghi est si lisse que sa biographe n’a pas trouvé une anecdote à se mettre sous la dent.

    Un quidam lui aurait tout de même lâché un jour un « Va doucement, toi tu prends l’ascenseur, nous on doit monter à pied », ce qui serait une métaphore sur sa rapidité d’esprit et non sur son jeu de jambes de golfeur.

    Draghi aurait un côté Juppé, et Monti un côté Raymond Barre, c’est dire si on est loin des Marx Brothers.

    Les Mario’s brothers ne sont ni marxistes tendance Groucho, ni tendance Karlo, ni tendance Nintendo.

    Leur école économique est celle de l’orthodoxie.

    Draghi à la tête d’une BCE qui se croit l’héritière de la Bundesbank, la presse allemande ne voulait pas y croire.

    « Chez les Italiens, l’inflation est à la vie ce que la sauce tomate est aux pâtes », se gaussait le « Bild ».

    Erreur, car le Draghi, question rigueur, est quasi germanique, plus raide que le Berlusconi en plein bunga-bunga.

    Après le MIT, il a fait ses classes à la Banque mondiale puis à la direction du Trésor italien, où il a officié pendant dix ans.

     

    C’est là, qu’il a acquis sa réputation de Super Mario, pour avoir aidé à assainir les comptes du pays en privatisant 750 entreprises contre la modique somme de 10 milliards d’euros.

     

    « Vil affairiste »

    Le « professor » Monti, lui, a connu son premier quart d’heure de célébrité à la Commission européenne, où l’avait nommé en 1994 le cavalier Berlusconi.

     

    Le responsable de la concurrence à Bruxelles s’oppose à la fusion entre General Electric et Honeywell, et récolte le surnom de « Saddam Hussein du bizness ».

     

    Il inflige une amende de 497 millions d’euros à Microsoft, qui bafoue la sacro-sainte concurrence , le « Financial Times » le baptise le « tsar antitrust ».

     

    En 2004, alors que la France cherche à sauver Alstom en y injectant de l’argent public, il dénonce le ministre de l’Economie de l’époque, un certain Sarkozy.

    Le Français se plaint, dans la presse :

    « Il y a des gens à Bruxelles qui veulent la mort d’Alstom ».

    Monti réplique, dans « Le Figaro » :

    Sarkozy devrait « arrêter de donner l’impression que sans lui la Commission aurait dansé sur le cadavre d’Alstom ».

    Pas rancunier, Sarko devenu président l’invitera à figurer en 2007 dans le groupe d’experts sur la croissance française.

     

    La croissance ne s’en est jamais remise.

     

    Il n’y a rien de pire qu’un Italien qui se prend au sérieux, sinon deux Italiens qui se prennent au sérieux.

    Monti et Draghi ont désormais le destin de la vieille Europe entre leurs mains.

    Peut-on faire confiance aux deux plombiers transalpins pour résoudre la crise ?

     

    Les amateurs de complots en doutent, et les autres aussi, car nos deux professeurs de vertu économique ont en commun un gros point noir sur le CV : un passage par Goldman Sachs.

    La sulfureuse banque d’affaires américaine à l’origine de la crise des subprimes est aussi celle qui, dans les années 2000, a maquillé les comptes de la Grèce pour lui permettre de dissimuler sa dette et d’adhérer à la monnaie unique.

    Les incendiaires se retrouvent aujourd’hui pompiers, ce qui est un classique en pyromanie, mais moins en économie.

    Monti se défend en expliquant qu’il n’a collaboré avec la firme américaine qu’à partir de 2005 en tant que membre du conseil de recherche sur les politiques publiques.

    Draghi, lui, a été plus impliqué, avec le titre de vice-président pour l’Europe de la banque américaine entre 2002 et 2006.

    Deux mois après sa prise de fonctions, il accède au rang très prisé d’associé, synonyme de revenus hyper juteux.

    Il a juré en juin aux députés européens, qui ont eu la politesse de le croire, qu’il n’a rien eu à voir avec les combines sur la Grèce.

    Mais à peine arrivé à Londres, en 2002, Draghi signe un article avec un Nobel - on ne se refuse rien- pour justifier les pratiques de dissimulation de créances...

    Coïncidence, Goldman Sachs a aussi largement profité de son programme de privatisation dans les années 90.

    A la grande fureur de Francesco Cossiga, ancien président de la République italienne, qui, alors que le nom de Draghi circule en 2008 pour remplacer Berlusconi, tonne :

    « Impossible. C’est un vil affairiste qui vendra l’économie italienne à quelque connaissance de son ancienne banque d’affaires comme il l’avait déjà fait lorsqu’il était directeur du Trésor ».

    Et Luca di Montezemolo, le patron de Ferrari, de confier que Draghi passait régulièrement ses vacances dans le sud de l’Italie avec Robert Rubin, ancien vice-président de Goldman Sachs dans les années 90...

    Les dirigeants européens n’ont pas voulu s’abaisser à lui refuser la BCE au nom de ses relations à Wall Street.

    Pas plus qu’ils ne se sont étonnés de ce que Luca Papademos, le nouveau Premier ministre grec, ait été gouverneur de la banque centrale hellène de 1994 à 2002 et donc ait eu forcément partie liée avec la banque américaine pour dissimuler la dette qu’il prétend aujourd’hui rembourser...

    Il ne faut pas prêter aux anciens de la Sachs plus que leur passage chez Goldman leur a rapporté.

     

    Mais rien ne garantit que les deux Mario et consorts soient aujourd’hui pour l’Europe davantage un bon placement qu’un produit toxique....

     

    Par Jean-Michel Thénard dans Le Canard enchaîné du 23/11/2011

    Transmis par Linsay

    http://www.pcfbassin.fr/


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  • Commentaires

    1
    Lundi 28 Novembre 2011 à 08:47

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