• Florange "est un canard boiteux", selon le futur président de la BPI

    Florange "est un canard boiteux"

    Pour une entrée en fonction, c'est un coup d'éclat. Le futur président de la la future Banque publique d'investissement (BPI), Jean-Pierre Jouyet, s'est signalé ce vendredi matin en qualifiant le site d'ArcelorMittal de Florange de "canard boiteux" et en expliquant que la BPI n'avait pas vocation à venir en aide aux sites industriels en difficulté.

    "Est-ce que la BPI devra sauver Florange ?", lui a t-on demandé lors d'un entretien à Europe 1. "La BPI aura vocation à maintenir l'activité et non pas à aider les canards boiteux", a déclaré l'ancien président de l'Autorité des marchés. Cet ami personnel de François Hollande semble ignorer que le site de Florange, dont ArcelorMittals 'apprête à fermer définitivement les deux hauts fourneaux, est pourtant viable économiquement. Un rapport rendu au ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg l'atteste

    "Ca ne nous regarde pas"

    La remarque de Jean-Pierre Jouyet augure mal de ce à quoi servira la Banque publique d'investissement. Dans cette même interview, Jouyet, qui est également directeur général de la Caisse des dépôts (CDC), a estimé que la BPI n'avait pas vocation à venir en aide à de grands groupes comme PSA pour sauver les emplois. "Je ne dis pas que ça ne nous regarde pas", a expliqué l'ancien secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, tout en prévenant que "la BPI aura vocation à financer essentiellement des PME et des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Les exemples que vous avez cités relèvent de grands groupes. C'est une chose qui est différente."

    La BPI "sera une banque pour prévenir les difficultés des entreprises et c'est une banque au service de l'avenir", a ajouté le directeur général de la CDC. "Nous souhaitons aider à des projets d'avenir pour compenser les difficultés que vous avez citées", a-t-il expliqué, en référence, outre Florange et PSA, à Sanofi, Alcatel-Lucent, Air France et Areva. "Elle fera de la prévention contre le chômage, elle aidera à ce qu'il y ait de nouvelles activités. Pour le reste, c'est à d'autres dispositifs de jouer si nécessaire", selon lui.

     

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  • La raffinerie Pétroplus (76) liquidée

    Le tribunal de commerce de Rouen a prononcé mardi la liquidation de la raffinerie Pétroplus de Petit-Couronne (Seine-Maritime), tout en accordant un délai jusqu'au 5 novembre pour trouver un repreneur, a déclaré Yvon Scornet, porte-parole de l'intersyndicale CGT-CFDT-CFE/CGC.

    Le tribunal de commerce de Rouen a prononcé mardi la liquidation judiciaire de la raffinerie 

    Intervention de Jean-Louis Jegaden, Président du Groupe Communiste au Conseil général de Seine-Maritime


    Session du 16 octobre 2012


    Monsieur le Président,
    Chers collègues,
    Je souhaite intervenir, au nom du groupe communiste, avant la reprise de nos travaux ordinaires. La situation extraordinaire, nous y oblige. Le tribunal de commerce vient, il y a quelques minutes, de prononcer la liquidation de l’entreprise Petroplus, basée à Petit Couronne en banlieue rouennaise, et laisse jusqu’au 5 novembre un délai pour trouver un hypothétique repreneur.
    Cette décision du tribunal va s’appliquer à 470 salariés qui vont, de fait, subir le chômage. Sans compter les sous-traitants, et les entreprises de stockage comme la CIM, et le port du Havre : en tout, plusieurs milliers d’emplois sont touchés. C’est un coup dur pour notre département, c’est un coup dur pour le raffinage français et pour l’emploi dans notre Région.
    Il intervient une semaine après le coup de poignard porté à la sidérurgie avec l’arrêt du site de Florange. Ce sont deux secteurs d’avenir stratégiques pour l’indépendance économique de notre pays qui sont mis à mal.


    L’entreprise Petroplus, gérée par ses salariés depuis près d’un an, est rentable. Nous demandons à François Hollande et au Gouvernement de prendre toute la mesure de l’urgence et d’agir en conséquence pour permettre la pérennisation de l’activité de raffinage sur le site de Petit-Couronne, en allant s’il le faut jusqu’à la réquisition du site et la nationalisation de l’entreprise.


    Nous demandons l’adoption de la loi contre les licenciements boursiers, déposée par les élus communistes dans les deux assemblées. Compte tenu de la majorité de gauche, claire, large, dont nous disposons à l’Assemblée Nationale, et la majorité également au sénat, l’adoption de ce texte ne doit souffrir d’aucun obstacle.
    Le Ministre du Redressement productif et le Premier Ministre ont annoncé l’étude, dans les trois mois à venir, d’un dispositif juridique permettant la reprise, par les salariés, de sites industriels abandonnés par les actionnaires. Au vu de l’urgence de la situation, nous demandons à ce que le Département intervienne auprès de l’exécutif national afin que le calendrier législatif soit bouleversé et que dès la semaine prochaine ces lois soient discutées.


    Les salariés ont trop entendu que « l’Etat ne peut pas tout ». Il n’est pas possible de laisser les tribunaux de commerce arbitrer la politique industrielle de la France. C’est à la puissance publique d’en décider. Aujourd’hui avec la situation de Petroplus, il est temps de montrer l’action concrète d’un Gouvernement de gauche, au service de l’industrie française.

    http://le-blog-de-roger-colombier.over-blog.com


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  • Via : Slovar

    Le PDG de Renault lance un cri de détresse sur la compétitivité de ses usines françaises, oubliant au passage de préciser qu’il a déjà délocalisé 83%de la production actuelle et qu’une baisse des cotisations patronales ne servirait au mieux qu’à maintenir un minimum d’emplois.

     

     

    Restera t-il, dans peu de temps, une usine de production automobile en France ?

    C’est la question qu’on peut légitimement se poser en écoutant les très nombreuses lamentations des PDG sur le manque de compétitivité des usines françaises ou d’Europe de l’ouest. En fait, aucun ne parle du cycle de paupérisation, du aux cures d’austérité, imposées aux populations, qui ont détruit toute notion de pouvoir d’achat. Non, ils se plaignent que leurs clients, hormis les produits essentiels, reportent leurs achats les plus importants, notamment ceux d’achats d’automobiles neuves.

    Que faire, lorsque les salaires sont trop bas et que l’angoisse du chômage réfrène toute velléité de consommation ?

    Henri Ford qui n’était ni philanthrope, ni bolchévique, avait choisi de payer en moyenne deux fois mieux ses salariés que ses concurrents. Pour quelles raisons ? : attirer les ouvriers aux compétences les meilleures afin d’augmenter la productivité du travail et le fait que : « Un ouvrier bien payé est un excellent client ». Force est de constater qu’un siècle plus tard, les patrons de PSA et Renault nous expliquent que faute d’acheteurs, il est nécessaire de baisser le coût du travail et de flexibiliser le travail et les salaires de leurs ouvriers.

    Ce qui ne résoudra rien puisque les clients sont aux abonnés absents. Mais écoutons les arguments du PDG de Renault.

    Carlos Ghosn souligne que le problème de Renault était moins lié aux surcapacités qu’à la compétitivité de ses usines françaises. « Aujourd’hui, le principal sujet de Renault, notre urgence même, c’est notre compétitivité en France (…) » Carlos Ghosn, disant attendre du gouvernement : « des choix et un plan d’action (…) Nous avons un problème de coût du travail et nous avons besoin de flexibiliser le travail, notamment dans l’industrie (…) »

    Notons au passage que Carlos Ghosn n’a pas le moindre scrupule à concurrencer les productions de  ses usines françaises avec des DACIA made in Roumanie ou Maroc. Ou même de proposer sous le logo Renault les modèles haut de gamme Latitude et Koleos fabriqué en Corée. Pas plus qu’il n’a de scrupule à importer plus de véhicules au losange en France qu’il n’en exporte ! Allons, soyons sérieux deux minutes. Comment peux t-on comparer les coûts salariaux des ouvriers slovènes, turcs, marocains, roumains ou russes avec ceux des français ?

    La compétitivité, un simple alibi ?

    La réalité, c’est que monsieur Ghosn a fait des choix stratégique par lesquels la marque Renault est devenue, au fil du temps, un moyen de rebadger des productions DACIA (Brésil et Russie) et surtout ne doit pas gêner Nissan et sa filiale de luxe INFINITI si chers à son coeur. Et ce ne sont pas les véhicules électriques dont la diffusion devrait rester confidentielle, qui vont cacher le fait qu’à part la nouvelle Clio (dont seulement une partie sera fabriquée en France) et le serpent de mer Alpine, l’avenir industriel de Renault n’est plus en France. L’argument compétitivité n’est qu’un alibi. Car, en admettant que le gouvernement français diminue de façon considérable les cotisations patronales, rien n’empêchera les constructeurs automobiles de continuer de développer leur outil de production dans les pays aux coûts salariaux et aux normes sociales les plus bas. En fait, à terme, les clients de la zone Europe, deviendront des consommateurs d’appoint puisque les constructeurs ont déjà les yeux tournés vers la future clientèle des pays émergents où ils ont des usines ou des joint-ventures qui fourniront un jour ou l’autre … le marché européen.

