• « La corruption de syndicalistes phénomène social »

    « La corruption de syndicalistes - phénomène social »

    Discours du Secrétaire Général de la FSM George Mavrikos au Chili, 19.11.2011

     

    19 novembre 2011

     

    La Coordination FSM Chili a organisé le 19/11/2011 un séminaire à Santiago du Chili, avec la participation de 120 syndicalistes militants. L’orateur principal était le Secrétaire Général de la FSM George Mavrikos. Voici un extrait de son discours :


    « La forte influence du réformisme et de l’opportunisme dans le mouvement syndical au cours des années rend indispensable la capacité du mouvement de classe à étudier et à comprendre exactement les causes sociales de ce phénomène dans le but d’affronter de manière efficace les forces qui les cultivent. »


    Déjà au XIXe siècle, Karl Marx a souligné, dans la critique des syndicats anglais, la possibilité qu’ offrait le monopole industriel anglais à la bourgeoisie d’Angleterre dans le marché international pour acheter et incorporer de nombreuses couches de la classe ouvrière, surtout parmi les travailleurs qualifiés.


    Dans les premières années du XXe siècle, avec le plein développement du capitalisme monopoliste, Lénine a noté l’expansion de ce phénomène dans d’autres grands états impérialistes. Les capitalistes comptaient sur leur capacité à acheter les couches supérieures de la classe ouvrière, grâce aux profits énormes qu’ils s’assuraient avec l’exportation de capitaux et en général à l’action des grands groupes monopolistes. Il a décrit cette aristocratie ouvrière comme «des agents de la bourgeoisie au sein du mouvement ouvrier », véritables agents des capitalistes, conducteurs du réformisme et du chauvinisme. Il a montré l’importance de la position de la classe comme de la conscience de classe de cette couche et il a souligné que, si les racines économiques du phénomène et son importance politique ne sont pas comprises, le mouvement ouvrier ne peut pas avancer dans la solution de ses tâches pratiques.


    Un exemple typique est le gouvernement de l’Espagne, qui des impôts qu’il perçoit des travailleurs, « retourne » aux CC.OO. et à l’UGT tous les ans de grandes sommes d’argent. La somme qu’ont reçue ces organisations en 2010 de la part du budget général de l’État en Espagne dépasse les 10 millions d’euros. Une partie a été attribuée à des «  investissements syndicaux » en Amérique Centrale et en Amérique Latine.


    Ainsi, la réalité même montre l’expansion et l’approfondissement des relations capitalistes de production à l’époque où l’impérialisme généralise le phénomène de l’aristocratie ouvrière et la division de la classe ouvrière au sein d’un pays, ainsi que la pénétration des perceptions et attitudes petites bourgeoises dans son mouvement syndical et politique.


    L’apparition précoce de ce phénomène a mis en évidence la nécessité d’une confrontation majeure avec les intérêts de ces couches, la façon dont ces intérêts s’expriment dans le mouvement syndical ouvrier et la lutte pour l’unité de la classe ouvrière dans la ligne de classe.


    Il est important de souligner que la tentative de corruption et d’incorporation des couches de la classe ouvrière ne se limite pas à la partie essentielle de l’achat direct de consciences (salaires très élevés, compensations économiques  « non déclarées », etc.). La bourgeoisie s’est chargée et se charge de créer pour les fonctionnaires « obéissants » et les travailleurs réformistes quelques bons postes dans des syndicats «bourgeois soumis», dans des comités de ministères, d’organismes, tels que l’OIT et même dans les parlements. C’est cette bureaucratie syndicale et politique, de source et d’origine ouvrières, qui constitue le bélier pour le renforcement et le maintien du corporatisme et du réformisme au sein du mouvement syndical ouvrier. L’histoire et le rôle des syndicats jaunes dans les 100 dernières années démontre son excellent utilité pour le capital, précisément parce qu’ils peuvent apparaître comme des représentants des travailleurs, comme une partie de la classe ouvrière.


    L’existence de l’aristocratie ouvrière ne doit pas être comprise d’une manière statique comme un phénomène social qui affecte uniquement certaines économies capitalistes avancées ou certains secteurs de l’économie ou des entreprises individuelles. Quand s’est étendu et approfondi le développement du capitalisme dans le monde entier , l’aristocratie ouvrière a émergé et s’est établie dans des pays où auparavant elle n’existait pas. Par exemple, en Grèce, son expansion s’est associée au sale  rôle de l’Institut de corruption « Fridrich Ebert » et les mécanismes pour la gestion des programmes et le financement de l’U. E,  également au niveau des syndicats réformistes. Les postes payés dans divers comités de « coopération sociale » sont des formes essentielles de formation de l’aristocratie ouvrière contemporaine.


    En Autriche, dans la période 1998-2000, la centrale syndicale OGB a été condamnée dans les tribunaux pour corruption parce que la Banque BAWAG a donné la preuve de la dépense de 1,5 milliard d’euros en « Investissements syndicaux » dans les Caraïbes… Aujourd’hui, le rôle des Autrichiens a été repris par les Espagnols, les Belges, les Français, les Hollandais etc..


