• Grèce: la tache brune

    Manifestation contre Aube dorée le 25 septembre dernier

    Monde - le 30 Septembre 2013

    Editorial Par Jean-Paul Piérot

    Grèce: la tache brune (édito)

    L'impunité dont jouissait Aube dorée commençait à faire tache pour le gouvernement grec au moment où il sollicite de nouveaux crédits et où la Grèce s’apprête à présider l’Union européenne en janvier 2014. L'édito de Jean-Paul Piérot.

    Le gouvernement hellénique s’est enfin résolu à agir contre les néonazis d’Aube dorée. Il a fait arrêter son chef, Nikos Michaloliakos, et une vingtaine de ses affidés pour appartenance à une organisation criminelle. Il était temps! Beaucoup d’exactions auraient pu être évitées si les autorités n’avaient pas tant tardé. C’est l’assassinat le 18 septembre dernier, du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas qui a contraint le premier ministre Antonis Samaras à céder sous la pression de l’opinion publique. Le 25 septembre, les Grecs avaient défilé en masse contre le fascisme, qui bénéficie de nombreuses complicités au cœur de l’État. Ce qui explique l’impunité dont bénéficièrent les nervis, qui ont perpétré plus de trois cents agressions racistes et autres actes de violence depuis 2011.

    Ces extrémistes sont les héritiers de la dictature des colonels (1967-1974). Michaloliakos lui-même fourbit ses premières armes à la tête de l’organisation de jeunesse du parti fasciste de Papadopoulos. Aube dorée a infiltré la police, la justice, les forces armées, tente d’exercer une influence dans l’éducation, ne manque pas de soutiens dans les milieux d’affaires. Signe de l’incroyable complaisance à son endroit manifestée par la coalition au pouvoir (droite et Parti socialiste), l’épouse du chef d’Aube dorée, la députée néonazie Eleni Zaroulia, a été reconduite comme représentante de la Grèce à la commission sur l’égalité et la non-discrimination à l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe !

    Par la rhétorique et les références idéologiques, les fascistes grecs ne se distinguent guère des autres composantes de l’extrême droite européenne: négationnisme, notamment à propos des chambres à gaz, que, rappelons-le, le Français Le Pen rangea parmi les «détails» de l’histoire, obsession raciste et xénophobe, anticommunisme musclé. Aube dorée appartient à la même famille que le FPÖ qui a obtenu, hier, 22% aux élections parlementaires autrichiennes. Les nazis d’Athènes sont boostés par le désespoir social et la perte de confiance à l’égard de partis politiques qui se partagent le pouvoir pour appliquer les directives de l’eurolibéralisme. Aube dorée, qui n’était qu’un groupuscule recueillant moins de 1% des suffrages en 2009, a fait une irruption au Parlement en 2012 avec la saignée sociale imposée à la Grèce par la troïka (Commission européenne, FMI et Banque centrale européenne). Une année émaillée de provocations, d’agressions contre des immigrés, dont l’une coûta la vie à un ouvrier pakistanais, de violences perpétrées contre des militants de gauche –une députée communiste frappée en plein débat télévisé et, enfin, l’assassinat d’un artiste antifasciste–, cela commençait à faire tache pour le gouvernement grec au moment où il sollicite de nouveaux crédits et où la Grèce s’apprête à présider l’Union européenne en janvier 2014.

    Poursuites pénales contre les cinq députés d'Aube dorée arrêtés

    Le Monde.fr avec AFP et Reuters

    Nikolaos Michaloliakos, chef d'Aube dorée, parti d'extrême droite grec, lors d'une conférence de presse, le 6 mai 2012. Nikolaos Michaloliakos, chef d'Aube dorée, parti d'extrême droite grec, lors d'une conférence de presse, le 6 mai 2012. | AFP/LOUISA GOULIAMAKI

    Les autorités grecques ont frappé un grand coup, samedi 28 septembre, contre le parti néonazi Aube dorée en arrêtant son chef historique et plusieurs députés, dix jours après le meurtre d'un musicien antifasciste par un membre de ce parti. Un vaste coup de filet qui survient alors que la Grèce en crise poursuit ses négociations avec ses créditeurs et s'apprête à prendre la présidence tournante de l'Union européenne.

    La police antiterroriste grecque a arrêté en début de matinée Nikolaos Michaloliakos, dirigeant et député d'Aube dorée, fondateur du parti en 1980, ainsi que quatre autres députés de la formation néonazie (sur un total de 18), dont son porte-parole, Ilias Kasidiaris. Des poursuites pénales ont été engagées par le procureur contre les cinq députés, qui restent tous détenus jusqu'à leur présentation à un juge.

    Les arrestations, de source judiciaire, sont fondées sur l'appartenance de ces députés à une "organisation criminelle", mais aussi sur des poursuites pour violences physiques et meurtre.

    UNE TRENTAINE DE MANDATS D'ARRÊT

    Douze membres du parti ont également été interpellés au cours de ce coup de filet mené dans plusieurs régions du pays et qui devrait conduire à d'autres arrestations dans les prochaines heures, puisque qu'une trentaine de mandats d'arrêt ont été émis par la Cour suprême à l'encontre des militants ou députés.

    Nikolaos Michaloliakos, en juin 2012.

    Nikolaos Michaloliakos, en juin 2012. | AP/Nikolas Giakoumidis

                                 NOMBREUSES VIOLENCES CONTRE LES ÉTRANGERS

    Le meurtre de Pavlos Fyssas, 34 ans, un rappeur antifasciste poignardé le 18 septembre à la sortie d'un café d'une banlieue d'Athènes par un membre d'Aube dorée, qui a reconnu les faits, a choqué l'opinion publique et brutalement sorti les autorités grecques de leur atonie face aux agissements d'un parti soupçonné de nombreuses violences contre les étrangers et les militants de gauche.

    La première réplique du gouvernement est survenue lundi, avec la démission et la suspension de plusieurs membres de la police grecque dans le cadre d'une enquête, toujours en cours, sur les liens entre les forces de police et les personnes appartenant au parti néonazi. 

    Parallèlement, la Cour suprême grecque mène depuis une semaine des investigations tous azimuts dans le but de réunir des éléments à charge visant à étayer la caractérisation d'Aube dorée comme "organisation criminelle". Sur demande du gouvernement, les magistrats ont relancé des enquêtes enlisées sur une trentaine d'infractions imputées à des membres d'Aube dorée ces derniers mois. Depuis octobre 2011, quelque 300 cas d'agressions et violences contre des étrangers vivant en Grèce ont été répertoriés et documentés par le réseau associatif antiraciste et de défense des droits de l'homme Dyktio.

    Plus de 10 000 Grecs avaient manifesté mercredi à Athènes pour dénoncer le parti d'extrême droite, et 2 000 personnes avaient assisté, jeudi, aux obsèques de Pavlos Fyssas.

    http://pcfcapcorse.over-blog.com


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