    Alors, faire croire qu’en transférant les cotisations des entreprises vers les consommateurs (TVA) ou les contribuables (CSG) suffirait à ne plus supprimer d’emplois et même à en créer n’est qu’une imposture et viendrait au mieux améliorer les marges au profit … des actionnaires.  La longue plainte de nos constructeurs automobiles n’est en fait qu’un rideau de fumée destiné aux français, qui pourraient prendre ombrage en tant que consommateurs de la programmation des fermeture d’usines de production dans l’hexagone. 

    De façon plus prosaïque, l’avenir de l’automobile française est déjà en place. La Roumanie, le Maroc et probablement bientôt la Chine et l’Inde fourniront les véhicules low cost destinés aux salariés low cost. La République Tchèque, la Slovaquie ou la Hongrie fourniront les classes moyennes, et des accords passés avec des constructeurs germaniques permettront de proposer du haut de gamme.

    Ce qui fait qu’on oubliera le plus rapidement du monde le label France, inventé par le précédent gouvernement, que ni Renault ni PSA n’ont demandé, mais que, curieusement TOYOTA a obtenu haut la main.

    TOYOTA qui, outre ne pas pousser de longues plaintes, va exporter aux Etats Unis des Yaris fabriqués en France.

    Suggérer à Carlos Ghosn d’aller leur demander conseil pour ses problèmes de compétitivité en France ne serait, décidément pas, une mauvaise chose !

    Crédit et copyright photo

    L’Expansion


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  • Les dirigeants du groupe PSA veulent ouvrir la voie à de nouvelles réformes du marché du travail. Ces chantres de la flexibilité sont des piliers du Medef, qui alimentent l’organisation patronale en contributions idéologiques et, il y a quelques années, en participant à la caisse noire de l’UIMM. Ils comptent aussi quelques bons amis au sein du gouvernement.

    Les commentateurs avisés ont peu relevé l’étrange proximité qui lie étroitement Peugeot-Citroën (PSA) à l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) et au Medef. Frédéric Saint-Geours est un bel exemple de ces relations qui ont en commun une doctrine, celle d’un capitalisme financier sans entrave.

    Directeur général des marques du constructeur automobile PSA, numéro deux du groupe, Saint-Geours a rappelé récemment que PSA était en négociation en vue d’un accord de compétitivité dit de « flexibilité » dans l’usine de Sevelnord (Nord), à Hordain. Un accord cynique puisque dans un document interne, daté de 2010, dévoilé par la CGT en 2011, l’usine devrait fermer ses portes en 2015 et laisser sur le carreau 2 600 salariés. En cours, la négociation n’a pourtant pas fait grand bruit au sein des ministères clés du gouvernement.

    La course à la compétitivité

    L’accord de compétitivité illustre cependant la façon de penser du groupe PSA. Le constructeur se veut une entreprise globale, associée au géant américain General Motors (qui détient 7 % du capital de PSA), présente sur tous les marchés, jouant à fond la concurrence mondiale, où le salarié d’Aulnay-sous-Bois, de Rennes ou de Sevelnord est opposé frontalement au travailleur indien, slovaque, etc. La stratégie du constructeur y est énoncée très clairement : « Poursuivre l’ajustement des capacités à la demande commerciale, grâce au compactage des usines et à l’adaptation des effectifs ». Traduction : Sevelnord doit se plier aux règles de la concurrence, comme le site d’Aulnay-sous-Bois qui, étant moins compétitif que celui de Trnava en Slovaquie, pays à bas coût de main d’œuvre, doit fermer ses portes.

    Saint-Geours applique les préceptes de la très influente UIMM qu’il préside. Ce qui lui vaut aussi d’être membre du conseil exécutif du Medef. Restée puissante au sein de l’organisation patronale, l’UIMM [1] a publié en février 2012 un « Pacte social pour une industrie compétitive », qui propose notamment une « flexisécurité du marché du travail » et des accords de compétitivité-emploi imposant flexibilité horaire et salariale. La contribution des industriels au débat public lors de la campagne présidentielle, a défini une ligne, largement défendue par la patronne du Medef, Laurence Parisot.

    Pour mettre un terme « à la perte de compétitivité qui pénalise fortement » les industriels, l’UIMM a identifié « trois enjeux de compétitivité » : « le développement des compétences, la réforme du marché du travail et la revitalisation du dialogue social. S’y ajoute la proposition d’un choc de compétitivité en réformant et pérennisant le financement de la protection sociale », résume le « pacte social ».

    Ces enjeux de compétitivité étaient au centre des débats lors de la conférence sociale des 9 et 10 juillet. La patronne du Medef y a notamment milité pour un transfert des cotisations sociales vers la TVA et la contribution sociale généralisée (CSG), cette dernière option ayant la faveur du gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

    Le partage des rôles

    Un terrain d’entente sous le signe de la compétitivité est-il sur le point d’être formalisé avec le gouvernement de Jean-Marc Ayrault ? Le gouvernement a lui-même lancé le grand chantier de la compétitivité à l’occasion de la conférence sociale, et a confié à l’ancien dirigeant d’EADS, Louis Gallois, une mission sur ladite compétitivité des entreprises pour préparer la mise en œuvre de mesures avant la fin de l’année.

    Les industriels de l’UIMM ont réussi à imprimer leur marque. Certes, Frédéric Saint-Geours a été à bonne école : il fut en 1981 dans le cabinet de Louis Mermaz au ministère des Transports, et devint, de 1984 à 1986, directeur de cabinet du secrétaire d’État au Budget Henri Emmanuelli. Un socialiste qui a trouvé « plus que surprenants » les propos de Philippe Varin, patron de PSA, sur le coût du travail en France, et n’a pas éprouvé le besoin de s’exprimer sur le plan social en cours. Nouveau président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts, Henri Emmanuelli, est désormais au cœur de la boîte à outils de l’État, qui finance les industriels au travers du Fonds stratégique d’investissement (FSI).

    Fi donc des menaces lancées par le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, après l’annonce choc d’un plan de suppression de 8 000 postes dans PSA ! Les dirigeants du groupe PSA respectent un programme fixé depuis plusieurs années. Philippe Varin peut réclamer dans les médias une « baisse massive du coût du travail pour restaurer ses marges », un moyen de « maintenir les capacités d’innovation » de la filière automobile. Et surtout d’empocher sa part des profits. En 2010, Varin a quasiment triplé sa rémunération, touchant 3,25 millions d’euros. Frédéric Saint-Geours, alors directeur financier, a doublé le montant de la sienne, soit 1,26 million d’euros. Et les membres du directoire ont été gratifiés de 120 000 euros de prime exceptionnelle. La même année, la direction fixait les grandes lignes des futurs plans sociaux.

    Sous le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, Philippe Varin peut s’exprimer en toute tranquillité. Les coulisses de PSA révèlent une endogamie capitalistique qui pourrait mettre dans l’embarras le gouvernement. Ainsi, chez Péchiney, Varin y a rencontré Martine Aubry, qui fut directrice générale adjointe du groupe à la fin des années 1980, le grand patron étant à l’époque Jean Gandois, ancien dirigeant du CNPF, ancêtre du Medef, aujourd’hui sollicité par le gouvernement...

    Devenu président du Cercle de l’Industrie en mai, Philippe Varin y a côtoyé l’un de ses vice-présidents, Pierre Moscovici, aujourd’hui ministre de l’Économie. Et le ministre socialiste connaît bien la famille Peugeot : il tutoie et apprécie Thierry Peugeot, président du conseil de surveillance du groupe, et Christian Peugeot, directeur des affaires publiques.

    La mise au jour du système

    Le scénario du plan social démenti puis confirmé est un classique pour PSA : 2012 rappelle 2007. La rumeur de la suppression de 10 000 emplois en France et en Europe avait circulé pendant plusieurs mois et fut confirmée par l’ancien PDG du groupe, Jean-Martin Folz, qui annonça finalement la suppression de 5 000 emplois en 2007, après les 7 000 de 2006. La même année 2007, les actionnaires empochaient 317 millions d’euros de dividendes...

    2007 fut une année faste en révélation : la presse dévoile l’existence d’une caisse noire au sein de l’UIMM. Frédéric Saint-Geours, alors directeur général d’Automobiles Peugeot, succède à Denis Gautier-Sauvagnac à la tête d’une UIMM dans la tourmente. L’enquête judiciaire avançant à grands pas, Saint-Geours avoue que parmi les dix principaux donateurs de l’Epim (entraide professionnelle des industries de la métallurgie), la fameuse caisse noire antigrève de l’UIMM, Peugeot figurait en deuxième position.

    Peugeot apportait une obole de 49 140 euros pour « fluidifier » les relations sociales, selon le bon mot de Gautier-Sauvagnac, ancien membre du conseil de surveillance de Vallourec (en 2006), entreprise qui était le premier donateur de la caisse noire.

    « En 2007, 153 entreprises ont cotisé à l’Epim pour un montant de 675 000 euros », admet Saint-Geours. « Quelque 574 000 euros ont profité à deux ou trois entreprises » qui ont traversé des conflits sociaux en 2007, indique vaguement le dirigeant de PSA. A cette période, en pleine campagne pour la présidentielle, le site d’Aulnay-sous-Bois était engagé dans un mouvement de grève qui a duré près de deux mois.

    Toujours à la même époque, les déboires de la puissante UIMM n’ont en rien changé la ligne idéologique du Medef. En octobre 2007, Denis Kessler, ancien vice-président du Medef et éminence grise du baron Ernest-Antoine Seillière lorsque celui-ci pilotait l’organisation patronale, lâchait cette déclaration de guerre : « II faut défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ». Au nom de la compétitivité.