    Il devient évident que les mécanismes de l’état bourgeois sont complémentaires des mécanismes du capital afin de stabiliser et d’amplifier ces couches vendues de la classe ouvrière.


    Il faut prêter une attention particulière à ne pas inclure dans l’aristocratie ouvrière de manière simpliste tous les travailleurs ayant des salaires  élevés dans les industries à forte productivité du travail, ou à tout travailleur qui exerce les principales fonctions de supervision dans le processus moderne de production capitaliste. Ces simplifications obscurcissent la question, elles divisent au lieu d’unir la classe ouvrière. Par exemple, un spécialiste ayant le salaire élevé des ouvriers qui travaillent dans des conditions insalubres dans les mines de charbon ou dans la construction navale, avec un rôle opérationnel et en termes d’intensification de grande quantité de travail, ne peut pas être classé comme faisant  partie de l’aristocratie ouvrière.


    La possibilité qu’a donnée aux forces du capital le développement rapide du capitalisme dans de nombreux pays plus que par le passé, d’acheter des segments de la classe ouvrière, ne doit pas conduire le mouvement syndical de classe à la perception que ce phénomène social peut se prolonger indéfiniment. Et cela avant tout parce que le monde capitaliste, particulièrement l’ancien et hautement développé, fonctionne de manière contradictoire. D’une part, tous les pays capitalistes ont tendance à briser les barrières qui empêchent les mouvements de capitaux dans le marché mondial au profit de leur propre monopole, en utilisant une partie du bénéfice excessif pour l’achat de segments de la classe ouvrière. D’autre part, cependant, l’intensité de la concurrence dans le marché mondial pousse chaque bourgeoisie à réduire le prix de la main-d’œuvre du pays pour améliorer sa position concurrentielle. C’est ainsi que la politique de gestion du système capitaliste exige aujourd’hui, de plus en plus souvent, une restructuration stratégique (flexibilisation des relations de travail, privatisation des entreprises et des services de l’état, réductions de salaire et licenciements de fonctionnaires, etc..) qui objectivement affectent certains secteurs de l’aristocratie ouvrière.


    Les événements de ces dernières années, avec la crise capitaliste qui frappe la vie et les droits de centaines de millions de travailleurs dans le monde entier, montrent clairement le rôle éternel des dirigeants des syndicats réformistes jaunes dans la promotion des intérêts du capital.


    Pendant des années, avant le déclenchement du nouveau cycle de la crise économique capitaliste, les syndicats ont joué un rôle insidieux pour la subversion et l’affaiblissement du caractère de masse du mouvement syndical, en cultivant les concepts de « partenariat social » de la classe ouvrière avec le capital, le refus de participer à des initiatives importantes de lutte (grèves, manifestations, etc.), au moyen de la transformation des syndicats en des structures bureaucratiques et des « institutions » de médiation entre les travailleurs et l’état bourgeois,  donnant son accord aux patrons pour qu’ils frappent toutes les voix de lutte au niveau initial, dans les usines, les entreprises et les lieux de travail.


    Ils ont signé de nombreuses conventions collectives, non seulement en dessous des besoins réels de la classe ouvrière d’aujourd’hui, mais en dessous du niveau de l’inflation, contribuant ainsi à l’intensification de l’exploitation des travailleurs qu’ils sont supposés représenter. Ils ont cultivé avec toutes ces méthodes un climat de fatalisme, d’acceptation du « moindre mal », c’est-à-dire la réduction des salaires ou des heures de travail afin de ne pas perdre les emplois.


    Il était donc naturel qu’avec le déclenchement de la crise économique capitaliste, une partie importante des travailleurs qui suivaient par habitude, par peur ou par prudence les directives syndicales vendues, se sont retrouvés impuissants, incapables de réagir devant l’attaque dévastatrice du capitale à l’encontre de leurs droits.


    De leur côté, les syndicats jaunes ont suivi, comme il fallait s’y attendre, leur trajectoire consistant à  faire des concessions de manière continue pendant les années de la crise. Ils ont adopté les interprétations des différents apologistes de la capitale sur les causes de la crise, disculpant le système capitaliste, soulignant la nécessité de « sacrifices » de tous pourvu que « ce soit réparti de manière juste », signant des contrats collectifs dégradants au nom du « risque de faillite de l’économie nationale ».


    Il s’est démontré une fois de plus, et au vu de l’attitude des différentes forces face à la crise économique capitaliste, que la classe ouvrière dans chaque pays ne peut pas évoluer, ne peut développer son propre chemin indépendant pour satisfaire à ses besoins, sans un affrontement et une rupture décisive avec les forces du compromis, du « partenariat social » et du défaitisme dans le mouvement syndical.


    Il n’y a pas de place aujourd’hui pour l’illusion que les dirigeants des syndicats jaunes peuvent changer de cap, qu’ils peuvent sous la pression des masses laborieuses prendre une orientation correcte, qu’ils puissent être mis à la tête de la lutte des classes. Tous les travailleurs honnêtes qui les suivent encore doivent être convaincus de laisser de côté  ces directions, de les éjecter des syndicats, pour se rassembler du côté et au sein des syndicats de classe en un front unique de la classe ouvrière. !

    http://www.pcfbassin.fr/


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