• Importante fuite de gaz sur une plate-forme Total en mer du Nord

    Importante fuite de gaz sur une plate-forme Total en mer du Nord
    Le colmatage de la fuite sur la plate-forme Elgin pourrait prendre six mois

    Il s’agit du plus grave incident qu’ait connu le groupe français en mer du Nord depuis au moins 10 ans. Et comme toujours dans pareille situation, les associations de protection de l’environnement doutent de la version officielle.

     

    Total, l’entreprise la plus prospère de France, s’ouvre de plus en plus aux énergies renouvelables. Leurs homologues fossiles demeurent néanmoins, sans contestation possible, son secteur de prédilection. D’où une mauvaise réputation aux yeux du grand public, qui n’a pas oublié la catastrophe de l’Erika. Ceux qui suivent l’actualité environnementale de près connaissent en outre la détermination de Total à exploiter les gaz de schiste dans nos frontières, détermination d’autant plus fondée que si la fracturation hydraulique est interdite dans l’Hexagone depuis cet été, la prospection des hydrocarbures de roche-mère à des fins scientifiques demeure tout à fait envisageable et même probable.

    L’accident d’avant-hier ne contribuera évidemment pas à restaurer l’image du groupe, qui va devoir soigner sa communication sur la durée (en tout état de cause, faire mieux que la direction de BP à la suite de l’explosion de la plate-forme Deepwater Horizon dans le Golfe du Mexique en avril 2010) et dépêcher d’importants moyens pour limiter la casse. Une fuite de gaz dont l’ampleur exacte et la cause restent à déterminer est survenue dimanche midi sur la plate-forme Elgin – surnommée « le puits de l’enfer » par le directeur de l’ONG norvégienne Bellona Frédéric Hauge et qui produisait jusqu’ici 9 millions de mètres cube par jour (soit l’équivalent de 3 % de la production britannique de gaz naturel) ainsi que 60 000 barils de brut léger -, dans le champ gazier du même nom, situé à 240 kilomètres à l’est d’Aberdeen (Écosse). Si les 238 employés présents sur la structure au moment des faits, évacués hier par hélicoptère et par bateau, sont de fait hors de danger, que l’alimentation a été coupée, que le gaz n’a pas pris feu et que deux bateaux-pompes se tiennent prêts à intervenir, colmater la fuite pourrait de l’aveu même de Total nécessiter… 6 mois. « Il y a deux options pour intervenir. L’une consiste à creuser un puits de secours, […] l’autre est une intervention sur la plate-forme pour sceller le puits, ce qui serait une option plus rapide […] Nous prévoyons de décider d’un plan dans les jours à venir », a précisé David Hainsworth, responsable Sécurité, Santé et Environnement chez Total Exploration&Production UK, dont les propos ont été repris sur le site Internet de LCI. La direction a en outre mis à contribution la société Wild Well Control, déjà intervenue à la suite de la marée noire dans le Golfe du Mexique, et mobilisé de dix à vingt ingénieurs spécialisés.

    Un nuage inquiétant

    Et alors que les autorités ont décidé d’interdire les vols à moins de 3 milles nautiques (5,5 kilomètres) et la navigation à moins de 2 milles nautiques (3,7 kilomètres) de la plate-forme accidentée, on en sait un peu plus sur les conditions dantesques dans lesquelles s’effectuait l’exploitation. Sur son site Internet, Total – qui a ouvert un site dédié à l’accident - fait ainsi état d’une pression et de températures « extrêmes » (NDLR : le groupe évoque une pression de 1 100 bars, c’est-à-dire 300 de plus que dans le puits de Deepwater Horizon), le réservoir de gaz étant enfoui à quelque cinq mille mètres de profondeur.

    Quatre vols de surveillance ont été effectués depuis dimanche, et aux dernières nouvelles, la situation serait actuellement « stable ». « Nous continuons à prendre toutes les mesures possibles pour tenter d’identifier la source et la cause de la fuite et de la contrôler », a également indiqué Total, tandis que le groupe pétrolier anglo-néerlandais Shell, qui a lui-même été confronté à un accident en mer du Nord en août dernier, a évacué à son tour, par précaution, sa plate-forme Shearwater et son puits d’extraction voisins Noble Hans Deul, rapportent nos confrères du Figaro.

    Et Total d’ajouter : « Les premières indications montrent qu’il n’y a pas d’impact significatif sur l’environnement et que l’utilisation de dispersant n’est pas nécessaire à ce stade […] Un avion de surveillance a confirmé la présence d’irisations à proximité de la plate-forme. Il s’agit de boues de forage et/ou de produits légers associés au gaz. » Une nappe fine d’hydrocarbures de 4,8 miles carrés (12,4 kilomètres carrés) s’est formée, du liquide s’étant échappé avant le gaz, lequel a fui à hauteur de 23 tonnes en l’espace de 48 heures. Assez dense pour être visible depuis d’autres plate-formes installées en mer du Nord, le nuage de gaz qui gravite autour d’Elgin serait sans danger pour l’environnement aux dires du pétrolier français, par ailleurs « presque sûr que la fuite provient de la partie de la plate-forme située au-dessus du niveau de la mer, ce qui rendrait probablement plus faciles les opérations de réparation ».

    Total paraît vouloir jouer la transparence et donne le sentiment d’avoir pris la mesure de la situation. Tel n’est cependant pas l’avis de M. Hauge, pour qui « le problème échappe à tout contrôle ». Interrogé par la BBC, l’océanographe Simon Boxall a quant à lui souligné les risques d’inflammation et de toxicité du nuage précité.

    Tout porte à croire que nous n’en sommes qu’aux débuts d’une énième tragédie de l’exploitation offshore de ressources fossiles. La deuxième en l’espace de sept mois en mer du Nord…

    Crédits photos : flickr / Enrico Strocchi – Richard Child

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