    Les infortunes des uns font la fortune des autres

    Que ce soit aujourd’hui Philippe Varin, hier Jean-Martin Folz, Christian Streiff ou Jacques Calvet, la famille Peugeot a toujours été aux commandes du groupe. C’est Thierry Peugeot qui est récemment sorti du bois et a fait bloc derrière Philippe Varin quand celui-ci a lancé son appel à la baisse du coût du travail, justifiant ainsi la suppression de milliers d’emplois.

    Pourtant la famille Peugeot fait partie des grandes familles du capitalisme français qui ont quitté le pays depuis longtemps. Une étude publiée en 2011 par le magazine économique de suisse romande Bilan, intitulée : « Les 300 plus riches de Suisse », a comptabilisé le patrimoine des 44 grosses fortunes françaises exilés en Suisse.

    Ces familles ont cumulé une trentaine de milliards d’euros dans le paradis fiscal. En cinquième position, la famille Peugeot dont la fortune, logée dans le canton de Vaud, a été évaluée entre 1,2 et 1,6 milliards d’euros...

    Notes

    [1] L’UIMM a aussi la haute main sur l’Unedic, dont le conseil d’administration a nommé président Jean-François Pilliard en février 2012, délégué général de l’UIMM depuis 2008.

    http://www.politis.fr/Peugeot-PSA-laboratoire-du,19103.html


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  • PSA: Thierry Peugeot craint pour ses actions

    Le chef de file des Peugeot, Thierry Peugeot, prend la parole ce vendredi matin dans le Figaro contre les critiques du gouvernement à l'encontre du plan de réorganisation de PSA Peugeot-Citröen, mais surtout pour tenter de consolider le cours de l'action de PSA, dont sa famille détient 25%.

    Pas de surprise dans cet entretien, le président du conseil de surveillance de PSA Peugeot Citroën ne va pas à l'encontre du plan massif de suppressions d'emplois (8.000) et la fermeture en 2014 de l'usine d'Aulnay (93). "Nous avons des valeurs d'humanisme et de respect (qui seront) appliquées dans la mise en oeuvre du plan", assure-t-il. Une affirmation étonnante au vu du chantage social auquel la direction du site de PSA Sevelnord se livre à l'encontre des salariés (lire nos révélations: L'insupportable chantage de PSA à Sevelnord). Toutefois, face au recul du marché européen de l'automobile, "nous sommes dans l'obligation de nous adapter, nous ne pouvons pas rester sans rien faire", justifie-t-il.

    Derrière Philippe Varin

    Les Peugeot sont en file indienne derrière le PDG de PSA. "Il n'y a pas de dissension au sein de la famille. Il y a l'unanimité totale. Et le conseil de surveillance a clairement exprimé son soutien à Philippe Varin, début juin", a-t-il également affirmé. Ainsi, aucune discordance non plus sur l'alliance avec General Motors, qui a pris 7% de son capital et avec qui il doit produire des modèles à partir de 2016..

    Une OPA possible

    Si les critiques du gouvernement contre PSA passent mal chez les Peugeot - "nous sommes prêts à accepter la critique mais il y a des limites" - on comprend à la lecture de l'entretien que c'est surtout parce qu'elles font du mal à l'image du groupe. Et l'image fait beaucoup pour le niveau des actions en bourse. Celui-ci étant bien bas (-18% depuis l'annonce du plan de réorganisation), Philippe Peugeot craint une OPA. "Tout est possible", relève-t-il "Les attaques dont le groupe fait actuellement l'objet ont un effet immédiat sur leur perception du groupe. C'est une situation qui est dangereuse", ajoute-t-il.

    Une éventuelle dilution de la participation familiale "n'est pas à l'ordre du jour", affirme-t-il, qui voit dans cet actionnariat "un élément de stabilité". "Nous sommes aussi des gens responsables. A chaque fois que le groupe a été en difficulté, il a suspendu le versement de dividendes à ses actionnaires. Cela a été le cas en 2009 et en 2010, au titre des exercices précédents. En 2011, l'entreprise a versé des dividendes car les résultats de l'exercice 2010 étaient bénéficiaires", a-t-il justifié.


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  • jeudi 19 juillet 2012 

    Rouge Midi 95

    En dépit des discours sur la « société de loisirs post-industrielle » qui avaient fleuri dans les années 1990 et 2000, l’industrie joue toujours un rôle majeur dans l’organisation des territoires, la dynamique des systèmes productifs et les rapports de puissance structurant la mondialisation.


    En vingt ans, entre 1990 et 2010, de profonds changements sont apparus dans la hiérarchie planétaire : face au dynamisme des pays émergents et des puissances régionales, l’Europe à trente (les vingt-sept pays de l’Union européenne plus l’Islande, la Norvège et la Suisse) tombe de 36 % à 24,5 % de la production [1].


    En 2011, la Chine est devenue la première puissance industrielle du monde, mettant fin à un siècle d’hégémonie américaine. De son côté, le Brésil, désormais sixième économie de la planète [2], a devancé la France pour la production industrielle ; la Corée du Sud a surpassé le Royaume-Uni, lui-même talonné par l’Inde [3].


    Ces reconfigurations géo-économiques s’expliquent par l’émergence d’une nouvelle division internationale du travail, dans le cadre d’une architecture mondiale multipolaire [4]. On assiste à un déplacement géographique sans précédent des marchés, aspirant investissements, emplois, localisations d’activités (voir graphiques). Entre 1990 et 2010, les profits des deux cent vingt plus grands groupes européens réalisés dans les pays émergents sont passés de 15 % à 24 %. Les logiques de localisation des transnationales en sont bouleversées. Si les délocalisations fondées sur les différentiels de coûts salariaux perdurent, les entreprises cherchent également à répondre aux demandes des nouvelles couches moyennes urbaines solvables, alors que les revenus de celles-ci dans les pays du Nord sont bloqués. Une ruée vers les marchés des Sud a commencé.


    Loin de se cantonner aux activités bas de gamme, les grands pays émergents gagnent des places dans des filières plus sophistiquées : télécommunications, aéronautique, trains à grande vitesse, nucléaire, industries navale et spatiale... Ils négocient pied à pied les transferts de technologies, réalisent un sensible effort de formation de leur main-d’œuvre et se dotent d’entreprises transnationales de plus en plus dynamiques, qui taillent des croupières aux groupes occidentaux. Dans les négociations exclusives entre l’Inde et Dassault, annoncées en février 2012, pour la fourniture de cent vingt-six avions de combat Rafale, le débat porte à la fois sur le nombre d’avions construits en Inde par l’entreprise publique Hindustan Aeronautics Limited (86 %, en principe), sur les transferts de technologies consentis et sur les contreparties économiques et financières.


    La géographie mondiale de l’innovation s’en trouve bouleversée, comme l’illustre le triptyque chinois, qui mobilise les facteurs humain, financier et technologique.

    1. Effort humain
    2. Effort financier5].
    3. Effort technologique,

    L’impact est considérable, et ouvre de nouveaux champs de concurrence frontale. Le 23 décembre 2011, le groupe China Three Gorges — du nom du célèbre barrage hydroélectrique sur le Yangzi Jiang — a acquis 21,3 % du capital de l’électricien Energias de Portugal (EDP, équivalent d’Electricité de France), privatisé au nom de la lutte contre la dette publique. Il a remporté l’affaire à la barbe du groupe allemand E.ON et du brésilien Electrobras, pour un montant de 2,7 milliards d’euros, en offrant un prix par action de 50 % supérieur à son cours de Bourse. Déjà, la Chine réalise la moitié de la production mondiale de panneaux solaires photovoltaïques, mettant sous pression les fabricants occidentaux, comme le montre la faillite, en décembre 2011, des allemands Solon et Solar Millennium. Elle dispose du premier parc mondial d’éoliennes, qui devrait être multiplié par 4,7 d’ici à 2020.


    Dans ce contexte, l’impasse des stratégies communautaires et l’aveuglement des élites politiques et économiques européennes sont stupéfiants, alors que l’arrivée de la Chine au premier rang de l’industrie mondiale a provoqué un véritable choc aux Etats-Unis [6]. Il est plus qu’urgent que l’Union européenne et la France se soucient enfin sérieusement de leur avenir industriel, scientifique et technologique. Chômage et sous-emploi se conjuguent dans l’Union, qui comptait 23,8 millions de demandeurs d’emploi à la fin de 2011.


    La crise s’est traduite par un effondrement de 20 % en deux ans (entre 2007 et 2009) de la valeur de la production industrielle dans l’Union européenne. Le recul va de 15 % en Europe centrale et orientale à un tiers en Estonie ou un quart en Lettonie, et dépasse les 20 % en Allemagne (21,4 %), en Italie, en Finlande ou en Suède. Entre le début de la crise, à l’automne 2008, et la fin de 2010, l’Union a perdu plus de quatre millions d’emplois industriels, soit 11 % de ses effectifs. Au troisième trimestre 2011, ces pertes n’étaient toujours pas résorbées, sauf en Allemagne. La récession qui s’annonce pour 2012-2014 du fait des gigantesques plans d’austérité ne peut qu’aggraver ce déclin.


    La France à la traîne


    La France est devenue le pays le plus désindustrialisé parmi les quatre grands de la zone euro (les trois autres étant l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie) ; entre 1980 et 2011, les emplois industriels y sont passés de 24 % à 13 % du total des emplois. Les raisons de cette forte érosion sont sujettes à débat. On estime généralement que, depuis 1980, environ un quart du déclin est imputable aux mutations du système productif et à l’externalisation accrue des tâches industrielles vers le secteur des services, comme par exemple le recours à l’intérim. Certaines tâches de conception, de maintenance ou même de secrétariat sont ainsi répertoriées comme des services alors qu’elles étaient auparavant inclues dans la production [7]. A cela, il faut ajouter la baisse d’effectifs liée aux gains de productivité, qui représente environ 30 % [8].


    Il serait cependant malvenu de fermer les yeux sur la longue et très inquiétante marche française vers la désindustrialisation, que la crise ne fait qu’accélérer. En témoignent de nombreux indicateurs, comme le recul de l’investissement, en baisse de 10 % entre 2008 et 2010, ou l’explosion du déficit commercial depuis 2004. Le solde des échanges industriels est dans le rouge pour presque tous les produits, sauf l’agro-alimentaire. Les exportations ne couvrent les importations qu’à hauteur de 87 % pour l’ensemble des produits industriels, de 73 % pour les biens de consommation et de 87 % pour les biens d’équipement. Sur les cinq dernières années, le déficit cumulé atteint 113,6 milliards d’euros, en particulier avec la Chine et l’Allemagne. Alors que les points faibles sombrent, les points forts s’érodent : la France perd des parts de marché à l’exportation en Europe et dans le monde sans pouvoir faire face à ses propres besoins nationaux.


    Entre 2008 et 2010, le recul de la valeur de la production française touche toutes les branches (hors secteur des déchets, eau et dépollution). Il atteint 28 % dans le raffinage et la cokéfaction, 26 % dans le textile, de 15 % à 20 % dans la métallurgie, la mécanique, l’informatique, l’optique et l’électronique, où se multiplient les fermetures de sites industriels. Entre 1989 et 2011, l’industrie française a ainsi perdu 2,5 millions d’emplois. Sans surprise, cette chute touche l’industrie lourde et celle qui utilise de la main-d’œuvre non qualifiée. Mais le recul s’étend également aux industries innovantes ou stratégiques, comme les équipements ou la robotique.


    De même, si les ouvriers non qualifiés payent le plus lourd tribut, avec une régression de 671 000 emplois (- 55 %), on assiste à la perte de 182 000 postes d’ouvrier qualifié et de 74 000 postes d’ingénieur, de cadre et de technicien. En octobre 2011, Peugeot SA annonçait ainsi la suppression de 6 000 emplois, dont 1 900 dans la production et 3 100 dans les services, en particulier en recherche-développement ; 3 000 sous-traitants et intérimaires sont remerciés. En dehors de quelques vieux héritages gaullistes datant des années 1960-1970 (aéronautique, industrie spatiale, armement, nucléaire) et désormais fragilisés, ainsi que de l’agroalimentaire, le socle industriel et technologique national se délite, sans qu’une relève d’envergure ait été lancée au cours des trois ou quatre dernières décennies.


    Rien d’étonnant à ce que la désindustrialisation soit devenue l’un des enjeux des élections présidentielles, la française comme l’américaine. Pas un candidat, de l’extrême gauche à l’extrême droite, en passant par MM. François Hollande et Nicolas Sarkozy, qui n’en parle. Dans la foulée des Etats généraux de l’industrie de 2010, le ministre chargé de ce dossier, M. Eric Besson, promeut l’« aide à la réindustrialisation », qui permet à de petites et moyennes entreprises (PME) de bénéficier d’avances remboursables sur trois ans, alors que le Fonds stratégique d’investissement (FSI) français annonce quelques prises de capital dans des PME jugées stratégiques. On ne peut cependant que constater le décalage entre ces mesures ou déclarations et les enjeux essentiels.


    La Commission de Bruxelles et les gouvernements nationaux qui se sont succédé ces trois dernières décennies ont une responsabilité directe, à la fois dans la construction puis dans l’effondrement du régime d’accumulation financière d’un côté et dans le mécanisme de désindustrialisation de l’Union de l’autre : les deux faces d’une même crise systémique. Définie en 2000, la stratégie dite de Lisbonne s’est révélé une pure illusion. En effet, elle fixait comme objectif — jamais atteint — que chaque Etat consacre 3 % de son produit intérieur brut (PIB) à la recherche-développement et à l’innovation. Elle se fondait pour cela sur un système de représentation idéologique axé sur l’« économie de la connaissance », censée remplacer la production matérielle.


    Ce discours a surtout permis de justifier l’abandon de pans entiers de l’industrie française et européenne, au nom d’une spécialisation internationale du travail réservant à l’Union européenne les technologies et secteurs de pointe. Il a largement accompagné le redéploiement international du capital, la financiarisation croissante et la gestion à court terme des actifs industriels, la forte dégradation du rapport entre travail et capital dans la répartition des richesses, le refus constant et systématique de toute politique industrielle communautaire et nationale au nom du dogme de la libre concurrence.


    Ce désarmement idéologique, politique et économique se paye au prix fort : entre 2000 et 2010, le PIB par habitant a grimpé de seulement 0,9 % dans l’Union et de 0,5 % en France, soit l’un des taux les plus faibles des économies industrielles. L’Europe et la France se trouvent ainsi pris en tenaille entre les pays en développement et les grands pays émergents qui vont, d’ici une quinzaine d’années, les concurrencer dans des secteurs jusqu’à présent relativement épargnés. De 1998 à 2008, le poids des pays à faible coût de production dans les importations de biens manufacturés de la zone euro passe de 17 % à 44 % [9].


    Il convient de souligner que la perte de compétitivité de la France dépasse largement le seul coût du travail.


    Toute analyse sérieuse doit intégrer à la fois la pression exercée par la politique de l’euro fort, la compétitivité liée à la qualité de la formation, à l’organisation du travail, à la place de la recherche et de l’innovation, aux caractéristiques du système productif et aux prélèvements du capital (paiement des dividendes, etc.). En effet, non seulement le coût horaire du travail en 2008 — dernière année de comparaison disponible — dans l’industrie manufacturière française est inférieur à celui de l’Allemagne (33,16 euros contre 33,37 euros), mais la productivité par personne est en France l’une des meilleures d’Europe : elle est de 21 % supérieure à la moyenne de l’Union à vingt-sept et de 15 % supérieure à celle de l’Allemagne. C’est pourquoi la stratégie systématique de baisse continue du coût du travail se révèle une impasse.


    Puisque l’Allemagne est convoquée à tort et à travers dans le débat public français, il convient de rappeler quelques faits. L’efficacité allemande repose fondamentalement sur une forte stratégie industrielle (20 % du PIB et 19 % de l’emploi), elle-même fondée sur l’innovation, la montée en gamme des produits et une spécialisation dans des activités motrices centrées sur les biens d’équipement civils, un tissu productif articulant de grands groupes (konzerns) et un puissant tissu de petites et moyennes entreprises innovantes (Mittelstand), capables d’exporter. Si l’on prend les évolutions sur vingt ans, on constate que la France représente, en moyenne, 73,5 % du PIB allemand, mais que la valeur de sa production industrielle n’atteint que 42 % de celle de l’Allemagne et ses exportations de biens et de services, 52 %.


    Les effets de ces choix stratégiques sont immédiats : malgré la crise, le taux de chômage officiel en Allemagne est au plus bas depuis vingt ans (6,8 %). En 2011, la croissance a été de 3 %, permettant de réduire à 1 % du PIB le déficit public. Quelque 535 000 emplois à plein temps ont été créés, et l’investissement en biens d’équipement a augmenté de 8,3 %. Cette bonne tenue de l’économie allemande est due à une hausse de 8,2 % des exportations, en particulier vers les pays émergents, dont la Chine, qui pourrait, d’ici trois ans, devenir son premier partenaire commercial.


    Certes, les konzerns ont transféré à l’étranger, en particulier en Europe centrale et orientale, une partie de leur appareil productif (automobile, mécanique...). Entre 1998 et 2012, la part des importations de biens intermédiaires dans la valeur ajoutée de l’industrie passe de 33 % à 59 % (de 50 % à 80 % en France) [10]. Mais les konzerns ont gardé le contrôle des segments et des fonctions les plus stratégiques et, surtout, ils n’ont pas cessé de moderniser leur appareil industriel en Allemagne même, afin de répondre aux nouvelles demandes mondiales.


    Les faiblesses du capitalisme français sont connues depuis une quarantaine d’années : sous-industrialisation (12 % du PIB et 11 % de l’emploi), insuffisance de la recherche-développement privée et industrielle, positionnement de milieu de gamme pour les productions, écrasement et pillage du tissu de PME par les grands groupes — celles qui exportent étant trois fois moins nombreuses qu’en Allemagne —, insuffisance de formation initiale et continue, sous-qualification et non-reconnaissance de celles qui existent, dévalorisation de toute culture technique, technologique ou scientifique dans le système des représentations sociales... La non-compétitivité française tient en particulier au sous-investissement des industriels et du secteur privé dans la recherche. L’effort ne dépasse pas le quart des dividendes nets versés en 2008, contre 35 % en 1995 [11]. En 2010, cela ne représente que 57 % de l’effort financier des entreprises allemandes.


    Alors que la stratégie de Lisbonne prévoyait de porter à 40 % le nombre des 30-34 ans titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur, 46 % des Français âgés de 25 ans à 45 ans ont un niveau inférieur ou égal au brevet d’études professionnelles (BEP) – certificat d’aptitude professionnelle (CAP).

     

    Enfin, le système productif français est également victime de l’hégémonie des paramètres financiarisés dans le pilotage des stratégies industrielles, les investisseurs financiers étant devenus in fine les arbitres des choix stratégiques.


    Sortir de l’impasse


    Face à ces contraintes et à ces urgences, l’Union européenne et la France doivent totalement repenser leur modèle de développement et redonner au système bancaire et financier le rôle dont il n’aurait jamais dû sortir : financer une croissance économique, sociale et territoriale efficace, durable et solidaire. Sur une génération, c’est-à-dire sur une trentaine d’années, c’est une véritable révolution industrielle et productive qu’il faut engager. La rupture technique et technologique doit être équivalente à celle qui fut réalisée à la fin du XIXe siècle. L’enjeu est bien de franchir une nouvelle frontière décisive dans des activités d’avenir qui permettent de répondre aux défis communautaires et mondiaux du XXIe siècle.


    Rappelons tout de même que la population mondiale doit augmenter de 1,4 milliard d’habitants d’ici à 2030, et la population active mondiale doubler d’ici à 2020. La généralisation du modèle américain de consommation à la planète entière se révèle une impasse. Un débat s’impose sur des politiques communautaires et nationales de réindustrialisation volontaristes qui s’accompagnent d’un effort à long terme d’innovation, de recherche fondamentale et appliquée, de formation et de qualification de la main-d’œuvre. Cela exige pour la France de mobiliser de 4 à 5 points de PIB supplémentaires, soit un effort indispensable, et tout à fait soutenable, de 100 milliards d’euros.


    La sortie de crise ne peut s’envisager qu’à travers la promotion d’un nouveau modèle de développement aux échelles nationale et communautaire, dans le cadre d’un modèle de croissance durable. Cela suppose la réhabilitation d’un Etat stratège définissant des politiques industrielles et des investissements à long terme, une rerégulation et une réorientation du secteur financier et bancaire vers les investissements productifs, la revalorisation du potentiel humain et de l’innovation, l’émergence de nouvelles spécialisations autour d’un renforcement de l’offre fondée sur de nouveaux producteurs et de nouveaux produits.


    Dans ce cadre, la France et l’Union européenne disposent, malgré les difficultés actuelles, de nombreux atouts [12]. Par exemple, dans l’énergie, les déséquilibres croissants entre l’offre et la demande, la montée structurelle des prix des matières premières à moyen et à long terme et la sécurité des approvisionnements obligent à une augmentation sans précédent de l’intensité énergétique, à une utilisation plus rationnelle et plus économe des ressources énergétiques et minérales (généralisation de filières de recyclage), au déploiement de nouvelles énergies et à une vraie rupture technologique dans le nucléaire (réacteur nucléaire de nouvelle génération, gestion des déchets radioactifs à haute activité et longue vie).


    Face à la hausse des besoins alimentaires mondiaux (+ 50 % d’ici à 2025), les défis à relever sont considérables pour produire à la fois plus et mieux en répondant aux exigences environnementales, sanitaires et sociétales, tout en assurant la sécurité alimentaire. Enfin, le développement de nouveaux champs sectoriels s’ouvre avec les technologies vertes, les énergies décarbonées et la capture et le stockage du CO2, les biotechnologies et les sciences du vivant, la chimie du végétal, les nouveaux matériaux, les nanotechnologies, les sciences cognitives et les nouvelles technologies informatiques. Autant de pistes pour une nouvelle révolution productive.


    Laurent Carroué mars 2012

    Transmis par Linsay


    Le Monde Diplomatique

    Laurent Carroué


    Directeur de recherche à l’Institut français de géopolitique (IFG, université Paris-VIII).


    Le titre et les intertitres sont de Rouge Midi


    [1] Alors que la stratégie de Lisbonne était censée la faire devenir la 1ère puissance économique mondiale NDR

    [2] Classement international du Center for Economics and Business Research (CEBR) de Londres, décembre 2011.

    [3] « World manufacturing production 2010 », IHS Global Insight.

    [4] Cf. « Crise et basculements du monde : enjeux géopolitiques, géoéconomiques et géostratégiques », Historiens & Géographes, n° 416, Paris, octobre-novembre 2011.

    [5] Estimations du « Rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures », annexe au projet de loi de finances pour 2012, Paris.

    [6] Cf. « The case for a national manufacturing strategy », The Information Technology and Innovation Foundation (ITIF), Washington, avril 2011 ; « Report to the President. Ensuring American leadership in advanced manufacturing » (PDF), Executive Office of the President, 2011.

    [7] 36 % des métiers industriels sont exercés par des établissements non industriels, contre 26 % il y a vingt-cinq ans.

    [8] « Le recul de l’emploi industriel en France de 1980 à 2007 : quelle est la réalité ? », Trésor-Eco, n° 77, Paris, septembre 2010.

    [9] Trésor-Eco, n° 95, novembre 2011.

    [10] Flash Eco, n° 32, Natixis, Paris, janvier 2012.

    [11] « Rapport annuel sur l’état de la France en 2011 », Conseil économique, social et environnemental (CESE), Paris, 23 novembre 2011.

    [12] Cf. « France 2030 : cinq scénarios de croissance », Centre d’analyse stratégique, Paris, mai 2011, et « La compétitivité : enjeu d’un nouveau modèle de développement », CESE, octobre 2011.


    URL article : http://www.rougemidi.fr/spip.php?article7060


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    Tous les faiseurs d'opinions, du journal Libération au journal patronal Les Echos, donnent à lire une seule idée à penser ... celle de Philippe Varin, président du directoire de PSA Peugeot Citroën. PSA Peugeot Citroën qui espère que le plan automobile que le gouvernement va présenter fin juillet abordera la question du coût du travail en France. Philippe Varin, le président du directoire du constructeur, a fait cette déclaration au lendemain de l'annonce d'une vaste casse de l'emploi pour rupture de ses activités en toute impunité dans l'Hexagone.

    Si le patronat peut claironner haut et fort sur le "coût du travail" c'est qu'il a trouvé un écho favorable du côté de François Hollande. "Mauvaise spécialisation sectorielle, faible nombre d'entreprises exportatrices, insuffisance d'innovation" mais aussi "rigidités dans la structure des coûts du travail" : le diagnostic des causes de la "détérioration de la compétitivité" française en matière d'industrie dessinée à grands traits par François Hollande à l'ouverture de la conférence sociale laissait présager que l'abaissement du coût du travail serait la réponse salutaire pour le nouveau monarque à la désindustrialisation de la France.



    "Compétitivité équitable", c'est le sésame pour ouvrir à toutes les régressions sociales

    Le patronat et ses multiples relais mettent les bouchées doubles pour maintenir les politiques économiques et sociales dans l'étau néolibéral. Pour le Medef un seul mot d'ordre "compétitivité équitable"...

    Le patronat n'a que ce mot à la bouche, il est aussi sur toutes les lèvres de ses relais : Institut de l'entreprise, Cercle des économistes, Coe-Rexecode, réseaux plus ou moins formels du CAC 40, Gracques, etc. Comme un mantra, impératif de "réalisme" économique, il signifie "rigueur" et "austérité" sans avoir l'air d'y toucher, le propre de la guerre que mènent les néolibéraux depuis toujours...

    L'enjeu pour le Medef consiste à désamorcer par avance par avance toute intervention politique dans ce qu'il voit comme chasse gardée. Aujourd'hui tout devient simple pour le Medef qui propose de réduire les coûts salariaux, de généraliser la précarité, de transférer à la collectivité le financement de la protection sociale, de baisser les dépenses publiques et de combattre les visées régulatrices du législateur.

    Pendant que l'Uimm dénonce, non sans hypocrisie, "une protection légale des salariés qui paralyse l'embauche", Laurence Parisot dérobe une innovation de première à Philippe Varin, lui-même pilier de la métallurgie et patron-casseur de PSA Peugeot-Citroën qui vient de déclencher le premier cataclysme social et économique de grande ampleur depuis l'élection de François Hollande en voulant supprimer des milliers d'emplois en France : "En 2008, nous avons fait un grand pas en matière de flexisécurité avec l'invention de la rupture conventionnelle, il faut inventer quelque chose d'équivalent sur le plan collectif. Aujourd'hui, un plan de sauvegarde de l'emploi se déroule selon un processus qui est compliqué, couteux et anxiogène."

    En remettant en selle son projet de "contrat unique" sur le marché du travail, le Medef avance pour détruire le CDI comme norme d'emploi, là aussi au nom de la "fluidification" des embauches, peut-être, mais avant tout, bien sûr des licenciements...

    Derrière la comédie de l'affliction patronale

    Dans le débat public, les patrons jouent la carte de la dramatisation mais, en coulisses, s'activent pour se rapprocher de l'Elysée et du gouvernement Ayrault.

    Les patrons comptent sur des relations nouées depuis des années : par exemple le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a été jusqu'à très récemment vice-président du Cercle de l'industrie, un lobby rassemblant une majorité des patrons du CAC 40, créé à l'initiative de Dominique Strauss-Kahn dans les années 1990 et désormais présidé par l'incontournable Philippe Varin (PSA).

    Dans l'entourage de François Hollande, les patrons tablent sur Jean-Pierre Jouyet, l'"ami de trente ans" du président qui passe de l'Autorité des marchés financiers (AMF) au Fonds stratégique d'investissement (FSI), ainsi que sur Emmanuel Macron, jeune banquier d'affaires devenu conseiller à l'Elysée... C'est ce dernier qui, avec Jean-Louis Beffa, longtemps patron de Saint-Gobain, a organisé, le 11 juin, un discret déjeuner avec un aréopage de patrons allemands et français autour du nouveau président de la République.

    D'après le récit publié dans le Monde, cette rencontre s'est soldée par un vibrant appel pour "retrouver la compétitivité" : "Soyez le Gerhard Schröder français !" Autrement dit : "Brisez toutes les protections sociales sur le marché du travail, baissez les impôts des plus riches, instaurez la TVA sociale !"

    Cette fois, l'heure de vérité approche pour François Hollande.

    « La seule posture possible pour le gouvernement, c’est de dire qu’il n’accepte pas » 

    Nous y sommes ! PSA Peugeot-Citroën annonce aujourd’hui son intention de supprimer 8 000 postes sur ses sites français (sans compter les milliers d’emplois induits) : 3 000 emplois directs à la production d’Aulnay-sous-Bois, 1 400 à l’usine de Rennes et 3 600 dans les effectifs hors production, tous sites confondus. Le gouvernement doit instaurer un moratoire sur les plans à venir, ainsi qu’une loi interdisant les licenciements boursiers.

    Il est incompréhensible que le gouvernement n’ait pas réagi plus tôt, étant donné que la fermeture du site d’Aulnay est redoutée depuis près d’un an et que les chiffres qui circulaient ces derniers jours annonçaient déjà entre 8 000 et 10 000 suppressions de postes. Le plan de redressement de la filière automobile, qui doit être annoncé la semaine prochaine par Arnaud Montebourg, arrive selon lui « trop tard », alors qu’il y a longtemps que les organisations syndicales, comme la CGT, et le Front de Gauche ont alerté les autorités, et demandé un moratoire sur les licenciements.

    Le gouvernement doit désormais s’exprimer et dire qu’il s’oppose au plan.

    On a un Ministère du Redressement productif, et il ne dit même pas son opposition ! La seule posture possible pour le gouvernement, c’est de dire qu’il n’accepte pas. Laisser fermer l’usine d’Aulnay serait contraire à ce que dit le gouvernement sur le redressement national.

    L’Etat doit instaurer un moratoire sur l’ensemble des plans de licenciements, et que soit inscrite dans la loi l’interdiction des licenciements boursiers. La question, c’est : est-ce que les licenciements c’est pour aller produire moins cher ailleurs et faire des bénéfices ?

    Toutes les aides publiques au secteur de l’automobile doivent être remises à plat avant que l’on n’engage de nouvelles politiques industrielles, rappelons qu’il y a deux ans, l’automobile a reçu deux ou trois milliards d’euros d’aides publiques, ce qui n’a pas empêché PSA Peugeot-Citroën d’annoncer 8 000 suppressions de postes. 

    L’usine Sevelnord d’Hordain, bientôt filiale à 100% de PSA Peugeot-Citroën, serait pour sa part liquidée en 2015, d’après la CGT, même si nous n’avons pas encore l’annonce officielle.

    Philippe Varin, le patron du groupe, dit « mesurer pleinement la gravité des annonces faites aujourd'hui ainsi que le choc et l'émotion qu'elles provoquent dans l'entreprise et dans son environnement ». Selon lui, « l'ampleur et le caractère durable de la crise qui affecte l’activité de PSA en Europe rendent désormais indispensable ce projet de réorganisation ». A d’autres !

    Quel mépris pour les salariés de la part de la direction et du gouvernement précédent, qui ont nié jusqu’au dernier moment qu’un tel plan machiavélique était à l’œuvre, pour l’annoncer avec une telle brutalité aujourd’hui.

    Plus que jamais, les « actionnaires n’ont pas de patrie », à part la « patrie de l’argent ». 

    C’est désormais l’heure de vérité. Le Gouvernement doit stopper d’urgence cette « prime à la casse ».

    Il faut d’urgence inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée la proposition de loi visant à interdire les licenciements boursiers, le groupe PSA Peugeot Citroën réalisant de confortables bénéfices et ayant versé 200 millions d’euros de dividendes en 2011.

    Ce groupe qui a reçu des milliards d’aides publiques sous différentes formes et dispose d’un trésor de guerre de quelques 10 milliards d’euros traite les salariés, leurs familles, les collectivités territoriales avec le dernier des mépris. Ce qui rend les annonces de ce jour encore plus insupportables c’est la soudaine envolée de la cotation en bourse du groupe Peugeot. Si ce ne sont pas des licenciements boursiers au profit des actionnaires, cela y ressemble follement, alors que la moitié des bénéfices réalisés ces dernières années ont été versés aux actionnaires sous forme de dividendes.

    Par ailleurs, il faut mettre également en débat une loi pour accorder un droit de veto aux élus du personnel sur toutes les décisions stratégiques.

    C’est encore plus scandaleux lorsqu’on entrevoit des promoteurs immobiliers venir frapper à la porte de la ville d’Aulnay-sous-Bois, après l’annonce d’une DUP (déclaration d'utilité publique) possible par le Maire socialiste.

    Quel devenir du site ? Quels plans déjà dans les tiroirs ? Comment ne pas mettre en corrélation les projets du Grand Paris et l’implantation d’une gare avec les appétits des spéculateurs y compris ceux de PSA qui y voit un juteux marché.

    La spéculation va bon train tandis que des hommes et femmes sont en colère et pleurent sur leur avenir qui s’assombri.

    Il faut arrêter cette casse sociale et ce massacre territorial !

    Le gouvernement doit, avec l’appui du Parlement, décréter un moratoire sur ces plans de licenciements et doit examiner avec les salariés, les élus locaux, un plan de soutien à l’industrie automobile dans une vision d’avenir, cherchant la sécurisation de l’emploi , envisageant des plans de formation, un effort de recherche et d’innovation pour des solutions s’inscrivant dans la mutation écologique dont la planète a besoin. L’expérience de l’Ile Seguin avec la fermeture de Renault montre que les promesses de réindustrialisation du site ne sont que du vent.
     

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  • Ne faut-il que délibérer, la Cour en Conseillers foisonne ;
    Est-il besoin d'exécuter, l'on ne rencontre plus personne.

    La Fontaine, "Le conseil tenu par les rats"

     

     

    Depuis quelques années, le consensus veut que "la politique" soit l'art de gagner les élections et d'accéder au pouvoir. Ainsi, on qualifiera de "génie politique" - Mitterrand en est le meilleur exemple - celui qui aura réussi à conquérir le pouvoir et à s'y maintenir pendant de longues années, même si son mandat se résume à une suite d'erreurs, de bévues, d'immoralités. Il sera admiré comme un "génie" parce qu'il a réussi à durer sur la plus haute marche du podium. C'est curieux, mais c'est comme ça.

     

    On peut être un stratège électoral et un dirigeant de parti hors paire tout en se révèlant un piètre gouvernant. La transformation de la politique en une profession comme une autre a provoqué une mutation fondamentale des élites politiques: parmi les jeunes qui se destinent à cette "carrière", les idées et les projets sont passés au second plan par rapport au besoin absolu de se faire élire et de monter un à un les échelons qui conduisent - si tout va bien - jusqu'à un maroquin ministériel voire plus haut. Des professionnels de la politique dont toutes les énergies et toutes les compétences sont pointés vers un seul but: monter. Et pour qui, reprenant la formule d'un leader politique, "gouverner est un pénible devoir entre deux élections".

     

    Mais la politique, ce n'est pas ça. L'élection n'est qu'un moment, un processus de sélection pour voir quel programme doit être appliqué, et qui assumera la responsabilité de le faire. Ce moment est certes important, mais ce n'est pas l'essence du politique. L'essence vient ensuite, une fois les urnes rangés. En un mot, lorsqu'il faut gouverner. La longue séquence électorale que nous venons de vivre - et le rapprochement des échéances avec le quinquennat - semble avoir fait oublier cette réalité à tout le monde, et tout particulièrement au politique. Tous ces gens se battent depuis des années pour devenir ministres. Maintenant qu'ils le sont, ils rappellent irrésistiblement à la poule qui a trouvé un couteau. Avec la circonstance aggravante que, contrairement à la poule proverbiale, on attend d'eux qu'ils prennent le couteau à deux mains et qu'ils fassent quelque chose pour résoudre les problèmes. Pour le moment, le gouvernement s'en sort en reportant les échéances: toute difficulté est d'abord une surprise, et ensuite l'opportunité d'annoncer une "concertation" sur une "grande réforme" qui, bien évidement, prendra beaucoup de temps pendant lequel on ne fera rien. Avec de la chance, on pourra faire durer le processus cinq ans, jusqu'à la prochaine élection.

     

    L'affaire des forages pétroliers en Guyane, qui coûta sa tête à la ministre de l'Ecologie Nicole Bricq en est l'illustration jusqu'à la caricature. Cela fait dix ans que des forages exploratoires sont effectués au large de la Guyane, en vertu de permis d'exploration accordés par l'Etat en application des dispositions du Code Minier. Au fur et à mesure que ces forages se révèlent de plus en plus prometteurs, les "majors" du pétrole ont pris des parts dans la recherche, et aujourd'hui celle-ci est conduite par un consortium dont Shell est leader. Ce consortium a investi des millions dans les travaux d'exploration, et début juin se préparait à conduire un programme de forages utilisant les équipements les plus modernes et notamment un bateau-plateforme positionné par GPS et dont la location coûte la bagatelle de 1 M€ par jour. Toutes ces informations étaient bien entendu publiques et connues de tous ceux qui s'intéressent à la question. Mais voilà que Nicole Bricq arrive et découvre - si l'on peut dire - le dossier. Que faire ? Annuler le permis de Shell, c'est le risque de devoir rembourser à la compagnie l'ensemble des investissements effectués, soit quelques dizaines de millions d'euros (1). Permettre que les travaux soient poursuivis, c'est se mettre à dos les écologistes. Que faire ? Botter en touche, en déclarant que qu'il faut lancer une "grande réforme du code minier", et qu'en attendant bien entendu tout est gelé. Shell et ses associés sont priés d'attendre l'arme au pied, continuer à payer ses ingénieurs à ne rien faire, payer la location de son bateau à 1 M€ par jour en attendant une réforme des vénérables textes miniers - réforme précédée bien entendu d'une "grande concertation" et du "débat sur l'énergie"... On connaît la fin de l'histoire: l'ensemble de l'industrie pétrolière est allée à Matignon et à l'Elysée expliquer les réalités du métier, et Bricq, sommée de se soumettre ou se démettre a préféré aller officier au ministère du commerce extérieur. Mais la question ici est: comment sur un dossier aussi ancien, aussi connu de tous, et sur lequel - comble des combles - Nicole Bricq avait elle même travaillé lorsqu'elle était sénateur, elle a pu arriver au ministère dans un tel état d'impréparation ? Comment est-ce possible que la question n'ait pas été arbitrée avant même l'arrivée du nouveau gouvernement ?

     

    Deuxième exemple: la question des tarifs du gaz et de l'électricité. Pour restituer le problème, il faut rappeler que dans le cadre de l'ouverture des marchés, les tarifs sont libres pour les consommateurs industriels. Pour les particuliers, un tarif reglementé est maintenu et appliqué par les opérateurs historiques (EDF pour l'électricité, GDF-Suez pour le gaz), les opérateurs privés étant libres de fixer leurs tarifs comme ils l'entendent (2). Ce tarif est fixé par le gouvernement, en principe ajusté quatre fois par an, sous le contrôle de la Commission de Régulation de l'Energie, dont le rôle se limite à contrôler un principe fondamental: que le tarif couvre les coûts de production. En d'autres termes, le gouvernement est libre de fixer les tarifs comme il l'entend, avec une seule condition: ne pas obliger les opérateurs à vendre à perte.

     

    Un principe fort sage, me direz vous. Qui est depuis des lustres le fondement de la politique tarifaire française. Depuis 1945, la doctrine a été "le courant à prix coûtant", le vendre en dessous revient à transférer aux usagers le patrimoine de l'Etat. Le problème, c'est que ce qui semble fort raisonnable dans l'abstrait peut gravement endommager votre santé électorale. C'est pourquoi les gouvernements - de droite comme de gauche d'ailleurs - on cherché à s'affranchir de cette contrainte pour faire plaisir à leurs électeurs. Les différentes manipulations de prix du gouvernement Fillon pour maintenir la hausse du prix du gaz en dessous du coût réel ont ainsi été sanctionnées plusieurs fois par la justice, le dernier épisode étant l'annulation cette semaine par le Conseil d'Etat de l'arrêté tarifaire d'avril dernier, qui obligera les consommateurs à payer un rappel sur les factures. C'est donc un problème connu. Personne ne découvre rien. Pas la peine d'être devin ou de sortir de l'ENA pour savoir que l'une des premières décisions à prendre par le nouveau gouvernement dès le mois de juillet était le mouvement tarifaire de la mi-année. Or, qu'est-ce que le gouvernement propose ? Une "reforme de la structure tarifaire" après une "large concertation", et en attendant, la congélation du problème sous forme d'une augmentation réduite à l'inflation que le Conseil d'Etat ne pourra que casser, puisque de toute évidence une telle augmentation ne couvre pas, et de loin, les coûts. Et là encore, la question est évidente: s'il faut une réforme des structures tarifaires, pourquoi diable cela n'a pas été préparé avant ? Si le problème est identifié et connu depuis des lustres, qu'est-ce qui empêchait les socialistes d'y réfléchir, de concerter et d'arriver au gouvernement avec une reforme toute faite à passer immédiatement ? Croient-ils vraiment que les industriels peuvent rester l'arme au pied jusqu'à la Saint-Glinglin en attendant que le politique prenne le temps de s'occuper des questions de fond ?

     

    Et finalement, nous arrivons à la question de PSA-Aulnay. Là encore, on ne découvre rien. La vulnérabilité de nos industries en général et de notre industrie automobile est connue. Pas la peine non plus d'être grand économiste pour se rendre compte que les politiques d'austérité qui balayent l'Europe allaient tôt au tard se traduire par une baisse de la demande solvable. Lorsque vous virez des fonctionnaires ou baissez leurs salaires, lorsque vous augmentez les impôts et les tarifs des services publics, lorsque l'incertitude de l'avenir pousse les gens à l'épargne de précaution, vous réduisez l'argent dont les gens disposent pour consommer, et donc la demande de produits de consommation. Et si c'est cette demande qui tire votre production industrielle, vous vous enfoncez plus profondément dans une spirale récessioniste. C'est exactement ce qui est en train de se passer.

     

    Là encore, le gouvernement semble surpris par un problème qui pourtant était anticipé par tous ceux qui ont deux doigts de jugeote et un minimum de culture économique (2). A quoi le gouvernement s'attendait-il ? Que les industriels allaient attendre gentiment, payant leurs ouvriers à ne rien faire en attendant que le politique prenne la peine de définir une stratégie industrielle ? Qu'ils continueraient à produire des voitures qu'ils n'arrivent pas à vendre en faisant confiance aux négociations sociales pour accoucher une politique de compétitivité ?

     

    Dans les années 1980, un certain nombre de socialistes ont découvert que gouverner, ce n'était pas aussi facile que passer des motions dans des congrès ou négocier des compromis entre "courants". Ils ont aussi découvert que, contrairement aux motions, qui ne portent pas véritablement à conséquence, gouverner implique une dure confrontation dont on ne sort pas indemne. Qu'au gouvernement, on ne manipule pas que des idées ou des valeurs, mais la vie des gens. Qu'une erreur peut coûter des vies. Certains, comme Pierre Bérégovoy, n'ont pas supporté ce qu'ils sont devenus. D'autres ont acquis une certaine sagesse - je pense à Laurent Fabius - qui leur a poussé à prendre des positions de principe même lorsqu'elles étaient contraires à leur propre intérêt. Il semble que la génération suivante n'ait rien appris des déceptions de leurs aînés et s'apprête à refaire les mêmes erreurs (4).

     

    Avec Aulnay, les professionnels de la politique socialistes vont devoir découvrir le monde réel. Ils vont s'apercevoir rapidement - Montebourg semble avoir déjà réalisé - que si l'on reste sagement dans le carcan de Maastricht il n'y a pratiquement aucune marge de manoeuvre, aucun levier pour sauver nos industries. Une note fort intéressante de P. Arthus (consultable ici, en anglais) montre que la monnaie unique cache un déséquilibre monétaire de l'ordre de 20% en faveur de l'Allemagne (en d'autres termes, l'euro "allemand" est sous-valué de 20% par rapport à l'euro "français"). Si on avait des monnaies nationales et qu'on les laissait flotter, leur parité s'équilibrerait par une réévaluation de 20% du mark, qui suffirait largement à rendre le coût du travail français compétitif. Mais sans possibilité de dévaluation, sans possibilité d'aide publique à l'industrie, sans possibilité de mesures protectionnistes, le gouvernement sera obligé de regarder passer les fermetures d'usine - compensées par l'ouverture de capacités de production ailleurs - et à jouer les pompiers.

     

    L'heure des tempêtes approche... et la politique, la vraie, va se venger de ceux qui croient que l'on peut s'improviser gouvernant par la magie exclusive de la parole.

     

    Descartes


    (1) Et oui, dans un état de droit, l'Etat a certaines responsabilités. Si l'Etat vous accorde un permis de construire une maison et quelques mois plus tard, alors que le  bâtiment est à moitié construit, il vous retire l'autorisation et vous oblige à démolir ce que vous avez construit, vous êtes en droit de vous voir indemniser à minima pour les frais que vous avez engagé. Et ce qui est valable pour le petit entrepreneur, est vrai pour Shell aussi. Cela s'appelle "égalité devant la loi".

     

    (2) Le tarif réglementé est donc un tarif "plafond": Un opérateur privé qui fixerait son tarif largement au dessus du tarif réglementé aurait bien du mal à trouver des clients...

     

    (3) Ce qui exclut bien entendu la grande majorité des eurolâtres, qui sont dans la pensée magique.

     

    (4) Quant à "l'autre gauche"... on a du mal à la prendre au sérieux, tellement son discours ressemble à celui d'une machine automatique - quand ce n'est pas à un disque rayé. Ainsi, le PCF déclare en réaction aux annonces concernant l'usine d'Aulnay sous bois que "une loi s'impose d'urgence". Quel dommage que la déclaration ne nous dise pas en quoi une telle loi consisterait. La seule proposition concrète - si l'on peut dire - est "l'interdiction des licenciements boursiers", qui n'aurait dans le cas présent la moindre efficacité: à l'annonce des licenciements, l'action PSA a perdu 8% de sa valeur. Si c'est ça un "licenciement boursier"... Quant au PG, ce n'est guère mieux: "Le parti de Gauche demande qu’une loi d’urgence proclamant un droit de véto des représentants syndicaux dans les Comités d’entreprise et l’interdiction immédiate des licenciements boursiers soit votée le plus vite possible". On est dans le royaume de la pensée magique. On ne le dira jamais assez: "l'interdiction des licenciements" est une chimère. On ne peut forcer un employeur à acheter une force de travail dont il n'a pas besoin.


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  • Industrie automobile : le démantèlement se poursuit

    Quelques rappels utiles :

     

    -En février 2011, nous écrivions : « Renault, Peugeot-Citroën, une année en or ». En effet, Renault venait d’annoncer 3,49 Milliards d’euros de profits et un montant de réserves disponibles de 12,8 milliards.


     Le groupe Peugeot annonçait au même moment 1,13 Milliards d’euros de profits et 11 Milliards de fonds de réserve..

    Tout cela obtenu bien entendu à coup de suppressions massives d’emplois, de bas salaires et de conditions de travail dégradées.

     

    -Rappelons également que Peugeot a supprimé 17 500 emplois entre 2007 et 2010 et que Renault a prévu d’en supprimer 6500 en trois ans.

     

    D’un côté les profits, de l’autre les conséquences sociales.

    -Quelques temps plus tard, une note interne au groupe P.S. annonçait la fermeture de trois sites de production et 6800 nouvelles suppressions d’emplois dont 800 intérimaires.

     

    Personne ne pouvait donc ignorer les objectifs des groupes automobiles. Et pourtant, le débat de fond sur le devenir de l’industrie fut totalement occulté (volontairement) pendant la longue période électorale, que ce soit par la Droite, le PS et ses alliés et par les centrales syndicales qui ont freiné les luttes.

    Les groupes industriels peuvent dormir tranquille, écrivions-nous, et poursuivre sans entrave leur course aux profits.

    La situation d’aujourd’hui n’est donc une surprise pour personne, la réalité est que tous sont d’accord pour accompagner les décisions imposées par ces groupes.

    Après l’annonce récente de 6000 à 10 000 suppressions d’emplois supplémentaires chez Peugeot, Arnaud  Montebourg, le nouveau ministre du travail s’est fâché tout rouge, et dans une démarche très révolutionnaire, il a demandé au P.D.G. de Peugeot le détail de ces suppressions d’emplois. Et pour se placer immédiatement sur le terrain de l’accompagnement, il annonce qu’il proposera dans les jours qui viennent un « plan d’action pour l’avenir de la filière automobile » qui sera présenté le 11 juillet.

     

    Le changement serait-il pour maintenant ? Les pistes que propose le ministre socialiste ne vont visiblement pas dans ce sens. Il s’agit d’ « aider les entreprises à amortir les périodes de sous production ». Autrement dit, financer le chômage partiel par l’Etat. Autre piste, développer le crédit impôt-recherche, en quelque sorte faire de nouveaux cadeaux aux patrons.

     

    Sarkozy l’a fait, Montebourg va l’amplifier.

     

    Dans un entretien au journal « Le Monde », il explique la désignation de 22 (un par région) « commissaires au redressement productif » pour aider les P.M.E. et « empêcher qu’elles tombent aux mains de prédateurs »

     

    Sauf que les P.M.E. sont soumises aux décisions des grands groupes industriels, les « prédateurs sont depuis longtemps déjà en place. C’est d’ailleurs à ceux-là que le gouvernement veut faire de nouveaux cadeaux.

     

    De plus, les politiques d’austérité imposées par le capital dans tous les pays européens ont des effets catastrophiques pour les peuples, mais aussi pour l’industrie automobile.

     

    En France, la production de véhicules a reculé de 37,2% en 10 ans. En Espagne la vente d’automobiles a reculé de 50%, en Italie de 25%. En Grèce, au Portugal, le phénomène est identique.

     

    La baisse des salaires et du pouvoir d’achat, le chômage massif, la précarité, la pauvreté, conséquences du profit capitaliste, accélèrent la casse industrielle en France et en Europe.

     

    Pour accumuler toujours plus de profits, les productions sont délocalisées en Chine, au Brésil, en Roumanie, au Maroc et ailleurs, mais l’exploitation capitaliste n’a pas de limite :

    Dans un article des « Echos », le patronat de l’automobile du Royaume Uni explique qu’il est très satisfait de la «  renaissance de l’industrie automobile dans le pays ». il vante ses relations avec les organisations syndicales : «  regardez les accords passés avec les représentants du personnel, vous verrez les efforts de flexibilité faits par les salariés » se réjouit le dénommé Phil Harrold, le représentant patronal, «  les chaines fonctionneront souvent cinquante et une semaine par an et lorsque les circonstances l’exigeront, les ouvriers ont accepté que leur rémunération puisse baisser jusqu’à 50% » Et d’ajouter «  En Europe, c’est au Royaume-Uni qu’il est le plus facile de fermer une usine si ses modèles n’ont pas de succès ». Ajoutons à cela une nouvelle baisse de la fiscalité des entreprises de la part du pouvoir en place et on voit se dessiner la stratégie des groupes industriels européens.

     

    Fatalité ? Certainement pas, la cause c’est l’existence du capitalisme, mais personne ne veut s’y attaquer, ils sont tous d’accord pour l’aménager.

     

    Confisquer l’outil de production au capital, en finir avec ce système, c’est la seule perspective pour préserver et développer l’industrie.

     

    Il n’y a que la force des luttes pour y parvenir.

     

    Source : « site Communistes »


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  • Par Ivan du Roy, Nolwenn Weiler (26 juin 2012)

    Le site de vente en ligne Amazon pourrait percevoir entre 4,5 et 12,5 millions d’euros de subventions en échange de la création de 300 à 500 emplois sur sa nouvelle plateforme de Chalon-sur-Saône. Problème : l’entreprise est pointée du doigt pour ses mauvaises conditions de travail et pour sa fiscalité très « évasive ». Créer des emplois, oui, mais à quel prix ? Une question à laquelle devra répondre le nouveau ministre du redressement productif Arnaud Montebourg.

    Le site de vente en ligne états-unien Amazon a annoncé la création d’une troisième plate-forme logistique en France. Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire) a été préféré à Beaune (Côte d’Or). Installé dans un entrepôt de 40 000 m2, le site d’Amazon devrait créer entre 300 et 500 emplois directs. Le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, longtemps député de Saône-et-Loire et ancien président du Conseil général, s’est défendu d’être intervenu dans le dossier pour favoriser Chalon. Il devrait cependant s’intéresser de près aux types d’emplois créés, aux conditions de travail qui y seront en vigueur et à « l’optimisation fiscale » pratiquée par l’entreprise accueillie à bras ouverts.

    Avec sa nouvelle plateforme, Amazon percevra les « aides légales » prévues en échange de création d’emplois : « La prime d’aménagement du territoire, les aides en matière de service de ramassage des salariés du Grand Chalon et des investissements dans des crèches pour les enfants des femmes qui travailleront chez Amazon. Ce dernier devrait employer 60 % de femmes, c’est important, l’essentiel des chômeurs en France sont des femmes », détaille le ministre. La prime d’aménagement du territoire représente quand même une aide de 15 000 à 25 000 euros par emploi créé [1]. Soit entre 4,5 et 12,5 millions d’euros de subventions dans le cas d’Amazon à Chalon. Les revenus mondiaux de la société s’élèvent à 42 milliards de dollars en 2011.

    Cadences infernales

    Problème : aucune condition n’est demandée en échange. Un emploi et un revenu sont toujours bon à prendre en ces temps d’austérité. Reste que la vie des salariés d’Amazon ne fait pas vraiment rêver. Dans la plus grande plateforme logistique française, à Saran, en périphérie d’Orléans, les employés du site de vente en ligne sont payés au Smic, quand ils ne sont pas intérimaires, et malgré des cadences souvent épuisantes (Lire notre article). Ils sont soumis à des fouilles corporelles, sont obligés de vider leurs casiers à heure fixe, sous le regard d’une vidéosurveillance. Certaines dispositions inscrites dans leurs contrats de travail sont rédigées en anglais. Le travail de nuit s’y pratique sans aucune prévention en matière de sécurité des conditions de travail. Et l’exercice de la liberté syndicale y est difficile. « Amazon recherche dès à présent 34 managers et spécialistes et des centaines de personnes passionnées pour rejoindre les équipes de ce nouveau centre », a indiqué la société. Vu les conditions de travail, mieux vaut, effectivement, être « passionné ».

    Côté fiscalité, Amazon est aussi loin d’être exemplaire. « Tout en créant des emplois, Amazon rapatrie en effet l’essentiel des revenus engrangés en France... au Luxembourg, où il a installé son siège européen », rappelle un article de Rue 89. Amazon y bénéficie d’un impôt sur les sociétés allégé (21,8% contre 33,3% en théorie en France). Et fait d’ailleurs l’objet d’une enquête du fisc français, l’entreprise ne s’acquittant pas de la TVA sur plusieurs biens. Le redressement productif, d’accord, mais à quel prix ?

    Ivan du Roy et Nolwenn Weiler

    Photo : Arnaud Montebourg en visite aux salariées de Lejaby (source)


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